vendredi 1 octobre 2021

Témoignage - Gérard Haddad écrit à sa bien-aimée disparue

Témoignage exceptionnel de rigueur et de tendresse que celui de Gérard Haddad. Ce psychologue et psychanalyste, également écrivain, raconte la fin de vie de son épouse, Antonietta. Exactement il décide de lui écrire des lettres alors qu’elle n’est plus là. Elle n’est pas morte, mais la maladie d’Alzheimer lui a enlevé parole et sensations. Surtout, elle a tout oublié de leur vie commune de 50 ans. 

Dans ce récit Gérard Haddad se dévoile. Comment il est tombé amoureux de cette jeune étudiante, vive et hyperactive. Comment ils ont décidé de vivre ensemble, partageant tout. L’équilibre qu’ils ont trouvé dans leur vie d’intellectuels, entre France, Italie et Israël. Une trop belle histoire que la maladie vient briser. « Je pensais que nous vieillirons du même pas, c’était la belle promesse du soir que j’espérais, et que la mort nous saisirait ensemble. Le sort, dans sa méchanceté, ne l’a pas voulu. » Les premiers signes sont diffus. Et le mari, souvent, refuse de les voir. 

Comme ces dernières vacances passés en Italie, dans le petit village de Monterosso dans les Cinque Terre. Antonietta, d’ordinaire si joyeuse et active, refuse de se baigner, rechigne aux découvertes. C’est après cet été qu’en plus de l’esprit, son corps lâche. Gérard Haddad raconte sans fard ces mois au cours desquels il doit être présent en permanence, s’occuper de cette femme d’ordinaire totalement indépendante comme un enfant. Jusqu’à la changer et la préparer pour la nuit. C’est pourtant dans cette épreuve que Gérard Haddad se découvre et signe les plus belles pages de cet amour infini : « Cette horrible maladie me faisait accéder au pur amour que tu voulus m’enseigner depuis le premier jour et que je ne sus recevoir qu’au moment de ce désastre. […] Notre amour que je croyais fané avait ressurgi, triomphant, vainqueur, infini. » Quelques mois de répit. 

La fin du livre est très dure, comme la lente extinction d’une femme qui a toujours été une lumière dans la vie de l’auteur. 

« Antonietta, lettres à ma disparue » de Gérard Haddad, Éditions du Rocher, 16,90 €