Clinique psychiatrique, meurtriers jugés déments, fête de l'ours et femme à la dérive : tel est le cocktail gagnant de ce thriller se déroulant dans le Vallespir et signé Alexandra Julhiet.
Plus un personnage est dans le doute, au bord de la dépression voire de la folie, plus le thriller est généralement réussi. Angèle, la narratrice de ce roman d'Alexandra Julhiet est au bord du gouffre. Pourtant c'est une femme forte. Installée à Paris depuis des années, elle est analyste pour une société renommée. Donnez-lui de tonnes de documents sur un sujet précis, elle lit l'ensemble et en tire des conclusions que son patron vend à prix d'or. Rationnelle, efficace sans la moindre faille. Jusqu'à la fin de son couple. Trompée par un mari qui l'abandonne dès qu'il est démasqué. Seule dans son grand appartement, elle déprime. Cauchemarde. C'est un suicide (un homme saute du dernier étage d'un immeuble devant ses yeux) qui l'achève. Et un message retrouvé écrit sur la glace de sa salle de bains, « Va crever !».
Son boss l'oblige à prendre quelques jours de repos. Elle va chez son père, psychiatre à la retraite. Ce dernier, qui perd un peu la tête, décide de profiter de la présence d’Angèle pour aller dans le Vallespir, assister à la fête de l'ours à Saint-Martin-d'Inferm, village fictif, sorte de contraction des trois cités qui célèbrent le plantigrade à la fin de l'hiver. C'est dans ce village, où son père possède une vieille maison, que le drame se noue.
L'autrice, connue comme scénariste à la télévision, signe son second roman et parvient rapidement à passionner ses lecteurs. Certes l'intrigue semble un peu cousue de fil blanc, mais on tremble quand même pour cette femme, prête à tout pour découvrir la vérité sur son passé, son enfance, ses origines.
Et puis il y a la description de cette fête de l'ours, folklorique mais aussi triviale, excessive. Angèle ne cache pas son malaise dans la foule avinée : « L'atmosphère semblait joyeuse et bon enfant, moi je la trouvais lugubre, comme si un désastre était sur le point d'arriver. L'un des ours, une masse de plus de deux mètres, tanguait dans la foule à la recherche d'une bagarre. Un autre profitait de son anonymat pour mettre des mains aux fesses des jeunes filles qui réagissaient en gloussant, inconscientes du danger. » Angèle va subir les assaut d'un ours dans les bois, pas loin d'une clinique psychiatrique. Dans cet établissement, des meurtriers, jugés non responsables de leurs crimes en raison de leur démence, vivent en semi liberté. Le père d'Angèle y a travaillé quand elle était enfant. Du moins c'est ce qu'elle croit se souvenir. Une histoire sur la mémoire, le mal, l'hérédité et la famille. Sans oublier Angèle, lumineuse héroïne qui va enfin sortir des limbes de l'oubli.
« La nuit de l'ours » d'Alexandra Julhiet, Calmann-Lévy, 380 pages, 20,90 €
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