samedi 10 mars 2007

Polar - Passé irlandais

Irlande secrète, Irlande mystérieuse, Irlande sombre. Ce thriller de Julie Parsons explore le côté obscur de l'Île émeraude


Quand il arrive dans la région de Cape Clear, à l'extrême sud de l'Ir­lande, Adam se fait très vite des amis. Il est vrai que ce jeune Anglais, blond, grand et avenant, a un charme indé­niable. A la recherche de petits boulots, il s'embarque sur des chalutiers et c'est en revenant d'une sortie en mer qu'il découvre Trawbawn. Une grande bâtisse, entourée de jardins savamment entretenus par Lydia Beauchamp. Lydia est une vieille femme bien seule depuis le suicide de son mari, Alex, et le départ de sa fille Grace. Lydia et Grace Beauchamp, deux femmes écorchées, séparées par une génération mais tourmen­tées toutes les deux par un passé qu'elles tentent d'enfouir dans les années mais qui revient inexorablement à la surface.

Douloureuses naissances

Lydia et Grace sont donc les deux héroïnes de ce thriller verdoyant de Julie Parsons, néo-zélandaise installée en Irlande depuis presque un demi-siècle. Lydia était une jeu­ne infirmière anglaise pleine de vie jusqu'à ce qu'elle tombe enceinte d'un chirurgien marié.

Elle garde l'enfant, Grace, et refait sa vie en Irlande,. trouvant un boulot dans un hôpi­tal psychiatrique. C'est là qu'elle rencontre Alex, un patient doux et dépressif. Ils se marient, Grace a ainsi une véritable famille. Un concours de circonstance fait qu'ils échouent dans la grande demeure de Daniel Chamberlain, à Trawbawn. A la mort de ce dernier, Lydia hérite de la propriété quelle bonifie en ouvrant au public les magnifiques jardins.

Tout irait pour le mieux si Grace, à l'âge de 16 ans, ne tombait à son tour enceinte. L'adolescente refusant de dévoiler le nom du père, Lydia fait le nécessaire pour que ce bébé ne soit pas un frein à l'ascension sociale de sa fille. Placée dans une institution, dès que le petit Daniel vient au monde, il est adopté par un couple stérile. Grace, tenant sa mère pour responsa­ble, quitte le foyer familial et poursuit, seule, ses étu­des à Londres. Brillante enseignante, elle se marie et a une petite fille, Amelia, aujourd'hui âgée de 16 ans.

Le lecteur découvre au fil des événements ces par­cours de femmes blessées et comprend que Lydia et Grace ne se sont plus parlées depuis 28 ans, autre­ment dit la naissance de Daniel.

Regrets éternels

Adam, pivot du roman, va quitter son rôle de gentil garçon pour se transformer en ange de la mort, outil d'une vengeance mûrement réfléchie. Il va s'immis­cer dans la vie de ces deux femmes déchirées de tris­tesse malgré le temps passé.

Ainsi, Grace, après une journée de travail,« s'offrirait le luxe de se souvenir. De son bébé à elle, son petit gar­çon. Arraché à elle à six semaines. Lorsqu'il avait été capable d'ouvrir ses yeux bleus laiteux et de la fixer, une minuscule ébauche de sourire flottant autour de ses peti­tes lèvres molles. Ce soir, où Amelia n'était pas là et où elle avait la maison pour elle seule, elle regarderait le des­sin du bébé et elle laisserait libre cours à ses larmes ». Et au même moment, dans sa grande maison vide, Lydia endure un véritable calvaire: « La douleur était devenue intolérable. Une souffrance atroce montait des profondeurs de son être. Elle avait envie de gémir, de san­gloter. De supplier qu'on la pardonne, qu'on la compren­ne. Mais il n'y avait personne pour entendre ses suppli­ques".

Julie Parsons utilise ce roman policier pour décorti­quer et expliquer comment le passé et les regrets peu­vent vous consumer lentement, de l'intérieur.

« Le sablier d'or », Julie Parsons, Calmann-Lévy, 20 €

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