vendredi 31 juillet 2009

BD - Voyage vers Antarès en compagnie de Kim


Le deuxième tome du cycle Antarès de Léo est paru en février dernier. Je ne sais pourquoi, il est resté longtemps dans un coin, sans que je n'y touche. D'habitude, je me précipite sur les albums des Mondes d'Aldébaran tant l'univers de cet auteur brésilien me passionne. Le redécouvrant presque, je me lance dans la lecture. Et les premières pages me déçoivent. Kim, en compagnie de sa fille, est dans un vaisseau qui part coloniser Antarès. 

Des pages oppressantes, en huis clos, où les voyageurs appartiennent à une secte très stricte sur les apparences vestimentaires. Bref, je met du temps à accrocher. Comme d'habitude, l'émerveillement intervient quand Kim touche le sol de cette planète inconnue. Et que les animaux et plantes locaux font leur apparition. Fleurs géantes, panthères à 6 pattes, dragon volant, gros concombres de mer affamés : on n'est pas déçu. D'autant que Kim , en compagnie d'un petit groupe de rescapés, se retrouve isolée au coeur de la planète. Des milliers de kilomètres les séparent du camp de base. Des milliers de dangers aussi... 

Mais ce sera pour le prochain album. Le cycle est prévu en cinq tomes. Cela fera un total de 15 titres. Une oeuvre foisonnante qui remporte un succès mérité.

« Antarès » (2), Dargaud, 10,40 € 

jeudi 30 juillet 2009

BD - Le bonheur de la masse


Turk, dessinateur de Robin Dubois et de Léonard, a toujours été associé à De Groot. Il en a surpris plus d'un quand il s'est lancé dans une nouvelle série avec Clarke au scénario. Le dessinateur de la gentille Mélusine est beaucoup plus acerbe quand il mène la barque. Le héros qu'il a offert à Turk est un grand malade. 

Le Docteur Bonheur a la prétention de guérir toute être humain victime de dépression, mélancolie, tristesse et autres maladies mentales de plus en plus courantes dans notre époque individualiste et stressante. Mais le docteur Bonheur a souvent des solutions radicales. Un discours rassurant avant une intervention définitive. Il veut que le bonheur soit un phénomène de masse, quitte à provoquer quelques dommages collatéraux. Avec son nez rouge et ses lunettes de soleil il pourrait faire penser à un clown. C'est juste un psychopathe qui s'ignore...

De l'humour noir et macabre qui paradoxalement fait du bien quand ça va mal. 48 pages d'un antidépresseur sans rival.

« Docteur Bonheur » (tome 3), Le Lombard, 10,40 € 

mercredi 29 juillet 2009

BD - Le pépé et l'iguane


Napoléon est perturbé. De plus en plus à cran. Ce petit garçon, moitié chinois (par son père) et moitié corse (par sa mère), vit très mal la perte de son grand-père. Un pépé qu'il aimait et qu'il regrette. Mais dans cette série imaginée par Barral et dessinée par TaDuc, le pépé revient assez rapidement sur le devant de la scène. En fantôme. Un fantôme que seul Napoléon peut voir. 

Le second tome débute chez un psychologue, les parents (en plein divorce) cherchant une solution pour permettre à leur enfant de retrouver un minimum d'équilibre mental. La solution : adopter un animal de compagnie qui fera oublier l'absence de l'être aimé. Après avoir hésité entre un chien et un chat, Napoléon revient à la maison avec un iguane. 

Un reptile au caractère bien trempé qui plait d'autant plus à Napoléon qu'il voit lui aussi le fantôme du pépé. Et très rapidement les relations entres les deux vont se détériorer, provoquant gags et situations cocasses exploitées par deux auteurs très en verve.

« Mon pépé est un fantôme » (tome 2), Dupuis, 9,45 € 

mardi 28 juillet 2009

BD - Cuba tourista


Avant de partir en vacances à l'étranger, mieux vaut se renseigner sur sa destination. Ainsi les deux vacanciers, héros de cette nouvelle série de Yves Montagne, ont peut-être choisi Cuba pour de mauvaises raisons. 

Ce gentil couple, composé d'Alex, un peu casanier et horriblement jaloux et d'Anna, plus aventurière et ouverte aux rencontres avec les autochtones, aurait du oublier les clichés de Cuba la rouge, fière et chaleureuse. Ils débarquent dans un pays où le touriste est avant tout un pigeon à plumer. Une première impression qui sera cependant atténuée par la suite grâce à la musique, seul plaisir et surtout liberté accessible à tout le monde. 

Cet album, tout en offrant une vision réaliste et non édulcorée de Cuba, n'en oublie pas de faire rire le lecteur. L'auteur a donc exagéré la mauvaise humeur d'Alex, entraîné malgré lui dans des galères de plus en plus importantes. Le dessin, très fluide et dynamique, se veut humoristique tout en situant l'histoire dans des décors plus vrais que nature.

« Les vacanciers » (tome 1), Vents d'Ouest, 9,40 € 

lundi 27 juillet 2009

Polar - Tarquin Hall, expert en intrigues indiennes

La première enquête de Vish Puri, détective privé indien, a l'honneur d'inaugurer la nouvelle collection « Domaine policier » de 10/18


Il fait un peu penser à Hercule Poirot. Mais il évolue dans un monde radicalement différent. Vish Puri, Chubby pour les intimes, Boss pour ses employés, est le meilleur détective privé de Delhi. Quelques affaires élucidées avec éclat ont suffit pour lui bâtir une réputation élogieuse. Vish Puri, 51 ans, quelques kilos de trop, fait partie de ces Indiens qui, tout en comprenant l'évolution de leur pays, puissance émergeante où les fortunes s'amassent en peu de temps, regrettent les traditions vieilles de plusieurs siècles et devenues caduques en une décennie.

Ce roman policier de Tarquin Hall, journaliste anglais marié à une Indienne et ayant longtemps vécu dans le sous-continent, est une excellente occasion pour décrire minutieusement l'évolution des mœurs des habitants de cette région du monde. Cet observateur privilégié y a trouvé de nombreuses sources d'intrigues à la sauce indienne.

Casquette et moustache

Vish Puri, surbooké, surmené, mène souvent plusieurs dossiers de front. Notamment celles qui doivent déterminer de la bonne moralité d'un futur marié. C'est le gros de son chiffre d'affaires. Mais parfois il est appelé à s'occuper d'enquêtes plus délicates et passionnantes. Il faut alors savoir se rendre invisible : « Puri qui se targuait d'être un champion du travestissement, ne portait rien d'inhabituel pour l'opération du jour ; pourtant on vous aurait pardonné si, le voyant pour la première fois, vous l'aviez cru réellement déguisé en détective : moustache en guidon de vélo bien cirée (qu'il gardait depuis l'armée), casquette de tweed et lunettes d'aviateur adaptées à sa vue. » Vish Puri, dans ce roman, est sollicité par un avocat qui est accusé du meurtre d'une de ses employée, Mary. La jeune fille, embauchée depuis à peine un mois, a disparu sans laisser de trace. Vish lance ses informateurs sur l'affaire et fait une découverte inquiétante. Peu de temps après la disparition de Mary, le corps d'une jeune femme, violée et défigurée, est découvert au bord d'une route. Cette enquête, qui occupe l'essentiel du roman, est menée tambour battant entre Delhi et Jaïpur.

Drogué au piment

Mais dans ce polar, d'autres intrigues se nouent. Vish Puri est notamment visé par un tueur, heureusement maladroit. Un matin, alors que le détective prenait soin de ses précieux pieds de piments sur la terrasse de sa maison, il essuie des coups de feu. Dans cette enquête, il recevra le renfort, non souhaité, de sa mère, encore plus maniaque et bizarre que notre héros.

On découvrira aussi sa vie de famille, typique d'une certaine bourgeoisie indienne. Vish Puri aime sa femme, un peu moins quand elle s'obstine à lui faire suivre un régime. Plus de sel ni de beurre. Heureusement il lui reste les piments. « Croquer un naga morich revenait à effleurer du plomb fondu avec le bout de la langue. Le palais de Puri, immunisé, réclamait en conséquence des condiments toujours plus forts. Au fil des années il avait développé une véritable addiction au piment ; son seul moyen de se les procurer était de les cultiver lui-même. »

Cette plongée dans l'Inde contemporaine, en plus d'être très dépaysante, est pleine d'enseignements. Une bonne façon de s'intéresser à ce pays en pleine expansion économique et qui comptera de plus en plus à l'avenir.

« L'homme qui exauce les vœux », Tarquin Hall, 10/18, 8,60 € 

dimanche 26 juillet 2009

BD - Mes souvenirs illustrés, extras bis

Dans les années 90, avec l'arrivée de Thierry Tinlot à la rédaction en chef de Spirou, l'animation a pris une autre dimension. Le summum aura été la malédiction de la page 13. Durant des semaines, la page 13 du magazine aura été frappée de multiples maux allant de mauvaises couleurs, à l'inversion de planches en passant par le flou ou le tremblé. Bref, elle devenait illisible. Après avoir envisagé de la laisser en blanc chaque semaine, une solution géniale a été trouvée : il n'y aurait plus de page 13, elle serait remplacée par la 12 bis. Une numérotation qui existe encore aujourd'hui.

Autre animation qui a vite tourné au second degré, l'élan de Frank. Frank est donc choisit pour dessiner des cartouches annonçant « le nouvel élan de la revue ». Mais pour lui, l'élan c'est avant tout un animal. L'élan, bête et pas très futé, geignard et râleur, a commencé à squatter les pages, devenant presque une véritable série. Finalement l'aventure s'est conclue par un album rarissime intitulé « L'élan n'aura jamais d'album »...

Autre grand moment de l'histoire de l'hebdo de Marcinelle : celui entièrement réalisé par Bercovici en 1999. Le dessinateur des Femmes en Blanc est réputé très rapide. Pour dépanner tous les auteurs de la revue (tombés malades en même temps...) il a assuré la quarantaine de planches de toutes les séries. Un numéro collector. Surtout pour les fans de Bercovici...

Chez Tintin, l'animation de la revue passait essentiellement par des opérations spéciales pour les anniversaires des héros. Chaque dessinateur rendait hommage, à sa façon, au héros mis en vedette. Cela permettait à certains « réalistes », à se frotter à des personnages improbables. Hermann dessinant Cubitus, Dupa transformant Ric Hochet  ou Andréas se coltinant Robin Dubois.

Autre cas classique d'animation chez Tintin, l'histoire à suivre à plusieurs mains selon le principe du cadavre exquis. Des planches rares car jamais reprises dans des albums.

PS : Merci aux sites "Journal de Tintin" et "Journal de Spirou" déjà cité dans une précédente note pour les couvertures.

samedi 25 juillet 2009

BD - Mes souvenirs illustrés, extras

Lire un hebdomadaire de bande dessinée dans les années 70 à 90 permettait essentiellement de découvrir en exclusivité les futures aventures des héros les plus importants. Mais cela ne suffisait pas pour attirer le lecteur. Les rédacteurs en chef ont donc de tous temps cherché à animer les pages, donner de l'inédit qui ne sera pas revu ailleurs. Cela a permis à Franquin de dessiner d'horribles monstres et Yann et Conrad de s'affirmer comme les sales gosses de la BD.

De toutes les animations, ce sont les hauts de pages de Yann et Conrad qui m'auront le plus marqué. Les deux jeunes auteurs français avaient la possibilité de dessiner une bande dessinée extraplate en haut des planches. Du noir et blanc, qui souvent faisait référence directement à la planche publiée en dessous. Une rubrique qui a fait débat, certains lecteurs se plaignant de cet humour noir. Mais la véritable levée de bouclier eut lieu chez les auteurs. Ce n'est pas parce qu'on travaille dans un journal humoristique qu'on a de l'humour... Parmi les têtes de turc de Yann et Conrad il y avait Devos et son Génial Olivier très daté, Yoko Tsuno ou Papyrus. Rapidement, sous la pression, certains gags ont été supprimés. Sur la vingtaine de hauts de page prévus, moins d'une dizaine paraissaient. L'expérience n'a pas duré très longtemps (un peu comme le Trombone illustré), mais aura soufflé en vent de fronde et de folie sur l'hebdo qui aura certainement conquis un nouveau public. On retrouve l'esprit de cette rubrique actuellement dans la page « La galerie des illustres » avec un strip écrit par Yann (qui n'a rien perdu de sa causticité) et dessiné par Léturgie, digne héritier de Conrad.


L'animation classique se faisait en couverture. Tintin, sans proposer d'aventure du reporter à la houppe (ou des repasses de versions anciennes), avait tout le temps une présence « hergéenne » en couverture. Des illustrations fournies par le studio, pas toujours de première fraîcheur. Spirou de son côté voulait une présence permanente de son héros principal en couverture. Longtemps Franquin a dessiné une vignette, notamment pour présenter les débuts des nouvelles séries. Ensuite, il s'est lassé et durant une longue période il a inauguré sa série de monstres. D'horribles bestioles étaient en une. Du grand art.

Ensuite, Tome et Janry ont pris le relais, avec brio, incorporant le Petit Spirou à ces dessins originaux. Toujours en couverture de Spirou, d'autres dessinateurs ont assuré l'animation. Notamment Roba avec des clowns montrant toute l'étendue de son talent graphique.

(A suivre demain) 

vendredi 24 juillet 2009

Roman - Apôtres, le grand retour

Que se passerait-il si l'un des apôtres de Jésus revenait sur Terre de nos jours ? Jean-Olivier Tedesco nous apporte la réponse.


Sa première intervention publique a bouleversé la France entière. Invité d'une célèbre émission d'actualité du dimanche, un certain Ben Youssef, travailleur immigré d'origine arabe, captive son auditoire et les millions de téléspectateurs. Son message, de paix et d'amour, dénote en cette année 2006 mais redonne espoir à tout un pan de la population. Et les spécialistes ont remarqué qu'il n'a prononcé que des phrases extraites de l'évangile selon saint Jean. De là à penser qu'il s'agit de la réincarnation de l'apôtre de Jésus Christ... Problème : après l'émission il disparaît aussi vite qu'il est apparu.

Dès le lendemain, Augustin Lévêque, le véritable héros de ce thriller politico-religieux de Jean-Olivier Tedesco, entre en scène. Augustin est au plus bas côté moral. Au chômage depuis de nombreux mois, il avait pourtant une place en or. Physionomiste à l'Elysée, il était directement affecté au Président, son regard acéré lui permettant de lire au fond des âmes des visiteurs de marque. Il avait le pouvoir à portée de main mais n'en a pas profité. Devenant trop dangereux car beaucoup trop bien informé des secrets de la République, il s'est fait licencier comme un malpropre après une cabale lancée contre lui par des envieux.

Dépressif, il était au bord du gouffre, pratiquement SDF, quand une femme s'est apitoyée sur son sort. Depuis il vivote chez cette Myriam, l'aimant sans être véritablement amoureux. Son ancien chef le recontacte : il doit retrouver ce fameux Ben Youssef. Les plus hautes autorités catholiques françaises recherchent également Ben Youssef qui semble réaliser des miracles partout où il passe.

La première partie du roman raconte cette chasse à l'homme dans Paris, Augustin lisant littéralement la bonté et la joie dans les yeux des passants ayant croisé la route de Ben Youssef.

Onze disciples

La suite du roman se passe à New York, Ben Youssef a recruté onze disciples devant porter sa bonne parole et Augustin sera le témoin de cette formidable aventure. Au cours d'une réunion préparatoire, il s'étonne et le dit à Ben Youssef : " A regarder ces onze hommes rassemblés autour de toi, qui aurait pu croire qu'ils étaient venus là pour sauver l'humanité et assurer enfin le triomphe de Dieu ? On aurait plutôt dit un gang venu préparer un mauvais coup. " On suit avec passion les découvertes d'Augustin, sur ce nouvel apôtre, mais également sur ses origines, simple mortel doté d'un don extraordinaire et qui semble promis à un destin hors du commun.

"Jean l'Imposteur", Jean-Olivier Tedesco, Albin Michel, 19,50 euros 

jeudi 23 juillet 2009

BD - Variations sur la solitude par Renaud Dillies dans "Bulles et nacelle"


Un petit souriceau dans une maison loin de la civilisation. Il s'appelle Charlie et est écrivain. Du moins c'est ce qu'il prétend, car son oeuvre, pour l'instant, se résume à une montagne de feuilles froissées. 

Charlie, dans l'introduction de ce long récit de Renaud Dillies, explique sa joie de vivre seul. Il ne dépend de personne, fait ce qui lui chante quand il veut. Reste que parfois, il se sent un peu seul. Une solitude de plus en plus pesante qui va prendre la forme d'un oiseau bleu qui intervient directement dans le récit. Charlie va tenter de s'en faire un ami, mais le volatile est difficile à apprivoiser et n'en fait qu'à sa tête. Cette histoire, aux faux airs de BD animalière, hésite entre philosophie et poésie. 

Les plus belles pages sont celles où l'auteur réinvente un monde enfantin de manèges et de personnages masqués. Savourez les pages du carnaval dans lesquelles ont retrouve toutes les origines nordistes de ce jeune auteur s'étant fait remarqué par l'album « Betty Blues » publié chez Paquet. La musique y avait une grande importance, comme dans la vie de Charlie, souris, écrivain et guitariste.

« Bulles et nacelle », Dargaud, 15,50 € 

mercredi 22 juillet 2009

BD - "Lilly et le Lord", dernier épisode de la saga des Rochester


Clap de fin sur la série des Rochester. Atypique, elle n'a pas su séduire un nombre suffisant de lecteurs. Dommage, sans être transcendante, elle permettait au lecteur de passer un agréable moment, dans une ambiance « so british », avec l'humour qui va avec. Dessinée par Philippe Wurm, elle était une des nombreuses créations de Jean Dufaux. Il était persuadé qu'elle passionnerait le grand public, dans une postface il fait un constat d'échec, clame sa colère, s'en prend essentiellement à lui, tout en regrettant que les « albums se soient noyés dans la masse ». Cette dernière histoire a le mérite de boucler la boucle. 

Les deux héros, Lady Elza Rochester et Jack Lord, mariès puis divorcés avec pertes et fracas, vont finalement se retrouver après ces errances mouvementées. De même, le destin de Feet, clochard et indic, va basculer car il pourra enfin se réconcilier avec sa mère, et retrouver son titre : lord Feetburry-Hampton. 

Quant au personnage principal de l'histoire, Lilly Hot Legs, artiste de cabaret, elle fera chavirer bien des coeurs en interprétant son rôle de sauvageonne vivant nue en Afrique.

« Les Rochester » (tome 6), Dupuis, 13,50 €  

mardi 21 juillet 2009

BD - La vengeance du corsaire


Jean-Yves Delitte a le titre très convoité de peintre officiel de la Marine. Ce dessinateur de BD, passionné de vieux gréements, embarque une nouvelle fois ses lecteurs dans un récit de pirates se déroulant en pleine guerre d'indépendance américaine, entre côte atlantique et mer des Caraïbes. 

Black Crow, corsaire du roi d'Angleterre, a pour mission de couler un navire néerlandais, affrété par les Français pour acheminer des armes aux colons insurgés. Pour attaquer ce bâtiment, Black Crow volera un galion français encore plus armé. Ce personnage, Américain toujours fidèle au roi, ayant du sang indien, n'est pas un exemple. Son moteur c'est la vengeance. Il se met au service des Anglais pour se venger des Français qui ont massacré sa famille et sa tribu. 

Mais dans cette guerre, essentiellement économique, les coups bas sont légion et Black Crow constatera amèrement que la parole donnée par un gradé, quel que soit son camp, est rarement tenue. Un récit assez noir et pessimiste, mais qui, au final, est très proche de la réalité de l'époque.

« Black Crow » (tome 1), Glénat, 13 € 

lundi 20 juillet 2009

Polar - Istambul tremble

Le 17 août 1999, un tremblement de terre frappe la Turquie. Dans les décombres, le commissaire Orkan découvre le cadavre d'un homme égorgé.


La ville d'Istambul est au centre de ce roman policier qui a pour premier mérite de mieux nous faire connaître la Turquie. Larif Marsik, l'auteur, décrit un pays encore à la croisée de son destin. Entre la tentation islamiste, la rigueur des militaires contrôlant toujours le pouvoir et l'envie d'émancipation d'une partie de la population, les choix sont cruciaux et périlleux. Et pour s'immerger dans cette réalité turque rien de tel que ce polar qui se déroule au lendemain du terrible tremblement de terre du 17 août 1999. Des milliers de victimes, des villes entièrement détruites, l'incapacité du pouvoir à prévoir puis à réagir.

Dans la nuit du 17 août, la terre tremble. Un seul des trois personnages principaux est sur place au moment de la secousse. Le commissaire Orkan, est surpris en plein sommeil. Son immeuble résiste, il descend dans la rue et découvre l'étendue des dégâts : « Jamais silence aussi bruyant. Istambul, grouillante, populeuse, frénétique, devenue presque figée de stupeur. Orkan marchait, tanguait plutôt, au milieu d'une tempête urbaine où des murs incertains formaient des vagues monstrueuse, prêtes à vous engloutir. Partout les mêmes scènes de ces habitants précipités hors de chez eux aux premières secousses, aux premiers signes du chaos, qui attendaient, implorant l'aide d'Allah, de la police, de l'armée. » Orkan va participer aux premiers secours. C'est dans ce cadre qu'il découvre sous des gravats le corps d'un jeune homme. Mais il n'est pas mort écrasé : il a la gorge tranchée. Malgré l'état d'urgence, Orkan va décider d'enquêter, de retrouver l'identité du mort et démasquer son assassin.

Sibel l'infirmière

A côté du récit policier classique, Larif Marsik va décrire la vie à Istambul à travers les sensations de deux autres personnages. Sibel, d'origine turque, est infirmière en France. Elle arrive le lendemain du tremblement de terre, membre d'une délégation de la Croix rouge devant estimer l'ampleur des secours à mobiliser. Rapidement elle est dépassée par l'horreur de la situation. Ainsi, un soir, en rentrant, « elle s'allongea sur le lit. Elle ferma les yeux. Des ombres apparurent. Celles de ces gens qui criaient, qui pleuraient. Elle frémit en constatant qu'elle ne pouvait rien pour eux. »

Mehmet le dealer

Mehmet lui n'a pas choisi de venir à Istambul. Fils d'émigré turc venu fournir une main d'oeuvre bon marché à l'Allemagne, il ne connaît pas le pays. Dealer pour une petite bande, il doit fuir Berlin après une transaction avortée avec des Polonais ayant décidé de se venger. Il débarque lui aussi le lendemain de la secousse, après des heures de trajet en bus. Un cousin d'un ami lui a trouvé une chambre. Le soir, seul, il prend conscience de sa situation. « Quelque chose d'indéfinissable s'empara alors de lui. Un mélange de fatigue, de désespoir. Il se mit à frissonner. Sa vie basculait. Il n'y pouvait rien. Il prit peur. »

Ces trois vont rapidement se croiser. Sibel est la cousine d'Orkan. Un soir, ils dîneront au restaurant et iront boire un verre dans un club où Mehmet a trouvé un travail de vigile. Ce chassé-croisé va se poursuivre au gré de l'enquête du flic, des doutes de l'infirmière ayant décidé de rester à Istambul, abandonnant travail et mari français, et de la descente aux enfers du dealer tombé sous la coupe de la mafia locale. Avec en toile de fond ce pays gangrené par la corruption, les lourdeurs de la religion et la mainmise de la mafia sur une bonne partie de l'économie. C'était la Turquie d'il y a dix ans. Il y a de fortes chances pour que tout y soit encore rigoureusement d'actualité.

« Tremblement de terre », Larif Marsik, Éditions du Masque, 6,50 € (Ce livre a obtenu le Prix du roman d'aventures 2009) 

dimanche 19 juillet 2009

BD - « Vous êtes ouverte ? »


Entrez sans crainte dans le monde de la grande distribution. Tant que vous êtes le client, vous ne risquez rien. Par contre, si vous passez de l'autre côté de la barrière, prenez garde. Cette aventure est arrivée à Anna Sam. Etudiante en littérature, elle a accepté un boulot d'hôtesse de caisse pour financer ses études. Un petit boulot devenu un travail à plein temps. Et pour enjoliver ce quotidien, elle a entrepris de raconter les nombreuses anecdotes de ses journées dans un blog. 

Un million de visiteurs plus tard, Anna Sam a décliné le blog en roman, chez Stock, et maintenant en bande dessinée. C'est Wol qui s'est chargé de l'adaptation alors que l'exécution graphique de la série était confiée à Julien et Mathieu Akita, deux frères franco-japonais. Cela donne un recueil de gags d'une demi-page, souvent irrésistibles. L'héroïne est confrontée à différents clients problématiques. Cela va du sans gêne qui passe devant les autres au voleur sans oublier le mangeur, refusant de payer les sachets de victuailles qu'il vient d'engloutir en faisant la queue à la caisse. 

Il y a également les acheteurs honteux, souvent de préservatifs ou de DVD de charmes. Toute une galerie (une caissière accueille, en moyenne, 250 clients par jour) de malotrus qui rendent ce métier, déjà ingrat à la base, encore plus éprouvant. Alors la prochaine fois que vous irez dans une grande surface, n'oubliez pas de sourire à la caissière. C'est un être humain comme les autres, pas un robot en encore moins la femme invisible...

« Les tribulations d'une caissière », Soleil Nomad, 9,95 €






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vendredi 17 juillet 2009

BD - Beaucoup de CDM, un peu de Janssens

Dans la famille CDM, Julien et Mo signent le sixième tome des aventures intersidérales de Cosmik Roger. Julien qui fait une infidélité à son collègue pour s'acoquiner avec Janssens, le scénariste des aventures de Planet Ranger, « l'écolo le plus con de la planète ». Ces deux albums ont pour point commun de proposer un humour efficace et sans barrières.


Planet Ranger est un nouveau venu. Il est chargé de démasquer les pollueurs et autres massacreurs de la planète. Pour lui, trier ses poubelles est essentiel. De même, il ne faut plus utiliser d'énergie fossile. Personnellement, il fait fonctionner le moteur de sa fusée portable à la vieille huile de friture. Efficace pour celui qui a le nez bouché... Les auteurs se moquent ouvertement de cette pensée verte dominante, parfois totalitaire, souvent provoquant plus de dégâts que les solutions existantes. De l'humour caustique qui devrait faire grincer les dents de bien de bobos se prenant un peu trop au sérieux...


Plus délirantes encore les aventures de Cosmik Roger. Ce héros commence à être bien connu des lecteurs de Fluide Glacial. Ce « Tragical Cosmik Tour » est le 6e recueil de ses histoires courtes. Dans la première, Notre héros (explorateur sidéral poissard à la recherche d'une planète habitable par l'homme), découvre qu'il est le dernier descendant d'Elvis Presley. Flanqué d'un manager peu scrupuleux, il va décider de monter sur scène interpréter les standards de son ancêtre. Cosmik Roger y croit dur comme fer, rêvant déjà aux groupies qu'il pourra entraîner dans son lit après les concerts. Le problème, c'est qu'en étant totalement dénué de talent, il n'est pas évident de percer dans le créneau assez encombre de rock star. Le personnage principal, looser libidineux imbu de sa personne, fait déjà partie du Panthéon des héros idiots mais désopilants.

« Planet Ranger » (tome 1), Le Lombard, 10,40 €

« Cosmik Roger » (tome 6), Fluide Glacial, 9,95 € 

BD - Une tueuse en herbe dans l'univers d'IRS


Quand une série rencontre le succès, la tentation de la démultiplier est souvent forte. Reste à trouver l'équilibre entre réelle création et simple recette commerciale. Dans le cas de IRS, il n'a sans doute pas fallu beaucoup insister pour que Desberg, le scénariste, développe « All Watcher ». Le créateur de Larry B. Max aime croiser ses intrigues, y rajouter des ramifications annexes. Dans ce premier titre, on suit les débuts professionnels de la belle Antonia, Italienne un peu volage. Après une nouvelle déception sentimentale, le jour de ses 23 ans, elle est invitée au restaurant par son père. Elle ne l'aime guère. 

Cet austère employé dans un service contentieux cache pourtant bien son jeu. Il lui révèle son véritable métier : tueur à gages. Et lui explique dans la foulée qu'il est temps pour elle de prendre la suite. Antonia a-t-elle véritablement le meurtre dans le sang ? Elle va avoir un embryon de réponse avec son premier contrat. Il s'agit d'éliminer un fonctionnaire américain un peu trop curieux : Larry B. Max. 

Dessiné par Queireix, ce premier tome est dans l'esprit de la série d'origine. Avec cependant un peu plus d'humanité, le personnage principal d'Antonia se révélant au final assez attachant.

« IRS All Watcher » (tome 1), Le Lombard, 6,95 € jusqu'à la fin de l'année puis 10,40 € 

jeudi 16 juillet 2009

BD - Joe a la trouille


Difficile d'adapter un roman de Marc Behm. C'est pourtant le pari relevé par Joe G. Pinelli aidé de Jean-Hugues Oppel au scénario. « Trouille », paru chez Rivages Noir, fait partie de ces polars où la noirceur est absolue. 

La cavale du héros est sans espoir. On le suit pourtant avec passion, malgré la fin inéluctable. Joe Egan a peur d'une femme, blonde vêtue d'un ciré. Quand il la voit, il sait que quelqu'un dans son entourage va mourir. Et une fois adulte, il se doute qu'un jour ce sera son tour. Il décide alors de fuir, le plus loin et le plus vite possible. Il abandonne sa petite vie tranquille de fonctionnaire pour aller de partie de poker en partie de poker. Il a des hauts. Des bas aussi. 

A la rue, abandonné de tous, il trouvera pourtant toujours la force de se remettre en selle. Parfois il se posera quelques temps. Avec une femme passionnée par le jeu, seul dans une cabane au fond des bois ou avec une sorcière noire, adepte du vaudou, maîtresse volcanique. 

Joe Pinelli abandonne l'autobiographie pour des pages très sombres malgré des couleurs directes parfaitement maîtrisées.

« Trouille », Casterman & Rivages Noir, 17 € 

mardi 14 juillet 2009

BD - Pluie d'acier futuriste


Ambitieuse série de science-fiction, « Echo » de Terry Moore interpelle d'abord par la qualité de son dessin. Un réalisme léché et précis, d'autant plus mis en valeur que les 130 pages du tome 1 sont en noir et blanc. L'action débute dans le désert californien. Au-dessus exactement. Une femme teste une nouvelle combinaison de vol en métal liquide. 

Un essai extrême, l'armée n'hésitant pas à tirer des missiles sur le prototype. La pilote n'en réchappe pas, la combinaison se transforme en une multitude de gouttes qui retombent à terre. Notamment sur Julie Martin, jeune femme faisant des photographies du désert. Julie qui va voir sa vie basculer, les gouttes se rassemblant sur son corps pour en recouvrir tout le buste. Elle va devoir apprendre à vivre avec cette seconde peau quasi indestructible. Et très recherchée, les militaires américains voulant récupérer ce qui leur appartient. 

Une héroïne en fuite, des officines secrètes, une tueuse implacable, un secret d'Etat : tout est en place pour une histoire passionnante prévue en 5 tomes, le second opus étant annoncé pour début 2010.

« Echo » (tome 1), Delcourt, 12,90 € 

lundi 13 juillet 2009

Thriller - Dérive sexuelle en Chine

Entreprendre en Asie du Sud-Est n'est pas de tout repos. Surtout quand on flirte avec la loi. Un thriller torride de Marc Boulet.


Avec « Le roi de Pékin », vous pouvez, à moindre frais, vous offrir une bonne dose d'exotisme et de dépaysement. Ce roman, entre le témoignage ethnologique et le thriller, signé Marc Boulet, débute aux Philippines puis se poursuit en Chine, à Pékin. Le héros, Marc, a débarqué en Asie du Sud-Est pour son travail de journaliste. Il a couvert la chute de Marcos. Il est resté aux Philippines pour finalement s'associer avec un autre Français, Roger, ancien militaire. Ils rachètent un dancing au bord de la plage de Sabang, une zone très touristique. Le Paradise sert de l'alcool, diffuse de la musique et accueille en son sein de nombreuses hôtesses. Un terme politiquement correct pour désigner des prostituées qui alignent les passes dans des chambres situées à l'étage. Marc et Roger touchent une partie des revenus. En clair, ils sont devenus de prospères proxénètes. Marc, marié à Jade, une Chinoise, économise ainsi des milliers de dollars.

Un bordel à Pékin

Tout se passe parfaitement jusqu'au jour où il découvre une de ses filles assassinée dans le bureau du dancing. Elle a eu le temps de désigner son meurtrier : Roger. Ce dernier était sur une mauvaise pente. Abusant du cannabis local, il était de plus en plus en dehors de la réalité en étant notamment persuadé d'être entré en relation avec les extraterrestres. Après une nuit de doute, Marc décide, sous la pression insistante de Jade, de livrer Roger à la police, sachant que cela condamne son commerce. Roger reconnaît les faits et écope de plusieurs dizaines d'années de prison.

Marc vend le Paradise et quitte les Philippines pour rejoindre la Chine et la famille de sa femme. Là, il s'associera avec Dragon, son beau-frère, pour ouvrir un nouveau bordel dans cette Chine qui se libéralise, lentement mais sûrement. Les affaires sont moins florissantes qu'aux Philippines, mais suffisantes pour vivre aisément. Tout bascule quand Roger refait son apparition quelques années plus tard...

Vérités chinoises

Marc Boulet, ancien journaliste, parfaitement intégré en Chine (il a débuté sa carrière d'écrivain avec le témoignage best-seller « Dans la peau d'un Chinois »), étoffe son récit en décrivant minutieusement la vie dans ce pays en pleine évolution. Il en profite aussi pour démystifier certains clichés vivaces sur cette civilisation rarement comprise par les Occidentaux : « Avant de m'installer en Chine, je croyais les Chinois fourbes, humbles et serviles. Rien n'est moins vrai. Toujours prêt à plaisanter et à ripailler, le Chinois est un gai luron, doublé d'un frimeur. Quand il dissimule ses opinions ou ses sentiments, c'est pour ne froisser personne. Quand il complimente de manière exagérée, c'est pour faire plaisir. » De même, selon Marc Boulet, « les Chinois ont un grave défaut qui est en fait une qualité : ils se sentent gênés devant les Blancs et s'en méfient, sans aucun doute à raison, après tout le mal et toutes les vexations qu'ils ont subis au cours des derniers siècles. » Le texte alterne donc intrigue pure avec le personnage inquiétant de Roger, considérations plus générales sur la vie en Chine et passages « chauds » quand Marc explique comment il profite du savoir-faire de ses pensionnaires, tant Philippines que Pékinoises. Un savoureux cocktail pour une lecture d'été divertissante tout en étant pleine d'enseignements.

« Le roi de Pékin », Marc Boulet, Denoël, 17,50 € 

dimanche 12 juillet 2009

BD - Redécouvrons Nahomi, héroïne créée par Crisse


Elle s'appelle Nahomi, est Japonaise, princesse, aimant la magie elle a vécu quelques aventures au milieu des années 80 dans les pages de l'hebdomadaire Tintin. Une héroïne aujourd'hui oubliée qui doit la vie à Crisse, le créateur de l'épée de Cristal et d'Atalante. C'était ses débuts dans la BD et ses histoires, gentillettes, enfantines et presque naïves au début, ont fait de plus en plus de place à la magie, au fantastique. 

Les prémices de l'héroic fantasy, genre dans lequel Crisse s'est affirmé comme étant un des meilleurs. Nahomi a connu un beau succès dans le pages de l'hebdo. Elle était très présente, notamment dans des récits complets de 16 pages. De plus Crisse aimait fournir des couvertures au couleurs éclatantes. Il a signé également quelques posters lui permettant de faire exploser son trait.

L'ensemble de cette production de jeunesse est reprise dans une intégrale Nahomi publiée par les éditions du Lombard. On retrouve les trois grands récits (parus en albums mais introuvables depuis très longtemps), des récits complets et des illustrations. Le tout accompagné d'un dossier dans lequel Crisse raconte la genèse de la série, son état d'esprit du moment et, déjà, ses envies de passer à autre chose.

« Nahomi, intégrale », Le Lombard, 18 € 

samedi 11 juillet 2009

BD - Will Eisner for ever


On a trop longtemps pensé, en Europe, que la bande dessinée n'était qu'une affaire franco-belge. En Amérique aussi de très grands créateurs ont contribué à l'éclosion de ce mode d'expression. Le plus grand reste Will Eisner. Totalement ignoré durant des décennies, il a conquis un vaste public avec la publication des aventures du Spirit dans les pages de Tintin (sur une initiative de Greg). Mais ce personnage, récemment adapté au cinéma, n'est qu'une facette de son œuvre. 

Il a débuté en signant des centaines d'histoires, sous divers pseudonymes, dans les fascicules vendus à très bas prix. Un travail à la chaîne, qu'il a raconté, des années plus tard, dans des récits complets devenus des témoignages historiques essentiels. Les éditions Delcourt ont entrepris de rééditer l'ensemble de ces BD, dans un format comics, en noir et blanc.

Dans « Le rêveur », vous découvrirez les débuts de Eisner dans le milieu de la BD. Pas du tout évident. La crise frappait le pays à l'époque. Il a finalement décidé de créer son entreprise avec une mise de fond de 30 $. Aidé d'un bon commercial il a rapidement trouvé des marchés, dessinant nuit et jour pour assurer les commandes. Face à l'afflux de travail, il a créé un studio, permettant à quelques jeunes et aussi des anciens de trouver un revenu fixe. Trois années éprouvantes mais très formatrices. Il a revendu ses parts 30 000 dollars pour aller tenter sa chance en indépendant sur le Spirit, malgré les rumeurs persistantes de guerre.


« Au cœur de la tempête », pavé de 200 pages, Will Eisner reste dans l'autobiographie, mais il raconte les années 40, abordant beaucoup l'antisémitisme ambiant de l'époque et l'histoire de sa famille, des émigrants chassés de leur terre natale et tentant de se faire une place dans ce pays en devenir. Une œuvre magistrale où son trait époustouflant magnifie cette romance des XIXe et XXe siècle.

« Le rêveur, Delcourt, 12,90 €

« Au cœur de la tempête », Delcourt, 17,90 € 

vendredi 10 juillet 2009

BD - Tony Corso règle ses comptes


Tony Corso délaisse la Côte d'Azur le temps d'un album pour retourner dans la ville de son enfance : Rome. Il reçoit un appel au secours de son pote Madgid. Ce photographe de presse s'est retrouvé au mauvais endroit au mauvais moment. Il a assisté à l'assassinat d'une star montante du foot. Le réflexe professionnel a voulu qu'il photographie la scène. 

Depuis il a aux trousses ce qui se fait de plus méchant dans la mafia locale. Il se cache et demande à son pote Tony de le tirer de ce mauvais pas. Corso va imaginer, en quelques heures, un plan qui devrait permettre à Madgid de s'en tirer. Mais c'était sans compter avec la réapparition de vieux fantômes de son enfance. Olivier Berlion, dans cette histoire intitulée « Vendetta », lève un voile sur le passé de son héros. A peine âgé de 10 ans, il assisté à l'assassinat de sa mère par un tueur à gages. 

Ce passé va interférer avec l'enquête actuelle, transformant ces 56 pages en un règlement de compte non prévu mais définitif.

« Tony Corso » (tome 5), Dargaud, 10,40 € (L'intégrale des quatre premières aventures de Tony Corso vient de paraître, 220 pages, 18 €) 

jeudi 9 juillet 2009

BD - La guerrière Aria en plein cauchemar


Aria, guerrière indépendante allant au gré des vents, poursuit sa découverte du pays de l'Ovéron. La contrée était calme et prospère. L'arrivée d'une secte a bousculé l'équilibre. Les trigyres imposent terreur et arbitraire. Ils sont aidés par le grand maître Dragannath qui a pris le pouvoir. Mais si le peuple fait le dos rond, la résistance s'organise. Aria, naturellement, est enrôlée dans les forces libres. Mais elle trouve que ces dernières manquent d'ambition. Elle va donc être au centre d'un plan qui devrait définitivement supprimer les tyrans d'Ovéron. 

Pour cela, elle devra utiliser les pouvoirs magiques de la Mamaïtha. Un produit qui provoque d'horribles cauchemars. Elle en goûtera un peu et se retrouvera face à des monstres terrifiants. Un plan qui oblige Aria à se jeter dans la gueule du loup. Elle mènera sa mission sous les atours d'une courtisane au cours d'une grande fête décadente. 

La série d'heroic fantasy de Weyland, une des plus ancienne du genre, est toujours aussi efficace. L'héroïne est belle, téméraire et ne se laisse jamais marcher sur les pieds. Un caractère de cochon qui ne peut que séduire le public BD.

« Aria » (tome 31), Dupuis, 10,40 € 

mercredi 8 juillet 2009

BD - Quand Christophe Bec imagine la fin du monde


L'avantage avec la bande dessinée, c'est que contrairement au cinéma, un créateur un peu ambitieux n'est pas limité par son budget. Christophe Bec l'a bien compris, se permettant des scènes qui n'auraient pas été imaginables dans la réalité. Le second tome de sa nouvelle série, « Prométhée », donne à voir la chute de milliers d'avions de ligne, la réapparition du Titanic, la destruction de New York par une pluie de déchets spatiaux et l'arrivée de vaisseaux spatiaux extra-terrestres sur les USA. Le tout avec des dessins réalistes criants de vérité. On s'y croirait. 

Toute la planète est en émoi. A 13 h 13, chaque jour, des catastrophes frappent l'Humanité. Les médias tentent de comprendre et certains dénoncent une manipulation planétaire des USA. Un projet secret destiné à imposer un nouvel ordre, une nouvelle religion... Mais dans la coulisse, la vérité serait ailleurs. Il s'agirait d'une invasion d'extra-terrestres hostiles.

 Beaucoup de souffle dans cette nouvelle série où l'auteur, originaire de l'Aveyron, retrouve avec bonheur toute la spécificité de son univers fantastique très personnel.

« Prométhée » (tome 2), Soleil, 12,90 € 

mardi 7 juillet 2009

Polar - Marseille lave plus blanc avec Franz-Olivier Giesbert

Un tueur en série sévit à Marseille. Il égorge ses victimes. Qui sont souvent des crapules finies. L'Immortel enquête.


Ce roman policier, truffé de rebondissements, de morts violentes et de personnages tous plus délirants les uns que les autres, plonge le lecteur dans une ville de Marseille gangrénée par la corruption et les ambitions de quelques gros nababs. Ecrit par Franz-Olivier Giesbert, on prend autant de plaisir à lire ces 300 pages que le journaliste en a éprouvé à les écrire. Car ce polar est avant tout une œuvre de divertissement, un exercice de style parfaitement maîtrisé, idéal pour cette période de vacances et de farniente.

Tout commence par le meurtre de la femme du commissaire Thomas Estoublon. Après une journée de travail, en solitaire, il la retrouve égorgée dans son lit. Très rapidement ses collègues le soupçonnent car le couple battait de l'aile. Seule Marie Sastre, commissaire elle aussi, est persuadée de l'innocence de Thomas. Mais elle ne peut empêcher son incarcération. Le policier, très déprimé, se pendra aux barreaux de sa cellule. Alors que le tueur sévit une seconde fois,, le disculpant à retardement. La presse s'empare des faits divers et baptise l'assassin du sobriquet le « Lessiveur » car il nettoie les scènes du crime avant ses forfaits. Un Lessiveur qui semble mener un combat très personnel, les victimes ne se connaissent pas mais ont au moins un point en commun : elles ne sont pas aussi innocentes qu'il n'y paraît.

Croutes de flic

Franz-Olivier Giesbert déroule son récit en suivant plus spécialement les agissements de trois personnages. Marie Sastre, la policière, pugnace mais si fragile, si attendrissante : « avec son menton décidé et sa bouche à baisers, elle était si naturelle qu'elle n'avait pas à se préoccuper de le paraître. Elle se fichait des apparences. De la sienne, notamment. » Elle tentera de démasquer le Lessiveur avec l'aide de Charly Garlaban, l'Immortel. Ayant survécu après avoir été criblé de balles, il ne sera pas insensible au charme de Marie malgré ses étranges manies, par exemple de s'entretenir des croûtes purulentes en divers endroits cachés de son corps. Un bon palliatif quand son chef s'en prend à elle : « Pendant cet échange, Marie Sastre s'était gratté le bras, puis l'aisselle où elle s'acharna sur une croûte qui finit par tomber. »

Tueur utile

Le troisième personnage clé c'est le Lessiveur. Dans certains chapitres, il commente ses exploits à la première personne. Le lecteur ne sait pas encore qui il est ni ses motivations, mais il a parfaitement conscience de la folie de cet homme, maniaque, sadique mais pas si inutile à la société alors qu'il est en pleine réflexion devant une de ses victimes se vidant de son sang : « Je dois à la vérité que j'éprouvais de la jouissance à le regarder mourir et que cette jouissance n'était pas seulement intellectuelle. Toutes les fibres de mon corps vibraient en même temps. Ce n'était pas tant à cause de la puissance que j'éprouvais devant cette pauvre chose qui se ventrouillait à mes pieds. Non, c'était l'idée d'avoir été utile à quelque chose en punissant une pourriture. J'avais le sentiment du travail accompli. »

Enfin il faut rajouter dans cette galerie des plus réussie la ville de Marseille. Toujours aussi belle et convoitée, elle donne une dimension supplémentaire à ce polar radical.

« Le Lessiveur », Franz-Olivier Giesbert, Flammarion, 19,90 € 

lundi 6 juillet 2009

BD - "Les cairns rouges", quatrième épisode de la série Seuls


Autant le dire d'entrée : un des personnages principaux de « Seuls » meurt à la fin de ce quatrième titre. Fabien Vehlmann, le scénariste, maîtrise parfaitement son sujet. Il parvient à développer l'intrigue générale, tout en donnant une tonalité particulière à chaque opus. 

Cette fois, ce sont des singes qui sont au centre de l'intrigue. Ils semblent s'être échappés du cirque, comme les autres animaux qui traînent en ville. Mais des singes en liberté, dans une ville déserte, adoptent rapidement une attitude étrange. Ils construisent des cairns, des amoncellement d'objets, qu'ils recouvrent de peinture rouge. 

Comme pour délimiter leur territoire. Ils campent dans un théâtre. C'est là qu'ils ont fait prisonnier un bébé. Dodji, Leila, Camille, Yvan et Terry, rejoints par d'autres enfants, eux aussi derniers survivants de l'Humanité, vont tenter de libérer l'enfant. 

Bruno Gazzotti, au dessin, impose de page en page la fluidité de ses cadrages et de sa mise en page. C'est passionnant. Du pur suspense comme on n'en fabrique que trop rarement.

« Seuls » (tome 4), Dupuis, 9,45 € 

dimanche 5 juillet 2009

BD - Fuite spatiale de plusieurs "Fugitifs"


Laurent Verron a longtemps été l'assistant de Roba. Logiquement il a repris les personnages de Boule et Bill. Mais ce dessinateur talentueux a toujours, en parallèle, développé des séries personnelles. Après avoir animé les iconoclastes aventures d'Odilon Verjus (avec Yann au scénario), il vient de lancer une série de science-fiction destinée plus spécialement aux jeunes lecteurs.

 « Fugitifs sur Terra II » raconte la rencontre entre trois jeunes que tout oppose mais qui devront s'unir et se comprendre pour survivre. La princesse Balti est l'héritière du trône. La junte vient de renverser ses parents. Les militaires voudraient bien l'éliminer définitivement. Son vaisseau vient de se crasher près de Pablo, un jeune paysan. De l'épave sort une autre jeune fille, Tiph, la fille du cuisinier du palais. Un trio qui aura l'aide de Bakou, un orang-outang amélioré. 

Si le scénario de Cric est un peu trop simple, on est en admiration devant le dessin, nerveux et très expressif de Verron.

« Fugitifs sur Terra II » (tome 1), Dargaud, 9,45 € 

samedi 4 juillet 2009

BD - Souvenirs émus de la toute première fois


Pour vous, la première fois, c'était à quel âge, où, dans quelle condition et avec qui ? Ces interrogations sont toutes comprises dans le concept de ce recueil d'histoires courtes dessinées par Krassinsky sur la base de récits authentiques d'amis ou d'anonymes. On parle beaucoup de sexe dans cet album, mais jamais de façon vulgaire. 

Par contre, ces premières fois sont souvent originales et comiques. Et sont tout à fait crédibles malgré leur incongruité. Ainsi le témoignage de Juliette qui se souvient : « pendant tout le temps que ça a duré, j'avais cet air dans la tête. Tata Yoyo. Impossible de penser à autre chose ». Ou Charlotte qui se focalise sur la personnalité de son partenaire : « Avec le plus beau mec du lycée. Qui se trouvait être aussi le plus con. » 

Cela touche à l'intime, mais approche de l'universel. Des situations à déguster avec gourmandise car si personnellement on n'a qu'une seule et unique première fois, dans cet album il y en a des dizaines.

« Toutoute première fois », Fluide Glacial, 9,95 € 

vendredi 3 juillet 2009

BD - Cette Afrique tant aimée par "Le Landais volant"


Jean-Dextre Pandar de Cadillac, baron et Landais, part à l'aventure en Afrique. Il arrive plein de bonne volonté, comme pour rattraper toutes les horreurs de ses ancêtres. Mais le continent noir a bien évolué. La naïveté du héros est du pain béni pour quelques aigrefins qui font commerce de l'attrape-nigaud. Mais comme il a bon fond, il fait aussi de remarquables rencontres. 

Cette BD de Nicolas Dumontheuil est très librement inspirée de ses périples en Afrique alors que le personnage est plutôt la représentation de Jean-Denis Pendanx, autre dessinateur des éditions Futuropolis. On retrouve dans ces trois premiers chapitres une Afrique envoutante, celle qui fera toujours rêver les jeunes aventuriers blancs.

« Le Landais volant » (tome 1), Futuropolis, 16 euros 

jeudi 2 juillet 2009

BD - Fuir loin de la banlieue et « Faire semblant les jours d'orage »


Deux jeunes de banlieue. Mike, rêvant de grands espaces, JP, quasi muet, à la force de frappe dévastatrice. Ils végètent entre beau-père violent et mère accro aux soap de la télévision. Pas intégrés, sans avenir. Il faudra un gros fait divers pour qu'ils franchissent le pas. Fuir pour échapper à la prison. Dans leur cavale ils vont croiser la route de Basile, vendeur de lunettes démodées sur le marché. Un trio improbable qui va mettre du temps à s'apprivoiser pour finalement s'entraider efficacement. 

Ce récit de Nicolas Poupon débute dans la noirceur totale et s'achève sur une belle note d'optimisme. Une BD sociale dans l'air du temps.

« Faire semblant les jours d'orage », Delcourt, 16,50 euros 

mercredi 1 juillet 2009

BD - Transition avant une naissance


Un premier enfant, dans un jeune couple, n'est jamais sans conséquence. Et dès les premières semaines de grossesse le fragile équilibre est mis à rude épreuve. C'est la trame de ce récit de Nicolas Vadot. Mais l'auteur aimant mettre en place un univers très personnel, le futur père, durant ces neuf mois, va passer de nuits loin de la réalité. 

En passant sous un un tunnel, il se retrouve sur une route rectiligne au milieu d'un désert. Là, il va rencontrer un marchand de sable, une psychologue, Morphée, et un bûcheron. Sans oublier un jeune chat. 

Poétique, merveilleuse, cette vision de la naissance, éternel recommencement, ne laisse pas indifférent.

« Neuf mois », Casterman, 15 euros