mardi 26 février 2008

Roman - Une famille (presque) parfaite

Toutes les difficultés de compréhension entre parents et ado se retrouvent dans les péripéties de la famille Stone dans ce roman de Jodi Picoult.


L’image même d’une famille dans l’air du temps, au-delà des conventions habituelles. C’est Daniel Stone, auteur de bandes dessinées, le père de Trixie, qui tient les rênes du foyer tandis que sa femme Laura est une brillante universitaire spécialiste de Dante, professant avec succès. Une famille heureuse, épanouie, avec des parents satisfaits dans l’ensemble de leur mode de vie et très fiers de leur fille, quatorze ans, lycéenne bien dans ses baskets. Mais justement, Trixie, jolie rousse au teint de pêche, a quatorze ans. Et quand elle ramène un petit ami, Jason, à la maison, Daniel a la désagréable impression de ne plus connaître sa fille et surtout, est lui-même étonné de la jalousie viscérale qui l’envahit. « En septembre de cette année, Trixie s’était trouvé un petit ami. Daniel, naturellement, avait eu sa part de fantasmes. Il se voyait en train de nettoyer, par le plus grands des hasards, une arme lorsque le petit ami passait prendre sa fille à la maison pour leur premier rendez-vous. Ou acheter une ceinture de chasteté sur Internet. » Et de fait, Trixie change, entraînée aussi il est vrai par sa meilleure amie depuis des années, Zéphyr Santorelli-Weinstein. Très dégourdie, celle-ci n’hésite pas à entraîner sa copine à sécher quelques cours, pour traîner et fumer en cachette.

Les affres de la jalousie

Trixie est heureuse, jusqu’au jour où, au détour d’un couloir du lycée, elle voit une super belle fille embrasser « son » Jason à pleine bouche, un Jason qui décide de rompre au bout de trois mois seulement d’avec la pauvre Trixie. Qui se donne un mal fou pour ne pas montrer le cataclysme qui la bouleverse, ce qui ne l’empêche pas de s’auto-mutiler pour, en quelque sorte, exorciser son mal-être. Lors d’une soirée trop arrosée entre copains, elle fait tout pour essayer de récupérer Jason, allant même jusqu’au strip-tease.

Mais les choses dégénèrent et Trixie, une fois rentrée chez elle après cette folle nuit, se terre dans une petit coin de la salle de bain, avant que son père la découvre toute tremblante et bouleversée. « Oh papa, balbutia-t-elle avant de fondre en larmes, (…) on m’a violée. » Hôpital, examens, l’absence de sperme fait douter médecins et policiers. Trixie, accuse son ex petit-ami Jason d’avoir fait le coup. Daniel voit rouge mais tout bascule quand on retrouve le corps de Jason assassiné. Trixie se retrouve dans le collimateur des policiers, persuadés d’avoir à faire à une vengeance. Interrogatoires sans fin, la jeune fille passe sur le gril encore et encore. Tant et si bien qu’elle décide de s’enfuir le plus loin possible, à savoir en Alaska, dans le petit village loin de tout où son père a grandi.

Ecriture enrichie de bande dessinée

Originalité de cet ouvrage, chaque chapitre est ponctué d’une sorte de mini-résumé sous forme de bande dessinée - n’oublions pas que Daniel est artiste. Des planches très noires, beaucoup plus violentes que les mots, interpellent le lecteur. Daniel, par recoupements, retrouve la trace de sa fille et file la rejoindre pour lui venir en aide, une fois découvert l’endroit où elle se terre.

Jodi Picoult dans « La couleur de la neige », nous fait profiter non seulement de son incontestable talent d’écrivain, mais aussi de l’histoire d’une relation père-fille dont la complexité s’explique en partie par l’âge de Trixie et par tous les rebondissements d’une enquête de meurtre qui finit par les poursuivre jusqu’en Alaska. Si Laura, la mère, est mise un peu à l’écart dans la première partie du roman, confrontée qu’elle est à ses propres problèmes (elle trompait Daniel avec l’un de ses étudiants), le mal-être de Trixie oblitère ceux-ci et la famille s’en trouve ressoudée.

Une très bonne étude de caractères, des personnages attachants et une intrigue intelligemment menée font de ce roman une œuvre très complète. Jodi Picoult prouve une fois encore son impeccable maîtrise de l’écriture et nous offre l’occasion de passer de très bons moments.

La couleur de la neige, Jodi Picoult, Presses de la Cité, 20,50 euros. 

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