La guerre est génératrice de peur, parfois de bravoure, la plupart du temps d’attente. Le soldat doit être discipliné et patient. Dans cette longue nouvelle d’Hubert Mingarelli, quatre soldats russes de l’Armée rouge apprennent à se connaître, à s’apprécier et se soutenir dans les longues périodes d’attente entre deux mouvements et une attaque pendant l’année 1919.
Le narrateur, Bénia, est un orphelin qui travaillait dans une scierie. Sa mobilisation a changé sa vie, sa conception de l’amitié. Un jour, au cours d’une marche forcée, il est le témoin d’une scène violente entre un simple soldat et un sous-officier dépassé par les événements. Cela suffit pour qu’il se rapproche de Pavel. Pavel devient son ami, son alter ego. Devenus inséparables, les deux soldats se comprennent et seront rejoints peu de temps après par Kyabine, "un grand con d’Ouzbek" qui perd tout le temps son tabac aux dés. Après il le mendie à ses deux amis.
L’hiver arrive, il faut se retirer dans une forêt, construire une cabane de bois et tenter de survivre. Le trio accueille dans son giron Sifra, jeune et timide. La petite bande se soudera définitivement dans la rigueur de l’hiver russe. Une cabane astucieusement construite, des corvées de bois judicieusement réparties et cette vie devient plus supportable.
Avec des mots simples et justes, Hubert Mingarelli raconte la lente construction de cette amitié. Bénia, qui de tout temps était condamné à la solitude, apprécie particulièrement cette complicité. Les habitudes qui rythment les journées immobiles. L’heure de la soupe, la balade vers un étang, la baignade, les parties de dés et les cigarettes longuement dégustées. Ces petits riens qui font tout dans la vie des soldats. A quelques kilomètres de là, sur le front, on s’entre-tue. Pourquoi ? Les quatre amis n’ont pas de réponse. Ils savourent simplement ces moments de tranquillité.
Un jeune volontaire sachant écrire sera chargé par le quatuor de noter dans son cahier à spirales ces moments de bonheur, comme pour les figer à jamais dans leur mémoire. Jusqu’à ce que la guerre les rattrape et bouscule ce fragile édifice patiemment construit par une amitié forte et sans limite.
« Quatre soldats », Hubert Mingarelli, Seuil, 15 € (5,50 € en édition de poche chez Points)
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