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jeudi 9 janvier 2025

BD - Ovales, ovules et IVG


La France en 1967 et 1968. Pas Paris, mais le Sud-Ouest rural, pas loin de Toulouse à Larroque-sur-Garonne. JeanLouis Tripp et Aude Mermilliod ont uni leur talent de scénaristes pour écrire cette saga historique, condensé de cette époque « révolutionnaire », même dans les villages les plus paisibles de province.

Pour comprendre l’évolution de la communauté, ils suivent le parcours de deux amies de toujours, Yveline et Monique, toujours dessiné par Horne. La première, fille de paysan, part à Paris poursuivre ses études grâce à la bienveillance d’un riche notable. La seconde, fille du patron de la tuilerie locale, se marie avec un jeune communiste. On suit plus particulièrement le parcours de cette dernière, Monique, charmante blonde, de plus en plus enceinte. Également de plus en plus fâchée avec son gaulliste de père.


Le second tome, qui va d’octobre 1967 à avril 1968 raconte aussi quand les jeunes rugbymen locaux, contaminés par une jeune gauchiste, vont transformer un match en manifeste situationniste, comment Yveline, séduite par un étudiant, va devoir avorter clandestinement ou pourquoi la femme de l’épicier doit se confesser après avoir rencontré le grand amour.

Le tout entrecoupé de rappels historiques, de la mort du Che Guevarra à l’ouverture de l’autoroute Paris Lille en passant par les Jeux olympiques d’hiver à Grenoble.
« Les vents ovales » (tome 2), Dupuis, 128 pages, 26 €

dimanche 9 juin 2024

BD - Le rugby émancipateur


Après la vie des pionniers dans le grand nord canadien, JeanLouis Tripp s’attaque à la vie dans deux villages du Sud de la France. Des cités voisines, simplement séparées par un pont qui enjambe le fleuve. Nous sommes d’un côté à Larroque-sur-Garonne, de l’autre à Castelnau-sur-Garonne, pas loin de Montauban. Tripp connaît parfaitement la région. Il y a vécu enfant et n’a pas quitté ce Sud ensoleillé et fou de rugby puisqu’il réside désormais dans les Corbières audoises.

La série Les vents ovales, prévue en trois tomes, ambitionne de raconter les événements de mai 68 mais depuis cette province si éloignée des barricades parisiennes. Simple scénariste sur le projet, il a reçu le renfort d’Aude Mermilliod à l’écriture et le travail graphique est assuré par Horne.

La première partie suit la vie quotidienne, de mai à septembre 1967, de deux copines, Yveline et Monique. La première, en couverture du premier tome avec un ballon de rugby dans les mains, est la plus jeune. À peine 18 ans, lycéenne, elle va passer son bac. L’obtenir avec la mention Très Bien et commencer ses études universitaires à Paris. La seconde, 21 ans, après un cursus au CREPS, va devenir prof de sport… à Béthune.

Deux jeunes femmes de la fin des années 60, entre envie de s’émanciper et pression sociale de leurs origines. Yveline, fille de paysan, fiancée à un gars du coin, voudrait tant s’extraire de son milieu, s’affirmer. Même envie du côté de Monique, fille du directeur de l’usine de briques, fille à papa surprotégée. Le dernier qu’elles passent ensemble est raconté avec finesse et délicatesse par un trio qui prend le temps de camper les personnages, l’ambiance et l’importance du rugby dans ces deux villages rivaux.

Un rugby émancipateur pour nombre de jeunes. Un sport collectif qui ne galvaude pas l’adjectif. C’est cette partie qui fera vibrer les sudistes amateurs de ballon ovale. Même si le premier public ciblé de la série semble être les femmes, libérées ou à libérer.

« Les vents ovales » (tome 1), Dupuis Aire Libre, 136 pages, 26 €

vendredi 29 avril 2022

BD - Dessins au fil du fleuve


Certains dessinateurs de BD aiment les festivals. Pas Angoulême, mais les endroits insolites, chargés de sens. Comme le Mapa Buku Festi qui se déroule sur une semaine le long du fleuve Maroni en Guyane française. Une dizaine d’auteurs sont partis à l’aventure et ont raconté ce qu’ils ont vu ou appris de cette région reculée de la France, aux confins du département français, entre Brésil et Suriname. 


Près de 200 pages où alternent petite histoires (Aude Mermilliod, Joub, Thierry Martin), simples carnets (Tripp, Lepage) ou planches plus explicatives (Joub, Nicoby). Une plongée dans l’enfer vert qui en réalité est de toutes les couleurs comme les superbes planches d’Éric Sagot.

« Maroni, les gens du fleuve », Futuropolis, 23 €


dimanche 28 juin 2020

BD - JeanLouis Tripp se dévoile


Tuyau d’arrosage en main, JeanLouis Tripp accueille le visiteur du jour avec un grand sourire. Le petit jardin devant la maison qu’il a achetée et entièrement rénovée au centre de Talairan a soif. Le soleil tape sur la garrigue et les pierres ancestrales du village construit autour de l’église. Cela fait cinq ans qu’il est revenu dans l’Aude, département d’origine de sa famille paternelle. « Mon arrière-grand-père avait les tuileries Coudonne à Narbonne. Il a aussi été maire de Laroque-de-Fa. Quand j’avais 40 ans, avec un copain, on faisait du vélo l’été sur ces routes des Corbières. »

Après avoir bourlingué aux quatre coins du monde (pays de l’Est enfant avec son père fervent militant communiste, Afrique, Amérique du Sud, Asie), il a définitivement largué les amarres avec la France pour s’installer au Québec en 2003. « J’ai occupé un poste de professeur de bande dessinée à l’université du Québec. J’ai pris la suite d’Edmond Baudoin. » Un changement radical après un parcours professionnel atypique.

Jeune dessinateur, il place ses premières histoires dans les revues adultes comme Métal Hurlant. Il est publié chez Futuropolis et lance les aventures de Jacques Gallard où il parle de sujets politiques comme l’apartheid en Afrique du Sud. 
Déjà, son envie de liberté le titillait. Se retrouver enfermé dans une série, à dessiner des heures par jour ne lui donne plus satisfaction. Il range ses pinceaux et décide de faire de la sculpture et de la peinture. Une période de vache enragée, mais sans regret. Cette liberté il en avait besoin pour mieux revenir. Au Canada, donc, il réalise un nouvel album au début des années 2000 et retrouve un vieux copain, Régis Loisel. Ils décident de travailler ensemble sur une série se déroulant dans ce Québec qu’ils découvrent, émerveillés. 

L’histoire du petit frère

Ce sera l’aventure du Magasin général (9 tomes chez Casterman), énorme succès de librairie et un travail en duo inédit. « J’avais des difficultés à débuter une planche, Régis Loisel lui peinait à terminer les siennes. Une fois le scénario écrit à deux, il crayonnait la planche et je la finalisais, en amenant mon style de dessin plus doux. » Plus qu’une collaboration, c’est une fusion de styles qui a donné toute sa force à ce Magasin général, qui reste avant tout « l’histoire de l’émancipation d’une femme » tient à préciser Tripp. 

 

Une fois cette belle aventure refermée, lors d’un repas avec Loisel et son éditeur, JeanLouis évoque son envie de dessiner un récit sur la spiritualité. Loisel, « qui a toujours été mon confident », le convainc que ses aventures sexuelles seraient plus pertinentes. Ce sera Extases, premier tome en 2017, le second vient de sortir (lire ci-dessous), un 3e est dans les cartons. 


Mais avant, toujours dans la veine autobiographique, JeanLouis Tripp veut raconter l’histoire de son petit frère, tué à 11 ans par un chauffard. Un roman graphique, plus sombre qu’Extases, dont il a déjà finalisé 88 pages. Il devrait être terminé en 2021.

Entre-temps, quelques scénarios devraient être confiés à des dessinateurs. Notamment un projet autour d’une star de la radio. Un autre, coécrit avec Aude Mermilliod, se déroule dans un petit village du Sud-Ouest, à l’époque de Mai 68 et dans le milieu du rugby amateur. Sans oublier un autre scénario toujours avec Aude Mermilliod. Seulement trois personnages pour un one-shot ayant pour décor Talairan. L’œil de Tripp frétille de malice en l’évoquant. Il n’en dit pas plus, mais on devine qu’on est à mille lieues du roman de terroir. 

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« Extases » : livre politique et sans tabou

Tout, tout, tout, vous saurez tout sur JeanLouis Tripp ! Une phrase à scander sur l’air du Zizi de Pierre Perret car le dessinateur de la série Magasin Général (avec Régis Loisel) s’est lancé dans une longue et copieuse autobiographie dessinée portant en grande partie sur sa vie sexuelle. Il faut oser se dévoiler ainsi à 60 ans passés.
En noir et blanc, avec une grande variété de traitement graphique, on dévore dans le premier tome la découverte de la sexualité par ce gamin à peine pubère. La suite est dans les 370 pages du tome 2, l’âge adulte mais aussi celui des « Montagnes russes ». Après 8 années de vie commune avec sa première compagne, la lassitude brise le couple. Alors qu’elle ambitionne de rentrer dans le rang pour une vie normale JeanLouis aspire à une existence aventureuse. Il va bien profiter de sa vie de célibataire, mais reste le romantique qui espère le grand amour.

Le coup de foudre frappe en plein festival de BD. Capucine est le rayon de soleil qui lui permet de repartir. Dans ces pages sans la moindre censure, il raconte l’explosion des sens des premières fois, puis la routine et les accrocs, quand en festival, le dessinateur cède aux avances d’une lectrice qui aime, « vraiment beaucoup » ce qu’il fait. Une remise en cause est nécessaire. Elle passe par de nouvelles séparations et une phase de dépression suicidaire.


L’auteur se met à nu physiquement mais intellectuellement aussi. S’il parle à la première personne, chaque lecteur, quel que soit son sexe ou sa situation sentimentale, se reconnaît un peu. Forcément : il n’y a rien de plus universel que la sexualité. Et d’expliquer que ce bouquin est avant tout politique. « Je fais une proposition, dit-il dans un texte liminaire : et si l’on essayait de parler du sexe comme d’une chose naturelle et normale ? De dédramatiser le droit au plaisir ? Dédramatiser. Dire que nous avons le droit de choisir ce que nous faisons avec nos corps. » Et de conclure que sa BD, en « montrant des sexes en action » est « une démarche politique ».  L’histoire va crescendo dans la découverte de la sexualité et l’exploration des tabous. Rien n’est occulté tant qu’il s’agit de pratiques « entre adultes consentants et désirants ».
La dernière partie est consacrée aux premiers pas de JeanLouis et Nathalie (sa petite amie du moment) dans un club échangiste. Le brillant dessinateur casse les codes graphiques de la BD sur la dernière séquence. Sur des doubles pages très sombres, il fait tout pour que le lecteur « entre dans la ronde des corps. Qu’il soit au plus près de l’expérience, au milieu de la chair. » L’effet est saisissant. On ne ressort pas de cette séquence, la dernière du tome 2, sans souhaiter ardemment connaître la suite.
 

« Extases » (tome 2), Casterman, 27,95 €
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Le chalet de Mont-Louis 


La montagne a occupé une grande importance dans l’enfance de JeanLouis Tripp. En fait tout a débuté dans les Pyrénées. Son grand-père avait un chalet à Mont-Louis dans les Pyrénées-Orientales. Dans les années 50, le père de Tripp, jeune élève pilote faisant son service militaire, y passe quelques jours de permission. Arrive un camion camping-car qui se gare devant le chalet. A bord, une jolie Montalbanaise qui va craquer pour le jeune en uniforme. La future maman du dessinateur. Une belle histoire d’amour qui se prolonge par un mariage et la naissance d’un garçon. Il sera baptisé Jean-Louis, en souvenir du chalet.


Le Cambre d’Aze à 7 ans 


Montagne toujours avec un rituel familial des Tripp. Pour les 7 ans des enfants, tout le monde escalade le Cambre d’Aze. JeanLouis Tripp a conservé cet amour de la montagne même si cela fait quelques années qu’il n’est plus retourné à Mont-Louis. Et si le temps le permet, il ne manque pas de photographier le Canigou depuis la garrigue des Corbières. 


L’amour du rugby 


Au Canada, ce qui a le plus manqué à Tripp c’est le rugby. « J’y ai un peu joué gamin, puis le club de mon village près de Montauban a fermé. Je me suis tourné vers le foot. Mais on suivait tous les matches en famille. Je me souviens d’une rencontre entre Narbonne et Montauban. La voiture était décorée aux couleurs des deux clubs, un de chaque côté. Mon père était de Narbonne, ma mère de Montauban. » Montauban dont il se souvient de la victoire en championnat de France en 1967. Il était au match après avoir vu toute la phase finale avec les parents.  Supporteur du Stade Toulousain, quand il est au Québec, il regarde tous les matches du top 14 en streaming.

La Talariane 

Plus qu’un simple restaurant, la Talariane tenue par Sylvie et Benoît est un véritable lieu de vie du village. On s’y retrouve pour un café sous la terrasse ombragée ou pour déguster les superbes entrecôtes à la carte. Tous les midis un menu est proposé avec entrée, plat et dessert. La cuisine est simple et copieuse, avec produits locaux et de saison. 
La Talariane, 8 Avenue du Termenès, 06 78 96 38 32

Le Gourg Goutonnier 


Le Canada, c’est beau, mais un peu lassant. Des forêts, des lacs… Des forêts, des lacs… Se revendiquant « Méditerranéen », Tripp, quand il est dans les Corbières, profite à plein poumons de la garrigue. Variété des paysages et des odeurs avec des endroits magnifiques comme le Gourg Goutonnier. Une résurgence de la rivière, dans un écrin de verdure. Parfait pour cet amateur de grands espaces qui ne peut jamais se trouver trop éloigné de l’eau. 

Le Banquet de Lagrasse 

Quand il a décidé d’acheter une maison dans les Corbières, JeanLouis Tripp visait Lagrasse. Ami depuis plusieurs décennies avec Jean-Michel Mariou, le créateur du Banquet du Livre, il a dessiné dans sa jeunesse pour le journal éphémère de la manifestation littéraire de référence des Corbières. Lagrasse, pour JeanLouis Tripp, c’est un refuge où il sait qu’il va rencontrer artistes et vie culturelle foisonnante.

 

lundi 26 novembre 2012

BD - Emplettes canadiennes avec le tome 8 du "Magasin général"

Double révolution dans le petit village québécois de Notre-Dame-des-Lacs : Marie est enceinte et le curé se pose des questions existentielles. Le 8e tome du « Magasin général » de Loisel et Tripp, tel un feuilleton captivant, dissèque les vies de ces villageois retirés entre forêts et montagnes enneigées. Marie ne sait pas qui est le père de son enfant, mais est quand même follement heureuse. 
La défection du curé perturbe les fidèles, notamment trois bigotes prêtes à en référer à l'évêque. L'album est entrecoupé de planches muettes, six cases pour montrer le temps qui passe, les occupations du quotidien plus fortes que les bouleversements. Une quiétude revigorante dans notre monde stressant.
« Magasin général » (tome 8), Casterman, 14,95 €

mercredi 17 novembre 2010

BD - Magasin général change de propriétaire

Depuis six ans c'est devenu une très bonne habitude. Loisel et Tripp nous entraînent dans un voyage au Québec. Magasin général était un peu un ovni lors de sa première apparition. Deux dessinateurs renommés fusionnaient leurs talents pour raconter les aventures des habitants de Notre-Dame-des-Lacs, un hameau perdu dans le nord canadien. Six tomes plus tard, force est de reconnaître que « Magasin général » est une valeur sûre, un feuilleton qui rencontre un important public de plus en plus demandeur. 

Marie est toujours à Montréal, la grande ville. La propriétaire du Magasin général manque aux habitants (surtout les hommes). C'est Serge qui va tenter d'assurer la relève. Mais s'il est parfait aux fourneaux, il est moins crédible en commerçant. 

Un peu plus sombre, cet épisode est cependant tout aussi prenant, l'accent et les expressions québécoises donnant toujours un air primesautier à cette bande dessinée détruisant définitivement la réputation de Loisel d'être un dessinateur « lent et peu productif ».

"Magasin général" (tome 6), Casterman, 14,95 € 

jeudi 15 janvier 2009

BD - Confessions villageoises


La vie suit son cours au sein de la petite communauté de Notre-Dame-des-Lacs, paroisse du Québec des années 20. Marie, la belle veuve, craque toujours autant pour le beau Serge, cuisinier parisien récemment débarqué dans la Belle province. 

Ils travaillent ensemble, vivent sous le même toit et naturellement les commères s'en donnent à cœur joie se demandant pour quand sera le mariage. Mais un soir, alors que Marie a enfin le courage de faire le premier pas, Serge lui avoue son secret. Et de ce fait le mariage devient impossible ainsi que l'amour de Marie. 

La jeune femme décide alors de se confesser et de révéler le secret au curé. Serge va devoir trouver quelques alliés pour tenter d'apaiser l'incendie qui menace. 

Cette belle histoire d'envie et de tolérance est rondement menée par le duo le plus remarqué de ces dernières années : Loisel et Tripp. Le premier s'occupe du découpage et de la mise en scène alors que le second assure un encrage « enrichi ». Ajoutez les couleurs de François Lapierre et vous avec un petit bijou entre les mains...

« Magasin général » (tome 4), Casterman, 14 €