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vendredi 29 mars 2024

Roman français - Paysans et bêtes « Du même bois »

Une ferme en montagne. Des paysans. Et des bêtes. Le tout à travers les souvenirs de Marion Fayolle. Une chronique d’un temps révolu, entre nostalgie et envie de liberté.



Ces derniers mois sur les routes bloquées, et à Paris récemment pour la salon, il est beaucoup question d’agriculture. De son évolution, de son avenir, d’économie, de politique. Tout ce que vous ne trouverez pas dans ce texte de Marion Fayolle. Du même bois parle des hommes et des femmes qui depuis des générations vivent sur ces terres en moyenne montagne.

Pas des agriculteurs, non, des paysans dans toute la noblesse du terme. Ceux qui font ce pays, ces paysages. Devenue dessinatrice, Marion Fayolle a quitté cette ferme en Ardèche près de la source de la Loire. Ferme qui n’existe plus d’ailleurs. Non viable économiquement. Mais en y passant toute son enfance, elle a emmagasiné quantité de souvenirs. Elle aurait pu en faire une BD, elle a préféré raconter, avec des mots simples, des émotions fortes, des portraits de ses proches, ce quotidien où toutes les générations, de la « gamine » au pépé, cohabitent dans ces deux habitations reliées par l’étable où vivent les vaches et leurs petits.

L’autrice se met souvent à la place des anciens qui voient le temps passer, les mœurs évoluer, les traditions s’estomper. mais ils croient toujours que les jeunes vont continuer, comme eux qui ont repris l’exploitation des parents. « Les jeunes rêvent de s’envoler avant l’hiver, d’échapper à la neige qui les emprisonne pendant des semaines, des mois, Ils imaginent une vie à eux, qui ne serait pas celle des parents, qu’ils auraient réussi à inventer tout seuls. C’est l’adolescence, ça leur passera. Quand ils verront que ce n’est pas mieux ailleurs, ils reviendront, ils feront paysans, on ne veut jamais ressembler à ses parents quand on a quinze ans. »

Pourtant l’appel du large sera le plus fort. Pour la « gamine » notamment qui semble être le portrait craché de l’autrice. Comme ses cousins ou ses amis, « ils ont envie de partir, de débrider leur mobylette, de connaître ce qui existe derrière les montagnes, après les vallées, de l’autre côté des frontières. Ils ont eu un paysage entier pour grandir mais ça ne leur suffit pas. Au-delà de la ligne d’horizon, ils sont convaincus que c’est mieux. » L’exode rural expliqué simplement, humainement. Et chez les anciens, la survie est forte. Comme cette mémé qui « fait de tout petits pas, pour faire durer la vie, pour ne pas arriver trop vite à la fin. Elle raccourcit les promenades, n’a pas besoin d’aller loin pour compter les buses, surprendre des renards. »

Dans cette ferme vit la famille, besogneuse, résignée ou prête à déployer ses ailes ailleurs, mais aussi les bêtes. Ce sont les autres personnages principaux de ce récit. Les vaches, calmes ou capricieuses, les veaux, si mignons, irrémédiablement condamnés, quelques cochons, des lapins et une poule faisane domestiquée par un tonton zinzin. Une ménagerie merveilleuse qui semble elle aussi crier grâce à Marion Fayolle : « Ne nous oubliez pas ! ».

« Du même bois » de Marion Fayolle, Gallimard, 116 pages, 16,50 €

 

jeudi 25 mai 2017

De choses et d'autres : la vigne rescapée


L’été est quasi là. Je m’en rends compte tous les jours en allant au travail au guidon de mon scooter. La visière relevée, je profite du paysage et des odeurs. Cinq minutes dans la campagne, cinq autres dans la ville avant de me garer en face du journal.
A ma gauche, des genets d’ordinaires discrets éclatent d’un jaune presque fluorescent. A droite des prairies fraîchement fauchées commencent déjà à sentir le foin sec. Les acacias ont perdu leurs grappes de fleurs blanches, mais le parfum des tilleuls de l’avenue d’Espagne arrivent à surpasser les relents de gaz s’échappements dus aux embouteillages.
Et puis il y a les vignes. Vertes, resplendissantes, aux longues tiges encore intactes et non disciplinées. Enfin les rares qui restent dans cette zone péri-urbaine de Perpignan. La semaine dernière, une nouvelle parcelle a été « traitée » définitivement. Un énorme tracteur, des socs et un rouleau. Déracinés tous ces ceps sans doute trop anciens. Longtemps il ont fourni le raisin avec lequel on confectionne ces vins râpeux, pas forcément goûteux ni distingués mais qui ont fait vivre des générations de viticulteurs. Tous arrachés. Tous sauf un pied, un miraculé, seul au milieu de ces « cadavres » qui déjà font le bonheur des particuliers venus les ramasser pour se chauffer dans deux ou trois hivers. Un petit pied rescapé, vaillant, comme un symbole de ce monde agricole en pleine mutation. Ou disparition penseront les plus pessimistes. 
(Chronique parue en dernière page de l'Indépendant le 25 mai. Malheureusement le pied de vigne rescapé a disparu quelques jours pus tard...)

samedi 28 février 2015

DE CHOSES ET D'AUTRES - Le salon où on rigole

La dernière scène à la mode ne se trouve pas là où on le croit. Les cafés théâtres ou scènes de stand-up sont dépassés. Le nouveau comique français s'est donné rendez-vous cette semaine au salon de l'agriculture. Comme si la proximité des bêtes à concours provoquait une alchimie génératrice de traits d'humour et de sentences assassines. François Hollande a hérité de la rude tâche de passer en premier. Une inauguration un peu tristounette. Point de saillie mémorable comme celle de l'an dernier quand il a répondu à un gamin à la recherche de Nicolas Sarkozy, que ce dernier ne viendrait plus... Justement cette bête de scène qu'est l'ancien président a fait son come back depuis. Au salon, il a connu l'un de ses plus beaux succès d'improvisation avec un « Casse-toi pov' con » d'anthologie. Cette année il s'est contenté de charrier le président et sa nouvelle promesse non tenue. 
Les deux stars ont du mourron à se faire, les petits jeunes poussent derrière. Un certain Fillon, François de son prénom, a tenté la déclaration fracassante. A la question quel est votre projet pour les agriculteurs, il s'est contenté d'un laconique « Moins les emmerder. » Mais la vedette cette année est sans conteste un petit taureau ibérique. Il a fait fort en s'enquillant une quantité astronomique d'alcools plus ou moins forts. Tout rouge et transpirant, il en a perdu sa rigidité quasi cadavérique. S'égosillant à la recherche de Le Foll, son ministre et guide, il a carrément sauté une barrière de sécurité pour s'inviter en direct sur le plateau d'une émission. Retenez son nom, il a un bel avenir dès qu'il se lâche : Manuel Valls

vendredi 16 janvier 2015

DE CHOSES ET D'AUTRES - Camembert-de alors !

Voilà un nouveau sujet susceptible de mobiliser le peuple de France dans un bel élan d'unité nationale : le dernier fabriquant indépendant de camembert, une ferme sise dans le village du même nom, risque d'être racheté par des capitaux étrangers. Vous ne rêvez pas, le symbole de la gastronomie française et des fromages qui puent pourrait passer à l'ennemi. Quand les époux Durand qui depuis 30 ans produisent du camembert artisanal (moulé à la louche) issu du lait de leurs 70 vaches décide de passer la main et de vendre leur exploitation agricole, ils ne se doutent pas que les candidats à la reprise seront si nombreux. Pas moins de 300 candidatures en quelques mois. Les unes sérieuses, certaines farfelues et d'autres venues de très loin. Comme pour les grands crus girondins, un Chinois a fait une offre. Il y a même un acheteur potentiel originaire des Emirats arabes unis. Alors, un camembert aura-t-il un jour le goût des nems ou sera-t-il coupé au lait de chamelle ? Voilà de quoi battre le rappel dans les hautes sphères intellectuelles et culinaires françaises. Je vois déjà Jean-Pierrre Coffe s'offusquer « C'est de la merde ! » ou Jean-Luc Petitrenaud grimacer en engloutissant un demi-claquos bien coulant. Heureusement, aucune candidature ne provient des USA. Normal, leur guerre aux fromages au lait cru est totale et sans pitié. Ils seraient capables de raser le village de Camembert avec leur armée de drones. Mais le pire serait une reprise par des capitaux de Hollande. Pas notre président, mais la nation qui se prétend l'autre pays du fromage. Imposteurs !

Chronique "De choses et d'autres" parue le 16 janvier en dernière page de l'Indépendant.