Quelques chroniques de livres et BD qui méritent d'être lus et les critiques cinéma des dernières nouveautés. Le tout publié dans l'Indépendant du Midi sous la signature de Michel Litout.
mercredi 28 mars 2018
Cinéma : Électrisante Isabelle Huppert dans « Madame Hyde »
De ce film iconoclaste de Serge Bozon, on retiendra cette phrase prononcée par l’héroïne avec véhémence devant des élèves chahuteurs : « Un prof n’a pas besoin d’être aimé mais d’être compris. » Et il y a du boulot dans le cas de Madame Géquil (Isabelle Huppert), professeur de physique en totale perdition dans ce lycée technique. Non seulement elle est malmenée par les garçons, mais elle subit également les foudres des deux seules filles de la classe, exaspérées de ne pouvoir apprendre dans de bonnes conditions.
Au début on se croit plongé dans un film purement social sur les difficiles conditions de travail des profs. Ou, au choix, de l’incroyable hiatus entre les intentions des uns et les désirs des autres. Comme si enseignants et élèves se trouvaient sur deux planètes diffé- rentes. Madame Géquil tente donc de faire passer son message. En vain. Trop naïve, trop académique... Le genre de personnalité qui offre un boulevard aux perturbateurs. Comme Malik, un élève décrocheur comme il y en a des centaines dans un lycée de banlieue. Pourtant Madame Hyde ne lui en veut pas. Souffrant d’une maladie dégénérative, il ne se déplace que grâce à un déambulateur. Une fois ces premiers personnages présentés, le film bascule dans le surréalisme avec l’apparition du proviseur (Romain Duris), sorte de vaniteux égocentrique et du mari de Madame Géquil (José Garcia), homme au foyer d’une platitude et banalité rédhibitoires.
Coup de foudre
La bascule a lieu un soir de lune rousse dans un bâtiment préfabriqué abritant le laboratoire secret et personnel de la prof de physique. Alors qu’elle branche des appareils électriques, la foudre tombe sur la machinerie et électrocute la chercheuse. La nuit suivante, elle se lève, marche dans la rue et se transforme en boule de feu. Madame Géquil devient Hyde. Attention, ça va faire mal !
Le film de Serge Bozon aurait pu tourner au pastiche de la série B. Mais loin de son pré- cédent long-métrage (Tip Top, déjà avec Isabelle Huppert et complètement barré), Madame Hyde explore peu le fantastique. La transformation est brûlante la nuit, mais la journée, la prof dépassée se transforme en excellente pé- dagogue capable de se faire comprendre voire même d’être aimée, à l’opposé de sa déclaration liminaire.
Le seul inconvénient reste que le film, de fantaisiste, devient limite barbant. Presque un pensum, par moment, sur le vivre ensemble, l’interaction et l’avenir de l’éducation nationale. Comme si le réalisateur s’était perdu en cours de route, ou plus exactement s’était remis dans le droit chemin, comme Malik, abandonnant sa nonchalance pour une soif de savoir inextinguible.
➤ « Madame Hyde », comédie fantastique de Serge Bozon (France, 1 h 35) avec Isabelle Huppert, Romain Duris, José Garcia.
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