dimanche 26 janvier 2014

Livre : Dealer en panique

fitz, gay, corps, polar, masqueFitz, héros récurrent d'Olivier Gay, n'est pas recommandable. Dealer des nuits parisiennes, il attire autant les ennuis que les belles filles en quête d'un peu de rêve.

Pour cerner la personnalité de John-Fitzgerald Dumont, Fitz pour les intimes, il suffit de lire ce passage en début de roman. Après une sortie en boîte samedi soir très arrosée, une nuit torride en compagnie d'une élégante avocate rencontrée dans le cadre de son « travail » (Fitz est dealer de cocaïne), un dimanche chez ses parents (qui ignorent tout de ses activités délictueuses) accompagnée d'une amie cliente chargée de jouer le rôle de la fiancée officielle et la livraison en urgence de quelques grammes chez un député en vue, Fitz se lève vers midi. « J'avais toujours aimé le lundi. C'est ce jour-là, lorsque je pouvais rester sous la couette alors que les travailleurs de France et de Navarre se pressaient pour affronter une nouvelle semaine que je réalisais vraiment à quel point je menais une existence privilégiée. » Mais ce qui est vrai le lundi à midi, n'est pas toujours confirmé le lundi soir.

Cambrioleur ou tueur ?
Entretemps Fitz a boulotté quelques croissants, bu du café et fait une partie de jeu vidéo en ligne avec Bob (mystérieux hacker rencontré dans le cadre de ses deux précédentes enquêtes) avant d'aller se promener sur les Champs Elysées. Bob très curieux, est resté connecté. Il a la possibilité de voir et d'entendre ce qui se passe dans l'appartement de Fitz. Il assiste donc (et enregistre) l'arrivée d'un étrange cambrioleur. Ce dernier n'est pas là pour voler mais éliminer Fitz. La preuve ? Au téléphone, il demande à son interlocuteur : « Mais je fais quoi du corps ? », terrible phrase qui donne son titre au roman d'Olivier Gay. Bob prévient Fitz et lui recommande d'éviter de rentrer chez lui dans l'immédiat.
Voilà comment débute une sale semaine pour un héros qui ne comprend pas ce qui lui arrive. Il trouve refuge chez son pote Moussah, vigile survitaminé pour des sociétés de gardiennage. Il embarque dans sa cavale la belle Deborah, professeur dans un collège, celle qui accepte de jouer le rôle de Mme Fitz contre quelques grammes de cocaïne et un bon restaurant. Le trio va tenter de comprendre ce qui a déclenché cet engrenage.
Un partie d'explication se trouve en première page des journaux. Le dimanche soir, Fitz a répondu en urgence à la demande pressante de Georges Venard, 37 ans, député de gauche, très actif dans la défense du mariage pour tous (il est gay et le revendique) mais également un peu accro à la poudre blanche. Quand Fitz s'est rendu chez lui, il a trouvé porte close. Dans l'immeuble il a croisé un homme, soupçonneux. Quand il apprend que Venard s'est suicidé chez lui, Fitz subodore une histoire plus compliquée, voire un meurtre déguisé. Mais comment se défendre quand on ne sait pas qui est son ennemi ?
Jeune auteur lancé dans le grand bain de l'édition après avoir remporté le prix du premier roman au festival de Beaune, Olivier Gay prouve qu'il tient la distance. Son coup d'essai, déjà transformé, se transforme en œuvre avec ce troisième polar. Fitz y acquiert un peu plus de profondeur psychologique. Un dealer par nécessité, pas toujours à l'aise dans ses baskets dans ses activités illégales. Il a tout du joueur de poker quand il lance une grosse opération de bluff pour se tirer des griffes de ceux qui veulent l'éliminer. Il y démontre aussi toute sa science de la stratégie qui en ferait un excellent joueur d'échecs.
Et comme Olivier Gay a de la suite dans les idées, il place en début et fin de roman, deux courtes séquences indépendantes chargées d'appâter le lecteur. En fait, les ennuis de Fitz ne font que commencer...

« Mais je fais quoi du corps ? », Olivier Gay, Le Masque, 16 €


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