jeudi 24 avril 2014

Cinéma : 96 heures de garde à vue inversée entre Lanvin et Arestrup

Un flic, Gérard Lanvin, se retrouve en garde à vue durant 96 heures. Pour l’interroger, son pire ennemi, un truand, Niels Arestrup, récemment évadé.
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Dans la catégorie des thrillers ou films policiers il y a les « agités » (course-poursuite, fusillades...) et les « cérébraux » (personnages complexes, intrigue à tiroirs...) « 96 heures » de Frédéric Schoendoerffer joue clairement dans la seconde catégorie. Avec une réussite certaine. Il est vrai que dans le genre “duel de personnalités”, l’affrontement entre Gérard Lanvin, le flic pris au piège, et Niels Arestrup, le truand qui n’a plus rien à perdre, on atteint des sommets de tension. Au final le spectateur passe 96 minutes scotché dans son fauteuil, pris dans ce face-à-face qui fait parfois penser à certaines légendes du cinéma français, de Garde-à-vue (Ventura/Serrault) aux Granges brûlées (Delon/Signoret).

La notion de course contre le temps est omniprésente tout au long de ce film. Avec quelques symboles évidents comme cette montre qui passe de main en main ou la reproduction du tableau de Dali, les montres molles, dans la luxueuse villa utilisée comme décor de l’affrontement en huis clos.
Carré, le patron de la BRB (Brigade de répression du banditisme) tombe dans un guet-apens au petit matin. Deux hommes s’introduisent chez lui et prennent sa femme en otage. Elle aura la vie sauve s’il collabore. Son contrat est simple : il doit faire sortir Kancel de prison à la faveur d’une fausse extraction. Kancel est une vieille connaissance de Carré. Il y a trois ans, c’est lui qui l’a interpellé en plein casse. Une action d’éclat qui a permis à Carré de prendre du galon. Kancel, dans sa cellule, a mis au point cette évasion avec un seul but : savoir qui l’a balancé. Et aussi récupérer les millions qu’il est parvenu à mettre en lieu sûr avant de se faire prendre.
Menotté dans la cave
Une fois libre, le truand, interprété par un Niels Arestrup, abonné aux rôles de dur après son triomphe dans « Un prophète », va se mettre dans la peau du flic pour soutirer le renseignement du suspect. Menotté dans une cave, surveillé en permanence, aveuglé par un spot, Carré va devoir se mettre dans la peau du coupable qui ne peut pas avouer.
Véritable morceau de bravoure, l’opposition entre ces « deux grands acteurs », de l’aveu même du réalisateur, porte ce film de bout en bout. Il y a bien quelques interventions extérieures pour faire avancer l’action (Sylvie Testud en policière tenace qui cherche son patron, Laura Smet la fille de Kancel), mais elles sont juste là pour couper ces longs plans séquences entre un homme piégé et son geôlier implacable.
Quant à savoir qui a donné Kancel et où sont les millions, il faut patienter durant plus de 90 minutes pour avoir les réponses. Ou du moins, croire savoir. C’est aussi le message du film : il faut se méfier des apparences et ne jamais céder aux tentations du manichéisme.
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Gérard Lanvin, l'exigence de l'excellence

96 heures, thriller, lanvin, arestrup, testud, smet, Schoendoerffer Grande gueule assumée, Gérard Lanvin fait plus que se bonifier avec l’âge. Cet ancien du Splendid (il fait encore aujourd’hui souvent référence à Coluche) aime les rôles forts. Encore plus quand il peut y apporter sa touche personnelle. Quand il reçoit le scénario de « 96 heures » il s’imagine immédiatement dans la peau de ce flic à la vie personnelle compliquée et secrète. Le tournage dans la villa isolée en forme de bateau, s’est passé dans une ambiance très studieuse. Gérard Lanvin, lors de la présentation du film aux Rencontres cinématographiques d’Avignon a salué l’attitude de l’équipe technique. « Pour tourner ce film, il fallait que l’ambiance soir lourde, sinon cela ne marchait pas. Les techniciens l’ont parfaitement compris. Il faut que le climat soit pesant dans ce genre de film. »

Pour Niels Arestrup ces scènes d’affrontement purement intellectuel « ont nécessité une sacrée concentration. C’était même un peu oppressant. Gérard et moi ce n’est pas qu’on se parlait mais sans doute qu’on essayait de préserver quelque chose de manière inconsciente, une étrangeté de l’autre. » Le résultat est très probant. Malgré des contraintes énormes, Gérard Lanvin passant près de la moitié du film menotté à un lit métallique au fond d’une cave. Le genre de défi physique qui motive encore plus un acteur toujours aussi méticuleux dans les choix de ses rôles.



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