vendredi 15 mars 2024

En vidéo, “Une année difficile”

Même après Une année difficile, il faut rire de nos tracas, se moquer de nos travers et profiter de cette pépite d’humour noir de Toledano et Nakache éditée en vidéo par Gaumont. Un gouffre sépare Poussin (Pio Marmaï) et Cactus (Noémie Merlant). 

Entre le surendetté chronique et la militante pour le climat, une étincelle électrise leurs deux regards quand ils se croisent à l’ouverture des portes d’un magasin pour le Black Friday. Pourtant, le premier guigne un écran plat à prix bradé alors que la seconde veut bloquer les portes du temple de la surconsommation. La suite de la comédie est à l’image de notre société : pas toujours évidente, imprévisible et pleine de contrariétés. 

Pour faire passer la pilule, faisons confiance à Lexo (Jonathan Cohen), copain de Poussin et expert en gaffes. Une comédie enlevée dans l’air du temps. 

Polar - Mystères et secrets basques dans le nouveau roman de Cécile Cabanac, « À pleurer tout nous condamne »

 Vingt ans après la disparition inexpliquée de sa tante Diane, Alice revient au village, au cœur du Pays basque, pour tenter de dénouer les fils enserrant ce mystère familial. 


 Pour son cinquième roman policier, Cécile Cabanac situe l’action dans une région qu’elle apprécie : le Pays basque. Après la région parisienne, l’Auvergne et le Périgord, c’est dans le Pays basque intérieur, exactement à Saint-Just-Ibarre, un petit village, que cette nouvelle « reine du polar français » déploie son intrigue.

Le personnage principal est attachée parlementaire à Paris. Alice, 25 ans, est au bout du rouleau. Ce matin-là, dans le métro, elle se surprend à vouloir se jeter sous les roues de la rame. Un burn-out carabiné qui la pousse à tout plaquer et partir se réfugier dans la maison familiale de Saint-Just-Ibarre, très éloignée du marigot politique dans lequel elle perd ses repères. L’ancienne maison de sa tante, Diane.

Elle l’a peu connue. Il y a 20 ans, Diane a disparu sans explications. Installée comme médecin de village depuis quelques années, elle vivait seule dans la grande bâtisse. Les gendarmes ont retrouvé des traces de sang dans la cuisine, mais pas de cadavre. Malgré les recherches dans les forêts environnantes et les interrogatoires, Diane n’est jamais réapparue. Une histoire qu’Alice connaît très mal. Sa mère, Annabelle, sœur de Diane, très touchée par cette disparition, refuse d’en parler. Comme pour redonner un but à sa vie, Alice va rouvrir le dossier et questionner les survivants. Mais la jeune fille remue un passé que tout le monde au village semble vouloir oublier.

Sur une trame classique de secrets de village et familiaux, Cécile Cabanac colle la quête obstinée d’une femme forte en situation de faiblesse. Car Alice, déterminée, un peu imprudente malgré les avertissements et les menaces, va lentement mais sûrement découvrir quelques vérités cachées. On apprécie particulièrement le portrait de cette femme, sorte de miroir de Diane.

L’essentiel du roman se déroule de nos jours, mais de courts chapitres permettent au lecteur de comprendre l’état d’esprit de la communauté au moment de la disparition de Diane. L’enquête non officielle d’Alice va devenir plus tendue quand une des seules villageoises prête à l’aider est retrouvée morte chez elle et que Maiana, la fille de la mairesse, meilleure amie de Diane, disparaît elle aussi. Le dernier attrait de ce roman bien ficelé et au suspense parfaitement dosé, réside dans la description de ce Pays basque à la fois extrêmement beau mais parfois peu accueillant comme quand la météo s’affole : « La foudre venait de créer une colonne luminescente et le tonnerre rugissait. L’ambiance était magnifiquement sinistre. Une pluie drue s’abattit, aussitôt accompagnée de nouvelles flèches qui striaient la nuée noire. Les éléments se déchaînaient avec férocité et la jeune femme assistait à ce grand tremblement, les tripes nouées, pleine d’excitation et de peur. »

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« À pleurer tout nous condamne » de Cécile Cabanac, Fleuve Noir, 432 pages, 20,90 €. Le précédent roman de Cécile Cabanac, « Le chaos dans nos veines », vient de paraître en poche chez Pocket, 528 pages, 5,20 €

jeudi 14 mars 2024

Un beau livre : Les plus beaux villages de France


Collioure sera peut-être le village préféré des Français en 2024 (réponse fin juin...), mais ne fait pas partie des plus beaux villages de France. Le guide officiel de cet organisme vient de sortir.

On retrouve 176 destinations de rêve, authentiques et originales. Ils ne sont pas si nombreux que cela dans la région : il y a Lagrasse dans l’Aude et Castelnou, Eus, Evol, Prats-de-Mollo-la-Preste et Villefranche-de-Conflent dans les Pyrénées-Orientales. Un atlas du patrimoine tricolore qui ne peut que vous donner des idées pour les prochaines vacances.

« Les plus beaux villages de France », Flammarion, 200 pages, 18,90 €

Cinéma - Noir absolu “Dans la peau de Blanche Houellebecq”

Film Guillaume Nicloux avec Blanche Gardin, Michel Houellebecq, Luc Schwarz

Le jury (Michel Houellebecq et Blanche Gardin) en pleine délibération… ou descente après avoir consommé beaucoup trop de drogue.  Bac Films

Comment rentabiliser un voyage d’agrément en Guadeloupe ? Y tourner un film par exemple. Ou à l’inverse, comment transformer un tournage aux Antilles en voyage d’agrément ? Guillaume Nicloux réussi le coup du siècle en proposant Dans la peau de Blanche Houellebecq, long-métrage tourné en grande partie en Guadeloupe avec des comédiens qui n’ont pas grand-chose à prouver puisqu’ils jouent leur propre rôle. 

Un film à l’économie, mais qui décoiffe. Du début à la fin. Michel Houellebecq, avec son ami Luc Schwarz, accepte de faire partie du jury du concours de sosies de… Michel Houellebecq. Originalité, la compétition se déroule en Guadeloupe et le jury est présidé par Blanche Gardin. Après quelques scènes d’introduction, alibi pour faire passer un puissant message anticolonialiste (la Guadeloupe, comme la Corse ou les Catalans, réclame l’indépendance), c’est enfin la rencontre entre deux enfants terribles de ce XXIe siècle. Michel et Blanche, quel beau couple !

 Ils s’accordent rapidement sur l’importance, pour surmonter l’épreuve de ce concours bêtifiant, de consommer un maximum de drogue en un minimum de temps. On rit beaucoup aux saillies de Blanche Gardin et à l’air de plus en plus naturel de cocker neurasthénique d’un Houellebecq en pilotage automatique. Le meilleur de ce film très sombre reste la séance de torture infligée aux « Blancs » par le chauffeur « Noir » d’une énorme limousine. Vitres fermées, sans climatisation, les supposés descendants des esclavagistes vont suer sang et eau comme les Africains déracinés il y a quelques décennies. Le tout sans le moindre effet spécial.     



mercredi 13 mars 2024

Des poèmes : Il·lusió Col·lisió


Alain Pottier, dit Alpott, aime taquiner les mots. Ce vigneron mais aussi poète propose ses recherches et découvertes dans la collection « Be Fort ». Il·lusió Col·lisió, paru en décembre dernier, est un joli ouvrage reprenant plusieurs dizaines de courts poèmes de cet artiste qui a le Pays catalan chevillé au corps.

Découvrez d’abord 37 nouvelles poétiques richement illustrées de photos artistiques en noir et blanc. Puis explorez un long texte sur la Sicile africaine. Alain Pottier se dévoile un peu plus ensuite dans une autobiographie géographique qui passe par Toulouse, la Guyane ou Paris. Pour clore le tout, un texte sur la tauromachie.

« Il·lusió Col·lisió », Trabucaire, 112 pages, 20 €

Cinéma - “Scandaleusement vôtre”, insultes réjouissantes

Des lettres anonymes très vulgaires sèment la zizanie dans une petite bourgade anglaise. Tout semble désigner comme coupable la dévergondée Rose. Qui pourtant n’y est pour rien…

Énorme embrouille entre les deux voisines et amies, Rose (Jessie Buckley) et Edith (Olivia Colman).  STUDIOCANAL
Dans la galaxie des jurons et autres insultes, il y a la logorrhée du capitaine Haddock, bien gentille au final, et les immondices déversées en rafales par Rose (Jessie Buckley), une des héroïnes de Scandaleusement vôtre, film britannique tout en finesse malgré la verdeur des dialogues de Thea Sharrock. Juste après la fin de la première guerre mondiale, dans cette bourgade anglaise en bord de mer, Rose vit dans une petite maison, mitoyenne avec celle d’Edith (Olivia Colman). La première, jeune, mère d’une adorable gamine, aime la vie, les pubs et parle fort en jurant sans vergogne. La seconde, vieille fille bigote, vit toujours avec ses parents, va à la messe tous les dimanches et personnifie la bonté chrétienne. Edith et Rose, paradoxalement, sont devenues amies. La première voudrait « adoucir » le tempérament de la seconde alors que Rose aimerait plus prosaïquement que son amie se décoince un peu. Une relation qui vire au vinaigre. Rose dit ses quatre vérités à Edith. Qui lui pardonne mais ne lui adresse plus la parole. 

Les choses auraient pu en rester là, mais Edith commence à recevoir des lettres anonymes. Pas piquées des hannetons les missives. Edith y est traînée dans la boue avec force de mots insultants, positions scabreuses et allusions graveleuses. C’en est trop pour Edward (Timothy Spall) le père d’Edith. Il porte plainte. La police, pas futée, arrête Rose et l’envoie en prison malgré ses dénégations. 

Passant sans cesse de la pure comédie à la critique sociale, le film est particulièrement malin. Il rend surtout très sympathiques ces deux femmes que tout oppose. Et très désagréables les hommes de leur entourage, autoritaires et prétentieux. Cette histoire, tirée de faits ayant réellement agité le Royaume, est surtout une bonne occasion pour dénoncer le sort des femmes durant cette période. On en prend conscience quand la première femme policière de la région, Gladys Moss (Anjana Vasan) alerte sa hiérarchie face à ce qui a tout l’air d’une grossière erreur judiciaire. Mais elle serait tout juste bonne à préparer le thé de ses collègues, bêtes et obtus. Bien que Gladys soit beaucoup plus instruite qu’eux. Elle va d’ailleurs rapidement découvrir la véritable coupable en comparant les écritures. Une démonstration éclatante qui lui vaudra immédiatement… une mise à pied par son chef. Obstinée, avec quelques amies de Rose et d’Edith, elle décide de mener une enquête sur le terrain et imaginer un piège implacable pour prendre la coupable sur le fait. On retrouve un peu l’esprit d’Agatha Christie et des suffragettes dans ce film qui pourrait convertir au wokisme nombre de mâles dominants.   

Film de Thea Sharrock avec Olivia Colman, Jessie Buckley, Anjana Vasan, Timothy Spall





mardi 12 mars 2024

Polar - « Le silence des nonnes » après des hurlements d’horreur

 Seconde enquête de la commissaire Priya Dharmesh, flic d’origine réunionnaise imaginée par Marie Capron. Un polar très gore où ça meurt et ça mord… 

Certains romans policiers ne font pas dans la dentelle. Pour dénoncer la noirceur du monde, rien de tel qu’un bon massacre. Une course à l’horreur parfois malsaine. Sauf si elle est doublée d’un humour corrosif. Ou d’un discours politique progressif. Il y a un peu de tout cela dans Le silence des nonnes, second roman ayant pour héroïne le commissaire Priya Dharmesh. Cette petite femme d’origine réunionnaise, célibataire mais sur le point d’adopter la petite Lison (la rescapée de sa première enquête, La fille du boucher), est appelée avec son équipe dans un monastère parisien.

Douze nonnes se sont enfermées dans une pièce et refusent d’en sortir. Une fois la porte ouverte, les policiers découvrent un abominable massacre : « Je suis happée, raconte Priya, narratrice du roman, par la vision des vêtements sanguinolents éparpillés sur les marches de l’estrade. Ils semblent avoir été arrachés par un démon, découvrant des fleurs de chair éventrée sur des peaux diaphanes. […] Des mâchoires béantes vomissent un sang encore frais. Il m’est impossible de dénombrer les corps dans cette imbrication de membres déchiquetés. Partout, des plaies fleurissent dans cette mêlée humaine qui semble s’être livrée à une barbarie inouïe. » Les nonnes se sont entredévorées, victimes d’une drogue de synthèse déclenchant un cannibalisme irrépressible. Les créateurs de ce poison, deux jeunes idéalistes, sont capturés par la CIA qui va tenter d’utiliser le produit pour déclencher le chaos en Europe.

On retrouve parfois des airs de San-Antonio de la grande époque dans ce polar extrême. Le machiavélisme des méchants semble le seul adversaire de Priya. Sa détermination à faire triompher la vérité sera rudement mise à l’épreuve quand les politiques lancent la machine à fabriquer du récit, l’autre nom des mensonges d’État.

Un polar mené tambour battant, entre action, horreur et critique sociale. Du grand art qui distrait et fait réfléchir.

« Priya - Le silence des nonnes », Marie Capron, Viviane Hamy Éditions, 352 pages, 21,90 €

lundi 11 mars 2024

Un album jeunesse : Raptors rigolos


Ils ont des dents affûtées et sont toujours affamés. Parmi les dinosaures, les carnivores sont souvent caricaturés comme de très méchants bougres. Séverine de la Croix a décidé de les transformer en petits rigolos dans cette nouvelle série pour les plus jeunes. Les Férociraptors, surnom des vélociraptors, sont trois : Prune, Cassis et Myrtille.

Dans cette première aventure dessinée par Julien Flamand, ils tentent de dérober (pour le manger), l’œuf d’un autre dinosaure. Mais s’attaquer à un futur bébé de ptérodactyle, de tricératops voire de T-rex est très risqué. On rit bien de leurs déboires, notamment quand ils doivent se contenter, au final, de l’œuf de coco.

« Les férociraptors », Jungle Splash !, 40 pages, 8,95 €

dimanche 10 mars 2024

Des poèmes de jeunesse signés Philippe Salus


Ancien journaliste, Philippe Salus s’est reconverti dans l’édition. Il a publié les ouvrages des autres mais ces poèmes sont de lui. Des œuvres de jeunesse qu’il a décidé de sortir de l’oubli. « Poèmes lointains, rémanences de l’adolescence et de la jeunesse d’un auteur aujourd’hui sexagénaire », selon sa propre définition, ils sont illustrés de photos de Bruno Grégoire.

L’auteur a présenté son livre dans le cadre de la manifestation « Printemps des poètes », le dimanche 17 mars à la librairie Victor et Madeleine à Canet-en-Roussillon.

« Poèmes pour ne pas dormir », Philippe Salus, Obsidiane, 64 pages, 14 €


samedi 9 mars 2024

Francis Cabrel, Ibrahim Maalouf, Olivia Ruiz... Pour les 20 ans de son album "L'Amour parfait", Cali revisite ses chansons avec de nombreux artistes


Premier morceau, C'est quand le bonheur, est confié à Francis Cabrel. "Avec Francis Cabrel on ne se voit pas beaucoup mais c'est un camarade. J'ai eu la chance de faire la préface de sa biographie et il y a quelques années on avait chanté tous les deux sa chanson "Encore et encore" qui est très rythmique et on l'avait faite piano-voix. Il m'avait dit à l'époque "J'adore cette version car je redécouvre mes mots". Alors je lui ai proposé C'est quand le bonheur, et j'ai redécouvert mes mots. Je me suis rendu compte qu'il se l'était complètement appropriée. Il l'a tellement incarnée que les gens me disent, c'est une chanson de Cabrel en fait."  

Calogero - Elle m'a dit. "À l’origine c'est une voix féminine qui chante, mais j'entendais trop Calogero le faire. Il a été d'accord car il adore la chanson." 

Stephan Eicher - Pensons à l'avenir ."Il y a 20 ans, Stephan Eicher m'avait dit qu'il adorait cette chanson. Je lui ai proposé et j'ai pleuré car il m'a fait un beau cadeau.". 

Charlelie Couture - Il y a une question. "Il m'a fait une Charlelie, magnifique. Il part dans d'autres mélodies avec sa voix éraillée."

Ibrahim Maalouf - J'ai besoin d'amour. "Sur cette chanson, ce n'est pas un chanteur qui me répond mais la trompette d'Ibrahim Maalouf."  

Olivia Ruiz - Dolorosa. "Olivia crache toute sa fougue dans cette chanson d’amour cruelle."

Dominique A - Tes désirs font désordre. "Sur fond de boîte à rythmes il prend possession de mes mots amers et cyniques qui ne lui ressemblent pas."

Adamo - C'est toujours le matin. "Adamo c'est le plus gentil, le plus tendre des chanteurs. On a passé une journée en studio magnifique. Il y a 20 ans je chantais pour une fille, là on est un duo de garçons alors on a transformé la chanson : c'est mon meilleur ami et c'est moi qui lui vole sa femme, c'est moi le traître, le félon."

Benabar - Le grand jour. "Avec Bénébar, nous nous sommes amusés comme les deux acolytes, que nous sommes dans la vraie vie, sur une chanson faussement cruelle."

David Linx - Fais de moi ce que tu veux. "Ce chanteur de jazz, saupoudre le titre d’une sobriété inattendue."

Bernard Lavilliers - Différent. "Lavilliers m'a fait un beau cadeau. À la fin de la chanson, je lui ai demandé de déclamer le poème de John Donne, le poème inscrit au Perthus, au passage emprunté par les Républicains espagnols." 

Elliott Murphy - Tout va bien. "Elliott Murphy c'est la même génération de Springsteen. À 74 ans il fait encore des tournées à fond. Je l'ai croisé dans la rue et je me suis presque agenouillé pour lui demander s'il était d'accord d'aller chanter avec moi. Ce sont des petits miracles pour moi".

Peter Kingsbery - L'Amour parfait a state of grace. "T'imagines, la voix de Cock Robin ! Il m'a fait une version adaptée en anglais. Sa voix suave et subtile offre à l’album un final tout en grâce."

Sans oublier deux titres en bonus, Pascal Obispo pour Les choses défendues et Coco Caliciuri, la fille de Cali, qui chante avec son père une seconde version de L'amour parfait.