Après 12 années de prison, un tueur d'enfant retrouve la liberté et tous ses démons. « Le Magicien », un thriller français de Jean-Marc Souvira.
Deux hommes face à face. Deux personnages principaux dont les points de vue alternent tout au long de ce roman policier de Jean-Marc Souvira. Premier à entrer en scène, Arnaud Lécuyer. Il vient de purger 12 années de prison pour le viol et le meurtre d'une vieille dame. De l'autre le commissaire Ludovic Mistral, flic d'élite récemment nommé à la brigade criminelle de la police judiciaire de Paris, le fameux 36, quai des Orfèvres. Arnaud Lécuyer sous ses airs de petit homme tranquille, maigrichon, timide et effacé, cache un redoutable prédateur. Durant les 12 années de prison, il a tué, en toute discrétion, trois co-détenus qui avaient abusé de lui à son arrivée.
Mais Arnaud Lécuyer, « tombé » pour le viol d'une personne âgée, est surtout attiré par les petits garçons. Il en a six dans sa « collection », six gamins de 9 à 11 ans qu'il a entraînés dans une cave d'immeuble, étranglés puis violés. Un tueur en série qui a terrorisé la capitale il y a 13 ans. Il était surnommé le Magicien car pour obtenir la confiance des jeunes garçons, il leur faisait des tours de cartes. Les enfants, fascinés, suivaient ce prestidigitateur qui acceptait de révéler ses secrets, mais à l'abri des regards et oreilles indiscrètes.
Un policier presque parfait
Arnaud Lécuyer sort donc de prison et malgré un emploi d'insertion chez un plombier, des convocations chez le juge d'application des peines et des séances obligatoires chez un psychiatre, retombe dans tous ses travers, ses perversions. Au volant de sa camionnette de service, il ne peut s'empêcher de se mettre en « chasse ». Il repère un gamin qui s'ennuie et tente de recommencer, comme avant. Il est dérangé par un clochard qui y perd la vie. Mais l'enfant survit et raconte aux policiers comment il a été abordé par ce « Magicien ».
Un Magicien de sinistre mémoire qui refait surface, provoquant un branle-bas de combat dans le service du commissaire Mistral. Ce policier est l'antithèse du flic communément véhiculé dans les polars : marié, deux enfants, aimant le jazz, formé aux USA, « le fait de parler avec son épouse, de la resituer dans leur environnement familial avec leurs deux enfants, apaise Mistral qui a besoin de ces contacts familiaux pour affronter son travail. Ce n'est pas le genre de flic solitaire qui fume deux paquets de clopes, boit une bouteille de whisky par jour et qui a u mal à rentrer chez lui en se demandant de quoi demain sera fait. » Un policier presque parfait qui, en plus de cette délicate enquête, doit faire face à l'ambition d'un collègue frustré.
« Prédateur » en « chasse »
Cela donne un contraste très fort entre cet homme équilibré, aimant, épanoui et croyant fermement à sa mission de justice et le tueur, névrosé, avide de sexe et de sang, comme pour mieux entretenir le souvenir des violences sexuelles imposées par son père. Récupérant sa liberté, son premier échec ne le refroidit pas : « Le prédateur cherche une place de stationnement à proximité du Trocadéro. Il y a toujours beaucoup de monde dans ce lieu touristique. Lécuyer se dit qu'un môme qui s'égare, même un touriste, ferait l'affaire ».
Jean-Marc Souvira ne raconte, dans ce premier roman très documenté, que le quotidien de nombre de ses collègues car il est lui-même policier à Paris. Le lecteur, entre les explications savantes des rouages d'une enquête, sera surtout marqué par les pensées abominablement macabres de Lécuyer, la figure centrale, et très réussie, de ce thriller plaisant bien que parfois à la limite du morbide.
« Le Magicien », Jean-Marc Souvira, Fleuve Noir, 20 € (disponible en poche chez Pocket)
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