Sage-femme fraîchement diplômée, Angélina s'est juré d'honorer le nom et le métier de sa mère, alors qu'arrive « Le temps des délivrances ».
Il est des évidences difficiles à contester, Marie-Bernadette Dupuy possède une plume d'une prolixité telle qu'elle frise parfois la démesure. La quantité au détriment de la qualité, voilà ce que peut craindre le lecteur.
L'auteure ne partage (évidemment) pas cet avis, elle qui déclare en préambule de son livre : « Une demande qui revient fidèlement au fil des courriers et des rencontres : une suite, écrivez-nous une suite ! ». On veut bien la croire et certes, ces papivores-là ne sont pas déçus, les romans-pavés de M-B Dupuy comptent rarement moins de 700 pages. Et 700 de plus pour la suite, et 700 autres pour la suite de la suite. Un peu comme ces films qui obtiennent un succès d'audience tel que les producteurs et/ou réalisateurs ne résistent pas à l'envie de tourner un deuxième, troisième, quatrième voire cinquième opus (cf Terminator où ce brave Schwarzy finit par s'essouffler un rien. Faut dire qu'à l'époque, il ne s'était pas encore mis à la bière light). « Le temps des délivrances » ne déroge donc pas à la règle, qui succède aux « Mains de la vie ».
La bonne et l'enfant
Vous l'aurez compris, je ne suis pas particulièrement fan de ce genre de production littéraire. Beaucoup de redondances, un côté bien-pensant quelque peu agaçant, d'inévitables répétitions à peine déguisées (il faut bien les remplir, ces 700 pages ! Aussi, vous deviendrez incollable sur la manière d'accoucher au XIXe siècle ) et un style plutôt ampoulé. « La liberté ne siérait qu'aux hommes, reprit-elle. Ils prennent leur plaisir et après ils s'en vont sans se soucier des conséquences. (…) Vous étiez tout disposé à faire de même avec moi, me conquérir et me laisser derrière vous ! (...) A présent ivre de rage et de chagrin, Angélina le saisit par les épaules. Elle lui murmura de très près : (…) sans Gersande (sa bienfaitrice, ndlr), mon enfant serait un bâtard ! Elle était si proche de lui qu'il eut un élan instinctif vers elle, autant pour la faire taire que sous le coup d'un désir impérieux. L'enlaçant avec fermeté, il s'empara de ses lèvres, douces et satinées ».
Malgré ses faiblesses, le livre présente néanmoins quelques aspects séduisants. Les aventures d'Angélina, jeune sage-femme de 22 ans dans la petite ville ariégeoise de Saint-Lizier en cette fin XIXe, se révèlent pleines de rebondissements. Assez peu crédibles sans doute et attendus, sûrement. Une vieille aristocrate bienfaitrice de la costosida (sage-femme en occitan), deux jeunes hommes séduisants dont l'un est le père de son enfant caché, une petite bonne recueillie alors qu'elle mendiait, en guenilles, sur le parvis d'une église, un père qui commence par la renier (fricoter en dehors des liens sacrés du mariage, il trouvait ça moyen) mais ensuite pardonne et tombe sous le charme de son petit-fils. Autant de bons vieux clichés qui font pleurer dans les chaumières mais, accommodés à la sauce Dupuy, assurent quelques heures d'évasion aux lectrices en mal de « belles histoires ». D'un romantisme échevelé par bien des côtés, elles sont agrémentées de quelques scènes de sexe osées juste ce qu'il faut pour ajouter un zeste de piment à l'ensemble. Passages qui feraient tout juste ricaner monsieur Grey, mais M-B Dupuy ne joue pas dans la nuance.
D'ailleurs, c'est bien pour cette raison qu'on finit par la trouver sympathique, Marie-Bernadette. Sans autre prétention que de les contenter, elle propose à ses lecteurs(trices) d'abandonner le temps d'une lecture, leur quotidien accablé par les soucis, et de s'immerger dans l'univers de rêves et d'illusions sorti tout droit de son imagination.
Fabienne HUART
« Le temps des délivrances - Angélina », Marie-Bernadette Dupuy, Calmann-Lévy, 22,50 €
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