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lundi 29 mai 2023

Cinéma - “L’amour et les forêts”, couple à cru

Subtile analyse de l’alchimie des rapports dans un couple, L’amour et les forêts de Valérie Donzelli est aussi et avant tout un film sur la sororité, les pervers narcissiques et le harcèlement dans un couple. 

Adaptée du roman d’Éric Reinhardt, l’histoire de Blanche et Grégoire ressemble à trop de ces relations amoureuses qui partent sur de très bonnes bases et s’achèvent dans la déception, les cris et parfois la violence. Blanche (Virginie Efira), est célibataire. Sa jumelle, Rose, tente au cours de cet été en Normandie de lui trouver un nouveau compagnon, l’homme parfait. Blanche, prof de français, semble résignée. C’est à contre cœur qu’elle se rend à une soirée où, parait-il, l’oiseau rare l’attend. Là, Blanche retrouve une vieille connaissance, Grégoire Lamoureux (Melvil Poupaud), devenu banquier. Des années qu’ils ne se sont pas vus. Immédiatement, ils se sentent attirés l’un vers l’autre. Grégoire, doux, sensible, prévenant, la joue séducteur au grand cœur. Blanche cède rapidement. Comme le fait remarquer sa sœur, qui la connaît parfaitement, « il suffit qu’elle croit qu’elle est aimé pour aimer en retour ». Quelques mois plus tard, Blanche est enceinte et épouse Grégoire qui est muté à Metz. Nouveau départ dans une nouvelle maison. 

Les 20 premières minutes du film, écrit en collaboration avec Audrey Diwan, ressemblent presque à un roman de la collection Harlequin. Mais on se doute que ce n’est que façade, car c’est une Blanche au visage triste et défait qui raconte, dès les premières images. Le spectateur se doute que la suite est moins gaie. Blanche se souvient alors de la première fois où elle a douté de son mari. Elle apprend qu’il a menti à sa direction pour être muté à Metz, prétextant que c’était la région d’origine de son épouse. Éloignée de sa mère et de sa sœur par ce subterfuge, Blanche constate que son mari est de plus en plus possessif, directif, autoritaire. 

Il la surveille, regrette qu’elle ait retrouvé un poste d’enseignante. Elle va s’enfermer dans cette relation toxique, redoutant de tout perdre, notamment l’amour de ses deux enfants. Le film permet à Melvil Poupaud de faire une extraordinaire performance d’acteur très crédible quand il passe de gentil amoureux à jaloux acariâtre. Virginie Efira est parfaite dans ce rôle compliqué de femme sous influence, ne voulant pas voir la réalité durant de longues années. Un déclic, une rencontre, l’écoute d’un professionnel, vont lui permettre de se sauver. Et c’est sans doute la grande utilité et force de ce film : permettre à d’autres femmes sous emprise de prendre conscience de la situation et de trouver la force et le courage pour crier « Basta ! ».

Film de Valérie Donzelli avec Virginie Efira, Melvil Poupaud, Dominique Reymond, Marie Rivière, Romane Bohringer, Bertrand Belin

mercredi 8 juin 2022

Cinéma - “Petite fleur”, sanglant éloge de la routine mortifère


Adapté d’un roman argentin par Santiago Mitre, le film Petite fleur a été presque entièrement tourné à Clermont-Ferrand. Ville de province manquant singulièrement de charme, elle a semblé parfaite au metteur en scène pour faire passer ce sentiment de déracinement du personnage de José (Daniel Hendler).

Marié à Lucie (Vimala Pons) avec qui il vient d’avoir une petite fille, ce dessinateur de BD argentin a accepté un boulot alimentaire pour redessiner le personnage symbole d’une société de pneumatiques. Mais il se fait virer et finalement Lucie doit trouver du boulot et José s’occuper du bébé. Le début du film a tout d’une purge, d’un téléfilm de France 3, si l’on oublie la présence et le potentiel comique de Vimala Pons. Car José est un taciturne. Il parle peu, intériorise beaucoup et limite ses interactions sociales. Il doit se faire violence pour aller sonner chez le voisin afin de lui emprunter une simple pelle pour creuser un trou dans le jardin. 

Un voisin qui fait basculer le film dans la satire, le fantastique, l’absurde et le grand guignol. Jean-Claude (Melvil Poupaud) est le parfait bourgeois prétentieux. Il est riche, étale son luxe et ne sait parler que de sa passion : le jazz. José va subir sa logorrhée avec patience. Mais, finalement, il n’en peut plus et va utiliser la pelle tant espérée en objet contondant et tranchant pour rabaisser le caquet au pédant. S’ensuivent quelques jours d’angoisse... Mais, une semaine plus tard, en sortant promener sa fille, il croise Jean-Claude, vivant, toujours aussi lourd. Qui invite José. Le jeudi suivant, il retourne chez le voisin et à la faveur de la répétition d’un élément déclencheur (qui donne son nom au film), il trucide une seconde fois le raseur. Puis une troisième…

Le film va alors se transformer en éloge de la routine du meurtre. Car depuis qu’il tue son voisin, chaque jeudi, José est plus heureux, plus ouvert et épanoui. Reste que Lucie s’interroge et le pousse à aller voir un psy (Sergi Lopez), seconde pierre d’un film où l’irrationnel est omniprésent.

Comédie romantique sanguinolente et iconoclaste, Petite fleur laisse des traces dans l’esprit du spectateur. Qui va s’interroger, lui aussi, sur ses routines, ses trucs et astuces répétitifs qui finalement donnent de la saveur à des existences qui parfois ne semblent même pas mériter d’être vécues.

Film de Santiago Mitre avec Daniel Hendler, Vimala Pons, Melvil Poupaud, Sergi Lopez