jeudi 10 février 2022

De choses et d’autres - Amazon voit trop grand

430 millions d’euros. Une broutille pour Jeff Bezos, l’homme le plus riche du monde. Ce qui coûte cette somme astronomique c’est son nouveau jouet, un yacht construit à Rotterdam. Le fondateur d’Amazon s’est fait un petit plaisir en lançant la fabrication de ce navire long de 127 mètres.

Un trois-mâts qui aurait dû sortir du chantier naval en toute discrétion. Mais un petit problème s’est transformé en grosse polémique. Le yacht est trop grand pour atteindre la mer. Ce n’est pas la longueur ni le tirant d’eau qui coincent mais la hauteur des mats. Pour sortir de Rotterdam, il n’existe qu’un passage : sous le pont dit De Hef.

Un ouvrage métallique qui s’élève pour laisser passer les bateaux. Mais comme le patron d’Amazon a vu grand, très grand, ça ne passe pas. Alors, avec ce sans gène qui caractérise les milliardaires, Jeff Bezos a demandé à la ville de Rotterdam de démonter le pont pour qu’il puisse passer avec son gros bateau. Quelques spécialistes pensent qu’il serait plus simple de démâter, mais ce n’est pas la solution retenue par Bezos.

Les habitants de Rotterdam sont évidemment vent debout contre cette solution qui, en plus de paralyser le trafic routier, serait une atteinte à un monument national reconstruit après les bombardements allemands durant la 2e guerre mondiale. Reste maintenant à savoir ce que va décider la municipalité de la ville.

Mais je sens qu’un comité d’experts indépendants comme il se doit, va prouver par A + B que le démontage est inévitable. De toute manière, ce sera à la charge du milliardaire. Et qui oserait se fâcher en ces temps où le commerce numérique est en plein essor, avec l’homme le plus riche du monde ?

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le lundi 7 février 2022

mercredi 9 février 2022

BD - Bébé star

Parlez-vous le bébé ? Quand vous entendez un « Areuh » ou un « Ouin ! », comprenez-vous la pensée profonde énoncée par cet être qui pourtant passe ses journées à dormir, manger et déféquer ? Le commun des mortels, même les parents, n’a que peu de notions de la langue des bébés.

Par contre, Didier Tronchet est parvenu à force d’observations, longues et patientes, à transcrire tout ce que les bébés ont à nous dire. Il a donc décidé de partager son savoir dans cet album de BD, entre humour et tendresse.

L’humour, il y en a partout. Comme ce bilan d’une journée de bébé : « Un verre renversé sur le journal, un pot de miel cassé au magasin, une bretelle de soutien-gorge arrachée dans la rue et un vomi sur le corsage tout neuf de maman. Bilan : j’ai bien mérité un peu de repos. Mais je ne dois pas oublier de me réveiller à 3 heures du matin. »

La tendresse on la retrouve quand l’auteur, par ailleurs papa, est tellement heureux de promener son enfant dans un porte-bébé ventral. Bébé explique pourquoi : « Il se sent enceint de moi. Avec la tête et les membres qui dépassent. Une grossesse à ciel ouvert… »

« Moi bébé, ma vie, mon œuvre », Delcourt, 12,50 €

Chronique parue le samedi 5 février en dernière page de l’Indépendant

mardi 8 février 2022

De choses et d’autres - Les enfants et la cuisine

Décidément, les candidats à la présidentielle désignés par Les Républicains ont des soucis d’image de marque côté famille. On ne revient pas sur l’affaire Pénélope Fillon, qui a sans doute coûté 5 ans à l’Élysée pour l’ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy. Cette fois, la droite classique a désigné Valérie Pécresse.

Mariée à un certain Jérôme, il n’est pas un simple mari qu’on sort. Au contraire, ce patron de grande entreprise gagne très bien sa vie. Pas besoin d’emploi fictif pour acheter maisons et (gros) portefeuilles d’actions. Pourtant, comme il est confiant dans les chances de son épouse de l’emporter en avril prochain, il anticipe déjà ce que sera sa future vie.

Pour le Point, il explique que bien évidemment, si Valérie Pécresse devient la première présidente de la République, il est prêt « à gérer les enfants et la cuisine ». Chapeau bas pourrait-on dans un premier temps le féliciter. Mais en réalité, cela ressemble plus à du cynisme qu’autre chose.

Les enfants ? La plus jeune a 18 ans, l’aîné 25. Il n’y a donc plus grand-chose à gérer de leur vie. D’autant que d’après le Canard Enchaîné, les trois enfants Pécresse ont déjà des comptes en banque très confortables, car les parents ont utilisé toutes les possibilités existantes pour leur faire des dons en numéraires et en immobilier. A 18 ans, sans avoir jamais travaillé, la cadette a un pécule plus important que ce que j’ai gagné durant toute ma vie active.

Reste la cuisine alors ? Pas certain que les chefs de l’Élysée le laissent aux fourneaux. C’est quand même leur boulot…

Bref, j’ai comme l’impression qu’après le couple Fillon, c’est le couple Pécresse qui a tendance à prendre les Français pour des idiots.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le vendredi 4 février 2022

lundi 7 février 2022

De choses et d’Autres - Je ne peux pas, j’ai télétravail

Ils ont osé ! Je viens d’entendre à la radio une publicité pour une grande enseigne de la distribution. Un de ces sketches de la vie quotidienne qui mettent en scène mari et femme. Madame annonce, enthousiaste, qu’il y a une promotion de plus de 30 % sur un produit particulier (pour vous dire la vérité, j’ai déjà oublié quoi…).

Et que donc il faut immédiatement aller en faire un stock avant qu’il ne soit trop tard. Et là, le monsieur répond, très embêté : « Mais je ne peux pas, je te rappelle que je suis en télétravail ! ». Les publicitaires ont donc osé mettre en scène les nouvelles conditions de travail de quelques millions de Français. Et de suggérer de transgresser toutes les règles quand le mari, prenant conscience de l’importance du rabais (vous aurez remarqué que, dans les publicités, les hommes impriment beaucoup plus lentement l’attrait de certaines promotions), décide finalement de faire un saut au magasin, tout en demandant à son épouse de trouver une excuse si le bureau appelle durant son absence.

Même si je trouve cette publicité un peu gonflée, je dois admettre avoir déjà vécu cette situation. Pas par rapport aux promotions, mais au fait que tout en étant en télétravail, je déserte sans scrupule mon poste durant quelques minutes, voire un peu plus, et en profite pour accomplir de rapides courses, des tâches ménagères… ou une sieste réparatrice. Mais je n’ai pas mauvaise conscience.

Car la monnaie du télétravail c’est de ne pas avoir d’heure pour débuter sa journée (personnellement, ça m’arrange car j’écris plus facilement très tôt le matin) et encore moins pour éteindre l’ordinateur le soir. Quand on pense à le faire…

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le jeudi 3 février 2022

dimanche 6 février 2022

De choses et d’autres - Du noir au bleu

Toujours pas candidat. Emmanuel Macron n’a toujours pas annoncé s’il se représentait ou pas à l’élection présidentielle. Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement, a d’ailleurs estimé, hier, que les Français « ne comprendraient pas » une annonce immédiate de candidature. Pas d’annonce certes, mais dans les faits, la campagne est lancée.

Et l’accent est mis sur le bilan. Comme cette mise en scène graphique du plus bel effet postée sur le compte Twitter officiel de l’Elysée. On voit, écrit en bleu sur un post-it jaune : « Ouverture du pass culture aux 15 - 16 - 17 ans. Fait. E. M. » À côté, sur ce qui ressemble au bureau du président de la République, quelques livres empilés. On distingue nettement un ouvrage d’Hélène Carrère d’Encausse, l’exemplaire de la pléiade des mémoires de Charles De Gaulle et… Le tome 100 du manga One Piece.

Une photo trop artistique pour être naturelle. Le choix des ouvrages est mûrement réfléchi. La présence d’un manga montrant que le président est au top des attentes de la jeunesse française. Une montre est aussi exposée. Avec un bracelet tricolore pour donner un peu de couleur officielle au cliché.

Par contre, les publicitaires ou hommes du marketing qui ont fabriqué de toutes pièces ce qui devait ressembler à une image prise sur le vif ont fait une grave erreur, dénoncée avec force moqueries dans les commentaires. L’écriture sur le post-it est en bleu, mais le feutre posé à côté est noir.

Vivement que le président soit officiellement candidat et qu’il prenne sa campagne en main car, pour l’instant, ses fils de pub lui font plus de tort que de bien.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le mercredi 2 février 2022

samedi 5 février 2022

Cinéma - « Les promesses » si politiques


Présenté en compétition au dernier Festival du film politique de Carcassonne, Les promesses de Thomas Kruithof est une véritable plongée dans le mécanisme qui fait avancer les hommes politiques. En l’occurrence une femme, Clémence (Isabelle Huppert), maire d’une cité de banlieue paroissienne. Au pouvoir depuis deux mandats, elle a publiquement annoncé un an avant la nouvelle élection qu’elle ne se représenterait pas. Sa première adjointe a été désignée par le parti pour lui succéder.


Dans les dernières semaines de son mandat d’élue locale, elle se démène pour obtenir une grosse subvention de l’État qui permettra de rénover la cité des Bernardins. Les copropriétaires n’en peuvent plus de l’insalubrité malgré les charges importantes. De plus tout l’ensemble se délabre à cause des marchands de sommeil. En négociant avec un haut fonctionnaire, Clémence va recevoir une proposition de ce dernier qui va radicalement changer la donne. Les Bernardins ont peu de chance d’être rénovés et Clémence va radicalement changer sa façon de voir son avenir. Un revirement qui va totalement désarçonner Yazid (Reda Kateb), son directeur de cabinet, brillant, originaire des Bernardins et qui espère après l’élection un poste dans un ministère à Paris.

Envie de pouvoir

Le scénario permet de surfer sur plusieurs intrigues. La première, la plus importante, l’avenir de la cité. Mais on découvre aussi en filigrane les ambitions de Yazid, ses difficultés à gérer au quotidien son origine modeste dans un monde où même très efficaces, on reste avant tout issu d’une minorité. Le plus passionnant est l’analyse des décisions de Clémence, femme politique dont la complexité est remarquablement interprétée par Isabelle Huppert. Si elle semble bien décidée au début à abandonner le pouvoir, comme lassée de cette course incessante aux subventions d’un côté et aux poignées de mains de l’autre, elle se retrouve à douter quand elle s’imagine un destin national.

Alors, lentement mais sûrement, elle revient sur sa promesse de quitter son mandat. Une promesse non tenue de plus dans un monde politique où l’ivresse du pouvoir semble une drogue dure. Pourtant, le film reste assez positif. Car malgré les manœuvres de certains, les rancœurs d’autres et les abandons des derniers, il reste des hommes et femmes qui pensent que la politique reste sacrée et essentielle. Malgré les scandales, les reniements et les fameuses promesses non tenues.

Un film qui devrait particulièrement intéresser les élus locaux et tous les responsables d’associations.

Film français de Thomas Kruithof avec Isabelle Huppert, Reda Kateb


vendredi 4 février 2022

De choses et d’autres - Lapsus et fautes de Taubira

Il est des lapsus qui en disent plus que n’importe quel discours. Dimanche soir, en s’adressant à ses sympathisants après le résultat de la primaire populaire, Christiane Taubira a fait cette déclaration lunaire : « Merci d’être dès demain la cheville ouvrière d’une possible victoire en avril 2002. »

2002 ! Comme si l’ancienne garde des Sceaux voulait rejouer la présidentielle qui a vu l’élimination de Lionel Jospin à cause de la division de la gauche. Elle y croit sans doute à sa victoire. Persuadée qu’elle aura moins d’adversaires devant elle : Chirac mort, Le Pen, Jospin et Chevènement trop vieux… Elle s’est reprise dans la foulée, mais ce lapsus, même s’il n’a duré que quelques secondes, est révélateur de cette gauche qui vit dans le passé.

La même Taubira qui ne marque pas des points quand elle revendique une « laïcité qui n’écrase pas ». Désolé, mais jusqu’ici, ce sont plutôt les religions, toutes les religions, qui ont écrasé tous ceux qui ne voulaient pas croire en leur Dieu.

De toute manière, cette primaire populaire a tout de la mascarade démocratique. Pas de résultats chiffrés au final, juste une sorte de tableau d’honneur très scolaire avec des appréciations qui font un peu Bisounours. La candidate originaire de la Guyane récolte un « Bien », Yannick Jadot, en seconde position, un « Assez bien ».

Pourtant, à lire les énormes fautes d’orthographe relevées dans plusieurs messages pondus par les équipes de Christiane Taubira, c’est un « Nul » éliminatoire qui aurait dû être décerné à cette experte en division de la gauche.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le mardi 1er février 2022

jeudi 3 février 2022

De choses et d’autres - Un revers pour la Russie

Rien ne va plus pour la Russie. Avant même de lancer sa formidable armada massée à la frontière, elle vient de subir une défaite cuisante. Poutine doit enrager au Kremlin. Pourtant tout avait bien commencé et les premières manœuvres donnaient largement l’avantage au canonnier russe.

Mais les forces de l’Otan avaient décidé de mettre en valeur une petite unité d’un pays satellite, pourtant très loin de la ligne de front. Vaillamment, sans jamais rechigner aux kilomètres parcourus et confiant dans sa bonne étoile (celle de Noël), le tirailleur espagnol a lâché quelques rafales totalement incroyables.

Le combat fut long, mais au final, l’ours russe a craqué face aux ruades du taureau ibérique. L’Ukraine n’est pas encore sauvée, mais la victoire de Nadal face à Medvedev ce dimanche en Australie apporte un peu d’espoir. À moins que, vexé comme un pou, Poutine décide sur le champ de lancer ses milliers de soldats à l’assaut du pays qui fait de la résistance.

Et pourquoi ne pas envahir aussi l’Espagne ? En espérant qu’il ne décide pas de débarquer entre Port-La Nouvelle et Le Barcarès pour lancer ses chars vers le sud par la route inverse d’Hannibal. A priori on ne risque pas grand-chose. L’Otan nous protège. Enfin si l’on en fait bien partie…

Un récent sondage nous apprend que seulement 66 % des Français le savent avec certitude. C’est mieux que les Américains qui ne sont que 65 %. Quant aux 11 % de Russes qui croient en faire partie, je serais eux, je me méfierais. Cela frise la trahison et pourrait les conduire directement dans les camps sibériens en compagnie de Navalny, officiellement estampillé la semaine dernière comme « terroriste ».

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le lundi 31 janvier 2022

mercredi 2 février 2022

De choses et d’autres - Défis pour les traducteurs

La semaine dernière, Joe Biden, en pleine conférence de presse, croyant que son micro était coupé, a lâché une appréciation peu reluisante à l’encontre d’un journaliste de Fox News. Une belle grosse insulte, de celles qui sont bipées dans les programmes de téléréalité. Certains s’offusquent, d’autres rigolent… Et puis, il y a les journalistes de l’Agence France Presse basés à Washington qui se posent des questions.

Dans un tweet, Sébastien Blanc, responsable du bureau américain de l’agence de presse française, résume le problème : « Gros débat au bureau de l’AFP, à Washington, sur comment traduire au mieux le dérapage de Joe Biden, qui a lancé à un journaliste de Fox News : « Stupid son of a bitch ». « Espèce d’enfoiré » ?, «Fils de pute » ?, «Gros connard » ?

Décision finale : « Espèce de connard » ! Voilà donc comment le mot « connard » s’est invité dans la diplomatie mondiale.

Mais ce n’était pas une première, car le dilemme inverse s’était présenté quelques jours auparavant. Cette fois c’était les journalistes anglo-saxons qui se sont arrachés les cheveux quand Emmanuel Macron a expliqué à des lecteurs du Parisien qu’il avait envie « d’emmerder les antivax ». Certains ont choisi la version light avec les verbes « to bug », plus proche d’embêter. D’autres ont bien compris l’intérêt du trash et le président français se retrouvait à scander du « piss off » à tire-larigot.

Bref, en « emmerdant les sons of a bitch », les plus hautes sphères parlent parfois aussi mal que dans les cours de récréation.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le samedi 29 janvier 2022

mardi 1 février 2022

De choses et d’autres - Test technique

Pour fabriquer ce quotidien, nous utilisons, journalistes et techniciens, un logiciel particulier. Mardi, nous sommes passés à la nouvelle version, la 7. Un transfert totalement transparent pour vous, lecteurs de l’Indépendant. Pourtant, il y a toujours des risques quand on mélange technique, test et mise en production.

Pour apprendre à maîtriser les nouvelles fonctionnalités offertes par la nouvelle version, on travaille dans des pages test. Et ces formations, parfois, ressemblent à des occasions inespérées de se décharger de toute la pression quotidienne. C’est la foire au mot d’esprit ou transgression qui, a priori, ne franchira jamais ces quatre murs.

Sauf quand on fait une fausse manœuvre. Je me souviens de cette grosse gaffe à Tahiti, un laborantin aigri, croyant que les clichés avaient déjà été utilisés, a gravé au cutter des insultes sur le visage du PDG apparaissant dans une soirée organisée par le journal. Photos qui ont été publiées avec les mots orduriers...

On ne compte plus les fois où un texte en latin a été imprimé. C’est en fait du texte de « remplissage » servant à en mesurer la longueur.

Des dérapages qui n’arrivent pas que dans les journaux. En début de semaine, tous les utilisateurs d’Air France (soit quelques millions de personnes) ont reçu un SMS assez abscons : « Test de Julien à nouveau. » Rien à voir avec les PCR qui nous bouffent la vie. Simplement un technicien travaillant sur l’appli de la compagnie aérienne a fait un test d’envoi de message. Mais au lieu de rester dans sa configuration de travail, il est passé en production et l’a envoyé à tous les clients.

C’est bon Julien, ça fonctionne !

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le vendredi 28 janvier 2022