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dimanche 12 mars 2023

Cinéma - “Mon crime” ou la belle revanche des femmes

Joyeuse fable féministe se déroulant dans les années 30, “Mon crime” de François Ozon, est la comédie à ne pas manquer en ce mois de mars.

Deux jeunes actrices en tête de distribution de ce film français grand public : Mon crime de François Ozon affiche la couleur. En propulsant les très talentueuses Nadia Tereszkiewicz et Rebecca Marder dans les rôles de Madeleine la comédienne et Paulette l’avocate, il prend le pari de la nouveauté, tout en jouant sur une suite de casting prestigieuse. Une démarche logique au regard de la philosophie très féministe et « girl power » de ce film pourtant librement inspiré d’une pièce de théâtre des années 30.

Madeleine et Paulette vivotent à Paris. La première, blonde vaporeuse, comédienne, n’arrive pas à décrocher le grand rôle qui la lancerait au théâtre. La seconde, brune à la langue bien pendue, avocate, ne trouve pas le moindre client qui ose faire confiance à une femme. Cela fait quelques mois qu’elles ne peuvent plus payer leur loyer. Madeleine est encore plus déprimée après qu’un producteur a tenté d’abuser d’elle en échange d’un petit rôle. Le lendemain, un policier débarque à l’appartement. Le producteur a été assassiné d’une balle dans la tête. Madeleine est la principale suspecte. Quand elle comprend que le scandale autour de cette affaire peut lui faire de la publicité, elle s’accuse du crime, persuadée que son amie Paulette parviendra à la faire acquitter.

Duo féministe 

Une comédie virevoltante, aux dialogues enlevés et personnages tous plus croquignolesques les uns que les autres. Car pour mettre en valeur les deux jeunes femmes en mal de revanche dans cette société où les mâles ont tous les droits, le réalisateur a fait appel à quelques célébrités qui ont accepté d’endosser le costume de beaux salauds. Fabrice Luchini est parfait en juge d’instruction sûr de son fait, persuadé que la découverte d’une coupable lui permettra enfin de faire décoller sa carrière. Son ami (Dany Boon), endetté auprès du producteur trucidé, sorte de copie onctueuse et dandy de Fernandel, ferait un coupable parfait. 

Le procureur (Michel Fau), lors du procès, est odieux et d’un machisme qui ferait aujourd’hui s’évanouir la moindre féministe, même encartée à En Marche. Reste le meilleur, la meilleure exactement, Isabelle Huppert, exubérante et grandiloquente dans les tenues éternellement kitsch d’une ancienne gloire du muet. Elle débarque telle une furie dans ce duo féministe qui tente le tout pour le tout afin de sauver une machination mal partie. 

Mon crime, tout en étant indirectement un hommage aux productions du siècle dernier, est un film moderne par son propos et son interprétation. Une réussite comme seul le cinéma français un peu ambitieux sait mener à bien.

Film français de François Ozon avec Nadia Tereszkiewicz, Rebecca Marder, Isabelle Huppert, Fabrice Luchini

 

vendredi 18 novembre 2022

Cinéma - “Les Amandiers” : des talents chez Chéreau

Le théâtre des Amandiers et Patrice Chéreau sont au centre de ce film qui fait la part belle aux étudiants.

Patrice Chéreau (Louis Garrel) au plus près de ses jeunes comédiens. Ad Vitam Production - Agat Films et Cie


« Pourquoi voulez-vous devenir comédien ou comédienne ? » Tous les candidats à l’admission à l’école du théâtre des Amandiers à Nanterre ont certainement longuement préparé leur réponse. Ils savaient que leurs mots comptaient pour beaucoup dans leur chance d’être repéré par Pierre Romans (Micha Lescot), le directeur et âme de l’école. Et surtout ensuite de pouvoir travailler avec la légende française du théâtre : Patrice Chéreau (Louis Garrel). 

Réalisé par Valeria Bruni Tedeschi, Les Amandiers raconte comment, au milieu des années 80, une bande de jeunes artistes talentueux vont se trouver, s’aimer et former une famille de scène. La comédienne et réalisatrice a débuté elle aussi aux Amandiers. Elle s’est librement inspirée de son histoire pour raconter l’enthousiasme de Stella (Nadia Tereszkiewicz) et le désespoir d’Étienne (Sofiane Bennacer). La première, riche fille de bourgeois, semble vouloir faire du théâtre pour s’occuper. Mais elle possède au plus profond de son être une rage, une passion, qui vont lui permettre d’émerger dans le groupe de candidats pour finalement terminer dans le groupe des 12, ceux qui auront la chance d’aller à New York suivre un stage à l’Actor’s Studio puis de travailler avec Patrice Chéreau. Étienne aussi va être de l’aventure. Lui, c’est pour impressionner sa mère qu’il fait tout pour réussir. Charmeur, triste et toujours sur la corde raide de la drogue, il irradie une force et un nihilisme incandescent. 

Une histoire d’amour (qui finit mal) en filigrane du film mais qui ne pollue pas trop l’essentiel du propos : montrer la fabrique du théâtre. Louis Garrel, dans la peau de Patrice Chéreau, apporte cette rigueur et cette exigence, marques de fabrique du metteur en scène. Au plus près de ses interprètes, Chéreau travaille comme une brute, malmenant les élèves, hurlant, menaçant sans cesse de tout arrêter. Une tension perpétuelle, sorte de carburant essentiel chez lui. Moins chez les comédiens en devenir, encore insouciants, comme moqueurs face à ces exigences trop sérieuses. 

Quand ils interprètent Tchekhov, ils n’en oublient pas que ce qu’ils font s’appelle aussi jouer. Un jeu au cours duquel ils rient, s’amusent ouvertement, parodient. Le spectateur se régale au cours de ces répétitions devenant le témoin privilégié de cette alchimie si particulière du théâtre à la mode Patrice Chéreau. 

 Film français de Valeria Bruni Tedeschi avec Nadia Tereszkiewicz, Sofiane Bennacer, Louis Garrel, Miche Lescot.