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samedi 8 septembre 2012

Roman - Réunion d'idiots dans "Géographie de la bêtise" de Max Monnehay


Fable tragique, « Géographie de la bêtise » de Max Monnehay s'interroge sur la place des idiots dans notre société. Ce roman aurait pu être un manifeste de rassemblement de tous les laissés pour compte. Au début, l'utopie est belle. A l'arrivée, la fin est tragique.
Pierrot, idiot mais riche, décide de fonder un village des idiots. Il sillonne la France, tant pour recruter des simples d'esprit que pour trouver un endroit à eux, un refuge d'où les « intelligents » seront bannis. L'idée a fait rire. Dans les faits, elle permet à un village abandonné de revivre et à ces demeurés de donner un nouveau sens à leur non vie.
Une expérience si réussie que beaucoup tentent de rejoindre ce nouvel éden. Pierrot et Bastien, le narrateur, vont mettre en place un questionnaire, sorte de test de QI inversé, pour éloigner les profiteurs. Première question : « Combien font trois fois quatre ? » Bastien est en admiration devant la splendide ruse de Pierrot car « Il est peu d'idiots ignorant la réponse. Mais il est peu de malins sachant que peu d'idiots ignorent la réponse. » Quand Elisa passe le test, Bastien comprend vite qu'elle fait semblant d'être idiote. Pourtant il va faire comme si elle en était véritablement une. Et Bastien, en trafiquant les résultats, comprend que finalement lui aussi n'est pas si idiot que cela. Mais deux intelligents dans un village d'idiots, comment cela ne peut-il pas mal finir ?
Max Monnehay, à l'écriture sèche, incisive et percutante, signe un deuxième roman tout aussi déconcertant que son premier, « Corpus Christine », paru en 2006. S'ils sont sympathiques par certains aspects, ces idiots font aussi peur. La peur de la différence qui entraîne l'incompréhension et le rejet de l'autre.

« Géographie de la bêtise » de Max Monnehay, Seuil, 17 €

lundi 28 août 2006

Roman - La haine au ras du sol de "Corpus Christine" de Max Monnehay

"Corpus Christine", de Max Monnehay, explore les limites de la haine entre mari et femme.



Si l'on a le malheur de vivre en couple, on ne ressort pas indemne de ce roman âpre et dérangeant. Et malgré des années de bonheur conjugal sans nuages, on ne peut s'empêcher de se demander : "Et si cela m'arrivait à moi aussi ?"
Le narrateur, dans un langage très mouvementé et haché, on comprend pourquoi au fil des pages, raconte au lecteur qu'il interpelle parfois, son calvaire et sa déchéance. Condamné en position verticale "depuis sa chute" sur laquelle il reste très discret, il ne se déplace plus dans son appartement qu'en rampant. Mais il n’est pas seul. Sa femme continue de vivre avec lui. Mais au lieu de l’aider, elle le brime, l’affame. Seul a ruminer des mauvaises pensées le nez au plancher, le mari va raconter le coup de foudre pour cette joggueuse croisée dans la rue. Leur rencontre, le bonheur des premiers mois de vie commune, les bons moments partagés… Jusqu’à ce fameux jour.

Dramatique et... loufoque
Devenu un pantin sans défense, elle va se venger de ces années de simulation. Notamment en l’affamant. Quand il parvient à voler un pot de moutarde oublié dans la cuisine, il va goulûment s’en repaître. Résultat il a mal au ventre s’en plaint et en profite au passage pour pousser une gueulante contre le lecteur interloqué imaginant même ce qu’il pense : "Mais pourquoi se sent-il obligé de nous décrire ses brûlures d’estomac ? Quand va-t-il cesser de se plaindre à la fin ? Va-t-il crever qu’on en finisse !"
Mais le calvaire n’en est qu’à ses débuts. De plus en plus faible et affamé, sa femme va s’attaquer à sa famille, lui donnant, telle une offrande, le petit orteil sanguinolent de sa mère… Impuissant, il jure de se venger mais au bout de quelques jours doit réagir, "La chair pourrit. Elle empeste quand elle se décompose. Elle engendre la vermine. Je vais devoir me débarrasser de l’orteil de ma mère. Un enterrement n’étant pas envisageable, ne me reste que la chasse d’eau en guise de sépulture."
Tout l’intérêt de ce premier roman réside dans cette opposition continuelle entre une situation tragique, révoltante, pathétique et un certain détachement, une désinvolture qui nous rappelle sans cesse qu’il ne s’agit que d’une pure fiction sortie de l’imagination de Max Monnehay qui n’a que 25 ans. "Corpus Christine" est son premier roman. Une signature à suivre.

"Corpus Christine" de Max Monnehay. Éditions Albin Michel. 15 euros.