Si certains films français ont la mauvaise habitude de commencer mollement, ce n'est pas le cas de "Victoria" de Justine Triet. Dès les premières minutes on est emporté dans la tornade de la vie de cette avocate jouée par Virginie Efira. Toujours en train de courir, dépassée par les événements, elle se fait virer par son baby-sitter (elle a deux petites filles qu'elle élève seule depuis le départ de son ex, écrivain maudit), en trouve une de rechange (une amie bonne poire) à la dernière minute pour aller à un mariage. Là elle boit trop, se fait draguer par un scientifique assommant et doit subir les jérémiades de son meilleur ami, Vincent (Melvin Poupaud) en pleine rupture avec sa petite amie. Elle croise aussi Sam (Vincent Lacoste), un de ses anciens clients, dealer d'occasion, à la recherche d'un stage dans le milieu juridique. Dix premières minutes où le spectateur est scotché à son siège, subissant cette vie de folie. Pourtant Victoria s'ennuie. Profondément, abominablement, désespérément. Virginie Efira est parfaite en executivewoman, sans cesse occupée mais à la vie triste et creuse. Dans ce mariage, tout le monde fait la fête autour d'elle, mais cela n'a plus prise sur sa réalité. On la devine torturée par son existence vaine. Bien des questions se bousculent dans son inconscient. Elle tente de les mettre à plat lors d'une psychanalyse. Ou lors de séances de voyance. Mais n'est-ce pas au final pour trouver les mêmes réponses ?
La vie de Victoria bascule à la fin du mariage. La petite amie de Vincent revient sur la piste de danse le ventre en sang. Elle l'accuse de l'avoir poignardé après avoir fait l'amour dans les toilettes. Garde à vue, interrogatoires… Vincent veut absolument que Victoria la défende. Une grave erreur qui risque de plomber sa carrière en robe noire.
Film sucré-salé
Le film utilise ce procès en fil rouge, avec notamment le témoignage du chien de la victime (lire ci-contre). Mais la vie de Victoria est affreusement compliquée. Son ex dévoile ses turpitudes passées dans un blog littéraire. Nouveau procès. Mais dans le rôle de la victime cette fois. Sans baby-sitter, elle se décide à recruter Sam. Et comme il est à la rue, elle l'héberge dans le salon. Il dort dans le canapé quand la jolie blonde, reçoit les hommes dragués sur une application de rencontre. Et ce qui devait arriver arriva : Victoria craque.S'inspirant des grandes comédies américaines, la réalisatrice dont c'est le second film réussit la prouesse de rendre sympathique cette avocate un peu fofolle mais surtout totalement irresponsable, plus que borderline. Sa chute a dans les trente-sixièmes dessous fait basculer le film dans le mélodrame.
Tel un plat sucré-salé, "Victoria" doit se déguster sans a priori ni dogmatisme, accepter simplement ce contraste de sensations, de situations, un mélange des genres qui fait phosphorer le cerveau au même titre que les papilles d'un gastronome.
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Un chien à la barre
Il y a pourtant un témoin de la scène : le chien de la victime. Le juge d'instruction décide de tester les réactions de l'animal en présence de Vincent. Un expert vient à la barre, avec l'animal, pour expliquer que ce dalmatien réagit quand il est face à une personne qui fait du mal à sa maîtresse. Loufoque ? Pas du tout car la réalisatrice a confié s'être inspirée d'un véritable fait divers. "Celui d'une femme qui a été retrouvée pendue et de tests pratiqués sur son dalmatien pour évaluer comment il réagissait à l'odeur de ses proches accusés."
Un procès dans le film marqué par le règne animal, le dénouement étant finalement fourni par une preuve irréfutable apportée par… un chimpanzé.
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