Certains personnages imaginaires survivent à leurs créateurs. Parkar, archétype du braqueur américain fait partie de la galerie. Imaginé par Donald E. Westlake au début des années 60, Parker ne devait pas vivre de nouvelles aventures après ce polar noir et sombre où il terminait en prison. Mais l'éditeur américain, visionnaire, a demandé à Westlake (qui avait signé ce titre sous le nom de Richard Stark), de trouver une astuce pour remettre le dur à cuire sur le circuit. Chose faite pour une vingtaine de romans. Parker adapté souvent au cinéma mais aussi en bande dessinée. Après quelques titres illustrés par Darwin Cooke (publiés chez Dargaud), Parker est de retour, dans une adaptation (très francophone) de Doug Headline et des dessins de Kieran.
C'est un titre de 1969 qui est proposé pour ce premier titre de la nouvelle collection de Dupuis, Aire Noire. Les romans avec Parker en vedette sont froids, sans émotion ni affect. Un gangster qui n'agit que pour l'argent. Les premières pages le montre en train de mettre la dernière main à son nouveau braquage. Une banque avec trois complices dont George Uhl, le chauffeur, qu'il ne connait et dont il se méfie. Il a raison car une fois de retour à la planque avec le magot, Uhl tue deux de ses complices, rate Parker qui prend la fuite, met le feu à la ferme perdue et se tire avec l'ensemble du pactole.
Tout l'album raconte comment Parker, avec opiniâtreté et malgré le peu d'indices, va tout faire pour retrouver capturer "La proie" qui donne son nouveau titre à l'histoire. Des kilomètres en voiture, plusieurs états, des désillusions, de vieux ennemis qui ressurgissent et un Uhl toujours aux aguets.
On admire la parfaite adaptation de Doug Headline, expert en polars plus sombres que l'âme humaine. Quant au dessin de Kieran, il est au diapason, froid, anguleux, sans effet ni couleurs inutiles. Du roman noir comme seuls les vrais amateurs savent apprécier.
"Parker - La proie", Dupuis, Aire Noire, 112 pages, 20,50 €


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« Fatale », polar de Jean-Patrick Manchette paru en 1977 est peut-être le plus sombre et nihiliste des romans de l'écrivain trop tôt disparu. Doug Headline en signe l'adaptation et Cabanes les dessins. Un récit au long cours de 130 pages avec des airs de Simenon pour la description des notables de banlieue et de roman noir américain pour le personnage d'Aimée. La jeune femme aux cheveux noirs apparaît dès les premières pages. Une partie de chasse entre amis. L'un d'entre eux s'isole. Aimée arrive, lui sourit, le tue. Dans le train de nuit qu'elle prend dans la foulée, elle change de tête. Blonde et bouclée, elle débarque à Bléville. Son bord de mer, ses industries agroalimentaires. Sous une couverture de riche veuve qui cherche une propriété tranquille, elle s'intègre à la bonne société de la cité. Industriels, médecin, notaire : elle les intrigue et devient l'amie de leurs femmes. Patiemment Aimée va tisser sa toile d'araignée pour tout connaître de leurs travers, grands et petits secrets. Alors elle pourra faire ce pour quoi elle est venue. La BD, fidèle au roman, est le portrait d'une femme dangereusement désespérée. Son passage à Bléville laissera des traces. Rouges et sanglantes...
La belle Livia est elle aussi au centre de « Perico », série écrite par Régis Hautière et dessinée par Philippe Berthet. Cette jeune Cubaine, après une enfance malheureuse, est vendue à un parrain de la drogue. Dans la première partie, elle profite de la fuite aux USA du jeune Joaquim, un employé du trafiquant, pour s'évader avec lui. Ils volent au passage une valise pleine de billets. La seconde partie du récit vient de paraître et se déroule entièrement aux USA, à la fin de ces années 50 où la corruption est partout. Le rêve américain aussi. Livia voudrait devenir actrice à Hollywood. Dans une belle décapotable, elle va traverser les States avec Joaquim en chevalier servant. Mais le rêve devient cauchemar... un trio de tueurs cubains, bénéficiant de complicités dans la police et les syndicats de routiers, va traquer les deux jeunes en cavale. Berthet, qui a désormais sa propre collection (Ligne noire), excelle dans ces décors rétros. Il revient un peu à ses premières amours, du temps du « Privé d'Hollywood » avec Bocquet et Rivière.