jeudi 23 novembre 2006

Roman - Haro sur les journaleux

Si vous êtes allergique aux journalistes et à la presse parisienne en général, ce roman, caustique a souhait avec ce milieu, devrait vous séduire.


Il est des professions qui ont toujours fait rêver. Journaliste a longtemps eu une belle côte auprès des jeunes. Le métier a cependant beaucoup perdu de son aura et ce roman, pourtant signé par deux journalistes, ne va pas redorer le blason d'une corporation en perte de vitesse question crédibilité et respectabilité.

Christine Kerdellant et Eric Meyer, 43 ans, ont déjà bien roulé leur bosse dans la presse magazine (L'Entreprise, Le Figaro Magazine). Ils utilisent cette expérience pour imaginer un hebdo, La Semaine, et une rédaction que l'on imagine pas si virtuelle que cela. De même le jeune reporter, Adrien Grangé, héros de ce roman, est certainement un condensé de plusieurs jeunes journalistes, persuadé que fougue, talent et ambition va leur ouvrir toutes les portes. Sans oublier bien évidemment que travailler dans un magazine qui tire à un million d'exemplaires est plus valorisant que d'être rédacteur sportif à la République des Pyrénées...

Réunions décousues.

Tout émoustillé de participer à une conférence de rédaction du prestigieux titre, il tombe dans une discussion décousue et déconnectée du réel, digne des plus mauvais cafés du commerce. Rancœurs de certains, arrivisme des autres, toute puissance du directeur et servilité fielleuse des plus peureux : Adrien se demande comment ce journal, chaque semaine, peut influencer tout ce qui compte de décideurs dans l'Hexagone. Il constate, amer, après quelques jours de pratique : « Je m’attendais à des joutes intellectuelles, des démonstrations lumineuses et des échanges brillants sur les grands débats de l’heure. Et j’assiste à des réunions décousues, des discussions anarchiques, distrayantes certes, mais où le principal objectif semble consister à tuer les idées des autres comme on flingue des zombies dans un jeu vidéo. » Et quand parfois une voix originale se fait entendre, c’est un véritable tir de barrage des vieux de la vieille. Le journaliste « rengaine alors en silence son embryon d’article, immolé et désormais impubliable, tandis que l’assemblée prépare ses munitions pour l’assaut suivant. Le but est atteint. La menace écartée. Le bon sujet mort-né. Les journalistes de La Semaine pratiquent l’interruption volontaire d’idées neuves. »

La belle documentaliste.

Adrien est forcément déçu mais il s’accroche à quelques satisfactions : le charisme de sa chef de service, Claudie, bosseuse et intelligente et surtout au charme de Hannah, la documentaliste. Une petite histoire romantique vient pimenter ce roman qui bascule d’un coup d’un seul dans le polar quand on découvre le responsable de la fabrication pendu dans un placard à balais. Suicide ou meurtre ? 

Adrien fait des heures supplémentaires et tente de démêler les fils de cet écheveau. Il découvrira les pratiques peu avouables de certains dirigeants du journal. Il entreprendra une lutte très délicate pour redonner ses lettres de noblesse au « plus beau métier du monde »…

« Le plus beau métier du monde », Christine Kerdellant et Eric Meyer, Flammarion, 18 €

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