mardi 20 septembre 2022

De choses et d’autres - Un drôle de don pour la science

Tout le monde peut contribuer à l’avancée des connaissances médicales. Prenez la grande opération intitulée « French Gut », lancée par l’Institut national de recherche pour l’agriculture, les hôpitaux de Paris et AgroParisTech. En faisant un petit don que vous envoyez par la poste, vous pourrez permettre aux chercheurs français de radiographier une des choses les plus mystérieuses du corps humain : son microbiote.

Dit comme ça, c’est assez enthousiasmant. Dans les faits, le romantisme du bénévolat est beaucoup moins évident. Car le don qui permettra de faire avancer les chercheurs sur la compréhension du microbiote est un peu rebutant. En clair, si vous acceptez de participer à l’étude, il faut 100 000 volontaires, vous recevrez un kit pour expédier, par la Poste, un petit échantillon de vos… selles.


Un peu de votre caca dans une boîte hermétique (on l’espère vraiment sécurisée pour le confort de ces pauvres facteurs déjà mis à rude épreuve) et on saura un peu mieux de quoi est constitué ce magma de bactéries qui pullulent dans les intestins. Une véritable faune sauvage, inconnue et aux pouvoirs insoupçonnés.

Ne dit-on pas que les intestins sont notre second cerveau ?

Et si, en réalité, comme dans les mauvais films de science-fiction, nous n’étions que des corps dépourvus de volontés, commandés par une armada d’aliens microscopiques bien au chaud et à l’abri dans nos tripes ?

J’ai trop d’imagination, ou alors c’est ma parano qui me fait gamberger. Mais si au final ma théorie foireuse est reprise par des complotistes (« Avec les reptiliens, ce sont les microbiotes qui commandent le monde »), j’aurai au moins laissé une trace sur cette terre. « Trace de pneu » ricane mon moi primaire scatologique.

Billet paru en dernière page de l’Indépendant le jeudi 22 septembre 2022

lundi 19 septembre 2022

De choses et d'autres - Seconde main


Le marché de la seconde main explose en France depuis quelques années. Grâce aux plateformes. Ebay a longtemps été leader du secteur. Jusqu’à l’arrivée du Bon Coin et de Vinted.

Mais il ne faut pas croire que seuls les particuliers peuvent profiter de cet engouement pour la revente de produits d’occasion. L’État aussi en tire de substantiels bénéfices. Et directement car régulièrement, des objets saisis pour rembourser des dettes (notamment fiscales), sont proposés dans des ventes aux enchères un peu particulières.


L’une d’entre elles est organisée le 4 octobre à Lyon. Elle est remarquable car parmi les plus de 210 lots proposés aux acheteurs (sur place ou sur le net), deux d’entre eux attirent de nombreuses convoitises.

Les lots 31 et 32 sont certains de trouver acquéreurs car ils proposent ce qui est quasiment impossible à trouver depuis une année : une PlayStation 5 ! À court de composants électroniques, le fabricant de la console de jeu n’en écoule que quelques unités à la fois, généralement à des privilégiés lors de vente sur invitation. L’État va donc démocratiser la vente des PS5. Enfin, pour deux exemplaires seulement grâce à l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués.

Et si jouer ne vous intéresse pas, vous pourrez frimer avec quelques objets de luxe saisis à d’autres frimeurs un peu moins honnêtes : une Chevrolet Corvette coupé (14 000 €), un tableau de Zaho Chun (6 000 €), des bagues en or très vulgaires (1 600 €) ou une Rolex Submariner (6 000 €, que si vous avez moins de 50 ans).

Et pour les moins riches, il vous reste le lot 62 : trois flacons de parfums « de luxe » pour 50 € seulement.

Billet paru en dernière page de l’Indépendant le vendredi 23 septembre 2022

Cinéma - “Revoir Paris”, thérapie pour tenter de revivre

Comment se reconstruire après avoir été blessée dans un attentat terroriste ? Réponse dans ce film exceptionnel d’Alice Winocour.

Alors que le procès de l’attentat de Nice s’est ouvert cette semaine, quelques jours après le verdict de ceux de Paris, ce film d’Alice Winocour permet de se replonger dans cette ambiance qui a longuement tétanisé la France. Librement inspiré des actions terroristes contre des terrasses de café et le Bataclan, Revoir Paris est une plongée dans la tête d’une des victimes, Mia (Virginie Efira).

Attention, on ne ressort pas de ce film intact. La force de l’interprétation, la justesse des réactions, la beauté de certaines réactions risquent de durablement vous rester en tête. La réalisatrice, directement impliquée dans les attentats de Paris (son frère était au Bataclan), a fait un choix radical pour raconter l’horreur. « Ce n’est pas tant l’attentat lui-même qui m’a intéressé, explique-t-elle dans le dossier de presse, mais les traces qu’il a laissées chez les victimes. Aucune d’entre elles n’a une vision globale de l’attaque, mais seulement des bribes, des images désordonnées, comme les fragments d’un miroir éclaté. »

Les premières minutes montrent la vie parisienne de Mia. Au guidon de sa moto, elle va travailler et retrouve, le soir, son compagnon, médecin. Il doit partir en urgence à l’hôpital. Elle rentre seule. Comme il pleut, elle s’arrête dans une brasserie attendre la fin de l’orage. C’est là que sa vie bascule. Les premiers tirs, une blessure au ventre, puis un grand trou noir.

Rencontre avec les autres victimes 

Trois mois plus tard, elle ose revenir à Paris. Mais ne se souvient plus de la soirée fatale. Juste quelques flashes. Des images fugitives. Une fête d’anniversaire dans la salle où elle buvait un verre en attendant, deux jeunes touristes asiatiques croisées sur le chemin des toilettes. Les pieds du terroriste, quand elle se cache sous les tables renversées, les balles qui claquent.

Pour tenter de se réapproprier sa vie, son passé, Mia revient à Paris, va sur les lieux de l’attentat, rencontre des membres de l’association des victimes, dont Thomas (Benoît Magimel), celui dont on fêtait l’anniversaire. Lentement, comme à reculons, Mia va se souvenir, retrouver des détails, comprendre ce qu’elle a fait. Comment elle a pu survivre, avec qui elle s’est cachée. Presque une enquête policière dans une mémoire bloquée.

Virginie Efira, dans ce rôle compliqué, entier, signe une de ses meilleures prestations. L’ancienne animatrice télé belge s’est métamorphosée depuis quelques années en brillante comédienne. Cette nouvelle prestation la place très largement au-dessus de toutes ses consœurs. Un film inoubliable, très éloigné de tout manichéisme, qui paradoxalement, malgré le sujet, redonne espoir dans la vie et envie de revivre, tout simplement.

Film français d’Alice Winocour avec Virginie Efira, Benoît Magimel, Grégoire Colin.

 

dimanche 18 septembre 2022

BD - Corto Maltese chez les nazis


Présent à Perpignan pour le FID, Ruben Pellejero signe son quatrième album des nouvelles aventures de Corto Maltese. Le beau marin ténébreux est à Berlin au cœur des années 20. Hitler commence à faire parler de lui et une secte du nom de Consul distille son antisémitisme.

Corto apprend que son ami Steiner est mort. Il va tout faire pour retrouver son meurtrier et le venger. Entre Berlin et Prague, il rencontre des espions communistes, de belles comédiennes et des astrologues illuminés.

Le scénario de Canales est ancré dans l’Histoire et Pellejero, doucement mais sûrement, s’affranchit de la simple copie de Pratt pour donner plus de puissance et de personnalité à son dessin. De mieux en mieux.

« Corto Maltese » (tome 16), Casterman, 17 €

Cinéma - Un futur très visitable

La série imaginée par François Descraques, « Le visiteur du futur » se décline aussi au cinéma dans un long-métrage hilarant.


De la science-fiction française réussie ! Il y a longtemps que le spectateur exigeant dans ce genre périlleux n’avait pas eu l’occasion de ressortir heureux d’une salle obscure. Le visiteur du futur de François Descraques, en plus d’être fidèle à la série télé d’origine, offre intrigue intelligente et multitudes de gags, le tout avec des décors soignés et des effets spéciaux réussis.

Tout débute par une catastrophe dans une centrale nucléaire française. Renard, le visiteur du futur (Florent Dorin), tente de l’empêcher. En vain. Alors il décide de tout faire pour annuler la construction du complexe. Il va tenter d’influencer Gilbert (Arnaud Ducret), le député qui a lancé ce projet « d’avenir ».

Exactement comme la fille du politique, Alice (Enya Baroux) qui, elle, a la fibre écolo. Mais la brigade temporelle veille. Alors Renard, le père et la fille s’échappe dans le futur, sur cette terre ravagée qui n’en a plus pour longtemps.

Ribambelle d’excellents seconds rôles 

On apprécie dans ce film le ton encore très gamin de la série. Les héros sont désopilants, avec une mention spéciale au docteur Castaforle interprété par Slimane-Baptiste Berhoun. Mais tous les seconds rôles valent le détour. On trouve, d’ailleurs, dans la distribution, une ribambelle de rigolos patentés, souvent méconnaissables mais toujours hilarants.

Ouvrez l’œil pour repérer McFly et Carlito en ingénieurs totalement dépassés face à une situation d’urgence, Kyan Khojandi en clodo alcoolo, Marc Risso en barman spécialiste en jus de chaussette, Davy Mourier en marchand de gros, (« Mais vous vendez quoi ? Des gros ! ») M. Poulpe en mangeur d’enfant, Simon Astier en fonctionnaire servile ou David Marsais en délateur décomplexé.

Rajoutez quelques zombies (des lents mais aussi des rapides), des flics ignares et un peu d’émotion pour un final presque larmoyant et vous avez un bon film, abouti, qui ne se prend pas au sérieux tout en faisant passer un message aux générations futures : le nucléaire c’est bien aujourd’hui, mais dans le futur, ça risque de sérieusement craindre.

Film français de François Descraques avec Florent Dorin, Arnaud Ducret, Enya Baroux
 

samedi 17 septembre 2022

BD - La touchante tendresse de Monsieur Léon


C’est un petit bonhomme terne et insignifiant. De ceux que personne de remarque dans les transports en commun. Un discret qui vit sa vie sans bruit, bien à l’abri derrière les murs de son deux-pièces. Pourtant monsieur Léon mérite bien qu’Arnaud le Gouëfflec et Julien Solé lui consacrent tout un album de BD.

Car Monsieur Léon cache bien son jeu. Il aime les vieilles ritournelles d’antan, pratiquer le tango et autres danses de salon, jouer au golf nu dans son salon ou porter secours aux poissons rouges dépressifs. Surtout, Monsieur Léon, en cette période de confinement, est capable de braver les forces de l’ordre et l’interdiction de circuler, juste pour plaire à sa voisine, la si timide et prude Mademoiselle Sophie.

Parues dans Fluide Glacial, ces petites histoires complètes sont plus poétiques qu’humoristiques. Elles racontent un monde moins mercantile que notre quotidien. Julien Solé, au dessin, excelle dans le mariage entre noir et blanc et couleurs éclatantes. Un dessinateur qui sait alterner les styles, toujours à l’affût d’expérimentations graphiques. Julien Solé qui fait partie des auteurs présents à Perpignan ce week-end dans le cadre du festival de la BD.

« Monsieur Léon », Fluide Glacial, 13.90 €


Cinéma - « Le Tigre et le Président », un film sur Paul Deschanel, le président lunaire

Biopic historique sur l'affrontement entre un politique iconoclaste et le grand Clemenceau. 


Il y a les petites histoires et la grande Histoire. Le Tigre et le Président, premier film de Jean-Marc Peyrefitte fait parfaitement la synthèse de ces deux façons de raconter le passé. D’un côté Clemenceau, homme d’État dont on aime encore aujourd’hui se référer, de l’autre Paul Deschanel, éphémère président de la République dont on ne se souvient que d’une chose : il est tombé d’un train.


Pourtant, ce film porté par deux grands comédiens (Jacques Gamblin est Deschanel, André Dussollier est Clemenceau), montre une tout autre réalité. Clemenceau, revanchard, cynique et assoiffé de pouvoir veut devenir président de la République. mais il se fera battre au Congrès par Paul Deschanel, farfelu, poète, visionnaire.
Or, en 1920, Deschanel représentait le futur radieux d’une France qui voulait s’émanciper. Il voulait donner le droit de vote aux femmes, abolir la peine de mort, interdire le travail de nuit. Pourtant, en 2022, il ne reste rien de sa pensée, avant-gardiste pour l’époque. Comme si cet homme était trop en avance sur son temps.

Le film, un peu didactique par moments, nous permet de le redécouvrir. En réalité de le découvrir tout court pour la majorité des Français.

Film français de Jean-Marc Peyrefitte avec Jacques Gamblin, André Dussollier

vendredi 16 septembre 2022

BD - Barney Stax, le détective privé du pire


Le mythe du détective privé à la Marlowe a encore de beaux jours devant lui. Question dérision, l’album de James et Guerse est un bijou d’humour. Généralement, Barney Stax n’a absolument rien à faire de ses journées.

Mais quand une jolie blonde débarque dans son bureau et lui demande de suivre son mari pour comprendre pourquoi il ne la trompe pas (elle est nymphomane et paiera Barney en nature), il ne se doute pas qu’il est en train de plonger dans une guerre secrète entre CIA et KGB. Car le mari, plombier de son état, est en réalité un espion. Dialogues hilarants, situations cocasses, chutes incongrues, rebondissements abracadabrantesques : Barney Stax va regretter d’avoir dit oui.

« Barney Stax », Fluide Glacial, 13,90 €

De choses et d’autres - Et pourquoi pas en pédalo ?


Ils sont contrariants ces footballeurs. On leur demande juste de courir derrière une balle, et eux en profitent pour faire le buzz sur tout et n’importe quoi. Prenez Mbappé. L’attaquant du PSG et de l’équipe de France se retrouve au centre de deux affaires regrettables.

 

Une sordide histoire de marabout et un fou rire qui passe mal. Dans le premier cas, rien à rajouter. La Justice tranchera. Mais je ris intérieurement en imaginant le malaise des juges devant évaluer le niveau d’infraction d’un maraboutage…


Le fou rire est consécutif au dérapage de l’entraîneur du PSG et de son char à voile en conférence de presse. Si Kylian rigole comme un bossu à la sortie de son boss, ironisant sur une question plus que d’actualité sur l’utilisation d’un jet privé pour rallier Paris depuis Nantes, une bonne partie de la France rit jaune. Car, au même moment, le président Macron en personne demandait à tous les Français de faire des efforts en réduisant leur consommation d’énergie.

Si le commun des mortels doit faire des sacrifices, avoir froid cet hiver, rogner sur ce qu’il reste de leur petit train de vie, les footballeurs professionnels bénéficient toujours de privilèges qu’ils ne veulent surtout pas remettre en cause.

Si j’avais un pouvoir quelconque, je déciderais sur-le-champ que pour rallier les stades climatisés du Qatar où se déroule la prochaine coupe du monde, les sélectionnés tricolores n’iront pas en avion mais en pédalo. Au moins, ils seront en forme à leur arrivée.

Et si l’électricité doit être coupée cet hiver, je choisirai comme première date le 22 novembre de 20 h à 23 h. Partout en France. Les Français auront une excuse en béton pour ne pas suivre les tribulations des milliardaires du ballon rond à la télévision.

Billet paru en dernière page de l’Indépendant le mercredi 7 septembre 2022

jeudi 15 septembre 2022

BD - Une apprentie flic au 36 quai des Orfèvres


Si vous êtes jeune et qu’une carrière de policier vous tente, plongez dans ce roman graphique réaliste. Henri Scala, commissaire de police s’est associé au scénariste Mark Eacersall pour raconter les premiers pas d’une jeune policière à la brigade criminelle à Paris.


Un long et dur apprentissage dessiné sur près de 120 pages par Boris Golzio. Pauline, gardienne de la paix, a été repérée en haut lieu. On lui donne l’opportunité de rejoindre ce prestigieux service.

Elle va apprendre le métier, passer des nuits blanches et tout faire pour clore une vieille enquête sur une femme retrouvée découpée au bord de l’autoroute.

« Cristal 417 », Glénat, 19,50 €