On a trop longtemps pensé, en Europe, que la bande dessinée n'était qu'une affaire franco-belge. En Amérique aussi de très grands créateurs ont contribué à l'éclosion de ce mode d'expression. Le plus grand reste Will Eisner. Totalement ignoré durant des décennies, il a conquis un vaste public avec la publication des aventures du Spirit dans les pages de Tintin (sur une initiative de Greg). Mais ce personnage, récemment adapté au cinéma, n'est qu'une facette de son œuvre.
Il a débuté en signant des centaines d'histoires, sous divers pseudonymes, dans les fascicules vendus à très bas prix. Un travail à la chaîne, qu'il a raconté, des années plus tard, dans des récits complets devenus des témoignages historiques essentiels. Les éditions Delcourt ont entrepris de rééditer l'ensemble de ces BD, dans un format comics, en noir et blanc.
Dans « Le rêveur », vous découvrirez les débuts de Eisner dans le milieu de la BD. Pas du tout évident. La crise frappait le pays à l'époque. Il a finalement décidé de créer son entreprise avec une mise de fond de 30 $. Aidé d'un bon commercial il a rapidement trouvé des marchés, dessinant nuit et jour pour assurer les commandes. Face à l'afflux de travail, il a créé un studio, permettant à quelques jeunes et aussi des anciens de trouver un revenu fixe. Trois années éprouvantes mais très formatrices. Il a revendu ses parts 30 000 dollars pour aller tenter sa chance en indépendant sur le Spirit, malgré les rumeurs persistantes de guerre.
« Au cœur de la tempête », pavé de 200 pages, Will Eisner reste dans l'autobiographie, mais il raconte les années 40, abordant beaucoup l'antisémitisme ambiant de l'époque et l'histoire de sa famille, des émigrants chassés de leur terre natale et tentant de se faire une place dans ce pays en devenir. Une œuvre magistrale où son trait époustouflant magnifie cette romance des XIXe et XXe siècle.
« Le rêveur, Delcourt, 12,90 €
« Au cœur de la tempête », Delcourt, 17,90 €
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