samedi 31 janvier 2009

BD - Vendanges mortelles


Augustin, 13 ans, profite pleinement de la vie à la campagne. Il est le fils unique de Lucette et Maurice. Mais ce ne sont pas eux les chefs de famille. Ce rôle est tenu par Geneviève, la grand-mère maternelle. C'est elle qui tient les rênes de l'exploitation viticole en Provence. 

Augustin insouciant qui voit sa vie basculer. Alors que les vendanges battent leur plein, Geneviève meurt en chutant dans les escaliers. La perte de cette femme de tête permet à Maurice de sortir de sa réserve. Il n'a plus qu'une idée : vendre le domaine et retourner en ville. Ce citadin ne s'est jamais fait à la campagne. Mais alors que les obsèques se préparent, l'arrivée des gendarmes va bousculer ses projets. La mort de Geneviève ne serait pas si naturelle qu'il n'y paraît. 

Cette histoire sombre de famille a été imaginée par Olivier Mau, romancier ayant fait ses preuves. Il retrouve son dessinateur préféré, Rémy Mabesoone (ils ont déjà signé « Achevé d'imprimer »), pour illustrer cet implacable déchirement familial. 80 pages en noir et blanc, beaucoup de noir, peu de blanc.

« Au revoir monsieur », Casterman, 15 € 

vendredi 30 janvier 2009

BD - Du blog au papier

Grande mode depuis quelques années, le passage du blog dessiné au livre. Les éditions Delcourt et plus particulièrement la collection Shampoing se sont faites une spécialité de ce nouveau genre. Le blog, alimenté au jour le jour, permet aux auteurs de tester différents styles et de raconter leur vie. Cela donne parfois des résultats indigestes, mais dans l'ensemble c'est très réussi. La vie des dessinateurs comme vous n'avez jamais l'imaginer s'étale dans trois titres parus récemment.


« La belle vie » de Bézian
n'est pas issue d'un blog, mais la forme s'y apparente. Histoires courtes de une à six planches, ces tranches de vie parle de tout et de n'importe quoi. Scènes vues dans la rue, les trains ou le métro, discussions en famille, anecdotes de festival, Bézian, au dessin d'ordinaire travaillé et sombre, se lâche, changeant de style, trouvant une pertinence et une justesse étonnantes. 

Il se met en scène souvent. N'hésitant pas à se moquer de ses manies. Par exemple cette habitude qu'il a de fermer la porte de son appartement à clé quand il descend chercher son courrier. Pourquoi ? Paranoïa cachée, faut-il qu'il consulte. Très bien vues également les astuces de son gamin pour ne pas finir son assiette. 

Le meilleur restant les portraits de « fans » venant obtenir une dédicace en festival. Il n'est pas tendre pour ces étranges personnages, l'un lui demandant de dessiner un troll, une autre de faire un dessin sur un bout de nappe en papier tâché ou celui qui marmonne vouloir un personnage, n'importe lequel, mais qui pleure... (Delcourt, 13,95 €)


 « Les petits riens » de Lewis Trondheim
illustrent parfaitement le concept de la collection dirigée par le même Trondheim (on n'est jamais mieux servi que par soit même). L'inventeur de Lapinot et du Donjon, mène une vie très normale si l'on excepte ses nombreux voyages. 

Il s'étonne lui même de passer le fêtes de fin d'année au soleil de la réunion, de revenir en France pour assister à une tempête de neige sur Montpellier avant de reprendre l'avion pour passer 18 jours à Fidji. 

Ce dernier voyage, assez flippant au demeurant, devrait dégoûter certains des destinations à priori paradisiaques et se révélant mortellement ennuyeuses. (Delcourt, 11,50 €)

 


« Notes » de Boulet
reste le mètre étalon du genre. Boulet, cantonné dans des BD pour enfants durant de nombreuses années, s'est défoulé le poignet en distillant sur le net ses notes totalement délirantes. Il y expérimente tout, tant au niveau graphique que narratif. Ce second recuil reprend les messages de 2005 et 2006. Il raconte sa vie parisienne, avec ses amis de studio et de bars. Lui aussi régulièrement participe à des festivals. 

Il en dévoile tous les à-côtés, de l'accueil chez l'habitant aux repas entre confrères et tentative de drague de jolies bénévoles. Boulet qui n'hésite pas à payer de sa personne pour porter la bonne parole du style franco-belge en Afrique. Il livre plusieurs récits de stages en Afrique, au Cameroun et au Tchad notamment. 

Il en profite pour publier les croquis et aquarelles réalisés sur place. Boulet sait se moquer de lui, mais il reste un excellent dessinateur. (Delcourt, 16,50 €)

P. S. : Parmi les blogs dessinés, n'oublions pas celui de Pénélope Bagieu. « Ma vie est tout à fait passionnante » a l'avantage d'avoir amené à la BD tout une kyrielle de lectrices qui ne connaissaient rien à ce support. La version « poche » de l'album paru l'an dernier est annoncée dans les prochains mois. 

jeudi 29 janvier 2009

BD - Du rêve au cauchemar


Gihef, dessinateur réaliste ayant signé « Enchaînés » et « Haute sécurité » sur des scénarios de Callède, délaisse cette fois le pinceau pour sa première expérience de scénariste. Il a confié la réalisation graphique de cette histoire à Lenaerts, dessinateur réaliste au trait clair et précis, proche de ce que fait Berthet ou Dominique David. 

De scénariste, il en est justement question dans cette BD qui revisite le mythe de Hollywood. Le héros, Orson Wells, est un jeune scénariste qui va tenter sa chance à la Mecque du cinéma américain. Embauché dans un grand studio, il devra se contenter, au début, de distribuer le courrier. Mais rapidement le big boss se souviendra de ses capacités pour sauver le script d'un film mal engagé. 

Orson va alors tutoyer la gloire. Il devra cependant renier toute originalité artistique et une certaine déontologie de sa fonction. On se doute, dès les premières pages, que si la réussite est rapidement au rendez-vous, le prix à payer en contre-partie sera très élevé. 

Une BD sombre et triste sur un milieu plein de strass et de paillettes.

« Mister Hollywood », Dupuis, 10,40 € 

mercredi 28 janvier 2009

BD - Explorateurs intersidérants


Rien de meilleur pour réussir une bonne série comique que de choisir des héros crétins. Et dans le genre, Spoot et Nik, les explorateurs spatiaux imaginés par Mo/CDM sont particulièrement gratinés. 

Le premier album de leurs aventures, tout en étant composés de gags en une planche, est construit sous forme de trois grands chapitres chronologiques. Une première partie nous montre leur apprentissage à terre, la seconde intitulée « C'est parti mon kiki ! » relate les explorations et la dernière conte le retour sur terre. 

La plus importante est bien évidemment celle du milieu. Les deux lascars vont aller à la rencontre des différentes races d'extraterrestres peuplant les galaxies. Généralement ce premier contact se passe mal. Il est vrai que Spoot et Nik sont les spécialistes des bourdes et autres impairs vexants et blessants. 

Ces multiples rencontres donnent également à Mo/CDM l'occasion de montrer toute la palette de son imagination en matière de monstres intergalactiques. I

l y a parfois du Moebius teinté d'un peu de Edika. C'est le seul intérêt pour les amateurs de SF car c'est avant tout de la grosse rigolade, entre absurde et non-sens.

« Spoot & Nik », Le Lombard, 10,40 € 

mardi 27 janvier 2009

BD - Secrets enfouis


Depuis toujours, les familles ont été un lieu propice aux secrets. Parfois ils restent cachés, d'autres fois ils éclatent au grand jour, bouleversant un précaire équilibre. Cet album écrit par Brigitte Luciani et dessiné par Colonel Moutarde (pseudonyme d'une jeune dessinatrice au trait fin, élégant et coloré) propose au lecteur deux versions de l'histoire. 

La partie apparente, puis la partie cachée. Toute l'originalité réside dans ces séquences cachées, que le lecteur ne découvre qu'à la seconde lecture, après avoir descellées les pages secrètes. La famille se retrouve donc pour l'enterrement du grand-père. Dans la grande maison à la campagne, les enfants devenus adultes se retrouvent, les petits-enfants jouent dans cet espace ouvert. La veuve s'active pour oublier son malheur. 

Mais très vite des tensions vont resurgir. Jalousie, mensonges, avarice : quelques défauts vont prendre le dessus. Heureusement certains secrets vont rester bien enfouis. 

Un album de femmes, avec une bonne dose d'humanité, cette denrée si rare dans les albums... d'hommes.

« Histoires cachées », Delcourt, 13,95 €  

lundi 26 janvier 2009

Roman - Star miniature dans L'usine à rêve de Hollywood racontée par François Rivière

François Rivière joue la nostalgie à fond dans ce roman relatant l'éphémère carrière d'un enfant-acteur dans « L'usine à rêves » du Hollywood des années 50.


En juin 1955, Charles Dulac est un gamin de 11 ans tout ce qu'il y a de plus mignon : « une chevelure blond châtain bouclant en désordre, un petit nez mutin et de bonnes joues dorées par l'éclat du soleil printanier ». Un gentil garçon, élevé par sa grand-mère, qui va voir le cours de son existence modifié quand il croise, sur les plages de Biarritz, la route d'un couple d'Anglais, Alex et Donnie Bliss. Charles va devenir Little Charlie et partir à la conquête d'Hollywood en compagnie de Donnie, la scénariste de cette série policière télévisée devenant rapidement un succès d'audience. Charles se souvient encore parfaitement de ces moments où il découvre le 7e art, la gloire, la vie. Une certaine vie. Pas simple et pleine d'excès.

Dans ce roman de François Rivière, c'est Charles le narrateur. De nos jours, il vit reclus dans sa grande villa en France sur la côte Atlantique. Il lit beaucoup et, régulièrement, se passe les bobines des aventures de Little Charlie. Il vit dans le passé mais pourtant n'ose pas affronter une certaine partie de son existence. Quand le petit Charlie a du interrompre sa carrière brutalement et trouver refuge à Bruxelles. Bruxelles où il décide aujourd'hui de se rendre, à la demande de Nico Pharrel, impresario belge qu'il a connu à Los Angeles et qui vit ses derniers jours, rongé par une longue maladie. Charles est réticent car Pharrel est l'homme qui lui a enlevé son plus grand amour, Teddy.

Apprenti acteur

Le roman alterne souvenirs très nostalgiques et redécouverte de Bruxelles par un Charles hésitant de plus en plus à affronter un Pharrel qui semble en savoir plus qu'il n'y paraît sur les secrets de Little Charlie. On se délecte de la découverte du métier de comédien par ce gamin de 12 ans, s'ouvrant à la vie après avoir vécu dans le giron d'une grand-mère possessive. Avant de traverser l'Atlantique, Charles prend des cours de comédie en Angleterre avec une certaine Binkie. « Nous nous enfermions dans le bureau de Binkie où elle déclamait des textes dont je devais ensuite apprendre par cœur certains passages. J'adorais ça. Pour la première fois de ma vie je m'amusais. Être un apprenti acteur était mille fois plus excitant que tout ce que j'avais connu jusqu'alors. »

Sous le charme de Teddy

Une fois à Hollywood, Little Charlie fait un carton. Le gamin, très entouré, va découvrir, en accéléré, tous les travers de la célébrité. A peine adolescent, il prend conscience de son homosexualité en tombant sous le charme d'un de ses partenaires, guère plus âgé que lui. Mais ce dernier l'ignore. Cruelle déception. « Il me fallut les trois semaines de tournage pour admettre que j'avais vécu tout seul mon premier coup de foudre. »

Peu de temps après, Teddy fera son apparition. Teddy, le playboy, toujours entouré de jolies filles, des starlettes en général. Teddy encore présent à l'esprit de Charles et qui va le hanter durant son voyage à Bruxelles.

Ce roman de François Rivière, par ailleurs spécialiste de littérature policière et scénariste de bande dessinée, décrit minutieusement le Hollywood des années 50 et le Bruxelles de nos jours. Avec en lien, le petit Charlie, enfant-acteur ayant oublié de grandir.

« L'usine à rêves » de François Rivière, Robert Laffont, 18 € 

dimanche 25 janvier 2009

BD - Lascive et sensuelle sweet Loreena

Jolies femmes, fantômes et héritage : tel est le menu de cet album de la série Halloween Blues de Mythic (scénario) et Kas (dessin). Les jolies femmes ce sont Loreena Sunbury, jeune orpheline de 20 ans, et Dana Anderson, actrice américaine, au firmament de sa gloire. 

Cette dernière est également le fantôme de cette histoire fantastico-policière se déroulant dans une ville moyenne des USA dans les années 50. Dana, tout de rouge vêtue, hante son mari, l'inspecteur Forester Hill, suspecté en son temps du meurtre de son épouse. Et parfois l'aide dans ses enquêtes. 

Loreena est persuadée d'avoir été attaquée par une statue dans la bibliothèque de la grande demeure de son oncle, son tuteur après la mort de ses parents. La jeune fille a l'impression de devenir folle car Forester Hill lui prouve que cette agression ne peut pas avoir eu lieu. Mais ce dernier, habitué aux phénomènes étranges et aux esprits tordus avides de dollars, ne lâche pas l'affaire. La machination est plus compliquée qu'il n'y paraît et sera résolue le jour d'Halloween. 


Un sixième épisode d'une série délicieusement rétro, servie par le dessin du Polonais Kas, élève de Rosinski ayant trouvé son style personnel, aux airs parfois alambiqués mais très efficace.

« Halloween Blues » (tome 6), Le Lombard, 13 € 

samedi 24 janvier 2009

BD - Manipulation à l'antenne dans les émissions te télé réalité


On a beaucoup critiqué la télé-réalité sur son côté scénarisé. La réalité présentée à l'antenne ne serait que la transposition d'un scénario écrit à l'avance et interprété dans des candidats-pions manipulés ou consentants. 

Jean-David Morvan, dans cette série dessinée par Porcel, abonde dans ce sens. Dans un futur proche, les abonnés peuvent suivre au quotidien l'action des forces de l'ordre. Plus spécialement un flic, beau, téméraire et charmeur. Pour relancer l'intérêt, une nouvelle partenaire fait son apparition : Oshii. 

Le programme prend une toute autre ampleur quand des terroristes enlèvent la fille du président et diffusent des scènes de torture. Oshii va tenter de retrouver la jeune fille. Ce qu'elle ne sait pas, c'est que tout est truqué par le machiavélique patron de la chaîne Médiacop. 

Le dénouement de cette série, c'est lui qui le raconte par le menu à une amie, avant même que tout ne se réalise. Fiction, réalité, anticipation, le lecteur ne sait plus et s'interroge d'autant plus sur le genre.

« Reality show » (tome 5), Dargaud, 13,50 €

vendredi 23 janvier 2009

BD - Terrible maladie mortelle


La confrérie du crabe est une parabole très poétique sur la maladie. Ce crabe, on devine qui il est exactement. Il grignote de l'intérieur cinq enfants qui se sont connus dans un hôpital. Cinq gamins qui veulent croire à leur guérison. 

Mais qui dans le premier tome se retrouvaient dans un étrange lieu, poursuivi par un vampire affamé, peu de temps après une opération chirurgicale délicate. Dans ce second tome, ils se réveillent dans une cellule, prisonnier d'un savant fou, réincarnation de Frankenstein. Il vient de donner la vie à une créature, petite fille curieuse persuadée que les garçons sont ses frères. L'arrivée de Dracula réclamant ses proies échappées, va provoquer un bouleversement des choses à priori inéluctables. 

Cette histoire de Mathieu Gallié dénote par son côté fantastique et poétique. Il rend hommage aux grandes peurs de l'Humanité. Andreae, le dessinateur, fait exploser son talent dans ces planches en couleurs directes.

« La confrérie du crabe » (tome 2), Delcourt, 12,90 € 

jeudi 22 janvier 2009

BD - Ancienne religion


La nuit de Noël, de nos jours, dans une église du Proche-Orient, un groupe d'homme armés fait irruption dans l'enceinte sacrée et sème la terreur. Ils tuent le prêtre, prennent les enfants en otages et font exploser l'édifice vieux de plusieurs siècles. 

La police secrète du Vatican envoie sur place un enquêteur et un jeune curé, spécialiste de l'histoire religieuse de cette région. Les deux hommes, que tout oppose, se révèlent complémentaires dans cette enquête qui remonte jusqu'à des temps anciens, avant le christianisme. Les ravisseurs, adorateurs de Baal, veulent échanger les enfants contre Lazare. Il aurait survécu jusqu'à aujourd'hui et serait ainsi la preuve vivante de l'existence du Christ. 

Cet album, le troisième de la série, fait alterner scènes savantes sur la genèse des religions et action pure. Novy et Queyssi, les scénaristes, maîtrisent leur sujet, tout comme Antonio Marinetti, le dessinateur italien de cette fiction religieuse.

« Les carnets secrets du Vatican » (tome 3), Soleil, 12,90 €

mercredi 21 janvier 2009

BD - Tuerie en campagne profonde


Mortagne, petite ville comme il en existe tant. Un peu plus de 1000 habitants, deux pôles économiques (vigne et bois), et Martial, jeune adulte qui tente de s'extraire de ce milieu qui l'étouffe. Il a décidé d'étudier la mécanique. C'est considéré comme une trahison par sa famille qui est employée dans la scierie de M. Listrac. 

Martial, héros en négatif de cet album de 112 pages d'Alfred d'après un roman de Guillaume Guéraud. Le jour du mariage de son frère, Martial a basculé de l'autre côté. Un événement a fait déborder la coupe. Armé du fusil de son père, il va tenter de vider l'abcès, "nettoyer" un petit peu le village. 

Une adaptation très forte d'un roman qui ne l'est pas moins. La violence est partout, tapie au fond de nos gènes.

"Je mourrai pas gibier", Delcourt, 14,95 euros 

mardi 20 janvier 2009

BD - Des rivières de sang sur Barcelone


Régulièrement, des auteurs espagnols ou catalans débarquent sur le marché francophone et prouvent que la BD est toujours aussi innovante de l'autre côté des Pyrénées. Dernière trouvaille des éditions Dargaud : "Jazz Maynard" de Raule (scénario) et Roger (dessin). 

Le dernier tome de ce triptyque met un point final à ce polar social et violent ayant pour cadre Barcelone. Dans cette ville entre modernité et tradition, Jazz Maynard, musicien de jazz, est venu faire une pige de son ancien métier : cambrioleur. 

Mais il découvre qu'il n'est qu'un pion dans une machination plus compliquée entre triade chinoise et politiciens corrompus. Le final, dans une tour, est inoubliable.

"Jazz Maynard" (tome 3), Dargaud, 13,50 euros 

lundi 19 janvier 2009

BD - Célibataire, mais jusqu'à quand ?


Cécily est une jeune femme moderne. Quand son mec devient trop lourd (accro aux jeux vidéo) elle décide de loger chez sa meilleure amie. 

Une bouffée de liberté, le temps de trouver un autre mec. Ou plus simplement de profiter un peu de la vie et de tester les différents produits sur le marché. Ce recueil de gags, entre tendresse et détresse, est avant tout un portrait acidulé de la vie des trentenaires d'aujourd'hui. Cécily puise dans son quotidien pour caricaturer toute une génération. 

Cela sonne souvent juste, les personnages étant très crédibles, de l'homme marié hésitant entre épouse et maîtresse à l'intellectuel déchiré à l'idée d'hypothéquer son indépendance par amour.

"Sans les mecs… ou presque !", Vent des Savanes, 12,50 euros 

dimanche 18 janvier 2009

BD - Franz, l'Irlandais


Trop souvent, des dessinateurs talentueux tombent dans l'oubli dès qu'ils n'ont plus de nouveautés dans les bacs. A plus forte raison quand ils meurent. Franz s'est éteint en 2003, mais son œuvre reste vivace, d'autant que les éditions du Lombard ont la bonne idée de régulièrement rééditer les meilleures histoires de ce conteur sans pareil. C'est le cas avec l'intégrale de la jeunesse de Lester Cockney, 128 pages qui rejoignent la collection Signé. 

Franz a débuté sa carrière en 1969. Des histoires courtes réalistes dans les pages de Spirou et Tintin. Il reprend le dessin de Jugurtha après l'immense Hermann. Il va faire ses classes dans ces histoires, parfois décousues de Jean-Luc Vernal. Il aime dessiner les femmes fières et libres, les chevaux, les espaces infinis et vierges. En se lançant, en solo, dans les aventures de Lester Cockney (série qui s'appelait à l'origine "Les fous de Kaboul"), il va franchir une étape supplémentaire dans sa carrière. De bon artisan, il passe à créateur authentique au talent reconnu.

Lester Cockney voyagera à travers toute la planète, achevant son périple en Amérique. Mais son enfance, c'est dans l'Irlande qu'il la passe. Cette enfance au centre de cette intégrale reprenant "Irish Melody" et "Shamrock Song" datant de 1994 et 1996. Le dessinateur trouvera l'inspiration dans ces verdoyantes collines irlandaises, peuplées de familles aux mœurs rudes. Un apprentissage de la vie qui explique le besoin de liberté d'un Lester devenu adulte. Une ballade à redécouvrir et qui n'a pas pris une ride.

"Irish Melody" et "Shamrock Song", Le Lombard, 20 € 

samedi 17 janvier 2009

Roman français - Vilain petit campeur


Les joies du camping, la vie au grand air, entre baignades, bronzette sur la plage et partage des douches communes, sont au centre de ce roman se passant sur la côte atlantique en été. Le Camping Atlantic : un petit paradis pour nombre de smicards heureux de passer quelques semaines loin de leur triste quotidien. Mais pour le bel Adonis, ce rituel immuable est devenu, avec les ans, totalement insupportable. Adonis qui a bien mérité son prénom. Il est beau à faire tourner les têtes. Toutes les filles remarquent cet adolescent en train de devenir un homme plein de charme et d'assurance. Adonis sait qu'il pourrait les séduire, mais il va utiliser toute sa "force de frappe" séductrice pour son frère aîné Nicolas.

Ariel Kenig décrit avec force détails les relations compliquées entre les deux hommes. Nicolas, émancipé, ayant un travail et une petite copine qu'il a même emmenée cette année au camping avec les parents. Adonis, toujours lycéen, sous la coupe de ses parents. Adonis qui a bien l'intention durant ces vacances de tout faire exploser, humilier les parents, ridiculiser la fiancée, brûler le camping et les idiots qui y vivent en été. Si parfois les rapports entre les deux frères déroutent le lecteur, parce qu'à la limite de l'homosexualité et de l'inceste, l'intérêt de ce roman réside surtout dans la description des faits et gestes des campeurs. Vus par les yeux d'Adonis, ils sont abjects. Ainsi le jeune rebelle constate que "c'est rassurant pour les vieux de savoir les jeunes avec les jeunes, les filles avec les filles, les malades avec les malades... Les ploucs avec les ploucs, ce sont les étés au camping et les parents parfaitement intégrés, sont assurément confiants en l'avenir. Ils reviendront l'année prochaine".

Ce "Camping Atlantic" nous met en présence de deux mondes totalement opposés. Celui de la normalité, qui entend profiter au maximum de ces congés payés durement conquis, même si inconsciemment on reproduit la vie de tous les jours mais au soleil. A l'opposé, Adonis représente cette envie d'absolu, de changement, de jouissance immédiate. La médiocrité doit être combattue. Même si c'est au détriment de sa raison...

"Camping Atlantic" d'Ariel Kenig. Editions Denoël. 15 € (En format poche chez J'ai Lu)  

vendredi 16 janvier 2009

BD - Birmane et résistante


Infatigable voyageur, Jonathan fait escale dans ce 14e album en Birmanie. Un pays dirigé par une dictature militaire intransigeante. Le héros, libre comme l'air, se sent bien à l'étroit dans ce carcan qu'un de ses amis compare au monde décrit par George Orwell dans 1984. Mais Jonathan sait être patient et persévérant. 

Il doit endormir la méfiance des autorités car il a un rôle important de messager à jouer. Messager de la résistance, malgré les arrestations, les déportations et les exécutions sommaires. 

Cela donne l'occasion à Cosey de longuement décrire ses errances dans la campagne, d'un temple à un autre, en barque sur des rivières calmes et parsemées de cabanes surélevées. Et enfin il la rencontrera, "Elle", femme "nat" porteuse des preuves des exactions du régime birman. Une rencontre magique, comme tous les albums de cette série devenue rare. Cosey, avec l'âge, a gagné en calme et en plénitude. Mais son message est toujours aussi fort. 

N'oublions pas qu'il fut un des premiers, en Occident, à dénoncer dans cette série, l'invasion du Tibet par les Chinois.

"Jonathan" (tome 14), Le Lombard, 10,40 € 

jeudi 15 janvier 2009

BD - Confessions villageoises


La vie suit son cours au sein de la petite communauté de Notre-Dame-des-Lacs, paroisse du Québec des années 20. Marie, la belle veuve, craque toujours autant pour le beau Serge, cuisinier parisien récemment débarqué dans la Belle province. 

Ils travaillent ensemble, vivent sous le même toit et naturellement les commères s'en donnent à cœur joie se demandant pour quand sera le mariage. Mais un soir, alors que Marie a enfin le courage de faire le premier pas, Serge lui avoue son secret. Et de ce fait le mariage devient impossible ainsi que l'amour de Marie. 

La jeune femme décide alors de se confesser et de révéler le secret au curé. Serge va devoir trouver quelques alliés pour tenter d'apaiser l'incendie qui menace. 

Cette belle histoire d'envie et de tolérance est rondement menée par le duo le plus remarqué de ces dernières années : Loisel et Tripp. Le premier s'occupe du découpage et de la mise en scène alors que le second assure un encrage « enrichi ». Ajoutez les couleurs de François Lapierre et vous avec un petit bijou entre les mains...

« Magasin général » (tome 4), Casterman, 14 € 

mercredi 14 janvier 2009

BD - Fuite sur le Mississippi


Librement inspirée du roman de Mark Twain, « Les aventures de Huckleberry Finn », cette série entraîne le lecteur dans le sillage d'un gamin effronté dans le Mississippi des années 30. Huck Finn vit dans une cabane avec son père, Tape-dur, alcoolique et violent. 

Huck sera finalement placé chez de bons bourgeois après la fuite de Tape-dur, soupçonné de meurtre. Une nouvelle vie pour le gamin habitué à se débrouiller seul dans les marécages. Dans cette exploitation d'élevage de poissons-chats, il rencontre Charley Williams. Le jeune Noir, tire-au-flanc, est persuadé d'avoir un grand avenir dans la musique. 

Après quelques péripéties ils prendront la fuite ensemble sur une barque, dérivant sur le fleuve à la recherche d'un peu de bonheur. Ce que Charley ne sait pas c'est que Huck a fait croire qu'il avait été assassiné. Et la police découvre un suspect tout naturel : Charley. 

Un récit prenant et dense imaginé par Philippe Thirault et Steve Cuzor, ce dernier assurant en plus le dessin de son trait réaliste et précis.

« O'Boys » (tome1), Dargaud, 13,50 € 

mardi 13 janvier 2009

BD - Brève paternité


Préparez vos mouchoirs. Cet album, le dernier de la série marquant les 20 ans de la collection Aire Libre, est un mélodrame dans toute sa dureté. Cela commence à 200 à l'heure. Xavier, 35 ans, est à la tête d'une petite entreprise. 

C'est le prototype du jouisseur. Grosse voiture, belles nanas : il est riche, le montre et en profite. Avouons que le trait est un peu gros. Les auteurs (Alcante au scénario, Fanny Montgermont au dessin) ont noirci le personnage. Peu sympathique, Xavier va devoir changer radicalement quand il découvre qu'il est le père de Julien. 

La mère, une de ses conquêtes quand il était étudiant, est malade. Elle lui demande de s'occuper de l'enfant. Il refusera dans un premier temps et, par la force des choses, devra héberger Julien durant quelques jours. Un choc pour le trentenaire car Julien, malgré ses 14 ans, en paraît 50. Il souffre d'une maladie génétique rare. Son espérance de vie est très limitée. 

Les auteurs ont décortiqué les relations entre ces deux êtres que tout oppose. Une relation tardive et brève. Intense aussi, malgré le difficile début.

« Quelques jours ensemble », Dupuis, 15 € 

lundi 12 janvier 2009

Thriller - Dantec survitaminé

Deux braqueurs en cavale, aux pouvoirs extraordinaires, sont les héros de ce roman de Maurice G. Dantec, de retour à ses premières amours.


Auteur détesté par certains, vénéré par d'autres, Maurice G. Dantec laisse rarement insensible. Ses rares apparitions publiques sont souvent folkloriques car l'homme n'a pas sa langue dans la poche. Sous des airs de chanteur rock, limite gothique, il aime provoquer les tièdes ou autres politiquement corrects en citant la bible et quantité de théories kabbalistes. Dans ses romans, c'est un peu le même topo. Vous ne trouverez pas de belle envolée lyrique ou de fin optimiste. Ce sera obligatoirement dérangeant et speed. Son nouveau roman au titre étonnamment long (« Comme le fantôme d'un jazzman dans la station Mir en déroute ») mais se révélant harmonieux et facile à retenir, joue dans la catégorie des textes courts et parfois très terre-à-terre, en opposition avec d'autres productions comme « Cosmos Incorporated », long et très cérébral.

Cap au Sud

Dès la première page on se retrouve dans le feu de l'action. Le braquage d'une poste. Le héros, et narrateur, rempli un sac de billets et prend la fuite dans la voiture conduite par sa compagne, Karen. Le dernier hold-up de la série. Avec le pactole accumulé en quelques mois, ils ont bien l'intention d'aller vivre heureux et tranquilles dans un pays d'Asie du Sud-Est. Maurice G. Dantec va nous raconter par le menu leur cavale à travers l'Europe puis l'Afrique, dans ce futur proche qui nous pend au bout du nez si on n'y prend garde.

Le couple s'est connu dans un centre de rétention. Ils y avaient été enfermés car porteurs d'un neurovirus, supposé dangereux par des autorités sanitaires frileuses. « On ne savait rien du neurovirus qui nous bouffait le cerveau, Karen et moi, mais comme tous les autres malades atteints du syndrome de Schiron-Aldiss, je suppose, on faisait de ces putains de rêves hyperintenses (...), des fois hyperlumineux, extatiques, où on revoit nos ancêtres et nos amis morts, et d'autres fois où c'est les ténèbres, la destruction, le feu, la douleur, la terreur... »

Baston à Abidjan

Armés de fausses cartes d'identités, ils traversent la France puis l'Espagne pour atterrir au Maroc. Là, ils auront affaire avec un flic véreux qui cherchera à leur mettre des bâtons dans les roues. Karen découvrira alors que le neurovirus donne des moyens de tuer tout à fait nouveaux et étonnants. Et de communiquer avec une sorte de « grand tout », chapeauté par un jazzman, Albert Ayler, dont le fantôme hante la station Mir en train de s'enfoncer dans l'atmosphère terrestre, au grand désespoir de l'équipage. L'auteur va en profiter pour placer quelques unes de ses tirades mystiques, sans pour autant négliger la partie action du roman, comme cette baston entre le narrateur et un dealer sur un quai du port d'Abidjan : « J'ai contre-attaqué avec un enchaînement thaïe-boxe de Shaolin, knee kick à la Bruce Lee, avec le talon, juste derrière le genou de sa jambe d'appui – ça lui fait un mal fou et ça l'a stoppé net -, enchaînement direct avec un leading side kick, en plein dans le thorax... » Et cela continue comme cela durant quelques pages.

S'il n'a pas l'ampleur de ses derniers textes, ce roman de Maurice G. Dantec reste un excellent amuse-gueule, comme une gorgée pour goûter à ce grand cru de la littérature française. Si vous avez aimé, rassurez-vous, ses autres titres sont copieux, flamboyants et dantesques. Dans tous les sens du terme.

« Comme le fantôme d'un jazzman dans la station Mir en déroute », Maurice G. Dantec, Albin Michel, 16 € 

dimanche 11 janvier 2009

BD - L'art de flâner selon Taniguchi


Si dessins animés et mangas japonais sont souvent associés à une certaine violence et frénésie d'action, tous les auteurs ne mangent pas de ce pain. A l'opposé de cette tendance, Jirô Taniguchi propose des histoires de tous les jours, marquées par une certaine nostalgie. 

« Le promeneur », sur des scénarios de Masayuki Kusumi, entraîne le lecteur dans les pas qu'un quadragénaire redécouvrant sa ville au gré de ses promenades. Des marches forcées au début car il vient de se faire voler son vélo. Rapidement il prend beaucoup de plaisir dans ces pérégrinations, à toute heure de la journée et même de la nuit. Avec lui on s'extasie devant une vieille boutique, une rue en pente, un vendeur de soques (ces chaussures traditionnelles). 

En fin de volume, Taniguchi explique son amour de la marche, de la promenade sans but : « J'ai le sentiment que, parmi les actions quotidiennes des humains, la marche est la plus naturelle. » Et une fois l'album terminé, vous ne pourrez vous empêcher de prendre un peu de temps pour redécouvrir, à pied, votre environnement...

« Le promeneur », Casterman, 15 € 

vendredi 9 janvier 2009

BD : Les auteurs de Largo Winch sortent la grosse artillerie


Comme nombre de séries lancées par Jean Van Hamme, Largo Winch remporte un important succès populaire. La BD dessinée par Philippe Francq devrait voir ses ventes encore progresser après le succès de l'adaptation ciné, toujours à l'affiche. « La voie et la vertu », 16e tome, est la seconde partie des aventures chinoises du milliardaire américain. 

Il est en fâcheuse posture. Obligé de dérober un manuscrit de Lao-tseu chez un riche industriel chinois, il est capturé sur le fait et emprisonné au Tibet, dans une cellule d'où il s'était déjà échappé quelques années auparavant. A Hong Kong, ses amis, Simon notamment, tentent de retrouver sa trace car de graves menaces pèsent sur le groupe W si son unique propriétaire ne réapparaît pas rapidement. 

Décors fouillés, action à toutes les cases, rebondissements : les auteurs sortent l'artillerie lourde pour une série qui ne semble pas sur le point de s'essouffler, même en ces temps de crise financière mondiale...

« Largo Winch » (tome 16), Dupuis, 10,40 € 

BD - Valentine est une râleuse congénitale


Si elle avait meilleur caractère, elle serait véritablement craquante cette Valentine imaginée par Anne Guillard. Un charme tout particulier qui s'explique (en fonction des goûts) par ses bourrelets, ses culottes trop petites, ses microbes ou son art de colporter des ragots. Une nana des années 2000, seule dans son appartement en désordre, cherchant du boulot et un amoureux. 

Cette BD d'un genre nouveau permet également à son auteur de faire une caricature virulente des magazines féminins, ses tests, ses conseils et ses publicités. Entre deux gags (la dominante de ce quatrième recueil est la facilité déconcertante de Valentine à attraper toutes les maladies contagieuses à 150 km à la ronde), vous pourrez lire l'interview de la « championne du monde de 400 m rage libre », découvrir les nouvelles tendances que sont les « Grippe party » ou le courrier des râleuses (Electra demande comment éviter de devoir, tous les matins, « faire la bise à tous mes collègues. Surtout les gros moches pas rasés »).

« Valentine » (tome 4), Vents d'Ouest, 9,40 € 

jeudi 8 janvier 2009

Chronique politique - Nicolas Ier, deuxième

Patrick Rambaud propose un second volet de sa chronique acide et caustique du "règne de Nicolas Ier".


Pamphlet sans concession, moquerie argumentée, méchanceté assumée : ces 175 pages habilement troussées par un Patrick Rambaud au sommet de sa raillerie remettent la présidence de Nicolas Sarkozy dans une perspective totalement différente de l'image véhiculée par les médias. Certes l'auteur ne le nomme jamais, mais on le reconnaît dans chacun des titres pompeux qu'il l'affuble toutes les trois pages. Florilège : « Notre Foudroyant Monarque, Notre Electrique Souverain, Notre Grandiose Leader, Notre Terrible Seigneur, Notre Roublarde Majesté... »

Patrick Rambaud reprend donc le récit du règne au début 2008. Avec l'arrivée d'un nouveau personnage principal qui va encore plus donner de relief à ce texte. Il fallait remplacer l'Impératrice disparue (Cécilia). Un rôle dévolu à la comtesse Bruni, « qui souriait en professionnelle comme une princesse de roman-photo italien », devenant rapidement "Madame". Cette romance semble avoir pour unique but de faire oublier les désillusions du peuple qui gronde de plus en plus.

L'empereur Nicolas Ier semble cependant réellement attiré par l'intrigante italienne. Pour preuve cette réflexion au lendemain de sa première rencontre : « Elle est pétée de thunes ! » C'est une des autres constances de ce pamphlet, quand il parle, "Notre Nervosité Intense" est d'une extrême vulgarité.

« Narcisse and Co »

Vient enfin le mariage, discret, mais savamment caché pour en faire un événement de première importance. La Carlamania est décortiquée par un Patrick Rambaud sceptique sur cette trop belle histoire d'amour. Elle de gauche, lui de droite. Ils vont s'influencer, devenant meilleurs... Que nenni, pour l'auteur ce n'est qu'une double opération de communication : « On eût dit que Madame et Lui avaient signé un pacte et monté une société qu'on aurait pu nommer la Narcisse and Co. Ils s'aimaient beaucoup, mais d'abord eux-mêmes, et se célébraient l'un l'autre. Sa Majesté vantait à la moindre occasion la beauté extrême et l'étincelante intelligence de Madame, et Madame expliquait au monde entier les vertus et le brillant de Notre Prince Charmant, si travailleur, si tendre, si rapide."

Une année qui ne fut pas de tout repos pour "Notre Vorace Souverain". En France la situation se dégrade. Difficile de tenter de se glorifier quand le prix de l'essence explose, les usines ferment et les taxis manifestent. Il tente de se refaire à l'international. Une bonne propagande le présente comme le sauveur du monde. Mais selon Patrick Rambaud, "Notre Sautillant Monarque" semble plutôt être la risée des dirigeants des autres nations.

Cette deuxième chronique s'achève en octobre, alors que la crise mondiale de la finance éclatait, en raison des agissements « des milieux d'affaire que choyait Notre Majesté ». « Comment Notre Hardi Monarque allait-il empêcher la dérive puis le naufrage ? » En excellent feuilletoniste, Patrick Rambaud annonce un troisième épisode que l'on espère aussi croustillant et politiquement incorrect.

« Deuxième chronique du règne de Nicolas Ier », Patrick Rambaud, Grasset, 13,50 €

mercredi 7 janvier 2009

BD - Capricorne rêve en cage


Si certains dessinateurs ont la fâcheuse tendance de se reposer sur leurs lauriers et de ne plus quitter un style dès que le succès est au rendez-vous, d'autres ne peuvent s'empêcher de s'imposer des contraintes pour tenter d'améliorer leur créativité. 

Le maître absolu de ce style de travail est Andréas. Le créateur de Rork a tout tenté en matière de narration et de mise en page. Enfin presque car à chaque album, il trouve une nouveauté à expérimenter. Le 13e tome de la série Capricorne ne déroge pas à la règle. Chaque planche est découpée en un damier de 20 carrés égaux séparés dans d'épais filets noirs. Le héros a ainsi l'impression de se retrouver derrière les grilles d'une cage. 

Cet exercice de style sur l'enfermement revisite la série fantastique. L'intrigue n'avance guère, mais le résultat, virtuose et beau, se laisse admirer.

"Capricorne" (tome 13), Le Lombard, 10,40 euros 

mardi 6 janvier 2009

BD - Fin de parcours dans les étoiles pour Lanfeust


Huit albums en huit ans : avec une remarquable régularité, Arleston (scénario) et Tarquin (dessin) ont mené à bien le second cycle des aventures de Lanfeust. 

L'intrépide héros a découvert la planète Merrion et son tyran local, le Prince Delhuu. Il a également fait une éclipse dans le temps, retrouvant sa belle fiancée, Cixi, mère d'un certain Glin, son fils, déjà adulte. Dans ce dernier opus, la petite bande (Hébus le troll et Swiip, l'extraterrestre) décide de rejoindre la planète principale. A court d'argent, ils se font embaucher sur vaisseau de croisière de luxe. Une première partie truffée de gags où Arleston s'en donne à cœur joie. 

La fin de l'album est plus sérieuse, avec un final en apothéose. Mais que les mordus se rassurent, un 3e cycle est en préparation.

"Lanfeust des étoiles" (tome 8), Soleil, 12,90 euros

lundi 5 janvier 2009

BD - Les aventures de Sillage en version courtes


La série Sillage de Jean-David Morvan et Philippe Buchet continue son bonhomme de chemin dans l'espace intersidéral. La jeune Nävis, dernière représentante de l'espèce humaine, en plus de ses grandes aventures, est l'héroïne de récits courts réalisés par différents auteurs qui peuvent ainsi donner leur vision de cet univers de science-fiction. 

Le sixième recueil nous donne l'occasion de retrouver avec grand plaisir la signature de Marc Wasterlain, créateur du Dr Poche et de Jeannette Pointu. Il illustre une transe de Nävis dans laquelle elle découvre qu'il existe un après la mort. 

Tébo propose un voyage comique alors qu'Aude Picault se penche sur le désir de maternité de Nävis, à peine adolescente.

"Les Chroniques de Sillage" (tome 6), Delcourt, 12,90 euros 

dimanche 4 janvier 2009

Roman - Inépuisable île au trésor

Pierre Pelot propose une version modernisée et futuriste du mythique roman d'aventures de Stevenson.

Rares sont les romans ayant obtenu une telle renommée. « L'île au trésor » de Robert Louis Stevenson est devenu l'exemple même du roman d'aventures. Dans sa trame, ses personnages, ses décors : tout frise la perfection, le parfait enchaînement. Qui n'a pas rêvé en découvrant ce texte être à la place du jeune Jim quand le grand souffle de l'aventure le fait partir vers des horizons inconnus ? Un roman qui passionne les lecteurs depuis des décennies mais également les auteurs. Pour preuve cette version modernisée signée de Pierre Pelot.

Il n'a pas pas changé le titre, se contentant de transposer cette histoire de pirates dans un futur proche. Un futur peu reluisant. Jim vit chez sa tante, Sally-Sea et le compagnon de cette dernière, Trelawey. Ils ont une auberge sur une île des Caraïbes. Une île ayant considérablement diminué de surface depuis la « Grande surprise ». Un terme assez poétique pour désigner la brusque montée de eaux des océans, annoncée par les scientifiques, mais pas si vite... Pierre Pelot joue sciemment le mélange des genres dans ce récit fidèle à l'original mais avec un soupçon d'écologie et d'anticipation.

Silver et les guérilleros

Tout commence pour Jim quand le capitaine Billy Bones débarque à la taverne. Un soir d'ouragan, alors que le vent détruit tout sur son passage, l'homme apparaît sur le chemin boueux : « L'espace d'une seconde on découvrit son visage aux traits marqués ruisselants, noueux, ses yeux agrandis presque anormalement globuleux, sa bouche ouverte sur un cri stupéfait qui découvrait ses dents, ses incisives, si fortement écartées qu'on aurait pu penser qu'il lui en manquait une sur deux. » Il ne s'en doute pas encore, mais l'aventure vient de faire une entrée remarquée dans la vie de Jim. Il devient le confident de Bones, apprend l'existence d'une carte au trésor de la bouche même de l'homme qui ne cesse de l'interroger sur sa tante et sa soeur jumelle, la mère de Jim.

Ensuite ce sera le départ et l'arrivée de nombreux protagonistes, de Silver à Flint au doc Calvino en passant par des guérilleros boliviens, petit grain de sel de Pierre Pelot. L'auteur français, ayant à son actif une multitude de romans, de la SF au polar en passant par le western a visiblement pris beaucoup de plaisir à revisiter ce classique. Le lecteur aussi...

« L'île au trésor », Pierre Pelot, Calmann-Lévy, 18 € 

samedi 3 janvier 2009

BD - Mauvais temps avec Prométhée de Bec


Christophe Bec, dessinateur originaire de l'Aveyron, est devenu en une dizaine d'années une valeur sûre de la BD fantastique et de science-fiction. 

Ses dessins hyper-réalistes alliés à une mise en page et un découpage très cinématographiques lui ont permis de toucher un public jeune et branché. Il a quitté les Humanoïdes Associés pour se recentrer sur la maison qui l'a fait débuter : Soleil. En plus de la réédition d'anciennes séries mises en stand-by (« Pandemonium » ou « Le temps des loups »), il revient à la SF avec le premier tome de « Prométhée ». 

Une ouverture prometteuse, avec une multitudes de personnages et de situations exceptionnelles qui ont le don de passionner le lecteur. Le 21 septembre 2019, à 13 h 13, toutes les horloges et montres de la planète s'arrêtent durant trois heures. Un premier signe inquiétant avant la disparition de la navette Atlantis en plein décollage puis la chute de centaines d'avions. Toujours à 13 h 13... 

Une action contemporaine que Christophe Bec met en parallèle avec l'histoire de Prométhée. Parfaitement maîtrisé, palpitant, cet album devrait passionner de nombreux lecteurs ayant déjà apprécié « Zéro absolu » ou « Sanctuaire ».

« Prométhée » (tome 1), Soleil, 12,90 €

vendredi 2 janvier 2009

BD - Les gardiens d'Elivagar


Écrite par Runberg, dessinée par Talijancic, la série « Hammerfall » plonge le lecteur dans les légendes viking. Le troisième tome met en vedette des géants chargés de surveiller les sources magiques d'Elivagar. Ce récit historique se déroule au moment des premières tentatives d'évangélisation des territoires du Nord par les prêtres francs. 

Une importante troupe, menée par Bjorn aidé de quelques notables d'Aquitaine, a pour mission de récupérer une relique dérobée par Ulf-le-Blanc. En parallèle, les frères Larsson se lancent à la poursuite de Bjorn qui a enlevé la femme d'Harald. En 56 pages très denses, l'action progresse, au fil des rencontres merveilleuses (géants, skanes et autres créatures fantastiques). En bateau, à cheval ou à pied, les différents protagonistes progressent dans ces vallées encaissées, forêts menaçantes et prairies enneigées. 

Une grande bouffée d'air pur pour les yeux et la tête. Cette série s'achèvera l'année prochaine avec le quatrième et dernier tome intitulé « Ceux qui savent ».

« Hammerfall » (tome 3), Dupuis, 13 € 

jeudi 1 janvier 2009

BD - Souvenir de famille


Stéphane Levallois fait partie de ces jeunes illustrateurs tellement doués qu'ils pourraient décourager des artistes ayant des années d'expérience derrière eux. Avec une incroyable aisance, il dessine une histoire de famille, sombre et lumineuse à la fois. 

Sombre comme l'époque : l'occupation allemande. Lumineuse car le héros, Bernard, le grand-père de l'auteur, a fait le choix de la Résistance, malgré les risques pour lui et sa famille. Tout commence aux obsèques de la grand-mère de Stéphane Levallois. Le jeune homme se souvient de ses étés dans la maison de campagne. Une nuit, il rêve de son grand-père qu'il n'a pas connu. Il avait l'apparence d'un sanglier. Le récit va ainsi imperceptiblement passer des souvenirs d'enfants au récit de la vie de ce sanglier, boucher de son état, résistant durant la seconde guerre. 

Un opposant discret à l'occupation allemande mais déterminé. Le cauchemar du petit-fils va se prolonger pour découvrir la fin du sanglier n'ayant aucune chance face à la meute vert-de-gris. 

120 pages en noir et blanc qui vous prennent à la gorge. Assurément un des 10 meilleurs albums de l'année 2008.

« La résistance du sanglier », Futuropolis, 23 euros