En premier lieu voyage à travers l’histoire de la photographie, ce thriller psychologique de Robert Goddard est aussi, et avant tout, le récit d’une manipulation de haut vol. Comme si le personnage principal de L’inconnue de Vienne, un photographe professionnel talentueux, se retrouvait piégé dans une de ses compositions un peu trop artistique pour être réelle.
Photographe anglais, Ian Jarrett a couvert plusieurs guerres ? Un de ses clichés, pris durant la guerre du Golfe, a fait toutes les couvertures des magazines et lui a permis de se faire un nom. Depuis, il a abandonné les zones de conflit et se contente de signer des clichés artistiques pour des livres de commandes. Voilà comment il se retrouve en cet hiver à Vienne. Une semaine pour rapporter une dizaine d’images typiques de la capitale autrichienne. Une bonne occasion pour abandonner l’ambiance délétère de la maison familiale. Ian n’aime plus sa femme, au grand désespoir de leur fille adolescente, Amy.
C’est en photographiant la place Saint-Etienne qu’elle lui est apparue : « Une silhouette déboucha dans l’image du côté sud de la cathédrale, vêtue d’un manteau rouge boutonné jusqu’au col pour se protéger du froid. » Il prend la photo mais cela ne plaît pas à L’inconnue de Vienne. « Elle marcha droit vers moi, les sourcils froncés. Elle donnait presque l’impression d’être en colère, ses yeux sombres me fixaient avec un air de défi. » Rencontre impromptue et coup de foudre immédiat. Elle dit s’appeler Marian, fuir son mari et ne pas savoir de quoi sera fait son avenir. Durant une semaine ils vont d’aimer. Et se promettre de se retrouver en Angleterre, de repartir à zéro.
La disparition de l’inconnue
La première partie du roman est presque trop belle pour être vraie. Mais le talent de Robert Goddard fait qu’on est totalement happé par cet amour fou. On veut y croire, même si on se doute que l’avenir sera moins rose. De retour à Londres, Ian quitte le foyer et se rend au rendez-vous convenu avec Marian. Qui n’est pas là. Commence une longue quête pour la retrouver. Percer ses mystères. Ian découvre que Marian est le nom d’une femme ayant vécu au XIXe siècle. Elle aurait, la première inventée la photographie. La femme de Vienne serait en réalité « possédée » par le fantôme de Marian. Une explication non rationnelle. Contrairement aux négatifs de la véritable Marian, retrouvés dans une vieille demeure. Ils valent de l’or. Est-ce le véritable mobile de la disparition de la belle inconnue de Vienne ?
Au gré des 430 pages du roman, Robert Goddard multiplie les fausses pistes, alternant les récits en parallèle, du présent compliqué de Ian à son passé traumatisant en passant par les bonds dans le temps racontant la vie de la véritable Marian, génie de la chimie, femme brimée par un mari violent et rétrograde. Et quand quelques escrocs viennent mettre leur grain de sel, on se retrouve avec un petit chef-d’œuvre de manipulation entre les mains, un roman brillant qui vous surprendra jusque dans son dernier chapitre.
« L’inconnue de Vienne » de Robert Goddard, Sonatine, 23 €
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire