Déjà le 19e tome des aventures des Sisters, ces deux nanas inspirées des propres filles du dessinateur, William. Il a sollicité Cazenove pour finaliser ces gags qui ont conquis des millions de lecteurs. Enfin, surtout des lectrices. Wendy (l’aînée) et Marine (la petite peste), vont voir leur quotidien chamboulé : la famille déménage.
Par chance, c’est un simple saut de puce, les parents ayant décidé de faire construire à quelques dizaines de mètres de l’ancienne maison, toujours à proximité un viaduc de Millau. Ce déménagement est une source importante de gags, notamment pour Marine qui ne comprend pas le concept, persuadée qu’elle aurait désormais deux maisons et que sa sœur resterait dans l’ancienne.
On rit beaucoup à ses mots de fillette naïve et inventive. « Les Sisters » (tome 19), Bamboo, 48 pages, 11,90 €
L’Aveyron, ses forêts sauvages, ses villages reculés et un curé unique sont au menu du nouveau film dérangeant d’Alain Guiraudie titré fort justement « Miséricorde ».
Un film d’Alain Guiraudie ne peut pas laisser indifférent. Sa vision de la province tranche avec les comédies caricaturales. Même s’il force sans doute le trait en ce qui concerne les penchants sexuels de ses héros. Nouvelle pierre à l’édifice avec Miséricorde, présenté en compétition à Cannes.
À l’automne, alors que les cèpes sortent, Jérémie (Félix Kysyl), la trentaine, revient dans le petit village de Saint-Martial, dans l’Aveyron, à quelques kilomètres de Millau, sur ces causses couverts de forêts. Il arrive de Toulouse pour les obsèques du boulanger, son ancien patron qui lui a appris le métier. Il est hébergé par la veuve, Martine (Catherine Frot) et retrouve le fils du couple, son copain de toujours, Vincent (Jean-Baptiste Durand).
Jérémie, que personne n’attend à Toulouse, décide de rester quelques jours à Saint-Martial. Il en profite pour faire de longues balades en forêt, croise la route du curé local (Jacques Develay) et de Walter, autre copain d’enfance, ermite vivant seul dans sa ferme presque en ruines. Comme souvent dans les films d’Alain Guiraudie, une fois les acteurs du drame présentés, on découvre leurs jeux troubles. Jérémie est-il attiré par Walter ? Quelle était sa relation avec le boulanger mort ? Vincent le soupçonne de vouloir coucher avec sa mère : véritable crainte ou simple jalousie ?
Tout est étrange dans ce village. Notamment les frontières entre les attirances. Beaucoup d’hommes, peu de femmes, des rituels étonnants et parfois la violence qui sort d’un coup, comme ces champignons que tout le monde cherche dans ces bois encore plus fréquentés qu’un quai de métro aux heures de pointe. Rapidement, la tension va monter, les mensonges se multiplier, la mort s’inviter au festin des sens.
Drame de la solitude sexuelle des campagnes, Miséricorde n’a pas la folie douce des précédentes réalisations d’Alain Guiraudie. C’est plus apaisé, mais toujours aussi ambigu. On suit les errances, remords, doutes, cauchemars et embrasements de Jérémie, fascinés par ce jeu de faux-semblant avec en point d’orgue l’intervention, quasi divine, du curé, manipulateur suprême, pour son propre intérêt même si c’est au prix de sa réputation.
Une histoire humaine, faite de chair et de sang. Avec en contrepoint apaisant, les arbres gigantesques, immuables et majestueux de cette forêt aveyronnaise, superbement filmée par un réalisateur toujours très à l’aise dans les grands espaces.
Film d’Alain Guiraudie avec Félix Kysyl, Catherine Frot, Jean-Baptiste Durand, Jacques Develay, David Ayala
Marie Rouanet vient de publier un texte court, très poétique, sur Pierre Soulages, son art et sa vie aveyronnaise.
La romancière Marie Rouanet, installée depuis des années à Camarès dans l’Aveyron, avoue une grande admiration pour Pierre Soulages. Un autre Aveyronnais, peintre centenaire, maître du noir obscur, vivant désormais à Sète mais qui a conservé des racines dans cette terre rude du nord de l’Occitanie. Marie Rouanet a mis sa plume au service de l’artiste. Elle signe un petit livre, sorte de long poème en prose, racontant, imaginant, le parcours d’un Soulages jeune, ouvert à la vie, aux couleurs, odeurs et sons de son quotidien d’enfant ruthénois.
Il aime découvrir les échoppes des artisans, admirer leur travail, leurs outils, leurs créations : « Les mains des ouvriers, épaisses, durcies de cals, fortes comme des étaux devaient pourtant être minutieuses. » Inconsciemment, il découvrait ce qui allait conditionner sa vie, son destin : « Tout cet enchaînement de forces aboutissait à la main nue, seule, capable de ce point d’orgue : l’art. » Attachée à la culture occitane, Marie Rouanet s’est trouvé un point commun avec Pierre Soulages quand il parle de son appartenance au « Pays ». « Lorsque l’on me demande si je suis Aveyronnais, je réponds : ‘Je suis Rouergat’. Le mot désigne un espace qui n’a aucune existence administrative. Il s’agit d’une certaine superficie où je me sens chez moi. Je n’y vais pas tous les jours mais assez pour y avoir des habitudes et des amis. »
« Le silence est l’écrin de la vie intérieure »
Enfin ce petit fascicule s’achève avec un chapitre sur l’abbaye Sainte-Foy de Conques, sublimée par les vitraux de Soulages. Certainement la partie la plus poétique, belle, lumineuse. Comme si l’inspiration était évidente dans ce lieu ou « le silence est l’écrin de la vie intérieure ». Et Marie Rouanet d’expliquer qu’en ce lieu, « à la place de l’éblouissement des yeux tu trouves l’indicible, l’invisible. Conques, mon chef-d’œuvre. Mon chant du cygne. »
Cet hommage de Marie Rouanet, une grande écrivaine d’Occitanie à Pierre Soulages, un autre grand de la culture régionale, prouve combien le territoire regorge de talents mondialement reconnus permettant de faire rayonner ce petit bout du Sud de la France bien au-delà de nos frontières.
Je vous préviens, il va souvent être question de mariage ces prochaines semaines dans cette chronique. J’ai l’honneur et l’immense privilège d’être invité fin juillet à celui de quelqu’un qui m’est cher. Au point que je dois en partie l’organiser. Alors forcément, cela va un peu m’obséder et risque d’avoir des conséquences sur ces lignes ancrées dans le quotidien. Je reviendrai sur la quête d’un traiteur un peu particulier - capable de griller deux cochons - en plein été en Aveyron. Il y aura un épisode sur les toilettes sèches car les mariés se soucient de la protection de la nature et de l’économie de l’eau. Sans compter les recherches d’amuse-gueules aussi originaux que faciles à réaliser pour l’apéro. En fait avant le mariage, nombre d’étapes s’avèrent plus ou moins incontournables. Oublions l’enterrement de vie de jeune fille, non seulement je n’étais pas invité mais en plus je n’ai pas le droit de savoir ce qui s’y est passé. Avant la cérémonie, il y a la rencontre.
Et la semaine dernière j’ai découvert par l’intermédiaire d’une amie Facebook la tradition du goûter matrimonial d’Ecaussinnes. Cette petite ville belge organise depuis 104 ans une grande fête au cours de laquelle les filles célibataires de la région vont à la rencontre de possibles prétendants. Modernité oblige, elles passent désormais par un speed-dating mais le côté convivial et festif est resté. On y danse sur de la musique groove et électronique, on boit beaucoup (de bière) et mange de la porchetta. Le week-end se termine par un bal folk, la plantation de l’arbre de mai et une balade aux flambeaux. Il y a même un marché steampunk.
Par contre, aucune statistique sur le nombre de mariages issus du goûter. Encore moins sur celui des enfants conçus lors de cette sympathique fête traditionnelle.
L'industrie du disque se porte bien. Les ventes ont légèrement augmenté en 2013. Côté français, ces statistiques permettent de connaître le classement, toujours très commenté, des artistes les mieux rémunérés. Comme chaque année, c'est Mylène Farmer qui arrive en tête, suivie par Maître Gims, révélation rap de l'année. Ce dernier vend beaucoup de disques, mais doit certainement gagner encore plus d'argent grâce à ses produits dérivés, notamment les vêtements mis en valeur dans ses clips transformés en simples publicités déguisées. Étonnant, Johnny Hallyday a toujours une place sur le podium. Pourtant, il ne fait plus recette. Pour preuve, il y a quelques mois, les piles de beaux livres sur sa vie son œuvre, soldés 5 euros (au lieu de 35…) dans une grande surface comme de vulgaires yaourts dont la date de péremption est presque dépassée. Il a quand même empoché 3 millions en 2013, ce qui explique son exil fiscal définitif et sans espoir de retour… La véritable surprise, c'est de retrouver Zaz à la quatrième place. Elle est moquée sur internet mais a su faire fructifier ses premiers succès et élargir son public. Moins présente en France, elle s'impose à l'étranger. 300 000 exemplaires de son album "Recto Verso" ont trouvé preneur hors des frontières de l'Hexagone. Elle incarne la chanson française par excellence comme en son temps Mireille Mathieu. Une belle revanche pour cette artiste qui a débuté en chantant "J'aime la saucisse avec de l'aligot !" du cultissime rap "Bienvenue en Aveyron".
Chronique "De choses et d'autres" parue ce lundi en dernière page de l'Indépendant.
Joseph Combes et sa petite famille sont l'objet d'une vengeance. Danger maximum pour l'ancien gendarme de Villefranche-de-Rouergue.
Mais qui peut en vouloir à Joseph Combes au point de tenter d'écraser avec une voiture sa fille, Clairette ? Si les forces de l'ordre de Villefranche-de-Rouergue, dans leurs premières constatations penchent pour un chauffard, Joseph Combes est persuadé lui qu'il s'agit bien d'une tentative d'assassinat. Pour preuve, il reçoit un coup de fil d'un mystérieux interlocuteur lui affirmant que la prochaine fois sera la bonne. Branle-bas de combat dans la famille qui n'entend pas se laisser faire. Clairette est mise au vert chez sa grand-mère à Bergerac et Joseph remonte la piste jusqu'à Figeac. Ce serait là qu'un groupe de comploteurs aurait mis au point un plan pour discréditer l'ancien gendarme devenu détective privé et redresseur de tort.
Alain Gandy a créé le personnage de Joseph Combes en 1997 et « Le piège se referme » est le 12e titre de la série avec ce héros récurrent qui ne cesse d'évoluer au fil des années.
Ancien militaire
Adjudant-chef en mission dans l'Aveyron au début, il s'est finalement installé dans la région, a quitté l'uniforme et s'est mis à son compte pour créer l'agence Combes et cie, officine de détective privé dans laquelle sa femme, la belle et impétueuse Claire, joue un rôle de plus en plus important. Joseph Combes est le prototype de l'ancien militaire, droit dans ses bottes, ayant le sens de l'honneur et une sainte horreur des injustices. Un peu le portrait d'Alain Gandy qui a été militaire dans une précédente vie. Avant de se lancer dans le roman policier rural et de terroir, il a signé quelques romans de guerre et des documents sur la Légion étrangère et même une biographie du général Salan. Mais depuis une dizaine d'années il se consacre exclusivement à Joseph Combes qu'il prend un malin plaisir à plonger dans des intrigues alambiquées où souvent de sombres personnages aux âmes torturées imaginent le pire.
Toute la tribu
Dans ce nouveau roman, c'est toute la famille qui est menacée. Quelques meurtres plus tard (des comparses du méchant sur le point de le trahir), Joseph Combes parvient à identifier l'instigateur du complot. Une vieille connaissance qui a déjà fait du mal à Claire Combes. Une découverte en pleine nuit qui jette un froid. « Le silence revenu avait l'air plus profond qu'avant ce réveil en fanfare. Il était chargé de drames, habité de personnages figés dans les souvenirs, agressifs, violents, cruels, qui avaient partagé avec Claire et Joseph, onze ans plus tôt, un jeu de passions et de morts subites. Dans le doux éclairage de la lampe de chevet, le ménage Combes de cette nuit se sentait revivre les péripéties les plus tragiques de son histoire commune. »
L'action se déroule à Figeac, Villefranche bien entendu mais également à Bergerac. L'ancien militaire devra aller demander de l'aide à un de ses anciens soldats (un montagnard vietnamien) pour contrer le machiavélique plan visant à détruire sa famille.
On appréciera dans cette série de romans, autonomes mais aux ramifications croisées dignes des meilleurs feuilletons, outre le cadre aveyronnais (et lotois) toujours plaisant, les caractères entiers et malgré tout très humains des différents membres de la tribu Combes. Joseph, le héros, laissant parfois la vedette à la fougueuse Claire, à l'effrontée et insouciante Clairette et au petit dernier, Robert, jeune bachelier à l'enthousiasme contagieux.
« Le piège se referme », Alain Gandy, Presses de la Cité/Balland, 18,50 €