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vendredi 15 septembre 2023

Littérature - Dans la famille d’Alexandre Jardin, découvrez les « Frères » de l'écrivain

Après son père, et son grand-père, Alexandre Jardin entreprend de raconter la vie folle et éphémère d’Emmanuel, son demi-frère aîné tragiquement disparu il y a trente ans.


« Ce livre est mon secret, l’obscur le plus obscur de ma vie » confesse Alexandre Jardin en parlant de Frères, nouveau chapitre de la vaste et affolante saga de la famille Jardin. Un petit texte écrit dans les Corbières, région que l’auteur de Fanfan affectionne particulièrement, loin des terres du clan familial, en Suisse ou à Paris, là où Alexandre va se souvenir de la vie météorite de son demi-frère, Emmanuel.

S’ils n’ont pas la même mère, Alexandre et Emmanuel ont en commun ce père excessif dans tout, grand scénariste de cinéma, à la vie nocturne dissolue en compagnie des plus grandes stars françaises de l’époque. Même père et même choc à la mort du Zubial, emporté par un cancer, laissant les deux frères désemparés. Ils vont pourtant réagir de façon diamétralement opposée.

Prendre la place du père

Quand Alexandre, envoyé en Irlande, tente de se suicider dans les rouleaux de la mer glacée, Emmanuel décide de se substituer à ce père parti trop tôt. À peine un mois après les obsèques, il a pris sa place… dans son lit. Juste 18 ans et amant de la dernière compagne en date, qui elle en a 35. Alexandre est horrifié. Mais Emmanuel jubile. « La puissance avec laquelle il assume l’intégralité de sa vie barjo et sensuelle me laisse sans voix. Le danger maximal ? Pourquoi pas ! Emmanuel refuse d’être normalisé, ça ne l’intéresse pas le moins du monde. Il ne souhaite pas bander sans risque. L’animal désire le maximum de tout. Ici et maintenant. Tricher à l’infini, se servir à pleine louche de cette drogue insurpassable. Et avec cette femme de dix-sept ans son aînée, il bande dur comme vingt biceps. » Voilà à quoi ressemblait ce frère incroyable.

Un artiste qui rêvait de cinéma, écrivait des poésies. Mais dans les faits, c’est le timide, romantique et très réservé Alexandre qui aura du succès, assurant la suite de la saga publique des Jardin.

Opposition entre deux caractères, deux parcours, Alexandre à qui tout réussi, Emmanuel malmené, notamment par sa mère d’une incroyable méchanceté. C’est sans doute dans ces critiques incessantes qu’il a trouvé la force de résister et l’envie de se détruire : « A force de se faire agrafer à domicile, pour ne pas dire lapider, Emmanuel a conçu des qualités de survie, des réflexes d’évasion et comme une difficulté persistante à s’acclimater au monde réel. » Emmanuel, de plus en plus fragile psychologiquement, va sombrer. Il fera quelques tentatives de suicide jusqu’à ce 11 octobre 1993, date clé régulièrement évoquée dans Frères.

Quand il se tire une balle dans la bouche, Alexandre est à Nouméa, comme s’il voulait mettre le maximum de distance entre lui et ce drame inéluctable. Ce n’est que 30 ans plus tard que le romancier décide de parler librement de ce frère. Car le deuil est long et que dans ces lignes, il ose aussi révéler ce secret ultime qui liera pour toujours les deux frères.

« Frères » d’Alexandre Jardin, 168 pages, Albin Michel, 19,90 €

jeudi 12 juillet 2007

Roman - Alexandre Jardin, dernier d'une étrange famille

Son image de «gentil écrivain » lui collant de plus en plus à la peau, Alexandre Jardin décide dans ce « Roman des Jardin », de faire toute la lumière sur les frasques de sa famille, vivier d'iconoclastes absolus.

Il y a le père bien évidemment, Pascal Jardin, scénariste et écrivain, libertin et homme à femmes. Alexandre avait déjà raconté ses aventures dans « Le Zubial », sorte de brouillon de ce roman vrai. L'auteur est plus discret sur sa mère, laissant la part belle à sa grand-mère surnommée l'Arquebuse. Un véritable phénomène que cette ancienne maîtresse de Paul Morand, régnant sans partage sur la propriété suisse, la Mandragore.

Futur président

Le week-end, son mari la rejoint, le Nain Jaune, éminence grise des hommes politiques de la IV et V république. Il a débuté sa carrière sous Vichy et depuis est au centre d'un vaste système de financement occulte des partis politiques, tous les partis politiques. Ce qui a permis au jeune Alexandre de côtoyer nombre de ministres ou de personnalités de gauche, promises à un bel avenir. Le jeune garçon, alors très Jardin par son déphasage avec les réalités, est persuadé que la seule profession digne pour lui est président de la République...

On trouve également dans cet antre suisse Merlin, oncle d'Alexandre Jardin, sexuellement déviant, mort pendu face à un miroir à la recherche d'une dernière érection.

Zouzou, raisonnable et normale

Reste le personnage principal de ce roman, Zouzou, la seule semblant normale. Engagée pour éduquer les petits-enfants et assurer la bonne marche de la maison, Zouzou est la seule encore en vie de cette période incroyable. Quand Alexandre Jardin décide de tout dire dans un roman coup de poing, il va d'abord la consulter. Pour chercher un assentiment chez cette femme qui aura été la maîtresse du Zubial mais également du Nain Jaune et même de Merlin.

Elle lui donnera la force de se lancer dans cette thérapie écrite avec ces quelques mots: « Il faut guérir un jour d'avoir, trop connu les Jardin. je ne vois pas d'autre remède que la vérité. Mais tu n'as pas tout dit : pourquoi cette retenue ? Déverrouille-toi intégralement et libère-nous. » Message reçu par l'écrivain du bonheur changeant de registre du tout au tout. Il va raconter, avec parfois force de détails, les errements de son entourage alors qu'il n'était encore qu'un enfant. Comme dans une dimension parallèle, les Jardin s'amusent à enfreindre les interdits. Quelques passages sont carrément extrêmes et à la limite du supportable comme la scène du ténia de l'Arquebuse ou du grand amour (pas du tout platonique) entre Yves Salses (un grand ami de la famille, pornographe notoire) et une guenon.

« Le roman des Jardin », Alexandre Jardin, le Livre de Poche, 6,95 €