vendredi 16 mars 2012

Rome, sanglante et sensuelle

Une esclave et un gladiateur vont tenter de s'aimer dans la Rome de l'empereur Domitien. Un roman d'amour et de haine signé Kate Quinn.



Kate Quinn, Maitresse de rome, Presses de la cité, roman historiqueNous n'avons pas idée de l'importance des jeux du cirque au temps de la splendeur de l'empire romain. L'arène permettait de voir et d'être vu. Et au centre, les gladiateurs étaient les stars d'aujourd'hui. « La maitresse de Rome », roman de Kate Quinn nous donne une bonne idée de l'ampleur du phénomène. La romancière américaine, dont c'est le premier ouvrage et qui a toujours baigné dans la Rome antique grâce à son père, historien, sacrifie au genre (une histoire d'amour tumultueuse et à rebondissements), pour mieux nous faire vivre le quotidien des grands mais aussi des moins que rien, les esclaves.

Sans tomber dans le manichéisme absolu, elle dresse quatre portraits, quatre personnalités qui vont s'opposer tout au long de ces 550 pages. Thea et Lepida chez les femmes, Arius et Domitien chez les hommes. Thea, esclave, Arius, gladiateur. Domitien, empereur, Lepida, noble ambitieuse.



La Juive et le Barbare

Thea, jeune juive rescapée de la ville martyre de Masada, est au service de Lepida. Les deux jeunes filles vont remarquer Arius, nouveau gladiateur qui fait se lever les foules. Arius, un Breton, à la carrure d'athlète sculptée après des années de travaux forcés dans les mines de sel. Aujourd'hui il est sur le point de devenir une des attractions des jeux. Quelques combats facilement remportés, et son propriétaire décide de lui faire affronter le meilleur gladiateur du moment, Bellérophon.

Arius, orphelin, perdu dans cette vile de Rome si différente de ses forêts lointaines, n'a plus aucune raison de continuer à vivre. Si ce n'est ce démon qui s'empare de lui quand il est au centre de l'arène. Un démon qui le pousse à tuer sauvagement tout être vivant s'opposant à lui. « L'épaule ouverte, Bellérophon cessa de sourire et commença à se battre pour de bon, mais il était trop tard. L'épée d'Arius emporta le haut de son bouclier, lui entailla largement les côtes, arracha la moitié des doigts de sa main gauche... » Arius devient le Barbare. Son règne va durer de longues années.



Quelques mois de bonheur

Lepida fait tout pour conquérir le cœur (et la couche) du Barbare. Mais Arius l'ignore. Par contre il n'est pas insensible à la tristesse de Thea, la messagère de Lepida. Un soir, l'amour est plus fort que tout. « Du pouce, Arius caressa la courbe de ces lèvres, puis y posa sa bouche. Il sentit ces lèvres s'ouvrir sous les siennes, et un violent frisson de joie traversa tout son corps. » Mais quel peut être l'avenir d'un homme risquant de mourir tous les mois sont les coups de ses adversaires avec une petite esclave juive ? Le bonheur ne dure que quelques mois. Lepida, découvrant leur relation, revend Thea au tenancier d'une maison close. Arius est envoyé en Germanie divertir les soldats.

L'histoire continue quelques années plus tard. Thea est devenue Athena, une chanteuse de talent, Arius est toujours vivant malgré quantité de cicatrices. Lepida a de plus en plus d'ambition. Elle entreprend de séduire Domitien, l'empereur. Mais une nouvelle fois Thea va se mettre en travers de son chemin. Choisie pour être la Maîtresse de Rome, Thea va enfin espérer pouvoir regagner sa liberté. Mais en tombant dans les griffes de Domitien, c'est une épreuve encore plus redoutable qui se présente à elle.

Ce roman n'est pas qu'une simple histoire d'amour impossible entre deux parias aux cœurs purs. C'est aussi un remarquable tableau des mœurs de l'époque. Fascination du peuple pour les jeux, cruauté des puissants, début de la persécution des Chrétiens, vous y trouverez beaucoup plus qu'une romance à l'eau de rose.

Michel LITOUT

« La maîtresse de Rome », Kate Quinn, Presses de la Cité, 22 €


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