mercredi 2 mai 2007

Roman - Les soins délirants

Dans « Hépatite C », Vincent Ravalec fait le récit des effets secondaires d'un traitement radical contre cette maladie méconnue.

Vincent Ravalec, de « Cantique de la racaille » à « Un pur moment de rock'n roll » s'est beaucoup inspiré de ses aventures (certains parleraient d'errances) de jeunesse pour bâtir des romans forts et sans concession. Il s'est assagi avec l'âge, mais a gardé un soupçon de rébellion. et une sale maladie. Il pose le problème dès les premières pages de ce « récit » : « J'étais écrivain, j'avais légèrement dépassé la quarantaine, et j'étais porteur de l'hépatite C depuis les années soixante-dix. A mon avis depuis 1976. Au moment où j'avais les cheveux plus longs qu'aujourd'hui. Quand un élan un peu fou rassemblait les gens dans des festivals de musique dissidente, avec ce truc de contre-culture, l'héro en pagaille, l'arrivée du punk. Avant la déferlante du sida et des seringues en vente libre. » Une maladie qu'il faut surveiller. Qui peut se faire oublier. Malgré les fréquents examens. « L'hépatite C n'était pas grave tant que vous étiez vert avec un peu de jaune. Quand vous étiez rouge-rouge, c'était le début de la fin ».

Légèrement hypocondriaque

Pour la première fois, les résultats sont « rouge-rouge ». « Je vais clamser, cette fois c'est certain ! » fanfaronne Vincent Ravalec en rentrant chez lui. Ayant une « certaine propension à l'hypocondrie », il n'est pas pris au sérieux par sa petite famille, une femme active et deux ados dont une fille an de David Guetta. Cela pourrait être dramatique, cela prend des airs de farce. Vincent Ravalec n'arrive pas à s'apitoyer sur son sort. Au contraire il se met en scène, tel un pantin hésitant.

Quand on est rouge-rouge, c'est surtout le signe qu'il faut tenter d'éradiquer la maladie. Il existe un traitement, lourd et cher, mais qui donne souvent de bons résultats. Une bithérapie devenue obligatoire, malgré les effets indésirables secondaires. Après avoir listé les symptômes de l'hépatite C (jaunisse, gonflement des chevilles et du ventre, vomissement de sang, infections à répétition...), il détaille avec un plaisir macabre tout ce qui l'attend : « douleurs d'estomac, sang dans les selles, toux persistante, battements cardiaques irréguliers, problèmes de vue et dépression ». Par exemple dans le volet dépression, il est marqué sur la notice livrée avec les médicaments que « certains patients sont allés jusqu'au suicide ».

Ours et nonnes lesbiennes

C'est donc la peur au ventre que l'auteur débute son traitement. Assommé les premiers jours, il va lentement mais sûrement glisser vers un état s'approchant plus en plus de la paranoïa la plus intense. Pour se protéger des murs de son salon qui se rapprochent de lui, il se confectionne un abri avec des chaises recouvertes de draps. C'est là qu'il va passer plusieurs jours, hagard, hébété, de plus en plus déconnecté de la réalité.

La suite du livre va crescendo. Ayant une révélation mystique, il quitte son appartement parisien pour rejoindre un monastère dans les Pyrénées. Il y croisera des nonnes lesbiennes toxicomanes, un ours agressif et un gourou à Lourdes. Son périple, dantesque, délirant et hilarant, s'achèvera à un péage d'autoroute, les gendarmes reconnaissant cet homme qui fait l'objet d'un « avis de recherche dans l'intérêt des familles ». Le récit de sa cavale est entrecoupé de souvenirs de jeunesse et d'affreux cauchemars. Si toute une partie du livre est sérieuse et documentée, apprenant au lecteur nombre d'informations sur l'hépatite C, une maladie qui touche 700 000 personnes en France, Vincent Ravalec n'a pas négligé dans des passages d'anthologie son côté iconoclaste trash, cher à ses lecteurs.

« Hépatite C », Vincent Ravalec, Flammarion, 16 €

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