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lundi 21 avril 2025

Thriller – Dante et son enfer reviennent

L'âme pèse-t-elle véritablement 21 grammes ? Et où se cache-t-elle dans notre cerveau ? Deux questions parmi des dizaines qui émaillent ce thriller scientifico-mystique signé d'un maître du genre : Fabrice Papillon. Après « Aliénés », on retrouve la commissaire Louise Vernay au centre de cette enquête internationale qui va de Paris à Londres en passant par le Portugal ou Rome. De nombreux retours dans le passé permettent aussi aux lecteurs les moins savants de réviser les vies (et morts surtout) de quelques génies comme Einstein, Descartes ou Dante, justement. 

L'écrivain italien tient une place particulière au cœur de ce tsunami de menaces. Dans cette tension allant crescendo, Louise Vernay tente d'avancer à sa façon : sans mettre de gants. Ce flic très individualiste, limite borderline, est en pleine dépression. Son grand amour vient de mourir dans l'espace (relire « Aliénés ») et son petit frère, dans le coma depuis des années, est sur le point d'être « débranché ». Alors quand la fin du monde menace, elle n'y va pas avec des pincettes. 

Un thriller mené tambour battant, l'héroïne multipliant les difficultés. Mais comment va-t-elle s'en tirer ? 

« La conjuration de Dante », Fabrice Papillon, Points, 528 pages, 9,90 €

vendredi 24 juin 2016

Livre : Lola, papillon de nuit


Le titre énigmatique du roman de Julie Estève ne parle qu'aux spécialistes des papillons de nuit. "Moro-sphinx" est une espèce gracieuse qui butine les fleurs à l'aide de sa longue trompe en faisant du surplace, comme un colibri. La nuit, Lola aussi aime à se charger d'odeurs. Pour attirer des hommes avec qui elle fait l'amour. Une sorte de fringale physique, comme pour se remplir de culpabilité. Avec à chaque fois un rituel pour marquer la fin de la rencontre "Elle attrape la main droite de son binôme et lui coupe l'ongle du pouce". Elle est comme ça la jeune héroïne fracassée, "quand d'autres se coupent avec des rasoirs, Lola écarte les cuisses." Texte parfois dur, ce premier roman rentre un peu dans le rang quand Lola tombe amoureuse. Reste qu'elle n'est vraiment pas faite pour la normalité.
"Moro-sphinx", Julie Estève, Stock, 18 euros.

lundi 5 avril 2010

Roman français - Rêveur et explorateur

Avec « Le papillon de Siam », Maxence Fermine nous entraîne dans le sillage de Henri Mouhot, explorateur français du 19e siècle.


Qui n'a pas rêvé, un jour, d'enfiler un costume d'explorateur et de découvrir des contrées encore préservées ? Certes, de nos jours, il n'existe quasiment plus de terre vierge. Mais il y a 150 ans, les cartes du monde étaient encore pleines de trous. Ce sont ces zones inconnues qui ont poussé Henri Mouhot à quitter son milieu de petit bourgeois de Montbéliard, en Franche-Comté, pour le royaume de Siam. Cette vie, marquée par une quête et une découverte, Maxence Fermine la raconte dans ce roman à la facture classique, comme un peu datée mais totalement en osmose avec l'air du temps d'époque.

Le jeune Henri s'est mis à rêver d'explorations en fréquentant les rayons poussiéreux de la bibliothèque de son école. Il s'ouvre de nouveaux horizons et se promet de quitter dès que possible son petit quotidien pour courir le monde. Il s'imagine notamment en train de parcourir les forêts du Siam, un pays d'Asie qu'il ne connaît qu'à travers le livre écrit par un religieux, Mgr Jean-Baptiste Pallegoix. Il se jure d'aller lui aussi dans ce pays où tout semble différent et merveilleux.

Partir. Facile à dire. Moins à faire. Cette opportunité de quitter le cocon familial il l'a en devenant professeur de français pour un diplomate russe. Il découvre Saint-Pétersbourg et à la fin de sa mission débute un tour d'Europe. C'est en Italie qu'il rencontre sa future femme, une écossaise, nièce d'un explorateur. Un signe.

Papillon insaisissable

Pourtant ce mariage va le sédentariser quelques années. Mais le démon du voyage va le reprendre et avec beaucoup de culot, après avoir essuyé un refus du gouvernement français, il va proposer ses services aux Anglais pour explorer ce Siam qui le fait toujours rêver. Il aura gain de cause avec cependant une priorité : capturer un Papillon de Siam.

C'est lord Rosse, président de l'Académie royale des sciences de la couronne britannique qui lui décrit cet insecte rarissime « De taille gigantesque, aux couleurs mêlées d'or, de bleu et de vert, c'est une variété nouvelle et inconnue, véritable merveille de la nature. » Henri Mouhot embarque en 1858 pour un voyage qui sera l'aboutissement de sa vie.

Maxence Fermine raconte avec une forte empathie ce périple, à croire que le romancier était dans les bagages de l'explorateur. Henri retrouve sur place Mgr Pallegoix, l'écrivain et inspirateur de sa jeunesse. Durant des années, inlassablement, le Français va sillonner les forêts, vallées impénétrables et montagnes vertigineuse à la recherche de ce papillon. Il le croisera une fois, mais sera incapable de la capturer.

Désespéré, prêt à abandonner, il va par hasard découvrir les ruines d'une ville inconnue. Une seconde fois sa vie va basculer. « Il se trouve au cœur d'une cité bâtie par une civilisation disparue depuis des siècles. Une ville à la fois minérale et végétale, dont il ne subsiste qu'un amas de ruines, un cimetière de grès envahi par la végétation. Une cité de silence et de mystère. C'est là, dans ce lieu hors du temps, alors qu'il cherche désespérément un papillon qui se dérobe à lui, qu'Henri Mouhot parvient au cœur du tombeau d'une race disparue. » Henri Mouhot n'a pas trouvé son papillon, mais il a révélé au monde entier Angkor, ville-temple considérée par certains comme la 8e merveille du monde...

« Le papillon de Siam », Maxence Fermine, Albin Michel, 14,50 € 

jeudi 24 mai 2007

Roman - Et voguent les papillons maritimes

Une balade en mer vire au cauchemar. Dérivant sur l'océan, un trio va devoir apprendre à se connaître sous la plume de Patrice Lanoy.


Les joies de la plaisance. Et de la cohabitation. Ce roman, triple parcours initiatique, va crescendo tout au long de ses 200 pages. Le calme avant la tempête. Puis le cyclone.

Loïc, ce jour-là, est affairé à remettre un peu d'ordre et repeindre son bateau, le Morpho (nom d'un papillon qui explique le titre du roman). Un petit voilier qui n'a plus pris la mer depuis pas mal de temps. Démâté, pratiquement à l'abandon, il a subi, par contrecoup, la grosse dépression de son propriétaire. Loïc a beaucoup navigué avec sa femme. Mais cette dernière n'est plus là.

Le lecteur, dans les premières pages ne le sait pas. Il se doute simplement que cet homme, taciturne et triste, fuyant le genre humain, a une plaie ouverte à l'âme. Remettre les pieds sur le Morpho est une première étape pour tenter de passer le cap. Et quand on est à quai, difficile de ne pas se faire aborder par quelques passants.

Un drôle de couple

Loïc, pour la première fois depuis bien longtemps, accepte de parler avec un drôle de couple. Klara et son cousin Sol. Klara, adolescente de 15 ou 17 ans « au timbre léger et grave. Une voix comme ça, c'est de la dentelle qui étrangle ». Et Loïc de se laisser entraîner par cette brune, « un pull vert trop épais, le jean troué où il faut, le bandeau dans les cheveux, elle se tient tout au bord, la moitié des pieds nus dans le vide ». Elle est accompagnée de Sol, son cousin, autiste. « Drôle de piquet, ce garçon. Maigre, presque aussi grand et accoutré encore que sa cousine. Le triangle de son maillot de bain lui fait de longues cuisses de criquet et les cheveux clairs et fins qui retombent sans cacher les yeux noirs m'évoquent les photos de vacances aux couleurs gommées ».

Dérive

Le trio du roman de Patrice Lanoy est en place. Loïc est le narrateur. Il raconte comment, malgré ses réticences, il accepte de prendre à son bord les deux enfants pour une petite balade, au moteur, vers le large, là où des otaries ont pour habitude de se réunir. Une rencontre magique. Ils traînent un peu, un peu trop. Quand ils veulent rentrer, le moteur rend l'âme. La nuit tombe. Les lumières de la côte s'éloignent. Le lendemain matin, le trio se retrouve seul en mer, sur un bateau sans moyen de propulsion, ni radio ni fusées de détresse.

Loïc va devoir apprendre à connaître ses deux passagers si particuliers. Heureusement il y a de la nourriture et de l'eau en quantité dans les cales du petit Morpho. Perdus dans l'immensité, ils vont se déchirer, se haïr, se suspecter des pires intentions. Klara, notamment, devient très agressive envers Loïc quelle suspecte d'être un psychopathe ayant déjà tué sa femme et qui ne les a entraînés au large que pour les assassiner. Sol, l'autiste, va profiter des aléas pour démontrer ses capacités et même revenir à la vie, à la raison. Mais la dérive ne fait que commencer.

Si on met de côté l'invraisemblance de l'enchaînement de problèmes techniques pour justifier la dérive du trio, il reste un très beau texte, entre paranoïa et réflexion philosophique, entre violence et découverte de soi et de l'autre.

« Le complot des papillons », Patrice Lanoy, Seuil, 16 €