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samedi 7 octobre 2023

Cinéma - “Le règne animal”, signe de la fin des Humains ?

Plus qu’une parabole sur l’évolution, « Le règne animal » de Thomas Cailley est un film sur la tolérance, la famille, la perte des êtres aimés et surtout une certaine forme de résilience.


Ils sont trop rares les films de science-fiction à la française. Souvent ratés aussi, il faut le reconnaître. Le règne animal fait figure de belle exception. On trouve dans ce long-métrage visionnaire de Thomas Cailley une qualité cinématographique associée à une profondeur de réflexion qui fait trop souvent défaut aux grosses productions américaines.

On ressort de la salle forcément plein de questions, mais aussi bouleversé par le destin de ce mari et père constatant que sa vie ne sera plus jamais comme avant. Il va cependant tenter de l’accepter, les larmes plein les yeux, le cœur brisé, un peu comme le spectateur qui ne peut rester indifférent à cette histoire.

Tout commence dans une voiture bloquée dans un embouteillage. François (Romain Duris) se dispute avec son fils Émile (Paul Kircher). Ils seront en retard pour le rendez-vous avec le médecin qui s’occupe de Lana, la femme de François et mère d’Émile.

Tout à coup, les portes d’une ambulance explosent. En sort un homme aux bras recouverts de plumes. Première apparition d’une « bestiole », ces humains qui, dans ce monde futuriste, se transforment en hybrides animaux. C’est aussi le cas de Lana, devenue agressive. Elle est transférée dans un centre dans les Landes, près d’une forêt, loin de la population parisienne. C’est dans ce cadre que le film prend toute son ampleur. Dans ces paysages sauvages, Lana va s’échapper, trouver refuge avec d’autres monstres dans les sous-bois. François va tenter de la retrouver, malgré le danger. Émile aussi pénétrera dans les bois inquiétants. Mais pour une autre raison : il vient de débuter son processus de transformation.

Thomas Cailley a intelligemment entremêlé les deux lignes de développement du film : les recherches du mari, la transformation du fils. Quand l’un conserve l’espoir de retrouver son épouse, de la voir redevenir normale grâce aux progrès de la science, le second constate, rageur, qu’il est en train de perdre sa part humaine au profit d’un instinct animal.

La panique des premiers instants se transforme en excitation en découvrant ses nouvelles sensations en compagnie de l’homme-oiseau, interprété par un Tom Mercier (La bête dans la jungle), méconnaissable. Face à la violence des humains, essentiellement motivée par la peur de l’inconnu, on voit toute la force des « bêtes », solidaires, ne cherchant qu’à se défendre.

Un film sur la peur et le rejet de ceux qui ne nous ressemblent pas ? Le règne animal a une dimension politique indéniable, preuve que la science-fiction, depuis toujours, est un genre très pratique pour faire passer certains messages subliminaux.

Film de science-fiction de Thomas Cailley avec Romain Duris, Paul Kircher, Adèle Exarchopoulos, Tom Mercier.

lundi 28 août 2023

Cinéma - “La bête dans la jungle”, un film hypnotique

Un couple se retrouve dans une boîte de nuit tous les samedis soirs. La vie s’écoule, ils observent et espèrent durant de longues années.


Sous des aspects parfois expérimentaux, le film La bête dans la jungle de Patric Chiha reste le prototype de l’histoire d’amour triste. Elle, May, le remarque alors qu’elle n’a que 15 ans. Lui, John, est seul dans les gradins d’une fête locale estivale dans les Landes. Ils ont 15 ans. Elle voudrait danser. Pas lui. Il va lui confier un secret. Et ne plus se voir de l’été.

Des années plus tard, May est devenue une jeune femme aimant faire la fête en compagnie de sa petite bande d’amis. Nous sommes en 1979, les tenues sont extravagantes et le groupe va participer à l’inauguration d’une nouvelle boîte de nuit parisienne. Encore faut-il passer l’obstacle de la physionomiste (Béatrice Dalle dans un rôle de narratrice tragique). May, son sourire, son effronterie, sa joie de vivre, font céder toutes les difficultés. Le film débute véritablement quand elle entre dans cette vaste fosse peuplée de toutes les minorités sexuelles de l’époque, transpirant sur du disco, fumant, se droguant, dansant et plus si affinités. C’est là qu’elle le remarque. Il est comme absent, déconnecté de la folie ambiante. Elle va s’approcher de lui, lui rappeler ce secret qu’il lui a confié et le retrouver tous les samedis durant de longues années.

Entre amour platonique ou amitié fusionnelle, la relation entre May et John va évoluer. Il lui demandera de lui faire confiance. Il sait qu’un jour, son secret deviendra réalité. Le film, tout en suivant cette relation unique et parfois un peu hypnotique tant elle est pleine et fusionnelle, raconte aussi la France de la fin du XXe siècle. Espoir de l’élection de Mitterrand, angoisse face aux ravages du sida, gentrification de la capitale…

Deux rôles aux antipodes

Avec de longs morceaux musicaux pour illustrer ce temps qui passe mais n’a pas de prise sur May et John, comme s’ils étaient encore et toujours adolescents dans ce bal landais. Si May danse beaucoup, John, jamais, ne mettra les pieds sur la piste. Leur relation si particulière, incompréhensible par certains de leurs amis, ne les empêche pas d’avoir des amants ou maîtresses, de vivre presque normalement le reste de la semaine. Un film étrange (comme son titre), unique, magnifié par deux comédiens aux antipodes (Tom Mercier taciturne et mystérieux, Anaïs Demoustier joyeuse et extravertie) et véritable master class pour les cinéastes désireux de filmer des foules en train de danser.

Film de Patric Chiha avec Anaïs Demoustier, Tom Mercier, Béatrice Dalle