Dans « La partie espagnole », Charles Cummings raconte le réveil d'un espion en sommeil, plongé au cœur d'une « sale guerre ».
Amateurs de romans à l'eau de rose, passez votre chemin. Le monde, bien réel, décrit par Charles Cummings dans ce roman d'espionnage d'un nouveau genre, est d'un machiavélisme absolu. Manipulations, double jeu, vengeance, scandales étouffés pour protéger de hauts dignitaires, meurtres et tortures sont au menu de ces 480 pages denses et haletantes. Alec Milius est au centre de ce récit. Il raconte, à la première personne, sa vie d'espion mis au placard. Ce Britannique, après une opération peu satisfaisante, a du quitter le service actif et, sous une nouvelle identité, vivre dans l'anonymat le plus complet. En Italie, puis en Espagne, à Madrid. Il travaille dans une banque d'affaires anglaise. Seul dans son grand appartement. Il a quand même une maîtresse, Sonia, la femme de son patron, Julian Church. Une vie calme, beaucoup trop calme. Pourtant, même s'il regrette le temps où il était en activité, il préfère rester dans l'ombre.Paranoïa à l'état pur
Quand Saul, un ami d'enfance, vient lui rendre visite (il vient de rompre avec sa femme et pense que quelques jours à Madrid vont lui changer les idées), ce dernier ne peut que faire remarquer combien Alec est devenu paranoïaque. Pour l'ancien espion, ce n'est que de la prudence. Et de lui expliquer : « J'ai cinq comptes bancaires. Quand j'appelle l'une de mes banques et qu'ils me mettent en attente, je crois que c'est à cause d'une mention en regard de mon nom, et qu'ils vérifient je ne sais quoi. Toutes les trois semaines, je dois changer de numéro de téléphone. Si quelqu'un à côté de moi dans le métro écoute de la musique avec un baladeur, je m'assure que ce quelqu'un ne porte pas de micro caché... »
Mais Alec doit travailler pour assurer sa couverture. Il est envoyé par son patron au Pays Basque. Des investisseurs voudraient avoir quelques assurances sur la stabilité de la région avant d'y injecter plusieurs millions d'euros. Alec rencontre des syndicalistes, des entrepreneurs, quelques politiques et au final un ancien responsable de Batasuna, le parti politique défendant ETA, la branche armée des indépendantistes basques.
Une « guerre sale »
« Mikel Arenaza, politicien et ami de la terreur, est un homme plein d'entrain et engageant (...). Il me repère dans la foule à l'instant même où il franchit la porte, un mètre quatre-vingts au moins d'une allure massive, arborant un sourire plein de charme sous une explosion de cheveux noirs en bataille. » Ils vont longuement discuter dans les bars de San Sebastian. Pour finalement sympathiser. Arenaza se confiera à cet étonnant banquier anglais, curieux et entreprenant, affirmant avoir du sang irlandais. Alec, sans le savoir, vient de reprendre du service. Quelques jours plus tard, l'homme politique basque se rend à Madrid. Il va passer quelques heures avec sa maîtresse mais également retrouver Alec. Depuis la gare il lui donne rendez-vous dans un bar. Il ne s'y rendra jamais. Arenaza vient d'être enlevé et sera retrouvé assassiné quelques temps plus tard. Alec Milius, se retrouve au centre d'une « guerre sale » entre les indépendantistes basques et une fraction radicale des autorité espagnoles.
Charles Cummings, l'auteur, a vécu à Madrid. Il a également été contacté par les services secrets anglais. Il parle donc d'un milieu et d'un pays qu'il connaît parfaitement. Son roman fait froid dans le dos et semble expliquer, en filigrane, que ce pays, malgré une indéniable démocratisation, a gardé en son sein des hommes et femmes prêts à tout pour servir leur cause.
« La partie espagnole », Charles Cummings, Editions du Masque, 22 €
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