lundi 22 janvier 2024

Polar - Traque canadienne « À la lisière du monde »

 Dans le Nord canadien, au début du XXe siècle, un policier tente de retrouver un trappeur suspecté d’avoir assassiné femme et enfant. Avec la nature comme principale ennemie.


Avant de se rêver survivaliste dans une nature vierge, certains idéalistes devraient lire ce roman de Ronald Lavallée. Ou mieux, tenter de rester vivant une journée et une nuit dans ce grand nord canadien. A la lisière du monde débute alors qu’en Europe les premières rumeurs de guerre mondiale font les gros titres des journaux québécois, même dans cette mission, perdue dans l’extrême nord de l’État, entre forêts d’épinettes, rivières, marécages et baie d’Hudson.

Une région glaciale en hiver, infestée de moustiques en été. Quelques baraques occupées par des Indiens et des trappeurs, un poste de police et première affectation pour le jeune Matthew Callwood. Fils de bonne famille, il a choisi ce bout du monde pour oublier un chagrin d’amour. Plein de bonne volonté au début, il va découvrir la réalité de sa mission : ne pas faire de vagues, attendre la fin des deux années d’engagement et s’ennuyer. Il va changer d’attitude quand il apprend qu’un certain Moïse Corneau serait dans la région. Une légende.

Ce trappeur a été condamné à mort pour le meurtre de sa femme et de son bébé. Il s’est évadé la veille de l’exécution. Depuis, il survivrait tel un sauvage dans la forêt boréale. Le romancier va transformer ce duel à distance en passionnante chasse à l’homme dans un environnement inhospitalier. Le policier doute souvent : « Chercher un homme dans cette immensité est absurde. Parce qu’on vit toute l’année dans des clapiers de quelques mètres carrés, parce qu’on remplit sa chemise, qu’on touche des orteils le bout de la baignoire, on finit par croire que l’être humain prend de la place sur Terre. C’est faux. Dans la forêt boréale, l’homme est un microbe. »

Accompagné de guides locaux et de deux autres policiers, Matthew va passer tout un été sur les traces de Corneau. L’occasion pour Ronald Lavallée de décrire cette nature violente et fascinante : « La rivière est en travail. La glace craque, grince et couine. De lourdes échardes s’élèvent hors de l’eau, exposent des fanons de cristal qui scintillent au soleil. » C’est d’une beauté renversante. Très dangereux aussi. Et cela donne une furieuse envie d’aller voir par nous-même. Mais pas plus d’une journée et une nuit…

« À la lisière du monde », Ronald Lavallée, Presses de la Cité, 368 pages, 23 €

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