Affichage des articles dont le libellé est matzneff. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est matzneff. Afficher tous les articles

lundi 16 octobre 2023

Cinéma - “Le consentement” : dans les pas de Gabriel Matzneff, le chasseur

Un film puissant pour montrer (sans voyeurisme), la monstruosité de la pédophilie avec l’exemple de Gabriel Matzneff.


Durant de trop longues années, Gabriel Matzneff, écrivain français, s’est cru intouchable. Il a transformé ses perversions et déviances sexuelles de pédophile en matière brute pour alimenter ses romans et journaux, complaisamment publiés par des maisons d’édition parisiennes. Il a fallu la libération de la parole des femmes pour qu’il soit enfin inquiété. Tout a commencé par la publication du récit Le consentement de Vanessa Springora en 2020. Elle racontait comment, à 13 ans, manipulée par cet homme brillant en société, elle est tombée amoureuse de Matzneff, a succombé à son emprise.

Comment ce dernier a profité d’elle, la transformant en objet sexuel, puis l’a jetée, tel un jouet usé. Le film de Vanessa Filho est fidèle au récit. Il raconte dans le détail comment Vanessa (Kim Higelin), intelligente, passionnée de littérature, s’est retrouvée dans le viseur du chasseur Matzneff (Jean-Paul Rouve).

Car il a beau parler d’amour éternel, de sentiments, l’écrivain imbu de sa personne n’est qu’un prédateur. Il aime le gibier, jeune, tendre. Séduire l’adolescente est un véritable challenge pour lui, qu’il utilise pour noircir des pages de son journal et alimenter un roman. Vanessa, flattée qu’on s’intéresse à elle, devient sa chose. Elle n’a que 14 ans quand il s’affiche avec elle dans les dîners en ville.

On est un peu interloqué en voyant comment, à l’époque, le sulfureux romancier était accueilli en star dans les soirées ou les émissions littéraires. Comme cet extrait d’Apostrophes au cours duquel Bernard Pivot semble fasciné par ses « écarts ». Heureusement, une des invitées, la regrettée Canadienne Denise Bombardier, a osé parler du sort des jeunes filles séduites, les « victimes ».

Jean-Pierre Rouve méconnaissable

Car Vanessa n’est pas sortie indemne de cette relation. Elle mettra longtemps à se reconstruire. Encore plus pour oser raconter ce passage de son existence. Le livre avait marqué à sa sortie. Le film apporte un plus aux écrits. On voit le manipulateur à l’œuvre, ses techniques, sa monstruosité. Il faut saluer le travail des deux comédiens. Kim Higelin joue parfaitement l’écartèlement de Vanessa entre cette attirance doublée d’une certaine répulsion quand elle découvre les véritables motivations de Matzneff.

Quant à Jean-Paul Rouve, ancien comique des Robins des Bois, si marrant en Tuche, il prouve que la comédie est un genre qui mène à tout, même aux rôles dramatiques les plus compliqués.

Film de Vanessa Filho avec Jean-Paul Rouve, Kim Higelin, Laetitia Casta, Élodie Bouchez.

samedi 25 janvier 2014

Livre - Émiles dans le mille à la sauce Gabriel Matzneff

Écrivain à la réputation sulfureuse, Gabriel Matzneff ne s'est pas assagi avec l'âge. A 70 ans passés, celui qui a séduit tant d'adolescentes se rêve toujours en gigolo d'une milliardaire américaine. Il le raconte en partie dans le recueil de ses "Nouveaux émiles". Émile comme Littré et Cioran, deux des maîtres de "Gab la rafale". Émile pour désigner le courrier électronique, courriel en français châtié, e-mail en sabir mondialisé.
Ce volume publié chez Léo Scheer (20 euros, dans toutes les bonnes librairies), reprend sa correspondance de début 2010 à mi 2013. On y apprend, dans l'ordre chronologique, qu'il a voté Mélenchon au 1er tour de la présidentielle puis Hollande (il regrette son choix très rapidement...), qu'il rompt douloureusement avec sa dernière conquête, qu'il défend bec et ongles DSK et qu'il a un cancer. Le tout dans un joyeux désordre, les destinataires des émiles n'étant désignés que par leur prénom. Les grandes envolées sur l'art d'écrire côtoient les considérations bassement matérielles des fins de mois difficiles car si Matzneff publie beaucoup, il vend peu. Celui qui a longtemps existé grâce à ses extravagances semble lassé de cette foire aux apparences. Il décline sèchement une invitation : "Je n'ai aucune envie de déjeuner avec votre monsieur passionné de littérature. La littérature, je m'en torche."
L'impression laissée à la lecture de ce livre est que Matzneff n'est plus de son temps. Au lieu d'avancer, il donne l'impression de reculer. Né au XXe siècle, il aimerait mourir au XIXe.
"Les nouveaux émiles de Gab la rafale", Gabriel Matzneff, éditions Léo Scheer, 20 euros