Quelques chroniques de livres et BD qui méritent d'être lus et les critiques cinéma des dernières nouveautés. Le tout publié dans l'Indépendant du Midi sous la signature de Michel Litout.
mercredi 15 août 2018
Cinéma - Comment faire de la poésie avec la conduite d’un chariot élévateur ?
Comment a-t-il fait ? Comment Thomas Stuber, réalisateur allemand, a-t-il réussi à faire un film aussi lumineux, beau et poétique juste en filmant des manutentionnaires dans les rayons d’un grand magasin discount ? Car « Une valse dans les allées » laisse une impression de beauté, de poésie, d’harmonie et de plénitude dé- routant au vu du sujet traité.
Christian (Franz Rogowski) vient d’être embauché dans un cette entreprise pour gérer le rayon boisson. Il sera supervisé par Bruno (Peter Kurth), un vieux de la vielle. Sans aucune expérience, Christian, quasi mutique, manipule des caisses de bouteilles et tombe en admiration devant le chariot élévateur de Bruno. Il va devoir apprendre à le conduire dans les allées, aller chercher des palettes tout au sommet du stock, être minutieux et rapide.
Le spectateur ne sait rien de la vie d’avant de Christian. Il se doute simplement qu’elle n’a pas dû être facile. Ses tatouages sur les bras et le cou, qu’il doit cacher quand il travaille car cela fait mauvaise impression sur les clients, laissent entrevoir un passé de violence. Dans les allées, comme s’il était admis dans une nouvelle famille, il veut faire bonne figure. Gentil, serviable, humble. Il ne fait pas de vague, ne veut surtout pas se faire remarquer.
Rayon confiserie
Ce n’est pas le cas de Marion (Sandra Hüller), la « madame bonbons » du magasin. Effrontée, joueuse, elle tourne autour de Christian. Il n’est pas insensible. Mais se lancer dans une relation amoureuse avec une femme mariée ne semble pas raisonnable. Sur cette intrigue minimale, le réalisateur tire une tranche de vie de l’Allemagne actuelle, besogneuse, respectueuse.
Quelques scènes marquent, comme le départ des employés le soir, quand, après avoir passé leur fiche à la pointeuse, ils serrent tous la main au chef de service. Ou la petite fête improvisée, le soir de Noël, quand le rush des clients est terminé.
Et puis il y a ces longues scènes où l’image se transforme en véritable peinture. Juste avec des empilages de victuailles et un chariot élévateur se dé- plaçant entre les allées, avec grâce et beauté. Au volant un Christian rayonnant. Tel un enfant heureux ayant toujours attendu ce moment. Comme s’il avait enfin trouvé sa place, modeste mais utile, dans une société déshumanisée.
➤ « Une Valse dans les allées », romance de Thomas Stuber (Allemagne, 2 h 05) avec Franz Rogowski, Sandra Hüller, Peter Kurth.
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