dimanche 24 mai 2020

Thriller - Un serial killer fidèle au « jamais deux sans trois »

 

Un homme, trois femmes. La distribution du roman policier Une deux trois de Dror Mishani fait dans le minimalisme. Son découpage aussi, trois parties nommées du prénom des trois femmes de la vie de Guil, avocat et quasi seul homme de cette histoire se déroulant de nos jours en Israël. Guil qui a beaucoup à cacher. Guil, serial killer de la pire espèce, de ceux qui agissent avec discrétion, passant toujours sous le radar des forces de l’ordre. 

La première femme, Orna, ancienne hôtesse de l’air, actuellement prof et récemment divorcée, est la maman d’un petit garçon. La seconde, Emilia, originaire de Lettonie, travaille comme aide familiale, pauvre, seule et un peu perdue. La troisième Ella, est beaucoup plus mystérieuse. Cette mère de trois filles a repris ses études et passe ses matinées à réviser dans un café. Elles ont en commun d’avoir croisé la route de Guil. 

La moitié du roman raconte comment s’est tissée la relation entre Orna et Guil. Lassée de passer ses soirées seules, elle décide de s’inscrire sur un site réservé aux divorcés, contacte Guil qui rapidement lui répond. Discussion virtuelle puis premières rencontres dans un bar. Il raconte être séparé de son épouse, a deux grandes filles, travaille beaucoup, va fréquemment à l’étranger et traîne sur ce site internet depuis deux ans sans trouver l’âme sœur. 

Trop de mensonges

Orna est attirée par cet homme si prévenant. Mais elle ne veut pas brusquer les choses. L’auteur, Dror Mishani, dans cette partie de son roman, s’écarte du roman policier. C’est à une description méthodique et circonstanciée des rencontres entre adultes trop seuls qu’il entreprend. Orna gagne en confiance. Accepte même de coucher avec Guil au bout d’un moment. Mais quand elle le surprend en plein shopping avec sa femme, dont il n’est pas finalement pas séparé, elle se sent trahie. Elle va alors le manipuler : « Il n’osait pas rompre de peur qu’elle ne révèle leur liaison à sa femme et à ses filles. À présent elle se servait de lui exactement comme il s’était servi d’elle, et pourtant elle ne s’aimait pas dans ce rôle. » On retrouve ensuite Guil dans l’histoire d’Emilia. La jeune femme originaire de l’Est s’occupe du père de l’avocat. Là, c’est une certaine misère de ces travailleurs expatriés qui est décrite avec minutie par l’auteur. Et puis arrive Ella. Guil l’aborde dans un café. Le lecteur tremble pour elle car il sait désormais que cet homme à l’aspect anodin est un serial killer méticuleux, qui prend du temps à chasser ses proies et ne fait pas d’erreur. On entre de plain-pied dans le polar, le final est époustouflant, une construction savante digne des meilleurs textes publiés dans la célèbre collection.

« Une deux trois » de Dror Mishani, Série Noire, 19 €

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