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mardi 27 août 2024

Rentrée littéraire - Trois génies se rencontrent à Londres en 1938


Le 19 juillet 1938, à Londres, Stefan Zweig, écrivain autrichien en exil, a organisé la rencontre entre Sigmund Freud et Salvador Dalí. Durant quelques heures, trois génies du XXe siècle ont discouru sur le devenir du monde, des arts ou de la politique.

C’est Clémence Boulouque qui a imaginé ce conclave de grands esprits si dissemblables. Freud est lui aussi en exil. Chassé de son pays par les nazis. Dalí, qui est accompagné de Gala, semble vénérer l’inventeur de la psychanalyse. Même si le peintre catalan, fidèle à son credo, est incapable d’apprécier autre chose que sa propre personne. La romancière joue parfaitement de l’incongruité du conclave.

Freud, vieillissant, malade, semble s’amuser des saillies de ce fou. Ce dernier, avant même de pénétrer dans le salon de Freud, a une révélation : « Voilà ma prophétie : le cerveau de Freud a la forme d’un escargot. Une sorte de spirale que l’on pourrait extraire avec une fourchette. » Escargots contre anguilles, c’est un des passages, succulents, de ce texte.

Reste les considérations de Zweig sur la situation de l’Europe, la persécution des Juifs, la montée du fascisme. Des passages graves, très éloignés des excentricités de Dalí, comme pour rappeler que rares sont ceux qui arrivent à deviner les catastrophes avant qu’elles ne soient inéluctables. Il suffit de savoir lire le langage des ombres.
« Le sentiment des crépuscules », Clémence Boulouque, Robert Laffont, 176 pages, 19 €

mercredi 16 avril 2014

Cinéma - Patrice Leconte fait une rechute de romantisme avec "Une promesse"

Si les histoires d'amour finissent toujours mal, encore faut-il qu'elles commencent. Dans Une promesse, film de Patrice Leconte, une femme et un homme n'osent pas se livrer.


« Quand j’ai lu le livre de Stefan Zweig sur les conseils de mon scénariste Jérôme Tonnerre, j’ai eu le sentiment de revenir à la maison, explique Patrice Leconte. J’avais sans doute un peu abandonné ce qui me plaît le plus au cinéma qui est de raconter les émotions, d’être en rythme avec les battements de cœur, de raconter des histoires d’amour. » Réaliser une comédie romantique en costumes, pas toujours très gaie, il faut oser en 2014. Mais pour Patrice Leconte, après s’être « un peu perdu » comme il le reconnaît bien volontiers, monter ce film c’était un peu comme retrouver les frissons de son premier long-métrage et surtout « de redécouvrir ce que j’aimais réellement faire. »

On retrouve donc un Leconte au cadrage soigneux et aux ambiances feutrées, celui de Monsieur Hire ou de la Veuve de Saint-Pierre. Un metteur en scène au plus près de ses acteurs, quasi fusionnel quand il s’agit de filmer les effleurements entre Richard Madden et Rebecca Hall.

Ménage à trois
L’action du film débute en 1912 en Allemagne. Une entreprise de fonderie dirigée par la main de fer de Karl Hoffmeister (Alan Rickman) embauche un jeune et brillant ingénieur, Friederich Zeitz (Richard Madden). Il gravit rapidement tous les échelons jusqu’à se retrouver secrétaire particulier du grand boss. Le patron, malade, ne peut plus venir à l’usine. Il demande donc à Friederich de servir de lien entre lui et l’entreprise. Chaque jour, le jeune homme se rend dans la belle demeure pour faire le point. C’est comme cela qu’il croise la jeune épouse de Karl, Lotte (Rebecca Hall). Tout est en place pour un ballet amoureux dangereux, encore plus risqué quand Friederich s’installe dans la maison pour être au plus près du jeune Otto, fils du couple dont il devient le précepteur.
Patrice Leconte filme avec une grâce et une sensualité l’attirance inexorable entre la mère et le jeune employé. Cela va de l’effleurement des mains sur les rampes d’escalier aux longues séquences sur la nuque de Rebecca Hall, d’une beauté époustouflante. Mais ils ne franchissent pas le pas. Elle veut rester fidèle.
Le mari, de plus en plus malade, n’est pas dupe. Il parvient à éloigner le prétendant en lui confiant une mission au Mexique. Les deux tourtereaux se feront la promesse de se donner l’un à l’autre au retour de cet exil forcé. Ils correspondent fiévreusement jusqu’à l’éclatement de la première guerre mondiale.
D’un romantisme exacerbé, ce film tourné en anglais, d’un grand classicisme, semble un peu décalé pour notre époque. Cet amour courtois datant d’un siècle semble daté. Mais c’est pourtant toute la beauté et le mystère de la naissance d’une relation amoureuse. « Une promesse » a le mérite de nous le rappeler à nous qui vivons en ces temps d’amourettes jetables.
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L'Europe à l'écran

Le film de Patrice Leconte est l'exemple de ce qui peut se faire de mieux en matière de coopération européenne. Le réalisateur français, adapte une nouvelle de l'Allemand Stefan Zweig. Le tournage se déroule en Belgique avec des acteurs anglais. C'est d'ailleurs dans la langue de Shakespeare que le film est diffusé en version originale. La décision de tourner en anglais s'est rapidement imposée à Patrice Leconte.
Son casting permet de redécouvrir Rebecca Hall, une actrice anglaise qui a illuminé l'écran de « Vicky Cristina Barcelona » de Woody Allen, en concurrence avec Scarlett Johansson. Patrice Leconte a filmé sa beauté diaphane au plus près. Il excelle pour mettre en valeur les femmes sur la pellicule. C'était déjà le cas avec Anna Galiena dans « Le mari de la coiffeuse ». Rebecca Hall a aussi tourné dans de grosses productions américaines comme « Iron Man 3 » et « Transcendance », film de science-fiction avec Johnny Deep en juin sur les écrans. Richard Madden, dans le rôle du jeune ingénieur, montre qu'il y a une vie après Game of Thrones. Interprète de Robb Stark, il a coupé barbe et laissé tomber la pelisse pour son premier grand rôle au cinéma. Il a un bel avenir en « beau gosse » puisqu'on le retrouvera en Prince Charmant dans « Cendrillon » de Kenneth Branagh annoncé début 2015.