Quinze ans après la fin de la 2e guerre mondiale, des juges allemands font le procès des tortionnaires d'Auschwitz. « Le labyrinthe du silence », un film contre l'oubli.
Au début des années 60, en Allemagne (de l’Ouest comme de l’Est), tout était fait pour oublier les horreurs de la folie nazie. Nuremberg a condamné quelques dignitaires, mais l’immense majorité des soldats, officiers et responsables SS a échappé à toute poursuite. Pire, leurs crimes sont systématiquement effacés de l’histoire officielle. Tout doit être fait pour la reconstruction du pays. Il y a eu trop de morts pour se passer des compétences d’hommes et de femmes qui ont pourtant activement participé au génocide. Alors que l’ennemi n’est plus que Bolchevique et qu’Israël se débat contre tous ses voisins, il reste cependant quelques rescapés des camps de la mort en Allemagne.
C’est le cas de Simon, un peintre qui croise un matin la route d’un de ses tortionnaires. Il est redevenu instituteur et parfaitement intégré dans cette nouvelle nation. Comment un ancien SS, qui a des centaines de morts sur la conscience, peut-il se promener en toute quiétude et être chargé de l’éducation des enfants ? Simon alerte un ami journaliste, Thomas Gnielka (André Szymanski) qui raconte cette histoire dans le journal de Francfort et va au parquet demander que des poursuites soient lancées contre ce criminel de guerre. Il apporte des preuves, mais cela n’intéresse personne. Le temps est au pardon. A l’oubli...
Petit procureur obstiné
Seul Johann Radmann (Alexander Fehling), jeune procureur à peine sorti de l’école, cantonné aux infractions routières, est interpellé. D’une rigueur absolue, il considère que tout meurtrier doit être poursuivi. Même s’il a commis ses meurtres en tant que soldat obligé d’obéir aux ordres de ses supérieurs. Il va tenter de retrouver le maximum de ces tortionnaires en recueillant le témoignage des rescapés. Mais le chemin est long, semé d’embûches, tel un véritable labyrinthe où il est vite fait de se perdre.
Basé sur une histoire vraie, ce film de Giulio Ricciarelli bénéficie d’une distribution de grande qualité. Alexander Fehling dans le rôle du petit juge entièrement dévoué à son métier rend parfaitement l’évolution de ce jeune homme, ce « blanc-bec » pour certains anciens déportés, qui va épouser cette cause après avoir pris conscience des horreurs d’Auschwitz. Une scène explique tout. Le journaliste Gnielka apostrophe Johann au début de l’enquête en lui demandant s’il sait ce qu’il s’est réellement passé en Pologne dans ce sinistre camp. Le procureur n’en a qu’une vague idée. Et c’est le cas de tous les jeunes gens qui l’entourent.
Ce devoir de mémoire, des Allemands envers les victimes de leurs parents, a sans doute permis que ces milliers d’histoires dramatiques ne disparaissent pas les limbes de la réécriture de l’histoire officielle. Et toute la force du film est de parler de déportation sans montrer la moindre image dure, insoutenable. Au contraire, rescapés et bourreaux se ressemblent étrangement une fois la paix retrouvée, comme s’il était facile d’endosser un costume d’homme respectable après avoir commis les pires ignominies. C’est aussi cette leçon que l’on retiendra de ce très édifiant « Labyrinthe du silence ».
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