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lundi 6 octobre 2014

Livre : L'étrange trio du cinéma français

Jean-Pierre Rassam, producteur, Claude Berri, acteur, réalisateur et producteur, Maurice Pialat, réalisateur. Trois hommes autour d'une table de poker, trois génies du 7e art.

rassam, berri, pialat, donner, grassetLe cinéma est friand de grandes et belles histoires. Avec si possible des personnages forts pour les porter. La littérature aussi. Christophe Donner, écrivain passionné de cinéma, a tout mélangé pour signer un roman détonnant dans cette rentrée littéraire parfois trop spirituelle. Sous le titre improbable de « Quiconque exerce ce métier stupide mérite tout ce qui lui arrive », citation attribuée à Orson Welles au festival de Cannes en mai 68, il raconte la trajectoire fulgurante de Jean-Pierre Rassam, fils de millionnaire devenu producteur de cinéma par défi et ennui. Il croise la première fois les routes de Claude Berri et de Maurice Pialat autour d'une table de jeu. L'argent n'est pas un problème pour le descendant d'un de ces nababs des pétrodollars. Au cours de cette partie mémorable, Claude Berri perd. Comme il n'a pas d'argent, il met en jeu son oscar obtenu quelques mois plus tôt pour son court-métrage « Le Poulet ». Rassam l'emporte. Mais Berri ressort heureux. Il vient de rencontrer Anne-Marie, la sœur de Rassam. Ils tombent fou amoureux l'un de l'autre. Cela compense l'attitude narquoise de Pialat qui vient de lui annoncer qu'il couche avec Arlette, la sœur de Berri.
Ces trois hommes sont donc liés par le cinéma, mais aussi la famille, devenant tous plus ou moins beaux-frères les uns des autres. Christophe Donner, une fois planté le cadre des relations de ce trio qui a bousculé le cinéma français, peut parsemer son récit d'anecdotes sur la création de quelques chefs-d'œuvres entrés au panthéon du cinéma.

Des films de légende
Claude Berri est le premier à remporter un succès populaire d'ampleur avec « Le vieil homme et l'enfant ». Il raconte sa jeunesse, quand, petit juif, en pleine occupation allemande, il est recueilli et caché par un vieux Français (Michel Simon) profondément antisémite. Pialat ne cache pas sa jalousie. Plus âgé, persuadé d'être beaucoup plus talentueux, il n'a pas encore fait de film important. Rassam, plus pour embêter Berri que pour gagner de l'argent, produit « Nous ne vieilliront pas ensemble ». Le drame avec Jean Yanne et Marlène Jobert dépasse le million d'entrées. Pialat est lancé. Rassam, en trois ans a déjà produit quantité de succès au box-office. Notamment le film scandale de Marco Ferreri, « La grande Bouffe » sur lequel il est régulièrement intervenu.
La fin du roman se consacre essentiellement au parcours de Jean-Pierre Rassam. Sa rencontre avec Jean Yanne et sa décision de le financer. Quelques années magiques où tout ce qu'il lance réussi. C'est beaucoup plus laborieux pour Claude Berri qui s'obstine à raconter sa vie, se donnant toujours le premier rôle malgré un jeu limité.
Truffé de moments de bravoure comme le sauvetage des enfants de Milos Forman dans Prague assiégée par les chars russes ou les repérages de Godard dans les camps d'entraînements palestiniens, le roman prend des airs de reportage. Mais comme au cinéma, il ne faut pas toujours croire que tout est vrai. Les trucages et effets spéciaux ne sont pas une invention du IIIe millénaire. Mentir, ou du moins enjoliver la réalité, reste avant tout un acte de pure création.

« Quiconque exerce ce métier stupide mérite tout ce qui lui arrive » de Christophe Donner, Grasset, 19,50 €

mardi 18 janvier 2011

Roman - Le Liban familial de Christophe Donner

Après avoir écrit sur sa famille, Christophe Donner se penche sur sa belle-famille. Des Libanais sous la coupe d'Elias, le patriarche de 104 ans.


Écrivain atypique à la production très conséquente, Christophe Donner a deux passions : les chevaux et le jeu. Il parviendra, comme toujours, à placer ces deux éléments dans son nouveau roman qui normalement aurait eu comme sujet principal la famille et le Liban.

Narrateur et personnage principal, il quitte Paris pour quinze jours, direction le Liban en compagnie de sa femme. Dora va voir, peut-être pour la dernière fois, son père, Elias Chamoun. Le patriarche qui affiche un âge invraisemblable pour ce pays souvent en guerre : 104 ans. Il n'a plus toute sa tête, mais suffisamment pour mener la vie dure à sa femme et à la bonne. Christophe Donner ,« Monsieur Christophe » pour Elias, a un faible pour ce vieil homme qui semble avoir des trous de mémoire sélectifs. Par exemple, il est incapable de se souvenir du prénom de sa fille, Dora, l'épouse de l'auteur. Cette dernière ne lui en veut pas, comme ses frères et sœurs elle est en pâmoison devant cet homme capricieux et autoritaire mais qui semble éternel.

Au fil des jours le charme s'estompe et Elias devient de plus en plus insupportable. Cela donne ces lignes d'une étonnante clairvoyance :

« La vieillesse qui serait un retour à l'enfance, je n'y crois pas, c'est un cliché pour dissimuler l'horreur. En fait, c'est un couloir de plus en plus étroit, de plus en plus étroit, dans lequel les vieillards avancent à tout petits pas. Leur maladresse n'est pas celle des enfants, mais celle de l'épouvante. »

Ces quinze jours à Beyrouth pour Christophe Donner, ce sont aussi, et surtout, deux semaines loin des champs de courses parisiens. Il se contente d'admirer, depuis le balcon de l'appartement qu'il occupe, les pur sang libanais à l'entraînement sur la piste du vieil hippodrome.

Un séjour au cours duquel il redoute puis espère presque qu'Elias tire enfin sa révérence, qu'il emporte dans sa tombe ses humeurs, sa dépendance et avec lui ses secrets. Un roman lumineux sur le Liban, la famille et la mort... avec un zeste de course hippique, Christophe Donner oblige.

« Vivre encore un peu », Christophe Donner, Grasset, 14 €

samedi 18 août 2007

Roman - Le double Bang de Christophe Donner


Martine Victoire est un sacré personnage. De ces héroïnes qui marquent les mémoires. Exubérante, grande gueule, vulgaire, enchaînant navet sur navet, cette star déchue du cinéma français est au centre du roman de Christophe Donner.

Pourtant il n'y a que peu d'invention dans ce personnage qui au fil des pages se révèle être la version féminine d'un acteur bien réel. Martine Victoire est donc une vedette. Le public va voir ses films. Pas pour l'histoire, mais pour elle, toujours si drôle avec ses mimiques et son langage ordurier.

Martine Victoire voudrait bien tourner dans de bons films. Elle en est d'ailleurs persuadée au début de chaque tournage. Mais rapidement elle prend conscience que le scénario ne tient pas la route, le réalisateur est incompétent et que la solution pour sauver l'entreprise c'est de faire du Martine Victoire. Elle part alors en croisade, faisant la promotion de ses productions à grand renfort de scandale sur les plateaux télé, friands de déclarations tonitruantes d'une actrice généralement ivre au moment de la prise d'antenne.

QUAND LE MARI PARLE

Et puis un jour, ce monstre médiatique est tombé sous le charme d'un simple chroniqueur hippique lors d'une soirée au cours d'un festival en Normandie.

C'est ce mari improbable qui raconte l'histoire de Martine Victoire, celle qui aura été sa femme plus de dix ans.

Son statut a changé quand ses patrons ont appris qu'il vivait avec la star.

Ils se sont mariés et ont eu une petite fille. Mais si Martine Victoire fait des miracles sur les tournages, elle manque singulièrement de talent quand il faut élever ses enfants. La petite Gaëlle mais également Alexandre conçu avec un premier mari. Alexandre qui va prendre de plus en plus d'importance dans ce récit.

Pour ce qui est de la partie hippique du roman, la grande passion de l'auteur, il glisse quelques portraits de propriétaires et employés gravitant dans ce milieu si exigeant et chante les louanges de chevaux légendaires. Mais ce que l'on retiendra de ce "Bang ! Bang !", loin d'être une farce grossière, c'est le côté profondément humain de cette femme en perpétuel équilibre instable. On la comprend dans ses tentatives de destructions massives et répétées. Nous aussi on aurait aimé l'aduler, la chérir et l'aider.

"Bang ! Bang !", Christophe Donner, Grasset, 18 euros