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samedi 15 février 2025

BD - Dans les coulisses des chaînes d'info en continu

Journaliste ! Mais quel beau métier ! 

Enfin, si on aime se lever tôt, rester le cul sur une chaise devant son bureau (desk en anglais) à répéter, tel un perroquet, tout ce que disent les confrères des autres médias. L'arrivée des chaînes d'info en continu a donné l'espoir à toute une génération de jeunes journalistes de faire un métier passionnant, au plus près de l'actualité, reportage, réactivité... Pierre Millet-Bellando a fait partie de ces rêveurs rattrapés par la réalité. A peine sorti de l'école de Lille, il décroche un poste de "deskeur" à la matinale d'une grande chaine nationale. C'était il y a quelques années. Depuis il est passé à autre chose et tente dans cette BD (illustrée par M. LeRouge) entre réalisme, souvenirs et décryptage pour tenter de faire comprendre aux lecteurs le fonctionnement de cette usine de l'information. 

Depuis son bureau, encore à moitié endormi, il réalise des "reportages" sur les grands événements de la nuit. Plus exactement il raconte les faits (lus dans les journaux) et les illustre d'extraits puisés dans les banques d'images internationales. Il devra assurer de longs mois ce rôle ingrat avant d'avoir le droit de sortir pour faire du terrain. Des micro-trottoirs (la pire expérience journalistique, toujours en cours dans toutes les rédactions et souvent réservée aux stagiaires ou débutants) ou les réactions de politiques à l'Assemblée sur la dernière polémique en date.  Rien de bien compliqué, il suffit de tendre le micro aux élus réputés "bons clients" qui ont toujours la bonne formule qui sera reprise sur les réseaux sociaux et permettra d'avoir de l'audience. L'audience, le nerf de la guerre. L'audience qui interdit tout sujet de plus de deux minutes. Alors un reportage au long cours, vous n'y pensez pas... 

S'il est très critique au début, le jeune journaliste, à force d'accepter les directives des cadres de la rédaction et des présentateurs vedettes, a obtenu ce qu'il voulait : faire du terrain. Généralement des directs dans les tranches du matin, mal préparés mais qui lui permettent de se faire remarquer. Car s'il est dispo pour les bouchons des départs en vacances, il est aussi partant pour les faits divers ou les événements exceptionnels comme les attentats à Paris en 2015 ou les manifs très agitées des Gilets jaunes. Il raconte comment l'information est formatée, aseptisée pour aller dans le sens des téléspectateurs, ceux qui regardent... les pubs. Ce n'est pas très glorieux pour la profession. Il a d'ailleurs depuis quitté ce milieu.

Journaliste ! Mais quel horrible métier !

"La fabrique des News", Steinkis, 168 pages, 20 € 

vendredi 1 septembre 2023

Roman français - Chômeur et enquêteur


Se retrouver au chômage du jour au lendemain peut avoir de graves conséquences sur sa santé mentale. Démonstration avec le cas du narrateur de ce roman très déconcertant de Laurent Rivelaygue. Le titre, Il faut toujours envisager la débâcle,  donne l’idée générale. 

Journaliste dans une revue spécialisée dans la logistique, il perd son boulot. Sa femme lui met la pression, son fils ne comprend pas. Il évite Pole Emploi et ses conseillères et se met à rêver de roman. Espoir vite anéanti par son manque d’imagination et d’inspiration. Il va donc se contenter de mener une enquête autour d’un fait divers non résolu : les crimes du Grêlé.

 Problème, à force de se renseigner sur les serial-killers, il va découvrir que le pire d’entre eux se cache dans le 3e tiroir de son bureau. À partir de ce moment, le roman part dans des délires hilarants, avec un héros de plus en plus à l’Ouest, incapable de faire la différence entre le réel (sa femme en colère) et ce qui relève de son imaginaire (Dupont de Ligonnès qui mange un sandwich la nuit dans sa cuisine). 

De l’humour absurde et un peu désespéré qui fait du bien à nos zygomatiques. 

"Il faut toujours envisager la débâcle" de Laurent Rivelaygue, Calmann Lévy, 270 pages, 19,50 €

jeudi 23 mars 2023

Un livre enquête sur les risques de l’éco-terrorisme

 La lutte pour préserver l’environnement va-t-elle devenir violente ? Le livre de deux journalistes originaires de Pyrénées-Orientales, Anthony Cortes et Sébastien Leurquin, tente de répondre à la question.

Face à l’urgence climatique, des voix s’élèvent. Mais sans véritablement réussir à faire bouger les lignes. Alors certains militants écologistes sont tentés pour changer de mode d’action, n’écartant plus la violence. Un réel danger selon deux journalistes originaires de la région, Anthony Cortes et Sébastien Leurquin. Ils ont enquêté sur les mouvements écologistes radicaux en France et publient le détail de leurs recherches dans un livre paru aux éditions du Rocher. Dans L’affrontement qui vient, ils ont notamment rencontré une militante de Deep Green Résistance qui annonce clairement la couleur : « La peur ça change pas mal de choses dans le rapport de force, puis ça te permet d’attirer des gens déterminés. Nous, on veut prendre petit à petit la place des mignons écolos pour amener l’idée d’actions violente comme l’axe central, voire le seul. »

Les autres mouvements sont moins offensifs, mais laissent entendre que la base, de plus en plus, envisage de passer à l’action face à l’immobilisme. Autre témoignage recueilli dans ce livre, celui d’une militante de 26 ans : « Il ne faudra pas accuser ceux qui se révolteront face à la situation. Ce que nous savons, c’est que tout est perdu ou presque, et ce n’est pas notre génération la responsable. Notre monde court à sa perte, notre monde est fini. »

Cette longue enquête (des dizaines de personnes longuement interviewées), tente aussi de comprendre comment l’État participe à cette montée de la tension. Gérald Darmanin (qui n’a pas voulu répondre aux auteurs), est le premier à avoir parlé d’éco-terrorisme dans le mouvement de protestation contre les super-bassines dans les Deux-Sèvres. Certains militants écolos sont fichés S, surveillés, parfois assignés à résidence.

Alors l’affrontement devient-il inévitable. Oui selon Sandrine Rousseau, députée écologiste : « Le système néglige quelque chose de capital : c’est une question de vie ou de mort ! Dans cette urgence vitale, les gens n’ont plus rien à perdre. »


« L’affrontement qui vient » d’Anthony Cortes et Sébastien Leurquin, Éditions du Rocher, 18,90 €