Hubert Mingarelli raconte une longue quête solitaire dans une nature hostile, pour des bottes, pour l'honneur.
Dans un pays d'Amérique latine, le village est réveillé par l'arrivée d'un groupe de rebelles dirigé par Raphaël Vallejo. Sur le chemin de la montagne où les combats font rage, Vallejo et ses hommes font une brève étape. Pour remplir les gourdes et surtout trouver de nouvelles chaussures. De magnifiques bottes sont dénichées dans une luxueuse maison de maître appartenant à Alvaro Cruz. Quand Eladio découvre le vol, son sang ne fait qu'un tour. Eladio, c'est le vieux domestique de Cruz. Malgré un rapport de force très déséquilibré, il réclame la restitution des chaussures sur le champ. Un coup de crosse sur la nuque clôt le débat.
Une bonne heure plus tard, Eladio reprend ses esprits, très énervé. Le nœud du roman écrit par Hubert Mingarelli se situe à ce moment précis. Le vieil homme aurait pu avouer sa défaite, se dire que finalement une paire de bottes ce n'est pas très grave. Mais une incroyable fierté va le faire agir en dépit de tout bon sens. Il récupère les anciennes chaussures de Vallejo et décide de jouer un bon tour à ces grossiers personnages.
Connaissant un raccourci pour rejoindre la route allant vers la montagne, il s'élance persuadé qu'il pourra les rattraper, leur passer devant sans qu'ils s'en aperçoivent et récupérer les bottes d'Alvaro Cruz. Hubert Mingarelli, dans son écriture, joue beaucoup sur l'opposition entre le style très parlé et populaire d'Eladio et des passages plus léchés, quand, par exemple, il décrit la rencontre entre le vieil homme et des biches : « Il aperçut les biches qui grattaient la terre à une quarantaine de mètres de là. L'une d'elles, en relevant le cou, l'aperçut et, sans qu'elle n'eût donné de signal, les autres biches cessèrent de chercher leur nourriture, et se tenant parfaitement immobiles, elles le regardèrent aussi ».
Rencontres merveilleuses, redécouverte de la splendeur de la nature : la quête du héros sera récompensée, mais pas comme il l'avait imaginé.
"Le voyage d'Eladio", Hubert Mingarelli, Seuil, 16 euros.
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