lundi 23 janvier 2023

Cinéma - “Nos soleils” brillent en Catalogne

Tourné en Catalogne dans la région d’Alcarràs, avec des comédiens amateurs, souvent eux-même paysans, Nos soleils, film  de Carla Simón est reparti de la dernière Berlinade avec l’Ours d’or. Une consécration internationale méritée  pour cette jeune cinéaste catalane à la tête d’une œuvre (même si ce n’est que son second long-métrage) marquée par un réalisme et un ancrage dans le présent. Nos soleils (Alcarràs pour son titre original) a des airs de documentaire. Pourtant c’est bien une fiction, avec scénario et comédiens. Mais pour avoir ce côté vérité vraie, la réalisatrice a planté ses caméras sur une véritable exploitation fruitière d’Alcarràs et a confié les différents rôles des membres de la famille Solé a des non professionnels, souvent paysans et donc au fait du travail de cette terre nourricière. 

En plein été, sous une chaleur écrasante, la petite équipe composée de quelques ouvriers immigrés et de la famille ramasse des pêches dans les vergers entourant la maison. Un travail dur, Quimet (Jordi Pujol Dolcet), le père, a le dos en compote, son épouse, Dolors, (Anna Otín) tente de l’obliger à se reposer, en vain. Le fils Roger (Albert Bosch) essaie de bien faire, mais subit toujours les foudres du père. Alors pour décompresser, avec son oncle, il fait pousser quatre pieds de cannabis bien cachés dans un champ de maïs. Reste les plus petits, à peine âgés de 6 ou 7 ans, une fille et deux jumeaux, cousins, profitant de cet immense terrain de jeu que sont les vergers, la ferme et la garrigue alentour. 

Panneaux solaires

Un monde qui est sur le point de s’écrouler, de disparaitre. La faute au grand-père, celui qui a repris l’exploitation de son père après la guerre d’Espagne. Les terres ne lui appartiennent pas. A l’époque, on ne signait pas de contrat, on donnait sa parole. Or le descendant du propriétaire a décidé de récupérer les terrains. Pas pour continuer l’exploitation agricole, trop coûteuse et peu rémunératrice. Il compte couper les arbres et les remplacer par des panneaux solaires. 

Lumineux de bout en bout, ce film passe de la chronique intimiste et locale (querelle de famille, fête de village avec Correfocs, repas dominical et cargolade) à l’universel avec la disparition programmée de cette agriculture qui pourtant depuis la nuit des temps nourrit la population. Une réflexion que Carla Simón mène avec brio, sans jugement à l’emporte-pièce. Juste la volonté de témoigner et de graver sur pellicule cette vie paysanne en train de disparaitre dans une indifférence la plus totale. Dans 30 ans, Nos soleils aura la même résonance que le Farrebique de Georges Rouquier.

Film de Carla Simón avec Jordi Pujol Dolcet, Anna Otín, Xenia Roset

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