dimanche 17 mai 2020

Roman - Quand le vent idiot guide les vagabonds


La littérature américaine doit énormément au récit Sur la route de Jack Kerouac. Cette simple idée de tout plaquer pour partir à l’aventure, l’esprit ouvert, juste pour avancer dans ce grand pays encore un peu sauvage et rencontrer des gens qui comme lui sont à la marge a éveillé bien des consciences, favorisé des carrières d’écrivains ou tout simplement poussé nombre de jeunes à se rebeller. 
Peter Kaldheim est passé par cette case « Sur la route ». Mais ce n’est pas au sortir de l’adolescence qu’il a chaussé ses baskets. A 30 ans passés, c’est contraint et forcé qu’il a déguerpi à la vitesse grand V du New York où il avait passé pourtant toute son enfance et le début de sa vie d’adulte à travailler dans le milieu de l’édition. Et comme Jack Kerouac, cette traversée des USA dans les années 80 est devenue un roman qui se savoure comme un café chaud après une nuit à la belle étoile à grelotter de froid.


Avec un réalisme absolu, sans jamais se prendre en pitié bien au contraire, Peter Kaldheim décrit le sale individu qu’il était devenu. Mauvais mari, alcoolique, drogué : en janvier 1987 il était prêt à tout pour acheter sa dose de cocaïne. Même à escroquer son dealer officiel, pourtant réputé pour ses méthodes violentes en cas de retard de paiement. 
Mais Peter, depuis quelques années, était sous l’influence de ce qu’il appelle le « vent idiot », cet Idiot Vent qui donne son titre au roman. « Je l’avais vu faire s’envoler à peu près tout ce qui aurait dû compter pour moi. Mon mariage. Ma carrière. Le respect de mes parents et amis. Même un endroit où poser la tête la nuit. » En pleine tempête de neige, Peter dépense ses derniers dollars pour un billet de bus. 
Une centaine de kilomètres au chaud puis il entreprend, en stop, de rejoindre la côte ouest. Ce périple, dans l’Amérique des clochards et des vagabonds, il le raconte avec une faconde réjouissante. Malgré le froid, la faim, le manque de drogue, il continue à avancer, rencontrant de belles âmes qui contrairement à lui dans sa première vie, ne cèdent jamais à l’individualisme. Certes, le chemin est parfois semé d’embûches, mais ce nouveau vent le pousse vers une vie libre et sans addictions. Quatre mois plus tard, il pose son baluchon dans le parc de Yellowstone. 20 ans plus tard il reprend sa carrière littéraire pour publier ces mémoires, le « Sur la route » de la fin du XXe siècle. 

"Idiot wind", Peter Kaldheim, Delcourt littérature, 22 €



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