mercredi 31 décembre 2008

BD - Affamées de vie


On en mangerait bien de ces « Croqueuses » imaginées par Karine Bernadou, jeune dessinatrice révélée en 2006 à Angoulême dans le cadre du concours "Jeunes talents". Les Croqueuses ce sont des femmes comme vous en croisez régulièrement dans la vie. Elles sont souvent séduisantes, libérées, amoureuses de la vie et décomplexées. 

Dans des gags en une planche, aux multiples héroïnes, Karine Bernadou nous en présente plusieurs spécimens, de la rondouillette fatiguée des compliments fusant sur son passage, à la revendicative, hurlant son envie de jouissance à son petit ami avachi dans le lit. Il y a aussi les pures intellectuelles, se demandant sans cesse le pourquoi du comment... Cela peut être gentillet, puis trivial et outrancier. 

Pourtant cela reste des scènes de la vie de ces femmes, loin des stéréotypes des années 60 ou 70. Des « Croqueuses » prêtes à se faire une indigestion d'hommes si l'occasion se présente. Une BD tout à fait dans l'air du temps.

« Les Croqueuses », Delcourt, 9,95 euros 

mardi 30 décembre 2008

BD - La stratégie du Mikado

Malheur à celui qui s'attaque à une Tigresse blanche. Encore plus s'il s'agit d'Alix Yin Fu, la pulpeuse héroïne dessinée par Conrad sur ses propres scénarios avec cependant une pincée de Wilbur, de son vrai nom Sophie Commenge, compagne du dessinateur. Personnage issu de l'univers des Innommables, Alix a vécu ses premières aventures sous la plume de Yann. Il s'agit, dans ce nouvel album, du premier titre du second cycle. 

De retour en Chine, Alix va de nouveau tomber entre les mains des nationalistes de Tchang Kai-shek. Une horreur pour cette jeune femme ayant juré fidélité et loyauté à la Chine nouvelle de Mao. Mais parfois, les combats politiques sont tortueux. Elle se retrouvera ainsi associée aux Anglais et à la CIA pour tenter de mettre la main sur le trésor caché des Japonais. 

Une histoire mouvementée, parsemée de vérité historique et de personnages réels. Le dessinateur, au sommet de son art, propose plusieurs planches panoramiques composées d'une seule image.

« Tigresse blanche » (tome 6), Dargaud, 11,50 € 

dimanche 28 décembre 2008

Roman - "L'idiot du village" de Patrick Rambaud


Téléporté dans le temps, le héros de Patrick Rambaud retrouve le Paris du début des années 50. Mais comment vivre au quotidien, sans nostalgie, sa propre enfance ? Tout a commencé par une anomalie dans le journal du jour. Au lieu de découvrir les nouvelles de 1995, le narrateur feuillette un exemplaire de 1953 revenant sur la dernière grève à l'usine de la Régie Renault et du repli des forces vietminh au Laos. Un soir, alors qu'il reçoit des amis, il découvre un chien dans la cuisine. Plus tard c'est une jeune fille habillée comme dans les années 50 qu'il surprend dans sa chambre.

Visions fugitives, inexplicables. Et puis finalement, un jour, il se retrouve dans sa rue mais les bâtiments ont changé d'aspect, les voitures aussi. Plus de doute, il a fait un bond dans le passé.

A ce stade du récit, entre nostalgie et fantastique, Patrick Rambaud ne donne pas de clés au lecteur. Vers où veut-il nous conduire ? Mystère... Mais on ne peut pas s'empêcher d'imaginer nos propres réactions si l'on se trouvait à la place du héros. Comment vivrions-nous une plongée hyper-réaliste dans le monde de notre enfance, surtout en connaissant le futur ? Déambulant dans ce Paris encore populaire, pas encore défiguré par l'urbanisme débridé des années 70, notre héros se trouve quand même très démuni malgré sa belle carte de crédit. Constatant que le phénomène dure, il doit trouver un toit pour s'abriter et un travail pour subsister.

Devenu serveur dans un restaurant des Halles, il reprendra le contrôle de sa vie en discutant en salle avec un habitué du restaurant. Ce journaliste au Figaro suit les rebondissements de la vie politique française. Et le serveur se transforme en voyant extralucide : procès des époux Rosenberg, mur de Berlin, tremblement de terre en Grèce, Dien-Bien-Phuh, il est incollable. Toutes ses prévisions se réalisent et le journaliste l'embauche comme secrétaire particulier. Mais jouer les devins n'a pas que des bons côtés. Il ne peut s'empêcher d'aller traîner du côté de l'appartement de ses parents et revoit sa mère, sachant quelle n'a plus que quelques années à vivre. Il croise également dans la rue sa future femme : une fillette jouant dans un bac à sable. Cette " fantaisie romanesque", selon les termes mêmes de son auteur, est beaucoup plus profonde qu'il n'y paraît.

"L'idiot du village" de Patrick Rambaud Editions Grasset. 16 euros (Le Livre de poche, 5 euros)   

BD - Nom de code : Mata-Hari

Les délinquants, en Suisse, n'ont pas la même envergure que dans nos banlieues. Quand ils décident de se lancer dans une magouille financière, l'unité est le million d'euros. Pour contrer ces voyous en col blanc, la brigade des enquêtes réservées a de très larges possibilités. 

Dans cette troisième enquête imaginée par Daniel Ceppi, c'est Zoé Zemp qui est la première sur le coup. Elle est contactée par un banquier qui s'inquiète d'une récente demande d'un ministre d'Azerbaïdjan : faire transiter par son compte bancaire la coquette somme de 49 millions d'euros. 

Un pactole accumulé par le ministre depuis quelques années en détournant une partie de la vente du pétrole du jeune pays issu de l'ancienne union soviétique. Va débuter un jeu du chat et de la souris, chacun se méfiant de l'autre, la victime pouvant se révéler aussi vicieuse que son bourreau. La démonstration technique des malversations est d'autant plus simple que c'est la très belle Zoé qui s'en charge.

« CH Confidentiel » (tome 3), Le Lombard, 10,40 euros 

samedi 27 décembre 2008

La cité des Jarres, polar islandais

La pluie incessante tombant sur l'Islande est le décor de cette enquête policière, véritable plongée dans un passé trouble signée Arnaldur Indridason.


L'Islande, petit pays perdu dans l'Atlantique Nord, à l'écart des modes et de la frénésie mondiale. Mais cela n'empêche pas ses habitants de se comporter comme le reste des humains sur la Terre. Erlendur, dans les premières pages de ce polar écrit par Arnaldur Indridason, ancien journaliste de 43 ans, se rend sur les lieux d'un crime. Un vieil homme vient d'être découvert dans son appartement en sous-sol, le crâne défoncé par un lourd cendrier. Le meurtrier est parti en catastrophe, en laissant la porte ouverte et un énigmatique message griffonné sur un bout de papier "Je suis LUI".

Avec ses deux adjoints, Erlendur va débuter son traditionnel travail d'investigation. Découvrir l'identité de la victime, ses habitudes, sa famille, ses possibles ennemis et en savoir un peu plus sur son passé. C'est dans cette dernière recherche qu'il va aller de surprise en surprise.

Le dénommé Holberg, chauffeur poids lourd, a déjà eu maille à partir avec la police. Mais c'était il y a très longtemps. Au début des années 60. Une jeune femme avait porté plainte contre lui pour viol. L'affaire avait été classée sans suite. Depuis il vivait tranquillement, sans faire de vagues. Erlendur, écoutant son instinct va pourtant creuser dans cette direction. Cette histoire tragique a pour cadre une Islande noyée sous la pluie. Arnaldur Indridason n'a pas cherché à embellir son pays, au contraire.

Ce polar atypique, par ses personnages et son cadre, finit cependant sur une note d'espoir, preuve que même les pires cauchemars ont une fin.

"La cité des jarres", Arnaldur Indridason, Points, 7 euros

vendredi 26 décembre 2008

Roman - Christopher Priest explore un amour invisible

Le corps meurtri après un attentat, un journaliste tente de se remémorer son dernier amour. Pas évident de se souvenir d'une femme invisible.


Christopher Priest fait partie de ces écrivains de science-fiction qui n'ont pas besoin d'engins spatiaux pour vous faire voyager dans des mondes inconnus. Dans « Le glamour », il développe son intrigue autour de l'invisibilité et de l'oubli. Richard Grey est un journaliste anglais. Cameraman réputé, il a filmé des guerres sans jamais être blessé. La mort, il l'a frôlée dans une rue de Londres. Une voiture piégée. Un simple attentat. Il était au mauvais endroit au mauvais moment. « Quelque chose m'a frappé aux reins, me projetant en avant. Il n'y a eu aucun bruit, mais j'ai violemment heurté l'encadrement en briques d'une vitrine ; le verre épais s'est brisé, les éclats m'ont arrosé. »

Le début du roman se déroule dans une maison de repos. Grey, grièvement blessé, se remet lentement. Bassin fracturé, brûlures, coupures : son corps est meurtri. Son esprit encore plus. Il a totalement oublié ce qu'il a fait les derniers mois. Une amnésie partielle très perturbante.

Vacances enchantées

Quand il reçoit la visite d'une certaine Sue Kewley, il est incrédule. Cette belle jeune femme, graphiste, affirme qu'elle était sa petite amie. Grey a beau se torturer les méninges, il ne se souvient de rien. Sue va alors lui raconter leur rencontre et les quelques semaines vécues ensemble. C'est la troisième partie de ce livre qui parfois prend des airs de romance de vacances.

Sue et Grey se rencontrent dans un train, en France. Il part en vacances, elle rejoint son petit ami, Niall, sur la côte d'Azur. Coup de foudre mutuel, ils font de multiples escales (Nancy, Dijon), s'aimant dans des hôtels impersonnels, profitant de cet anonymat. Mais plus ils se rapprochent de la Méditerranée, plus Sue est anxieuse. Elle ne veut pas que Grey rencontre Niall. Elle veut rompre seule. Grey accepte tout en se demandant à quoi peut ressembler cet homme présenté comme un écrivain fantasque et possessif.

Invisible et libre

Une belle histoire d'amour qui tourne au cauchemar quand Grey pense que Sue est folle. Elle parle seule dans la rue. Elle explique alors au cameraman incrédule que Niall est un « glam ». Le glamour qui permet à un être de se rendre invisible du commun des mortels, les « viandeux ». Elle même a été invisible dans sa jeunesse. Niall l'a séduite, notamment par sa philosophie de la vie : « Il considérait l'invisibilité comme la liberté, un avantage sur les normaux, un moyen de les espionner, de les spolier, de les dominer. » Sue va donc plonger dans le glamour avec lui, « le glamour était devenu un sanctuaire qui me protégeait du monde dur et où je me suis réfugiée. »

Sa rencontre avec Grey va tout changer. Mais elle devra faire deux fois le chemin, le persuader et se persuader qu'une vie normale est possible.

Roman fantastique allant crescendo, « Le glamour » tout en nous faisant rêver, nous ouvre des horizons nouveaux. Il est si tentant d'y croire pour expliquer ces mille petites incohérences de la vie. Trouvez les « glams » et vous expliquerez l'inexpliquable...

« Le glamour », Christopher Priest, Denoël, 21 €

jeudi 25 décembre 2008

BD - Deux doubles vies

Le second tome de cet « Atlantide Experiment » fonctionne comme le premier. Deux personnages, à des milliers de kilomètres de distance, vont vivre une expérience fantastique identique et se retrouvent dans la dernière planche, en Grèce. Aux Antilles, Betty Boren, riche, jeune et belle, va tenter d'aider un ami ayant la mafia russe aux trousses. Au même moment, en Australie, Jayden Paroz, malgré sa timidité maladive, tente de séduire la serveuse du Blue Note Café. S'il avait gagné au Loto ce serait plus simple. Or, un billet gagnant, il sait où il y en a un. Ces deux récits, rythmés et bourrés de péripéties, s'entremêlent au gré des pages, les deux personnages principaux glissant dans le temps pour se retrouver en Grèce. Mosdi, le scénariste, mélange les genres, donnant à Colak, le dessinateur, nombre de possibilité de s'exprimer graphiquement.

« Atlantide Experiment » (tome 2), Soleil, 12,90 € 

mercredi 24 décembre 2008

BD - Un père imparfait selon Bouzard


Cet album de Bouzard débute de la pire des façons : l'auteur vient d'apprendre que sa maman, victime d'une attaque, n'en a plus pour longtemps. A l'hôpital, il découvre une vieille dame affaiblie, obsédée par un secret qu'elle ne peut plus garder pour elle. « Ton père était un troll ! » Telle est la révélation qui va bousculer la vie de Bouzard. Il est très sceptique au début. L'affirmation venant d'une femme n'ayant plus toute sa tête. 

Mais après les obsèques, il remarque une couronne mortuaire confectionnée avec des branchages et du lierre. Avec des poils bruns au centre. Il fait analyser l'ADN de ces poils et découvre qu'il a la même anomalie génétique en lui. 

Sur une intrigue sérieuse et presque triste, Bouzard développe ce qui va devenir un road movie déjanté, vers la Bretagne, à la recherche d'un père poilu et fantastique.

« The autobiography of a mitroll » (tome 1), Dargaud, 10,40 € 

mardi 23 décembre 2008

BD - Parfaitement Parfait


Superbement mis en images par Alessandro Calore, dessinateur réaliste minutieux, le second tome de la série « Je suis Cathare », écrite par Makyo, plonge le lecteur dans cette période agitées du sud de la France. Les « Parfaits » cathares vont de village en village pour expliquer au peuple les préceptes de cette nouvelle religion. 

Les inquisiteurs ne sont jamais loin. Ils contrent violemment cette nouvelle évangélisation. A grand renfort de bûchers... Guilhem Roché, le guérisseur miraculeux, a retrouvé son frère, Arnaut et la belle Nita d'Olac. Retrouvailles agitées entre les deux frères car la jeune femme hésite encore dans son choix. 

Une histoire d'amour alors que le combat fait rage entre les « Parfaits » et les sbires du pape. Une série lumineuse et spirituelle, bel hommage au combat singulier des Cathares.

« Je suis Cathare » (tome 2), Delcourt, 12,90 € 

lundi 22 décembre 2008

BD - Le gang Chicou Chicou


La collection Shampooing, coordonnée par Lewis Trondheim, est devenue la spécialiste de la reprise de blogs dessinés sur papier. Après Boulet, Tarrin ou Mandel, voici les Chicou Chicou. Un groupe de jeunes créateurs (ils sont cinq), originaires de Château-Gonthier travaillant sur de l'autofiction (ils sont leurs propres héros) en cadavre exquis. 

Cela donne des récits, parfois nostalgiques et graves, souvent délirant où chacun surenchérit dans la démesure, tout en gardant une étonnante cohérence graphique malgré la différence des styles. Dans la catégorie délires ne manquez pas Super héros et Zombie. Retrouvailles ou Matin difficile sont plus tendres et réalistes. 

Au final cela fait un gros bébé de 450 pages confectionné à cinq mains. Et certains récits, non repris dans l'album, sont toujours visibles sur le site chicou-chicou.com.

« Chicou Chicou », Delcourt, 34,90 euros 

dimanche 21 décembre 2008

BD - Les débuts de Hugo Pratt


Hugo Pratt a débuté sa carrière de dessinateur de BD en Argentine. Entre 1953 et 1959 il a dessiné des milliers de planches des aventures du sergent Kirk, soldat américain ayant préféré déserter plutôt que de cautionner les massacres des Indiens en pleine conquête de l'Ouest. Quelques-unes de ces aventures sont parues en albums, mais cette fois c'est l'intégrale des histoires écrites par Oesterheld qui seront reprises en cinq volumes. 

Le premier reprend les six premiers récits parus en 1953 en Argentine. Mais la version présentée est celle de 1968. Pratt avait redécoupé et parfois redessiné des planches complètes. On trouve déjà dans la personnalité de ce héros tout ce qui fera la complexité et le charme de Corto Maltese.

« Sergent Kirk » (première époque), Futuropolis, 25 euros

samedi 20 décembre 2008

BD - Madila, prison dorée


A la fin des années 80, dans les pages de l'hebdomadaire Tintin, entre des gags de Cubitus et des histoires de Bob Morane, est apparue une étrange série signée Chantal de Spiegeleer. Dans la ville imaginaire de Madila, sorte de luxueuse station balnéaire dans l'Amérique des années 50, la belle Bacardi se transforme lentement en une réincarnation de Louise Brooks. 

Inclassable, cette BD a été suivie de quatre autres albums se déroulant toujours à Madila. Près de 20 ans plus tard, voici l'intégrale de ces histoires, élégantes et stylisées, avant-gardistes. Chantal de Spiegeleer, après s'être éloigné de la bande dessinée, serait en train de finaliser un nouveau projet. Elle l'explique dans l'interview préface ouvrant cette très belle intégrale.

« Madila » (intégrale), Le Lombard, 47 euros

vendredi 19 décembre 2008

BD - Le pavé Tintin


Malgré la disparition de Hergé et la non reprise des aventures de Tintin, le héros à la houppe reste un des habitués des fêtes de fin d'années. Après les fac-similés, les albums en noir et blanc puis ceux de petits formats, voici la dernière trouvaille des éditions Casterman : « Tout Tintin » en un seul volume. Un pavé de plus de 1000 pages, lourd comme deux annuaires, reprenant dans l'ordre chronologique les histoires parues en albums.

 Pas forcément pratique à manier, cette brique reste un bel objet, somme d'une existence de création et de passion. Un objet rare également car aucune réédition n'est prévue. Le tirage étant limité, il ne serait pas étonnant que dans quelques années ce « Tout Tintin » ait pris de la valeur.

« Tout Tintin », Hergé, Casterman, 77 euros 

jeudi 18 décembre 2008

Jeunesse - Les P'tites poules en album collector

Pour les plus jeunes, laissez vous charmer par l'espièglerie et la poésie des P'tites poules imaginées par Christian Jolibois et dessinées par Christian Heinrich. Dans cet album collector, retrouvés quatre aventures de ces volailles attachantes. 

Elles y rencontrent un jeune chat noir qui se révélera d'un grand secours, un chevalier aux prises avec une bête, Jean de la Fontaine et d'autres animaux de la forêt (Goupil) ou de la mythologie (le Minotaure). Un univers moderne et actuel permettant de revisiter et de découvrir des contes célèbres et immortels. Le tout enluminé de dessins expressifs aux couleurs vives. 

Des heures de lecture (seul ou accompagné) assurées pour les heureux propriétaires de cet album.

« Les P'tites Poules », Jolibois et Heinrich, Pocket Jeunesse, 14,90 € 

mercredi 17 décembre 2008

Roman historique - Les foulards rouges sous la plume de Fajardie


Frédéric H. Fajardie est décédé en mai dernier. Le prolifique romancier a remporté un formidable succès populaire avec ses récits historiques. Ce pavé de plus de 1200 pages reprend les aventures des flamboyants comtes de Nissac, plongés dans le tourbillon de l'histoire de la France du XVIIe siècle. 

Fajardie qui avait débuté dans un tout autre genre. 

Son premier roman, « noir » selon le terme utilisé pour décrire les œuvres de Léo Malet, « Tueurs de flics » avait fait grand bruit lors de sa parution en 1975. « La nuit des chats bottés » est devenu le roman symbole de toute une génération rejetant un certain ordre établi. On retrouve un peu de cette violence et insurrection dans ces récits de cape et d'épée. En brillant feuilletoniste, Fajardie vous entraînera sur des chemins palpitants et plein de rebondissements.

« Les foulards rouges » suivi de « Le voleur de feu », Frédéric H. Fajardie, Lattès, 23 € 

mardi 16 décembre 2008

Livre - Un dictionnaire de la Seconde Guerre mondiale


Idéal pour les historiens en herbe, pratique car classé par ordre alphabétique, ce « Dictionnaire de la Seconde Guerre mondiale » signé Pierre Montagnon, plus qu'un simple livre pratique doté de 3000 entrées, est aussi un bel objet, riche d'informations et d'un cahier reprenant les photos symboliques de cette période noire de l'histoire mondiale. 

Les hommes y ont une grande place, mais il est également abordé les grandes batailles ainsi que les différentes armes utilisées par les deux camps. Une somme qui couronne des années de recherche de Pierre Montagnon, Saint-Cyrien, historien et conférencier, auteur chez Pygmalion de plusieurs livres consacrés à cette période historique, aux guerre coloniales ou à la Légion étrangère.

« Dictionnaire de la Seconde Guerre mondiale », Pierre Montagnon, Pygmalion, 38,90 € 

lundi 15 décembre 2008

Art - Les influences japonaises d'Emmanuel Guibert


Faut-il être loin de ses bases, de son monde, pour libérer son imagination, renouveler son inspiration ? Emmanuel Guibert, dessinateur de BD, a passé plusieurs mois au Japon en 2007. Il en a profité pour noircir des dizaines de carnets de croquis, allant de l'encre de Chine aux compositions en couleurs ou les collages. Cette somme de créativité, influencée par le pays, la civilisation, mais sans verser dans le copiage, est repris dans ce gros et bel album, à l'Italienne. L'effet le plus saisissant est certainement les dessins réalisés dans un vieux cahier d'arithmétique trouvé aux puces. Ces dessins modernes sur des chiffres et caractères japonais forment un ensemble déroutant mais du plus bel effet.

« Emmanuel Guibert japonais », Emmanuel Guibert, Futuropolis, 46 € 

dimanche 14 décembre 2008

Thriller - Tueur d'Etat

Jeune et brillant soldat américain, Carl Rice devient tueur, pour son pays. Des années plus tard, son chef de l'époque est candidat à la présidence...


Thriller américain par excellence, ce roman de Phillip Margolin plonge le lecteur dans une histoire fictive des USA qui pourrait tout à fait être crédible. Un roman s'étalant sur plusieurs dizaines d'années, de la fin des années 60 à notre époque actuelle. Le premier chapitre se déroule en 1985, dans une superbe villa édifiée sur les rives du Lost Lake en Californie. Un policier découvre une jeune femme, affolée, témoin du meurtre d'un membre du congrès, Eric Glass. « Le congressiste était assis dans un fauteuil de cuir noir, ligoté aux bras et aux chevilles par du ruban adhésif. Son torse nu était couvert de plaies et le sang avait trempé le pantalon de pyjama qu'il portait pour tout vêtement. Il avait la tête baissée, le menton sur la poitrine, le visage aux traits tuméfiés et ensanglantés. » Vanessa, fille du général Wingate, affirme « c'est Carl qui l'a tué, Carl Rice. »

Bagarre au stade

Suite du roman de nos jours. A Portland, en Oregon, Ami Vergano, avocate, rencontre au cours d'une foire aux arts un ébéniste, Dan Morelli, qui deviendra son locataire : « L'homme avait les épaules larges et, sous l'épaisse moustache et la courte barbe qui lui ornaient le visage, les traits burinés de quelqu'un qui vit au grand air. Il devait approcher des cinquante ans. Il portait un jean, une chemise écossaise à manches longues et des mocassins. Il faisait penser aux hippies de la génération peace and love des années soixante. »


L'homme est discret, Comme s'il cherchait à se faire oublier. Ne faisant jamais de vagues. Sauf le jour où il assiste à un match de base-ball du fils d'Ami. Il est entraîneur assistant, sur le bord de la touche, notant, avec un stylo, les points sur une petite tablette. Un parent de joueur, Lutz, cherchant des noises à l'entraîneur, Dan intervient. Avec une étonnante efficacité. « Morelli abattit la tablette sur le poignet de Lutz. Blême de douleur, Lutz voulu donner un coup de tête à Morelli, découvrant sa nuque. Morelli planta son stylo dans le cou de la brute. Les yeux exorbités, Lutz s'écroula comme une masse en portant les mains à son cou. » Arrêté, Morelli refuse de coopérer avec la police. Ami acceptera de devenir son avocate et l'homme, comme s'il était au bout, raconte sa vie.

Les magouilles du candidat

Il s'appelle Carl Rice et faisait partie de l'Unité, une officine secrète chargée d'exécuter les ennemis des USA, à l'étranger comme à l'intérieur des frontières. Des informations confirmées par Vanessa Wingate, devenue journaliste, prête à tout pour aider Carl Rice, son premier amour, et surtout faire tomber son père, patron de l'Unité, favori de la prochaine élection présidentielle...

Entre jungle au Vietnam, université bourgeoise, rédaction d'un journal populaire et vie quotidienne dans une petite ville de province, c'est toute l'Amérique, dans son incroyable complexité qui est décrite par Phillip Margolin. Avec en toile de fond la fameuse théorie du complot, menée par un petit groupe d'hommes prêts à tout pour avoir le pouvoir. Et surtout cacher leurs méfaits. En face, trois êtres humains vont tenter de faire tomber l'édifice. Trois minuscules vies face à une machine implacable. C'est de la fiction, mais on ne peut s'empêcher de penser que ces faits sont particulièrement réalistes, voire plausibles.

« Le cadavre du lac », Phillip Margolin, Albin Michel, 20 € (également disponible au Livre de Poche)

samedi 13 décembre 2008

BD - Quand Lulu craque

Etienne Davodeau, auteur complet qui s'était fait remarquer ces dernières années par ses reportages dessinés (sur les paysans ou les syndicalistes chrétiens), revient à la fiction. Mais il ancre son récit dans le réel, faisant de Lulu, le personnage principal, une héroïne miroir dans laquelle bien des lectrices ou lecteurs pourraient se reconnaître. 

Lulu, la quarantaine, mariée, trois enfants, tente de retrouver du travail. Mais toutes les portes se ferment. Trop longtemps inactive, trop vieille, trop mère de famille. En sortant d'un entretien une nouvelle fois négatif, elle décide de ne pas rentrer chez elle. Une nuit pour faire le point, dit-elle à son mari. 

Une nuit et quelques jours, à errer, loin de son quotidien, comme pour se donner une respiration, une chance de changer sa vie. Lulu qui rencontrera un autre homme. Mais n'oubliera pas ses enfants ni ses amis qui se remémorent son aventure de quelques jours, au cours d'une veillée funèbre...

« Lulu, femme nue » (tome 1), Futuropolis, 16 € 

vendredi 12 décembre 2008

BD - Le Guinéa Lord chasse la fée


Branle-bas de combat dans le monde des Moriganes. L'une de ces créatures maléfiques vient d'être touchée par la grâce. Elle est en train de se transformer en fée. Tout en gardant la connaissance des secrets de sa première race. Pour abattre celle qui va devenir la fée Sanctus, les Moriganes font appel au Guinea Lord. Ce chevalier à l'armure noire et aux cornes de feu vient directement des enfers. 

Il se lance à la recherche de Sanctus qui a pris l'apparence d'une paysanne adolescente. Une souillon semblant juste bonne à donner à manger aux cochons. Une sorcière, Luchorpain, devine le potentiel de la fillette et l'achète. C'est donc dans la petite cabane, perdue au milieu de la lande, que l'affrontement aura lieu. Guinea Lord sera face à Sill Valt, chargé de protéger la fée. 

Une histoire limpide de Dufaux, magnifiée par les dessins de Delaby. Son académisme fait merveille dans cette histoire d'héroic fantasy débutée graphiquement par Rosinski dans un premier cycle.

« Complainte des landes perdues » (tome 2), Dargaud, 13 € 

jeudi 11 décembre 2008

BD - Fille courage dans le second tome des "Dérivantes


Dans « Les dérivantes », monde imaginé par Laurand, la société s'est morcelée en une multitude d'îles dérivant dans un immense océan. L'héroïne en est Papille, une fillette ayant grandi dans une taverne de la dérivante de Bourne. Sa mère, Ama, se trouve en fâcheuse posture à l'entame de ce second tome. 

Retenue prisonnière par Dolphène, roi de Bourne, il décide qu'elle devra passer la sentence du dragon. Jetée dans une grotte, elle devra affronter les flammes de cet animal mythique. La jeune femme recevra l'aide de sa fille qui préfère la mort à la séparation. Papille qui a une arme secrète pour affronter l'animal. Débordant d'originalité, le monde dessiné par Laurand est situé entre science-fiction et fantasy. 

La magie des parfums y joue un grand rôle. Chance pour Ama qui est une « grandartiste », parfumeuse blanche. Une série pleine de surprises et de possibilités, malheureusement arrêtée par l'éditeur.

« Les dérivantes » (tome 2), Les Humanoïdes Associés, 10,40 € 

mercredi 10 décembre 2008

BD - Lumière antique


Alix et Enak sont pensionnaires de la bibliothèque d'Alexandrie. Sous le couvert de faire des études, ils sont en mission pour César. Cléopâtre doit leur remettre un document prouvant la trahison de son frère, le pharaon Ptolémée. La lutte de pouvoir au sommet de la royauté égyptienne est en toile de fond de ce 27e album (écrit par Patrick Weber et dessiné par Christophe Simon) qui fait la part belle au phare d'Alexandrie trônant à l'entrée du port, sur l'île de Pharos. Le dénouement aura lieu durant la grande fête en l'honneur de Poséidon. Instructif et passionnant, cette aventure est totalement dans l'esprit du créateur, Jacques Martin.

« Alix » (tome 27), Casterman, 10 € 

mardi 9 décembre 2008

BD - Jolan, le fils prodige


Jolan, fils de Thorgal, a pris la relève de son père. Si Rosinski est toujours au dessin, Jean Van Hamme a cédé les rênes du scénario à Yves Sente. « Le bouclier de Thor » est la suite directe du précédent album. Jolan, en compagnie de quatre autres jeunes héros intrépides, a rejoint l'Entremonde. Il va tenter de dérober le bouclier de Thor pour Manthor, fils d'une déesse et d'un humain. Au même moment, dans un paisible village de vikings, Thorgal, revenu à la vie rurale, devra rendosser les habits de guerrier pour retrouver son dernier fils, Aniel, enlevé par les magiciens rouges.

« Thorgal » (tome 31), Le Lombard, 9,20 € 

lundi 8 décembre 2008

BD - Spirou de retour dans le temps Z


Morvan et Munuera, repreneurs de Spirou, auront donc réalisé cinq albums des aventures du groom rouge. Pour ce 50e tome intitulé 'Aux sources du Z », ils ont reçu l'aide de Yann qui a notamment mis son grain de sel dans les dialogues. 

Un album hommage, le héros devant faire des sauts dans le passé pour sauver Miss Banner, la dame de cœur de Zorglub et du comte de Champignac. Spirou (puis Fantasio qui le suit comme son ombre) revisite ainsi « La corne de rhinocéros », « La mauvaise tête » ou « Le gorille a mauvaise mine ». 

L'intrigue donne l'occasion de découvrir les premières recherches de Champignac, quand il était jeune et ami de Zorglub.

« Spirou et Fantasio » (tome 50), Dupuis, 9,20 € 

dimanche 7 décembre 2008

Polar - Secrets bien enfouis

La meurtrière de la jeune Abigail vient de se suicider en prison Mais elle serait finalement innocente. Un imbroglio pour la perspicace Vera Stanhope.

Dix ans de prison pour rien. Jeanie Long vient de faire dix ans de prison après sa condamnation pour le meurtre d'une jeune fille, Abigail Mantel. Elle n'a cessé de clamer son innocence. Alors qu'un témoin réapparaît et que l'enquête va être rouverte, Jeanie, à bout, se suicide dans sa cellule. Une raison supplémentaire pour Vera Stanhope, inspectrice de police pugnace, de démasquer le véritable meurtrier.

Ce polar noir d'Ann Cleeves fait un peu penser, par moment, à un bon Simenon. La policière est bourrue (comme le commissaire Maigret) et les différents protagonistes de l'affaire, sous des airs lisses et polis, ont de nombreux secrets à cacher. La petite bourgeoisie anglaise n'a rien à envier à celle de la province hexagonale. Avant que Vera n'intervienne, c'est par l'intermédiaire d'Emma que le lecteur découvre les événements, anciens et actuels. Emma, jeune mère au foyer, légèrement dépressive. Elle attend son mari James, marin, en fantasmant sur son voisin.

Une coupable trop idéale

Mais ce soir-là est différent. James lui apprend que le dossier du meurtre d'Abigail Mantel vient d'être rouvert. Jeanie Long, déclarée coupable, ne serait finalement pas la meurtrière. Une révélation qui fait remonter un flot de souvenirs dans la mémoire d'Emma. A l'époque, adolescente rebelle, elle était la meilleur amie d'Abigail. Abigail la fille de Mantel, riche promoteur immobilier. Emma de son côté rejetait sa famille : son père, pasteur rigoureux, sa mère, bibliothécaire effacée, docile, toujours dans l'ombre. Un dimanche soir, après une nouvelle dispute, elle sort dans la lande pluvieuse et balayée par le vent. C'est là quelle a découvert le corps d'Abigail, dans un fossé, étranglée. Les policiers ont rapidement trouvé une coupable idéale : la concubine du père d'Abigail. Jeanie affirme avoir passé la journée à Londres. Un alibi sans preuve.

Une preuve de sa présence à Londres qui réapparaît 10 ans plus tard. Mais trop tard... Vera Stanhope est chargée de l'enquête. La policière fait sa première apparition dans la petite paroisse d'Elvet au cours de la messe. Emma découvre une « femme corpulente et formidablement laide ». Elle était « vêtue d'une robe de crêpe informe constellée de petites fleurs violettes, et d'un gilet mauve pelucheux. Malgré le froid, ses pieds étaient chaussés de sandales de cuir plates ». Ann Cleeves force un peu le trait, mais il faut avouer que le personnage de Vera, teigneuse, buveuse, coléreuse, s'impose dans ce roman. Face aux atermoiements des différents protagonistes de l'affaire, elle élève la voix, les bouscule, pour faire enfin jaillir la vérité. Son face-à-face avec Emma fait des étincelles : « Pour la première fois, Emma se rendit compte que Vera était en colère, une colère volcanique, terrifiante. » La policière qui secouera tellement la fourmilière qu'un second meurtre sera commis, nouvelle preuve irréfutable de l'innocence de Jeanie.

Ce roman policier, parfois oppressant tant certains personnages sont tristes et résignés, fouille dans les tréfonds de l'âme humaine. Vera, heureusement, est là pour remettre tout en place. Quelles qu'en soient les conséquences...

« Morts sur la lande », Ann Cleeves, Belfond, 20 €

samedi 6 décembre 2008

BD - Les débuts de Sherlock Holmes


Sherlock Holmes inspire les scénaristes de BD. Cette fois, ce sont Didier Convard et Eric Adam qui se sont associés pour imaginer les débuts du célèbre détective. Une série confiée graphiquement à Jean-Louis Le Hir, dévoilant un nouveau pan de ses talents de graphiste. Après les très classiques (et rigides) Cholms et Stetson, les dessins d’humour à la Reiser sur l’entreprise (C’est qui le boss ?), il propose des planches très sombres, aux dessins stylisés utilisant des traits épais jouant à merveille avec les ombres. De loin ce qu’il a fait de mieux. 

Sherlock se lance donc dans le métier. Sa première enquête manque de prestige, mais il n’y a pas de petite affaire. Sur la piste d’un chat disparu, il découvre une fumerie d’opium. Devenu l’ami du patron, il se met à son service pour découvrir le meurtrier d’un client. Une quête qui conduira le jeune Holmes jusqu’aux confins du Penjab.

« Sherlock » (tome 2), Glénat, 12,50 € 

vendredi 5 décembre 2008

BD - Victoire à Waterloo


La belle uchronie que voilà : à la bataille de Waterloo, Grouchy n’est pas arrivé en retard. Résultat, Napoléon gagne cette bataille et la face du monde et de l’Histoire est totalement modifiée. 

Thierry Gloris, le scénariste, a donc imaginé une Europe en 1911 totalement différente. Les deux puissances coloniales (France et Grande-Bretagne), règnent sur le monde. A Paris, un détective privé fait de plus en plus parler de lui. Théophile Duroc a une façon très personnelle de résoudre les énigmes : observation et déduction. 

Duroc est la version française du Sherlock Holmes de notre réalité. Contacté par le conservateur d’un musée d'archéologie des colonies, Duroc se lance sur la piste du voleur d’un objet précieux et mystérieux. Un voleur roux, agile et à la force titanesque. 

Dessinée par Emiliano Zarcone, cette série mêlant enquête policière, science-fiction et fantastique, sans être radicalement originale, est une agréable variation sur l’histoire de France.

« Waterloo 1911 » (tome 1), Delcourt, 12,90 €. 

jeudi 4 décembre 2008

BD - Rêvons d’Ava…


Ava Dream est Anglaise, avocate et très belle. Quand ses patrons lui demandent d’aller s’occuper d’une succession dans le Sud-Ouest de la France, elle n’hésite pas. Même si elle a une certaine appréhension à travailler avec ces "frenchies" malodorants qui n’aiment pas l’eau. Un petit détail qui n’aura finalement que peu d’importance car la mission d’Ava est tout autre. 

Elle doit convaincre une riche héritière de fuir la secte qui l’a enrôlée. Action, charme, rebondissements : le cocktail des deux premiers tomes (parus simultanément et formant un tout, comme un pilote audiovisuel) de cette nouvelle série écrite par Eric Arnoux a tout pour convaincre le lecteur de BD de base. D’autant que le dessin de Queireix, tout en mettant en valeur les sublimes courbes d’Ava, fait des trognes d’exception aux personnages secondaires, notamment les "méchants".

« Ava Dream » (tomes 1 et 2), Le Lombard, 10,40 € chaque volume.

mercredi 3 décembre 2008

Roman - Le vieil homme et l'honneur

Hubert Mingarelli raconte une longue quête solitaire dans une nature hostile, pour des bottes, pour l'honneur.


Dans un pays d'Amérique latine, le village est réveillé par l'arrivée d'un groupe de rebelles dirigé par Raphaël Vallejo. Sur le chemin de la montagne où les combats font rage, Vallejo et ses hommes font une brève étape. Pour remplir les gourdes et surtout trouver de nouvelles chaussures. De magnifiques bottes sont dénichées dans une luxueuse maison de maître appartenant à Alvaro Cruz. Quand Eladio découvre le vol, son sang ne fait qu'un tour. Eladio, c'est le vieux domestique de Cruz. Malgré un rapport de force très déséquilibré, il réclame la restitution des chaussures sur le champ. Un coup de crosse sur la nuque clôt le débat.

Une bonne heure plus tard, Eladio reprend ses esprits, très énervé. Le nœud du roman écrit par Hubert Mingarelli se situe à ce moment précis. Le vieil homme aurait pu avouer sa défaite, se dire que finalement une paire de bottes ce n'est pas très grave. Mais une incroyable fierté va le faire agir en dépit de tout bon sens. Il récupère les anciennes chaussures de Vallejo et décide de jouer un bon tour à ces grossiers personnages.

Connaissant un raccourci pour rejoindre la route allant vers la montagne, il s'élance persuadé qu'il pourra les rattraper, leur passer devant sans qu'ils s'en aperçoivent et récupérer les bottes d'Alvaro Cruz. Hubert Mingarelli, dans son écriture, joue beaucoup sur l'opposition entre le style très parlé et populaire d'Eladio et des passages plus léchés, quand, par exemple, il décrit la rencontre entre le vieil homme et des biches : « Il aperçut les biches qui grattaient la terre à une quarantaine de mètres de là. L'une d'elles, en relevant le cou, l'aperçut et, sans qu'elle n'eût donné de signal, les autres biches cessèrent de chercher leur nourriture, et se tenant parfaitement immobiles, elles le regardèrent aussi ».

Rencontres merveilleuses, redécouverte de la splendeur de la nature : la quête du héros sera récompensée, mais pas comme il l'avait imaginé.

"Le voyage d'Eladio", Hubert Mingarelli, Seuil, 16 euros.

mardi 2 décembre 2008

BD - L'album anniversaire des Schtroumpfs

Pour célébrer le 50e anniversaire des Schtroumpfs de Peyo, un album a été spécialement édité. Cette histoire, hors-série, bénéficiant d'un tirage limité de 50 000 exemplaires (habituellement une nouveauté a un tirage trois fois plus important), explique en 28 planches l'origine de la flûte à six trous. Une flûte enchantée qui est commandée par un sorcier pour guérir un père de famille tombé dans une torpeur absolue. Le Grand Schtroumpf va donc livrer la flûte mais cette dernière va tomber dans de mauvaises mains. Il faudra l'intervention de Johan et Pirlouit pour que tout revienne en ordre. 

Un récit clin d’œil qui se poursuit presque naturellement dans l'aventure de Johan et Pirlouit.

Mais en plus de cette bande dessinée (écrite par Thierry Culliford et Luc Parthoens, dessinée par Jereon de Coninck), vous trouverez l'intégrale d'un cours de langage schtroumpf imaginé par Yvan Delporte et Peyo pour animer les pages d'un journal de Spirou paru en 1971.

« Les schtroumpfeurs de flûte », Le Lombard, 9,25 € 

lundi 1 décembre 2008

Science-fiction - Les mondes étranges des Fils du vent

Les personnages de ce roman fantastique de Robert Charles Wilson vont de monde en monde comme le commun des mortels change de chemise.

Où et quand peut-on affirmer que l'on est "chez soi" ? Dans son village natal, dans la ville où l'on travaille, près du lieu où l'on se sent le plus heureux ? Les différents protagonistes de ce roman de science-fiction signé de l'auteur canadien Robert Charles Wilson ont souvent déménagé. Ce sont des " Fils du vent", des nomades, sans domicile fixe. Karen est l'aînée. Un père alcoolique et violent, une mère très religieuse : bref rarement l'occasion d'être heureuse. Pourtant, une fois adulte, elle a rencontré Gavin, mariage et naissance de Mickaël dans la foulée. C'était il y a 16 ans.

De nos jours Karen recommence à faire des cauchemars. Depuis que la décision de divorcer a été prise. Pas exactement un cauchemar, simplement un rêve sombre et mystérieux. Elle se revoit enfant, sortant la nuit dans le jardin avec sa sœur Laura et son jeune frère Tim. Tim qui parvient à faire apparaître une porte dans le talus du jardin. En la franchissant, les trois enfants se retrouvent dans les rues noires et froides d'une ville industrieuse. Ils sont attirés par un homme en gris, cachant son visage derrière le rebord de son grand chapeau. Mais est-ce bien un rêve ? Quand Mickaël est lui aussi abordé dans la rue par le même homme en gris, Karen décide de quitter le Canada et de rejoindre sa sœur installée depuis des années dans la Californie d'un monde parallèle créée de toute pièce par Laura. Un don que les parents ont tout fait pour diaboliser. Karen a suivi l'avis de son père qui explique sa vision du pouvoir de Tim : "Il s'amusait avec les lucioles. Et puis tout d'un coup il s'est mis à tracer un cercle dans l'air. Et le cercle était rempli de la lumière des lucioles. Et il y avait des silhouettes dans cette lumière. Des visages, des corps, des choses avec des ailes. Ce pouvait être n'importe quoi mais - j'en étais certain - c'était l'enfer que Timmy venait d'ouvrir".

Ce roman précédemment publié il y a une quinzaine d'année, sans avoir le foisonnement imaginatif de "Darwinia", offre l'occasion à Robert Charles Wilson de lâcher la bride à son imagination. Mais il a mis tout son talent au service de la description psychologique des personnages. Notamment dans leurs relations fraternelles, souvent compliquées, encore plus dans une famille aux pouvoirs paranormaux.

"Les fils du vent", Robert Charles Wilson, Folio SF, 6,20 euros