samedi 30 novembre 2024

Thriller - « Éruption », roman brûlant signé Michael Crichton et James Patterson

 Alors qu’un volcan à Hawaï entre en éruption, menaçant la population, un autre danger, encore plus grand, risque de provoquer l’extinction de toute vie sur terre.


Mort en 2008, Michael Crichton, romancier américain devenu mondialement célèbre avec son Jurassic Park, n’a pas eu le temps de finaliser son ultime thriller. Un sujet qui lui tenait particulièrement à cœur : les volcans et Hawaï. Il avait accumulé une importante documentation et rédigé le début de l’intrigue. Une œuvre inachevée que sa veuve a longtemps préféré ignorer. Et puis la rencontre avec James Patterson, autre écrivain US expert en best-seller, a débloqué la situation. Voilà comment on peut trembler en découvrant Éruption, l’ultime cauchemar imaginé par Michael Crichton et mis en forme par James Patterson.

En ce début d’année 2025, la grande île d’Hawaï ne cesse d’être secouée. Les entrailles de la terre ont la bougeotte. Et comme souvent, ces secousses vont déboucher par une nouvelle éruption du volcan Mauna Loa. Une de plus dans la longue carrière de John MacGregor, volcanologue habitué aux caprices de notre planète. Mais peut-être aussi la dernière car selon toutes les observations de son équipe depuis des mois, c’est une éruption record qui est en train de se préparer. Au point qu’il craint pour la ville de Hilo, la plus grande de l’île.

Le roman va raconter, heure après heure, la préparation de l’éruption. Avec en plus un danger supplémentaire car pas loin du volcan sont entreposés des déchets toxiques mortels. Un double danger pour un héros intelligent, courageux, volontaire, sans faille. Le prototype du bon Américain, capable de tous les sacrifices pour sauver sa planète.

Un côté héros inébranlable toujours un peu irréaliste quand on sait comment cela se passe en réalité, mais c’est une grande spécialité américaine. Cela lui donne l’occasion d’avoir cette pensée, un soir sur une plage du Pacifique : « Mac prit le temps de s’imprégner de la scène, s’émerveillant de la perfection du monde vu d’ici. Seuls le clapotis des vagues devant lui, et de temps à autre le chant d’un oiseau nocturne, venaient rompre le silence. Il avait l’impression d’être le dernier homme sur Terre. Voilà ce qu’on essaie de sauver, songea-t-il. Ce qu’on doit sauver. »

Écrit comme un film à grand spectacle au budget illimité, ce roman est prenant car sans doute peu éloigné d’une possible réalité.

« Éruption » de Michael Crichton et James Patterson, Robert Laffont, 448 pages, 23 €

vendredi 29 novembre 2024

Une intégrale jeunesse - Les débuts de Chien Pourri


Animal préféré de nombreux jeunes lecteurs, Chien Pourri, après de nombreuses aventures, connaît enfin la consécration avec la sortie, quelques semaines avant les fêtes de fin d’année, du premier tome de l’intégrale de ces histoires imaginées par Colas Gutman et illustrées par Marc Boutavant.

Vous y découvrirez quatre romans, dont le premier qui présente ce drôle d’animal : « né dans une poubelle, qui sent la sardine » et dont le pelage ressemble à une « vieille moquette râpée ». Avec Chaplapla, autre estropié de la vie, il va aller à l’école, à la plage et fêter Noël.
« Les aventures de Chien Pourri » (intégrale 1), École des Loisirs, 256 pages, 24,90 €

Un beau livre - Extraordinaires oiseaux


Les fêtes approchant, commencez à penser beaux livres pour vos cadeaux. Si vous avez parmi vos proches un amateur de belles photos animalières, ce livre s’impose. Tous les oiseaux de nos régions (France et Suisse), sont présentés dans de superbes clichés mettant en valeur leur beauté naturelle.

D’un vol d’étourneaux, omniprésents en plaine, à la parade du grand tétras, merveille des Pyrénées, vous en prendrez plein les yeux. Et comme chaque illustration est accompagnée de textes signés de grands ornithologues, vous deviendrez en plus incollable sur cette riche avifaune de la région.
« Extraordinaires oiseaux », Salamandre, 264 pages, 45 €


Un cosy mystery - Intrigues autrichiennes


Joli hommage à l’inspecteur Colombo, une nouvelle série de cosy mystery prend place dans l’Autriche rurale. Un policier peu orthodoxe, Sifkovics, doit découvrir qui a tué une jeune mariée, retrouvée broyée dans une moissonneuse-batteuse.

Imaginé par Thomas Stipsits, l’enquêteur ne carbure pas au café mais à la « tisane d’herbe à fromage aromatisée au miel ». Il recevra, à son grand désespoir, l’aide de sa mère et ses copines, surnommées « Le gang des commères au foulard ».

Souvent décalé, avec quelques situations cocasses, ce polar permet de découvrir la vie quotidienne, pas si différente de chez nous, dans ce petit village de la montagne autrichienne.
« La mariée était en rouge », Thomas Stipsits, City, 260 pages, 15,90 € (le tome 2, « Ça va trinquer ! » est sorti au même moment)

jeudi 28 novembre 2024

Un roman foisonnant - « Le grand Quand » d’Alan Moore


Scénariste ayant marqué l’imaginaire des comics, Alan Moore est aussi (et sans doute avant tout), un romancier à l’imagination sans limite. Britannique pur jus, l’auteur se lance dans une série ayant Londres pour décor principal. Reste à savoir quelle ville exactement : la capitale anglaise de 1949 que l’on connaît où une métropole différente, comme issue d’un univers parallèle.

Pour vous faire une idée, plongez dans Le grand Quand, sur les traces d’un jeune libraire et futur écrivain, Dennis Knuckleyard, fasciné par des livres racontant l’histoire de la ville, avec des pans importants totalement imaginaires. Un univers foisonnant et incroyable où l’on retrouve la douce folie du génial Alan Moore.
« Le grand Quand », Alan Moore, Bragelonne, 384 pages, 25 €

Une saga - « Le seigneur des anneaux » en édition collector chez Pocket


Au rayon cadeaux de fin d’année, les livres collector sont toujours du plus bel effet. L’occasion d’offrir des classiques dans une édition originale. Pour les amateurs de fantasy, osez le Graal absolu : la trilogie du Seigneur des Anneaux.

La saga de Tolkien est à redécouvrir chez Pocket dans ce format poche de toute beauté, aux couvertures dorées et en relief. Trois tomes pour suivre les aventures des Hobbits face au redoutable Sauron, déterminé à conquérir le pouvoir absolu. Plus de 2000 pages au total, en trois volumes pour la somme totale de 34 €.
« Le seigneur des Anneaux », Tolkien, Pocket

mercredi 27 novembre 2024

BD - Fantomiald au boulot


La nuit, Donald devient Fantomiald, le justicier masqué. Un secret bien gardé que Picsou risque de découvrir quand il décide de mettre son neveu à la porte s’il ne paye pas un loyer rapidement. En plus des missions secrètes nocturnes, Donald va donc devoir trouver un travail…

Cet album, composé de quatre histoires courtes sur ce thème, est écrit par Nicolas Pothier et dessiné par Batem. Le repreneur des aventures du Marsupilami conserve toute sa virtuosité pour dessiner des personnages de l’univers Disney avec un peu plus de mimiques et caricatures que d’ordinaire.

On rit énormément aux histoires loufoques de Pothier, avec jeux de mots savoureux et situations loufoques mettant aux prises un Donald dépassé et un Fantomiald toujours aussi intrépide. Un bel hommage à une série populaire qui fait encore les beaux jours de la presse jeunesse.
« Un travail pour Fantomiald », Glénat, 56 pages, 15,50 €

BD - El Diablo de Palombie


Brave Marsupilami, animal de légende, invention de Franquin, devenu aussi célèbre que le groom rouge (Spirou), l’ayant découvert dans la jungle de Palombie. Un animal quasi magique qui vit désormais des aventures propres. Nouveau cap avec le lancement d’un album qui intègre la collection intitulée « le Marsupilami vu par… » inaugurée avec La bête de Zidrou et Frank.

Cette fois c’est Lewis Trondheim et Alexis Nesme qui proposent leur vision du roi de la jungle sud-américaine. Le premier signe un scénario permettant de découvrir les origines de l’animal. Le second met en images cette version se déroulant au temps des féroces conquistadores.

Mais comme c’est Trondheim au scénario, l’humour est omniprésent. Tout commence avec une rébellion à bord d’un voilier parti vers les Nouvelles Indes. À court de vivres, le capitaine Santoro, décide de cuisiner l’un des trois mousses. Ce sera José Palombo. Qui n’est pas d’accord. Par chance, en se réfugiant au sommet du grand mât, il voit une terre à l’horizon.

Les explorateurs, à la recherche de vivres et d’or, accostent, tombent sur des Indiens et un drôle de singe à la longue queue. La suite permet à Alexis Nesme de signer des planches de toute beauté, dans la luxuriance de la forêt équatoriale, avec parures chatoyantes et brillantes des autochtones et oiseaux de toutes les couleurs.

Un régal pour les yeux et les zygomatiques.
« Une aventure du Marsupilami, El Diablo », Dupuis, 64 pages, 17,95 €

mardi 26 novembre 2024

BD - La mémoire du futur de Spirou et Fantasio


La mode semble à la mort des héros. Spirou, vénérable personnage qui a fait le succès des éditions Dupuis, semblait avoir tiré sa révérence lors que précédent album titré sobrement La mort de Spirou. Mais les repreneurs de la série popularisée par Franquin, (Benjamin Abitan et Sophie Guerrive au scénario, Olivier Schwartz au dessin), ont plus d’un tour dans leur sac et proposent un 57e album, La mémoire du futur.


La suite du précédent où Spirou est prisonnier d’une intelligence artificielle issue du robot Cyanure, jolie création de Tome et Janry dans les années 80. Un héros persuadé d’être retourné à Bruxelles en 1958. Il devra trouver la faille qui lui permettra de retrouver le présent.

Un album assez déconcertant. Un côté hommage au Spirou de Jijé, mais un final hyperviolent, avec hécatombe (virtuelle certes) des seconds rôles. L’ensemble est cependant de très bonne qualité, version modernisée et futuriste d’une série qui va vers ses 90 ans.
« Spirou et Fantasio » (tome 57), Dupuis, 64 pages, 12,50 €

BD - Questions sur la ligne de vie de Corto Maltese


Comme Tintin ou d’autres héros de papier, Corto Maltese est un grand voyageur. Ses aventures lui ont donné l’occasion de visiter tous les continents et dans ce 17e album, il accroche un nouveau pays à son tableau de chasse : le Mexique.

Dans La ligne de vie, récit écrit par Juan Diaz Canales et dessiné par Ruben Pellejero, Corto cherche des fonds pour finaliser la restauration de son bateau. La démoniaque Bouche Dorée lui propose un marché : se faire passer pour un amateur d’art et acheter des objets en jade à un pilleur de temples mayas.


Une mission simple qui va se compliquer car Corto se retrouve embarqué, malgré lui, dans la guerre civile qui déchire le pays durant ces années 20. Le gouvernement, républicain, tente de mater la révolte des catholiques. Le bel aventurier va devoir transporter des caisses de munitions pour les insurgés.

Une longue aventure, pleine de péripéties, avec le retour de quelques seconds rôles connus (Raspoutine, Banshee) et la mort qui plane sur le héros à la boucle d’oreille. Une diseuse de bonne aventure lui a annoncé le raccourcissement de sa ligne de vie. Finalement, Corto Maltese est-il mortel ?

« Corto Maltese » (tome 17), Casterman, 80 pages, 17 €

lundi 25 novembre 2024

BD - De l’or (et un nouveau scénariste) pour les Tuniques Bleues


Pas de retraite pour les Tuniques Bleues et encore moins pour leur dessinateur, Lambil. Il signe le 68e album de ce duo légendaire de soldats américains pris dans la tourmente de la guerre de Sécession.


Cette fois c’est Fred Neidhardt qui signe le scénario. Le Montpelliérain, après avoir écrit un Spirou, s’attaque à une seconde légende de la BD franco-belge. Avec bonheur. Il offre notamment un début d’aventure très grinçant avec reparties cinglantes de Blutch, éternel tire-au-flanc dont la permission va être gâchée par son complice de toujours, Chesterfield. Ils vont tenter de dérober un chargement d’or destiné à financer l’armement des Sudistes.

À noter que l’un des personnages secondaires est un soldat noir, permettant à cette BD de faire passer quelques messages contre le racisme. Comme une réponse anticipée à la polémique autour de l’album Spirou et la Gorgone Bleue.
« Les Tuniques Bleues » (tome 68), Dupuis, 48 pages, 12,50 €

BD - "Signé Olrik", le dernier album de Blake et Mortimer d'André Juillard


Ce n’est pas sans un peu d’émotion qu’on découvre le nouveau Blake et Mortimer, le dernier dessiné par Juillard, mort à la fin de l’été. Un scénario d’Yves Sente pour une aventure se déroulant exclusivement en Angleterre : Londres et les Cornouailles.

Olrik fait des cauchemars. Il vit par anticipation son exécution. Prisonnier et condamné à mort, il attend sa dernière heure. L’arrivée de deux nouveaux prisonniers dans sa cellule va lui permettre de mettre au point un téméraire plan d’évasion. Un Blake et Mortimer fidèle aux codes de la série imaginée par Jacobs. Les deux héros vont avoir fort à faire pour contrer les multiples menaces pesant sur la couronne britannique.

Le professeur y développe une de ses inventions, une « Taupe », sorte d’excavateur permettant de creuser des galeries souterraines pour faciliter l’exploitation des mines. Il y est aussi question de la légende d’Excalibur, dernière occasion pour Juillard de dessiner des planches historiques qui ont fait son succès.
« Signé Olrik », Blake et Mortimer, 64 pages, 17 €

dimanche 24 novembre 2024

Thriller - N’oubliez pas « Phase 3 »

Nombre de chercheurs tentent de trouver un médicament pour vaincre Alzheimer. Dans ce roman d’Asa Ericsdotter, la solution est en vue. Mais à quel prix ? 

Genre à part, le thriller médical et scientifique connaît un regain d’intérêt depuis la pandémie mondiale. Asa Ericsdotter, romancière suédoise, s’engouffre dans la brèche en signant Phase 3, un thriller d’une incroyable efficacité et d’un réalisme qui risque de vous glacer d’effroi si vous avez plus de 60 ans.

La molécule mise au point par deux équipes de chercheurs américains agit directement sur les cellules du cerveau. Comme une sorte de détergent, qui nettoie les terminaisons nerveuses facilitant la communication entre neurones. Conséquence immédiate : les patients atteints par la maladie d’Alzheimer retrouvent la mémoire et une parfaite perception de leur réalité. Des recherches qui débouchent sur la mise au point d’un médicament, baptisé Re-cognize. Après de longues études théoriques, un essai clinique est réalisé sur des souris de laboratoire. Puis des malades, volontaires.

Re-cognize en est à la phase 3, la dernière, celle qui devrait, dans la foulée, permettre d’obtenir l’autorisation de la mise sur le marché. Cela semble un miracle. Presque trop beau pour Celia, Adam ou David, les trois personnages principaux du roman. Première alerte, quand une souris guérie tue les autres cobayes de sa cage. Puis des tueries de masse dans une maison de retraite et dans un centre commercial alertent les chercheurs. Car les tueurs sont des personnes âgées, des volontaires pour tester Re-cognize.

Phase 3 raconte comment certains scientifiques jouent avec le feu. Alors que d’autres sont excessivement prudents. Difficile de trouver un juste milieu quand il faut combattre ce mal horrible : « La grand-mère de Celia était la plus forte, la plus avisée. Puis la maladie d’Alzheimer avait commencé à la vider de toute sa sagesse. […] Elle était devenue quelqu’un d’autre. Puis elle était devenue personne. C’était une maladie diabolique. » En alternant les points de vue (chercheur, malades, cobayes), la romancière parvient à faire monter la tension dans une intrigue aux multiples rebondissements. Une réflexion très lucide sur la recherche médicale, ses conséquences, ses errements et les espoirs qu’elle suscite souvent.

Mais cela ne reste que de la fiction et malheureusement, tous les jours, des centaines de mémoires et de vies disparaissent de la surface de la terre.

« Phase 3 », Asa Ericsdotter, Actes Sud, 480 pages, 24 €

samedi 23 novembre 2024

Cinéma - Quand l’amour chamboule la vie des “Trois amies”

Plus compliqué que le ménage à trois, les trois histoires d’amour partagées et concomitantes de trois amies inséparables. Une comédie romantique douce-amère signée Emmanuel Mouret.


Joan, Alice et Rebecca sont amies. Trois jeunes femmes, enseignantes vivant à Lyon, qui se disent tout. Ou presque. Joan (India Hair) est la plus franche. Elle ne peut s’empêcher d’avouer à Alice (Camille Cottin) qu’elle n’est plus amoureuse de Victor (Vincent Macaigne), son compagnon et père de sa fille. Alice relativise : elle n’a jamais été follement amoureuse d’Éric (Grégoire Ludig), mais ne peut pas vivre sans sa présence quotidienne.

Rebecca (Sara Forestier) quant à elle est toujours célibataire. La plus fofolle du trio, vient de craquer pour un certain Monsieur X. Un homme marié dont elle cache soigneusement l’identité à ses deux amies. Logique, c’est Éric.

Quand Thomas (Damien Bonnard) est nommé dans le même collège que Joan et Alice, ces petites romances évoluent, mutent, se fracturent surtout.

Emmanuel Mouret est le cinéaste des amours compliquées. Il vient de placer la barre encore plus haut dans ce film où les sentiments perturbent le quotidien des trois protagonistes. En racontant en parallèle (mais aussi en les entremêlant) ces différentes rencontres et perceptions de l’attirance pour l’autre, il démontre brillamment qu’il n’y a pas un type d’amour, de coup de foudre ou de façon d’aimer mais une multitude. Autant que de personnes, voire de couples potentiels.

Si Vincent Macaigne, dans un rôle fantomatique étonnamment serein, semble être au final la voix de la raison, les trois femmes sont différentes et complémentaires. Joan, rongée par la culpabilité, refuse de se laisser guider par ses sentiments. Comme si elle portait en elle une sorte de malédiction. Alice, aux rêves étranges et prémonitoires, semble enfin rencontrer un homme qui la fait chavirer. Mais cela en vaut-il vraiment la peine quand le quotidien avec son premier compagnon est si doux ?

Reste le cas de Rebecca. La plus excentrique, aux sentiments les plus exacerbés. Sara Forestier, trop longtemps absente des écrans, revient avec un rôle en or. Obligée de mentir à ses amies après avoir trahi l’une des deux, elle ne sera jamais que la maîtresse qu’on cache. Celle qui enchaîne les déceptions, manque d’assurance et fait les mauvais choix. Sauf que, parfois, l’amitié est plus forte que l’amour et que ce dernier, comme la chance, frappe sans la moindre logique. Au final, Trois amies est un film universel d’une très grande finesse.

Film d’Emmanuel Mouret avec Camille Cottin, Sara Forestier, India Hair, Damien Bonnard, Vincent Macaigne, Grégoire Ludig.

En vidéo, “Le comte de Monte Cristo”


Énorme succès de cet été (presque 10 millions d’entrées), Le comte de Monte Cristo arrive en DVD et Blu-ray chez Pathé quelques semaines avant les fêtes de fin d’année. Un cadeau qui s’impose pour tout amateur de cinéma français de qualité.

On retrouve avec plaisir Pierre Niney dans le rôle-titre de cette adaptation virevoltante du roman d’Alexandre Dumas par Matthieu Delaporte et Alexandre de la Patelière. Une histoire de vengeance universelle qui prouve le côté indémodable du classique de la littérature française.

L’édition en vidéo de ce succès au box-office est très soignée avec une multitude de bonus comme un long making of et de multiples entretiens avec les membres de l’équipe. Un futur classique.

vendredi 22 novembre 2024

BD - Jeremiah dans le brouillard


Nouvelle aventure cauchemardesque pour Jeremiah, survivant de plus en plus impitoyable dans un monde postapocalyptique hyperviolent. Malgré les réticences de Kurdy, Jeremiah a accepté une mission douteuse. Convoyer un mystérieux objet très dangereux.

Dans des ruines grises, plongées dans la fumée et le brouillard, le duo va devoir affronter deux frères qui se font la guerre. Pris entre deux feux, ils ne devront pas hésiter à tuer pour survivre. Un long cauchemar pour les héros, peuplé d’hommes et de femmes aux visages déformés par leurs vies crasseuses.

Hermann, plus de 80 ans, a perdu un peu de précision dans son trait, mais conserve une étonnante faculté à retranscrire ces ambiances crépusculaires et morbides.
« Jeremiah » (tome 41), Dupuis, 48 pages, 13,50 €

jeudi 21 novembre 2024

BD - XIII à Moscou


Toujours en délicatesse avec sa mémoire, Jason Mac Lane, alias XIII, navigue entre passé et présent. Désormais animé par Yves Sente (scénario) et Iouri Jigounov (dessin), le héros tatoué quitte Cuba pour la Russie. Dans un jet privé, il vole vers la capitale russe, à la recherche d’une microcassette qu’il aurait cachée, en 1984, dans l’ambassade américaine, la fameuse Spaso House.

En plus de quelques scènes du passé, la BD propose une longue et passionnante course-poursuite dans les rues de Moscou. Car XIII, toujours dans les coups compliqués, se retrouve au centre d’une guerre d’influence en deux services russes, le GRU et le FSB. Le premier, le renseignement militaire, veut prendre le dessus sur la sécurité intérieure.

Un terrain d’action idéal pour Jigounov, successeur de Vance, à l’aise pour dessiner la ville qui l’a vu naître il y a 50 ans. Un album charnière, sur le passé du héros mais qui permet aussi de préciser le prochain thème, très lié à l’actualité, des albums à venir.
« XIII » (tome 29), Dargaud, 48 pages, 13,50 €

mercredi 20 novembre 2024

Thriller - « L’ours qui dort » réveille la guerre froide

 Alaska, terre sauvage. Les risques sont multiples pour les aventuriers. Des ours affamés aux savants fous en mal de cobayes.


La fascination des Américains pour leur armée est une réalité indéniable. Toute une littérature sur les exploits des GI’s et autres SEALS alimente la fierté de cette frange nationaliste du pays pour des héros ayant l’amour de la patrie chevillée au corps. Dans le genre, L’ours qui dort, premier roman de Connor Sullivan, en est un exemple parfait. L’auteur raconte les aventures de la famille Gale.

Le père, Jim, vit dans un ranch dans le Montana avec ses deux grandes filles, Cassie et Emily. Le moral de la première est au plus bas. Elle vient de perdre son mari. Cette ancienne ranger part se ressourcer en Alaska. En compagnie de son chien, elle va camper au bord d’une rivière, loin de toute civilisation. C’est là qu’elle est enlevée par des inconnus. Jim se rend immédiatement sur place à sa recherche. Mais comment retrouver une femme dans cette nature immense et sauvage ?

D’autant que les dangers sont multiples, comme cette rencontre périlleuse : « L’ours chargea. Une masse de six cents kilos de sauvagerie se précipitait sur lui avec la puissance d’une locomotive lancée à pleine vitesse. Le vieux cowboy abandonna la recherche de son revolver et se roula en position fœtale, les mains autour de son cou. »

Débutant comme un roman de survie en milieu hostile, le roman prend ensuite la trajectoire d’une histoire de vengeance sur fond d’espionnage du temps de la guerre froide et d’expériences scientifiques pratiquées par de véritables savants fous sur des prisonniers politiques. Un suspense haletant, des forêts du grand Nord au goulag russe en passant par la salle de crise de la Maison Blanche et le palais secret de Poutine.

Écrit avant l’invasion russe de l’Ukraine, ce texte alerte aussi sur les vues impérialistes d’un pouvoir de plus en plus totalitaire. Cela manque parfois de nuances, mais c’est malheureusement criant de vérité.

« L’ours qui dort », Connor Sullivan, H & O Thriller, 480 pages, 22,90 €

mardi 19 novembre 2024

Cinéma - “Sur un fil”, quand le rire lutte contre la maladie

Une acrobate, blessée, tente une reconversion en clown pour enfants malades. « Sur un fil », premier film sensible et très émouvant du comédien Reda Kateb.

On se croit trop souvent indestructible. Jo (Eloïse Sauvage), acrobate, passe des heures à répéter son numéro. Accrochée à sa corde à dix mètres au-dessus du sol, elle multiplie les figures. Elle est confiante. Un peu trop. Mais il suffit d’une demi-seconde d’inattention pour que tout soit remis en cause. Chute, jambe cassée, chômage. Mais pas d’indemnité pour cette intermittente du spectacle.

Elle n’a pas assez d’heures pour bénéficier de cette protection sociale. Alors, claudicante entre ses deux béquilles, elle va tenter une reconversion sur les conseils de son ami Gilles (Philippe Rebbot) : clown pour enfants hospitalisés. Si elle prend ça un peu à la légère, elle va vite découvrir un monde totalement différent.

Un monde où le public est en souffrance, où le rire a déserté les existences de ces petits malades, espérant guérir, redoutant la mort sans avoir presque rien connu de la vie.

La vie à l’hôpital

Pour son premier film en tant que réalisateur, Reda Kateb n’a pas choisi la facilité. Car il a l’ambition avec Sur le fil d’allier la comédie et l’émotion. Un pari souvent risqué, mais qui fonctionne à merveille dans ce cas précis. S’appuyant au plus près de l’expérience d’une véritable association, le cinéaste a soigné son casting. La dinguerie habituelle de Philippe Rebbot trouve son utilité quand il devient M. Poireau, le comparse de Roger Chips (Jean-Philippe Buzaud), véritable clown, formidable acteur.



Et pour découvrir ce milieu, Aloïse Sauvage distille naturellement grâce et tendresse. En devenant Zouzou, sorte de clown libellule au grand cœur, elle va réussir à rendre le sourire à Yacine (Massil Imine), gamin courageux, supportant les durs traitements pour vaincre une leucémie. L’émotion est vite au rendez-vous. Et malgré les pitreries du trio dans les couloirs ou dans l’intimité des chambres, le rire laisse parfois la place aux larmes.

Un film à portée sociale aussi, car il plonge le spectateur dans le quotidien de ces soignants (Sara Giraudeau en infirmière efficace et pleine d’empathie) souvent débordés par une masse de travail astronomique et des moyens humains de plus en plus limités. Eux aussi, sont Sur le fil toute la journée.


Film de Reda Kateb avec Aloïse Sauvage, Philippe Rebbot, Jean-Philippe Buzaud, Massil Imine

Reda Kateb : « Je me dévoile énormément dans ce film »

Venu en septembre dernier présenter son film en avant-Première au Méga CGR et au Méga Castillet, Reda Kateb avait fait le déplacement en compagnie de l’inspiratrice de son premier long-métrage, Caroline Simonds, fondatrice de l’association « Le Rire Médecin ».

Ensemble, ils ont expliqué la genèse de ce beau projet. « Même si je n’apparais pas à l’écran, souligne Reda Kateb, ce film me ressemble. Je me dévoile énormément, j’y ai mis un peu tout ce que je suis. C’est le milieu dans lequel se déroule l’histoire qui m’a inspiré. La plongée dans le monde des clowns à l’hôpital et un terrain où les personnages ne sont dans aucune posture, à nus, quand on n’est plus sur nos appuis et que la vie tient à pas grand-chose parfois. La maladie de l’enfant peut nous laisser désemparés mais elle est aussi vécue, avec le regard des clowns, dans une dimension autre que l’anxiété que je pouvais avoir avant de découvrir ce monde à l’hôpital. »

Pour Caroline Simonds, ce « film est le résultat d’une rencontre il y a plus de quatre ans grâce à mon livre* et d’un dialogue quotidien depuis. »

Une mutuelle compréhension et entraide essentielle pour Reda Kateb : « Je suis très heureux du retour des gens qui travaillent dans ce domaine et qui ont, d’une certaine manière, validé mon geste. C’est très important pour moi car je ne voulais pas les trahir. Jean-Philippe Buzaud, qui est clown à l’hôpital et qui a un des rôles principaux du film, m’a dit qu’il le vivait comme une forme d’hommage, de compréhension de leur métier. Mais je n’ai pas d’attente particulière si ce n’est de toucher les gens avec ce film. »

* « Le journal du docteur Girafe », éditions Thierry Magnier, 22 €

lundi 18 novembre 2024

En vidéo - “Au p’tit zouave”, la vie dans un bistrot parisien dans les années 50


Bienvenue au P’tit zouave, bar parisien typique. Un établissement qui sert de décor à ce film de Gilles Grangier, restauré par Pathé et à redécouvrir en DVD ou Blu-ray.

Unité de lieu et de temps, ce film en noir et blanc à la distribution prestigieuse (François Périer, Dany Robin, Marie Daëms, Jacques Morel) montre au public le quotidien d’un petit café de la capitale. Les personnages défilent. C’est pittoresque et comique au début, mais une intrigue policière vient chambouler la quiétude des lieux.

Trop longtemps considéré comme un cinéaste classique et mineur, Gilles Grangier est en réalité un excellent observateur de la vie quotidienne. Cette restauration propose en bonus des reportages sur trois des comédiens, François Périer, Dany Robin et Robert Dalban.

dimanche 17 novembre 2024

Thriller - Les Pyrénées, théâtre de l’angoisse

Une forêt primaire dans les Pyrénées. Des disparitions. Un village isolé et des rumeurs. Jérôme Camut et Nathalie Hug plongent leurs héros dans un univers angoissant, même s’il est « Loin de la fureur du monde ». 

La Mâchecombe. Un plateau, une forêt, des montagnes dans les Pyrénées entre Ariège et Aude. « Par temps clair, le regard portait de la plaine des Pyrénées jusqu’aux remparts de la cité de Carcassonne. » Le cadre est rapidement posé par Jérôme Camut et Nathalie Hug, auteurs de nombreux thrillers. C’est dans ce village et cette forêt protégée de Mâchecombe que l’action du roman se déroule. Un monde à part où tout le monde se connaît, où les rumeurs et légendes tiennent une grande place dans le quotidien des rares habitants.

En ce 15 août, Alix Ravaillé se consacre à son traditionnel pèlerinage. La jeune femme, récemment intégrée dans la police municipale de la commune dirigée par son père, Robert, vient déposer des fleurs là où sa mère aimait se recueillir. Cette dernière a trouvé la mort dans la montagne 8 ans auparavant. Un accident de VTT. Ce n’est pas la première qui meurt dans cette forêt. Mâchecombe a mauvaise réputation. Un massif maudit. Encore plus depuis que l’essentiel de la zone boisée est préservé pour un retour à l’état primaire.C’est l’essentiel de la mission de Robert, son adjoint Christophe et Alix. Mais en plus des ours, loups et autres prédateurs, un monstre se cacherait dans les bois. Dandelombe selon Noa, le petit frère d’Alix. Mi-homme mi-bête, géant et furtif, il fait peur aux locaux, mais n’empêche pas des orpailleurs de saccager la nature pour récupérer quelques grammes d’or. Au cœur de l’été, alors que des orages coupent les routes, des cadavres sont retrouvés dans un camp de fortune. Et Christophe disparaît. Alix, qui l’aime en secret, va tenter de le retrouver. Seule dans cette forêt primaire : « Il ne subsistait de la civilisation qu’une route forestière piquée de nids-de-poule et envahie d’herbe et de fougères qu’Alix emprunta pour rallier son objectif, situé au cœur de la zone protégée. » Mais elle n’est pas si seule et vient, sans s’en douter, de pénétrer sur le territoire de chasse de John, le véritable maître des lieux.

De simple polar en milieu clos, le roman prend des connotations fantastiques. Car longtemps on se demande ce qu’est véritablement ce John, qui se prétend « Dieu de l’ombre » que Noa a transformé en Dandelombe. Alix disparaît à son tour et son père mène l’enquête. Mais il se sent démuni, impuissant : « Autour de lui, les gens n’étaient pas pires ou meilleurs qu’ailleurs. La différence, c’était que, dans ces campagnes reculées, chacun en savait un peu trop sur tout le monde. C’était pratique dans certains cas, étouffant dans d’autres. » Et malgré cette promiscuité, certains secrets restent bien gardés.

Ce roman, très angoissant quand on est aux côtés d’Alix, prisonnière dans la tanière de John, être primitif aux réactions bestiales, est aussi l’occasion pour les auteurs de développer un message écologiste. Même en voulant préserver une forêt, on perturbe la nature. L’homme, du fait même de son existence, détruit son environnement. Une évidence dont on prend un peu conscience en refermant ce thriller finalement plus optimiste qu’il n’y paraît.
« Loin de la fureur du monde », Jérôme Camut et Nathalie Hug, Fleuve Noir, 496 pages, 21,90 €

samedi 16 novembre 2024

Littérature française - Comment un roman « Cucul » peut-il nous faire réfléchir ?

Écrire des comédies romantiques peut-il servir la cause du féminisme ? Camille Emmanuelle aborde le problème frontalement dans « Cucul ». 


Les plus anciennes lectrices se souviennent de la collection Harlequin. Des romans à l’eau de rose, à l’intrigue souvent très cucul, parfait pour oublier son quotidien de ménagère de moins de 50 ans accaparée par les tâches ménagères. C’est devenu au fil des décennies de la littérature romance. Rien de bien neuf, juste un peu plus de luxe et de rêve en boîte. Camille Emmanuelle, scénariste et journaliste, signe avec Cucul un roman très pertinent. Elle semble parfaitement connaître ce milieu littéraire assez particulier.

Son héroïne, Marie Couston, prof de français dans un lycée catholique, se transforme la nuit en auteure. Mais les modes évoluent et son éditrice lui demande de changer de genre. Le rose s’efface au profit du noir : place à la dark romance. Marie a un gros problème de conscience. Rajouter de la violence dans des scènes d’amour, c’est forcément cautionner le viol.

Alors elle décide de tout plaquer et dans un ultime chapitre écrit après une nuit alcoolisée, elle fait mourir son héros, James Cooper. Le lendemain matin, en plus d’une gueule de bois, elle découvre que son bellâtre a pris vie dans la réalité et squatte son canapé. Un James totalement déconnecté de la réalité, caricature du beau gosse qui, soi-disant, les fait toutes craquer. Il ne comprend pas son arrivée chez Marie.

Elle lui explique alors que « pour l’instant vous êtes un mâle alpha aux tendances BDSM. Là on me demande de faire de vous un psychopathe, mais attention, un psychopathe sexy ! » Ce qu’elle refuse catégoriquement.

Le roman se transforme alors en brûlot contre les clichés de genre, la banalisation de la violence masculine dans les romans à la mode et une ode aux bêtes comédies romantiques, certes limitées en ce qui concerne le message politique et la qualité littéraire, mais essentielles pour s’évader quelques heures et mieux profiter, après coup, de sa propre réalité.

« Cucul », Camille Emmanuelle, Seuil - Verso, 304 pages, 19,50 €
 

vendredi 15 novembre 2024

Des poèmes : Paul Eluard illustré par Kiki Smith


Superbe objet que ce livre d’art réunissant les poèmes de Paul Eluard et des œuvres de Kiki Smith. Un must pour les amateurs de poésie et d’art contemporain, parfait présent à glisser dans les cadeaux de fin d’année.
Paru initialement en 1929, ce recueil de poésie connaît donc une seconde jeunesse grâce aux illustrations de l’artiste américaine Kiki Smith.

Celle qui a pour credo « Soyons attentifs à la nature », propose des œuvres protéiformes donnant encore plus de profondeur aux mots du poète.
« L’amour la poésie », Paul Eluard et Kiki Smith, Gallimard, 176 pages, 45 €

jeudi 14 novembre 2024

Un atlas : L’histoire des frontières


Qui n’a pas passé des heures à rêver sur ces cartes du monde ? Multitude de pays séparés par des frontières. Cet atlas coordonné par Delphine Papin et Bruno Tertrais, raconte l’évolution de ces frontières au fil des siècles. Cela permet de mieux comprendre les enjeux actuels.

Deux gros chapitres sont consacrés à l’Ukraine et au Proche-Orient. Dans le premier cas, on devine pourquoi la Russie, longtemps hégémonique dans la région, a de nouveau des vues sur cette partie de l’Europe, déjà au centre de nombreux conflits auparavant. Le cas d’Israël, de la Palestine et du Liban, est là aussi détaillé avec minutie.

« L’atlas des frontières », Les Arènes, 200 pages, 27 €

mercredi 13 novembre 2024

Un collector : Les Fourmis


Le roman Les Fourmis de Bernard Werber a 33 ans. Un succès planétaire qui avait débuté plus de dix ans plus tôt. Car le romancier a mis 12 ans au total pour rédiger le texte final. Dans une longue préface ouvrant cette édition collector, il révèle qu’il en a écrit 24 versions différentes. Un exemple pour tous les apprentis écrivains persuadés de pondre un chef-d’œuvre dès leur premier jet.

Cette édition des Fourmis, format poche à la couverture cartonnée, propose de nombreuses gravures datant des années 20. Et surtout, les petites bestioles sont imprimées sur la tranche du livre et circulent sans cesse au bas de toutes les pages. Du plus bel effet.
« Les Fourmis », Bernard Werber, Le Livre de Poche, 416 pages, 14,90 €

mardi 12 novembre 2024

Un guide : Comment écrire


La France compterait, selon une croyance populaire, autant d’écrivains que de lecteurs. Mais arriver au bout de l’écriture d’un roman,n‘est pas chose aisée. Et très facile à rater. Pierre Assouline, critique renommé et romancier accompli, a puisé dans les déclarations des grands de la littérature mondiale pour synthétiser quelques conseils donnant les clés sur Comment écrire.

De Murakami à Zola en passant Balzac ou Steinbeck, vous trouverez quelques trucs et astuces pour trouver la motivation à aller au-delà de deux feuillets. Avec toujours en filigrane la recommandation essentielle de toujours reprendre un texte pour tenter de l’améliorer.
« Comment écrire », Pierre Assouline, Albin Michel, 336 pages, 24,90 €

lundi 11 novembre 2024

Cinéma - “Monsieur Aznavour” hommage à un très grand

Monument de la chanson française, Charles Aznavour a mis du temps avant de se retrouver en haut de l’affiche comme le raconte ce film de Mehdi Idir et Grand Corps Malade. 

Du travail, encore du travail, toujours du travail et une certitude inébranlable en son talent. Charles Aznavour, avant de triompher en France, puis partout dans le monde, a souvent douté. Mais jamais il n’a abandonné. Une force, une grandeur, au centre du film de Mehdi Idir et Grand Corps Malade tout simplement intitulé Monsieur Aznavour. Oui, le petit réfugié arménien est devenu un grand de la chanson française. Mais que de galères avant d’atteindre les sommets, ce fameux « haut de l’affiche » dont il a tant rêvé.

Le film, d’un peu plus de deux heures, revient longuement sur la jeunesse d’Aznavour (Tahir Rahim), avant le succès, quand il s’obstinait à faire dans la chanson fantaisiste, malgré sa voix voilée. Avec son compère Pierre Roche (Bastien Bouillon), il multiplie les petits contrats. De bars de village en petites salles provinciales ou cabarets, ils tentent de distraire le public. Parviennent à en vivre.

Dans le sillage d’Édith Piaf

Mais difficilement. Quand ils rejoignent la tournée d’Édith Piaf (Marie-Julie Baup), c’est mieux, mais rien d’exceptionnel. Passage par le Canada et finalement Charles semble tirer un trait sur ses ambitions de devenir une star. Pour assurer le minimum à sa famille, en ces lendemains de guerre, il devient homme à tout faire d’Édith Piaf. Il continue à composer, mais n’a pas encore trouvé son style. Charles va finalement, comme sur un ultime coup de poker, miser toutes ses économies sur une tournée et quelques dates à Paris. Avec, dans la manche, une carte maîtresse : la chanson Je m’voyais déjà. Décembre 1960, une star vient de naître devant un public médusé. La suite ressemble à un conte de fées, avec son lot de doutes, de déprimes et de séparations. Mais le travail, encore le travail, permet à l’artiste de s’en sortir, à l’homme de rester debout.

Ce film, forcément synthétique et partisan, ne montre pas toute la complexité de Charles Aznavour, mais grâce à l’interprétation remarquable de Tahir Rahim (César en approche, assurément), on cerne la personnalité de ce fils de réfugié, toujours là pour sa famille, même si trop souvent il a dû la sacrifier pour continuer son irrésistible ascension. Incapable de s’arrêter de créer, de prendre du temps pour lui et ses proches, Aznavour était un bourreau de travail. Cela a payé et personne ne peut s’en plaindre tant les titres qui rythment ce biopic sont devenus des rengaines familières à la grande majorité des Français.

Film de Grand Corps Malade et Mehdi Idir avec Tahar Rahim, Bastien Bouillon, Marie-Julie Baup

dimanche 10 novembre 2024

Cinéma - Découvrez la Genèse de la saga “Transformers”

De jouets à vedettes de cinéma : les Transformers ont fait rêver des générations de gamins. Les robots (des Autobots exactement), guerriers se transformant en bolides, ont beaucoup sillonné la Terre. Dans ce nouveau film, entièrement en animation numérique, on découvre leur origine.

Dans un passé indéfini, sur la planète Cybertron, de simples robots travaillent dur pour arracher aux entrailles de l’astre l’énergie nécessaire à leur fonctionnement. Parmi eux, Orion Pax et D-16, amis ayant juré de s’entraider pour l’éternité. Incapables de se transformer car privés de core, ce globe essentiel à leur force, ils compensent avec du courage et une forte envie de liberté. Ces deux mineurs, petits parmi les petits, ont pourtant un grand destin devant eux. Aidés de B-127 et d’Elita, ils vont aller à la surface pour tenter de découvrir la matrice du commandement. La suite sera une grosse déconvenue pour les héros et des combats intenses et fracassants.

Ce dessin animé, qui explique, au final, la naissance d’Optimus Prime et Mégatron (le gentil et le très méchant des histoires originelles), peut aussi se voir comme un film politique. On assiste à la naissance d’un mouvement de résistance face à une oppression qui ne dit pas son nom, masquée par des dirigeants manipulant les médias. Il y a aussi en filigrane un message sur la justice et le pardon en opposition à la vengeance et à la loi du talion.

Un film qui finalement s’adresse aux petits comme aux grands.

Film d’animation de Josh Cooley avec les voix françaises de Philippe Lacheau et Audrey Lamy


samedi 9 novembre 2024

En vidéo, “Breathe”


Sorti en DVD chez M6 Vidéo, Breathe, film de science-fiction n’a pas eu les honneurs du grand écran. Juste une sortie il y a quelques mois sur Prime Vidéo. Réalisé par Stefon Bristol, il fait partie de ces œuvres au budget serré qui misent tout sur la tension de l’intrigue.

Dans un futur proche, l’oxygène a quasi disparu de l’atmosphère. Ne survivent que quelques groupes de scientifiques. Maya et Zora sont recluses dans un bunker. Elles ont un générateur à oxygène qui attire les importuns. Mère et fille devront défendre chèrement cette machine qui leur permet de continuer d’avoir un avenir.

Un film un peu trop manichéen. Si la performance de Mila Jovovich est bonne sans plus, Sam Worthington, en méchant complètement frappadingue, fait forte impression.

vendredi 8 novembre 2024

Thriller - Place à la terreur dans les bois avec Maria Grund

Sanna et Eir, policières sur une île suédoise, sont de nouveau sur la sellette. Un homme, nu, poignardé, est retrouvé dans une ferme en ruines au cœur des bois. 



L’image d’une Suède tranquille et prospère, où il fait bon vivre, est sérieusement écornée dans les romans policiers des écrivains du cru. Maria Grund, nouvelle venue dans le milieu, n’échappe pas à la règle. Son premier titre, La fille-renard, abordait de front le problème de la maltraitance des enfants et de la pédophilie.

Dans la suite, Le diable danse encore, la police locale doit faire face à une multitude de problèmes, dont, entre autres, celui des SDF squattant sur des radeaux qu’ils amarrent dans des zones désertes, de la montée des groupes violents d’extrême-droite et du trafic de drogue gangrenant la jeunesse.

On retrouve aussi les différents personnages du premier tome, notamment Sanna Berling et Eir Pedersen, policières. La première, marquée après un affrontement avec Jack, tueur en série terrifiant, tente de se reconstruire dans le poste de police d’un petit village. La seconde poursuit sa carrière à la criminelle et a même rencontré l’amour. Tout change quand Sana, en suivant dans les bois un groupe d’adolescentes rebelles en vélomoteur, tombe sur le cadavre d’un homme dans les ruines d’une ferme. Il est nu, poignardé, le corps recouvert d’ecchymoses. Le roman raconte avec brio toute l’enquête, les progressions, les fausses pistes, jusqu’à la scène finale. Mais l’essentiel est dans le développement de la vie et de la psychologie des deux héroïnes. Sanna craint le retour de Jack. Elle reçoit des appels anonymes et entend parfois du bruit dans son appartement.

Cela devient vite effrayant, même pour le lecteur : « Sanna s’immobilise, et les images des victimes de Jack lui reviennent en masse. Elles avaient toutes la poitrine tailladée à coups de couteau. Tout à coup elle sent un courant d’air lui caresser la nuque. Elle tourne rapidement la tête pour regarder par-dessus son épaule, mais il n’y a personne. C’est juste cette satanée impression d’être observée qui lui joue encore des tours. »

Sanna et Eir, deux femmes aux abois, malmenées par leur créatrice. Car la Suède, définitivement, n’est plus un pays où il fait bon vivre…


« Le diable danse encore », Maria Grund, Robert Laffont - La Bête noire, 456 pages, 22 €

jeudi 7 novembre 2024

Polar - « Le premier renne », âme de la toundra

Découverte de terres rares, élevage de rennes et attaques de loups : trois facteurs qui risquent de mettre le feu à la région où patrouillent Klemet et Nina, membres de la police des rennes. 


On pourrait penser que dans la toundra, au cœur de ce grand nord, terres froides entre Suède, Norvège et Finlande, la nature a encore tous ses droits. En lisant le nouveau polar d’Olivier Truc, journaliste français vivant à Stockholm, on comprend que là-bas aussi l’environnement est en grand danger.

On retrouve avec un réel plaisir ses deux héros récurrents de la police des rennes : Nina Nansen et Klemet Nango. Le second est à moitié Sami, cette ethnie qui peuple la toundra depuis des siècles et des siècles. Une société en harmonie avec l’énergie vitale du lieu : les rennes. Ces mammifères vivent en harmonie avec leurs éleveurs, broutant le lichen, circulant librement de prairie en pâturage en été.

Un mode de vie qui perdure. Mais pour combien de temps encore ? C’est l’interrogation, l’inquiétude, qui reste en filigrane de ce texte. Les nomades éleveurs ont d’abord dû céder du terrain quand du fer a été découvert à Kiruna en Suède. Une mine toujours en exploitation, qui charrie des milliers de tonnes de minerai vers la côte, en train. Convois qui traversent les chemins de transhumance des troupeaux de rennes.

Nina et Klemet sont sollicités quand un train tue plusieurs dizaines de bêtes arrêtées sur les voies. Les éleveurs sont furieux. Le lendemain une bombe fait exploser le chemin de fer. La tension est forte. D’autant que l’été est là, avec un ensoleillement dépassant les 23 heures, et beaucoup de travail pour les éleveurs qui doivent marquer les faons. Une pratique ancestrale.

Chaque famille Sami a une marque propre, faite sur les oreilles des jeunes animaux. On découvre cette pratique avec Anja, fille d’éleveur, une rebelle. « Jamais Anja n’avait marqué un faon avec tant de difficulté. […] Elle reposa un instant sa main droite qui tenait le petit couteau à la lame effilée. […] Le cœur du faon battait, résonnait dans son propre crâne. Elle prit à nouveau la fine oreille entre ses doigts, retins sa respiration, l’œil démesuré du faon figé sur elle, trancha la pointe de biais. Pour sa marque, il fallait encore cinq coups de couteau. » Le texte d’Olivier Truc nous permet de plonger dans ce mode de vie si particulier ; ancestral tout en étant moderne, les jeunes Sami utilisant des drones pour localiser et guider les rennes de la toundra vers la zone de marquage.

Anja est au centre de l’intrigue. Spoliée de ses droits, elle veut avoir sa place dans le groupement d’éleveurs, le sameby. Mais en secret, elle a une autre utilité : c’est elle, tireuse d’élite, qui est chargée d’éliminer les loups et autres gloutons, prédateurs des rennes.

L’occasion pour l’auteur de faire se rencontrer Anja et un vieux berger français, Joseph, ayant perdu son troupeau dans les Alpes. Il veut se venger. Se rend à Kiruna pour se faire un loup. Anja va le guider, passer un marché avec lui, tout en expliquant, « J’en ai abattu trois des loups. Et quelques gloutons aussi. C’est pas pour ça que je me sens mieux. Ça Fait longtemps que j’ai compris que c’est pas ça qui m’apaiserait. » Cette plongée littéraire dans la nature sauvage est contrebalancée par les manœuvres des hommes, les ambitieux, investisseurs qui rêvent de gagner beaucoup d’argent.

Des gisements de terres rares ont été découverts. Le nouveau pétrole de la transition écologique. Mais encore une fois, cela risque se faire au détriment des rennes et des Samis.

« Le premier renne », Olivier Truc, Métailié, 528 pages, 22 €

mercredi 6 novembre 2024

Thriller - Le sang coule après « Le murmure des hakapiks »

Nouveau roman dépaysant de Roxanne Bouchard, toujours dans les incroyables paysages de la Gaspésie au Canada francophone. Avec des loups de mer et beaucoup de sang.


Certains auteurs ne sont pas tendres avec leurs personnages. Roxanne Bouchard, romancière québécoise fait partie des pires dans le genre. Ses deux héros récurrents, Simone Lord et Joaquin Moralès, se retrouvent dans des situations très compliquées dans Le murmurer des hakapiks.

Simone est seule sur un chalutier en compagnie de chasseurs de loups de mer et occasionnellement passeurs de drogue. Joaquin est lui aussi bloqué sur un navire, un bateau de croisière alors qu’il voudrait avant tout partir secourir sa collègue. Le lecteur, tremble surtout pour Simone, acculée par des hommes déterminés à la violer avant de la tuer. Un récit glaçant, comme ces contrées quand le vent nordet se met à souffler et transforme la mer en banquise.

Un polar très sombre, avec beaucoup de morceaux de Canada authentiques comme ces haka piks du titre, « de longs bâtons de bois munis de crochets. Contrairement aux tirs de carabines, dont la détonation est bruyante, l’élan de l’hakapik est discret. L’arme fend l’air dans un chuchotement et la masse métallique s’abat sur la bête. Un murmure, et le loup meurt, dans la froide quiétude de la banquise. » L’intrigue utilise cette chasse aux loups gris et cette technique particulière, qui a fait beaucoup couler d’encre quand Brigitte Bardot a dénoncé ces massacres.

Aujourd’hui encore les protecteurs des animaux s’opposent à cette chasse. mis le roman est tout en nuance, car la population de loups ne cesse de croître. Et leur chasse est autorisée. Mais très contrôlée, raison pour laquelle Simone se retrouve embarquée avec les chasseurs, recouverts de sang après avoir tué et dépecé une centaine d’animaux. Âmes sensibles s’abstenir.

« Le murmure des hakapiks », Roxanne Bouchard, L’Aube, 264 pages, 19,90 €

mardi 5 novembre 2024

BD - Chats bavards


Naturellement, les chats sont impertinents et moqueurs. Alors imaginez s’ils avaient le pouvoir de parler ! Justement, dans la série Parole de chat, écrite par Noël Chanat et dessinée par BidyBop, une bande de fieffés félins ne se prive pas de répondre aux humains qui ont la prétention de vivre avec eux.


Le jeune Jean-Aymar et son grand-père Victor se considèrent comme des maîtres des animaux, mais les chats, en réalité, n’y voient que des esclaves. Ce gros album, dessiné dans un style entre manga et BD animalière réaliste, est l’occasion de profiter de quelques bons mots sortis des gueules de ces matous matois.

Comme cette réflexion : « Les êtres humains sont très forts pour se gâcher la vie, on appelle ça la rature humaine » ou quand Jean-Aymar n’ose pas déclarer sa flamme à la jolie Ophélie, un chat lui fait remarquer que « avant de copuler, il faut d’abord lui sentir la croupe. »

« Parole de chat » (tome 2), Delcourt, 72 pages 15,95 €

lundi 4 novembre 2024

BD - Avant le génie


Pour sa première BD, Jeff Victor, connu pour son travail dans le monde de l’animation, revisite le mythe d’Aladin, des lampes magiques et des génies. Un roman graphique destiné aux plus jeunes (à partir de 7 ans), pour espérer avoir un jour un héraut doux et gentil comme le héros.

Avery vit seul avec son papa dans une station service perdue dans le désert américain. Un jour, il trouve une vieille lampe à pétrole. Il la nettoie et en sort Gribblet, sorte de petit chat au pelage rouge, qui parle et vole. Comme un génie. Mais il n’est que le héraut, celui qui va annoncer au chanceux qu’il vient de gagner trois vœux.


Le gentil Gribblet va ensuite expliquer à Avery que cette lampe a longtemps hébergée un génie femme. Tombée amoureuse du papa d’Avery, elle a donné naissance au petit garçon puis été condamnée à être emprisonnée au pays des génies. Avery, à moitié génie, va donc tenter d’aller la délivrer avec l’aide du malicieux Gribblet.

Dessinée dans un style très cartoon, cette histoire de famille séparée et de métissage vaut surtout pour les illustrations de Jeff Victor. On a réellement l’impression d’être immergé dans un film d’animation de très grande qualité.

« Fais un vœu », Jungle, 152 pages, 14,95 €