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vendredi 25 mars 2016

Cinéma : Les mystères de Rosalie Blum

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Qui est Rosalie Blum ? Pourquoi le coiffeur Vincent Machot surveille ses faits et gestes ? Julien Rappeneau propose une comédie sensible sur ces "invisibles" aux petites vies.
Adapté d'une bande dessinée de Camille Jourdy, "Rosalie Blum" conserve son architecture en trois parties distinctes, les trois points de vue des personnages principaux. Honneur à Vincent Machot (Kyan Khojandi), coiffeur de son état dans une petite ville de province (le film a été tourné à Nevers). Il se partage entre son travail, son chat, sa fiancée partie en stage à Paris et sa mère, installée dans l'appartement au-dessus du sien. À plus de 30 ans, il s'ennuie horriblement.

Un dimanche, obligé d'assouvir un nouveau caprice de sa mère (Anémone), il part acheter du crabe en boîte. Il en trouve dans une épicerie excentrée, tenue par une femme (Noémie Lvovsky) dont le visage dit quelque chose à Vincent. Tant et si bien qu'il décide de l'espionner, pour découvrir d'où il la connaît. Maladroit, il se transforme en suiveur-voyeur, l'accompagnant à la chorale, trouvant sa maison, fouillant ses poubelles et la regardant boire plus que de raison dans un club. Jusqu'à une nuit au cours de laquelle il abandonne, terrorisé par cette Rosalie Blum très mystérieuse.
Aude, suiveuse du suiveur
Second acte, Aude (Alice Isaaz), jeune chômeuse, se présente en championne du "moins j'en fais mieux je me porte". Elle vie en colocation avec un artiste de rue (Philippe Rebbot) et traîne avec ses deux amies de toujours (Sara Giraudeau et Camille Rutherford). Le trio sera le moteur comique du film, avec une mention spéciale à Sara Giraudeau, extraordinaire de drôlerie dans le rôle de cette ado attardée qui aime se faire peur, au point de se faire pipi dessus... Aude est la nièce de Rosalie Blum, cette dernière l'embauche pour espionner à son tour cet étrange coiffeur peu discret dans ses filatures.
Le suiveur suivi, la suiveuse séduite par le suivi-suiveur : un triangle amoureux se met doucement en place, au grand bonheur de Rosalie, triste et solitaire mais qui voit d'un bon œil cet embryon de romance entre ces deux jeunes paumés. Le film bascule alors dans une grande loufoquerie, où les quiproquos se succèdent, les routes se croisent, se télescopent.
Une belle histoire, à la fin certes prévisible mais qui fait tant de bien en ces temps difficiles et trop moroses.
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Noémie Lvovsky : femme étonnante et mère émouvante

Dans le rôle de Rosalie Blum, Noémie Lvovsky signe une performance toute en nuances. Cette femme solitaire, que l'on devine blessée par la vie, n'est qu'une silhouette dans la ville. Elle ne demande rien à personne, semble vouloir se faire oublier. Dans la première partie du film, Noémie Lvovsky n'a quasiment pas de texte. Elle déambule comme absente dans cette ville de province terne. Mais il faut aussi qu'elle apporte cette lueur de mystère qui accroche le regard de Vincent et du spectateur. Sobre et exemplaire, l'actrice, plus habituée aux rôles comiques, s'impose avec brio dans un exercice délicat.
Par la suite, tout en conservant cette gravité de mère courage au parcours heurté, elle redevient petite fille en manipulant Vincent et Aude. Son sourire, son regard espiègle sont un régal. Excellente actrice, Noémie Lvovsky a pourtant débuté dans le milieu par l'écriture de scénarios, puis la réalisation de films ("Camille redouble", notamment). Elle est passée de l'autre côté de la caméra dans des petits rôles, crevant l'écran dans le rôle de Vincent Lacoste dans "Les beaux gosses" de Riad Sattouf.

vendredi 16 octobre 2015

Cinéma : Famille et pierre, des valeurs sûres

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Jean-Paul Rappeneau signe son retour avec 'Belles familles', film sur l'héritage, le mensonge et la famille. Mais surtout la seconde chance après une erreur.

Depuis le succès phénoménal de 'La famille Bélier', le cinéma français semble de plus en plus intéressé par ces histoires de liens complexes entre les géniteurs et leur descendance. Ce n'est pas nouveau, mais ce qui paraissait désuet il y a peu encore, revient à la mode pour ne pas dire tendance. Jean-Paul Rappeneau (Le Sauvage, Tout feu tout flamme), à plus de 80 ans, signe un nouveau film dans cette veine. On y parle d'héritage (une belle maison convoitée par un promoteur et des politiques), d'amour caché, d'incompréhension entre deux frères et de père trop absent.
Jolie distribution
Pour planter ce décor un tantinet compliqué, le cinéaste a élaboré un casting très hétéroclite entre vieilles gloires (André Dussolier, Nicole Garcia), nouveaux talents (Marine Vacth) et comédiens incontournables du moment (Mathieu Amalric, Gilles Lellouche, Guillaume de Tonquedec et Karin Viard). D'excellents solistes qu'il fallait parfaitement coordonner pour que l'ensemble soit enlevé et convaincant. Même si parfois on éprouve une impression de 'trop prévisible', le tout forme une comédie qui se laisse gentiment regarder. Jérôme (Mathieu Amalric), vit à Shanghai. Il a coupé tout lien avec sa famille : sa mère et son frère. A l'occasion d'un voyage d'affaires à Londres, il fait un crochet à Paris. Leur présente sa fiancée chinoise et demande si leur maison d'enfance dans une petite ville de province a été aménagée depuis la vente. Il découvre effaré que la vente est bloquée depuis des années pour une histoire de préemption embrouillée de la mairie. Il file sur place et tente de dénouer les nœuds de l'affaire. Une plongée dans le passé qui lui fera ressortir les sombres souvenirs de son père, froid et austère, mais aussi rencontrer Louise (Marine Vacth), la fille de la seconde épouse de son père. Presque sa demi-sœur.
Une maison, deux familles
Elle aussi a longtemps vécu dans cette maison désormais sous scellés dans l'attente du résultat du procès. Louise, impétueuse, révoltée, persuadée que sa mère a été spoliée au moment de l'héritage. Pas mariée, sans testament, elle a été mise à la porte comme une malpropre par la femme légitime, partie depuis longtemps de son côté. Jérôme, exilé en Asie, n'a pas été informé de toutes ces péripéties. Il a au contraire voulu ne rien avoir à faire dans ces histoires d'héritage en renonçant à sa part. Une maison, deux familles aux intérêts différents : la tension va crescendo jusqu'au dénouement avec son retournement de dernière minute un peu téléphoné. Heureusement, l'amour... Jean-Paul Rappeneau, grand cinéaste français, a pourtant peu tourné. Il a peaufiné 'Belles Familles' des années avant de débuter le tournage. Il expliquait récemment qu'il voulait signer "un film 'mélan-comique'", mélange de comédie et de ton plus grave. Une volonté aussi de parler de la province et des souvenirs d'enfance. La France qu'il décrit semble un peu datée, avec notables sirupeux (André Dussolier en maire, Jean-Marie Winling en notaire) mais aussi en pleine mutation avec Jérôme, investisseur en Chine ou Grégoire (Gilles Lellouche), le fils de prolo devenu promoteur. Et puis le film se termine un peu comme un des grands films de Claude Lelouch. Comme un sentiment de travail bien accompli, de plénitude.