dimanche 13 octobre 2013

Roman - "Faber", mauvais camarade de Tristan Garcia


Enfant surdoué, Faber tourne mal. Trop conscient du monde aliénant, il ne peut qu'envisager de le détruire. Au risque d'entraîner ses amis dans sa chute.
Les romanciers français aiment l'autofiction. Se mettre en scène, raconter ses petits malheurs. Facile et sans ambition. Tristan Garcia n'échappe pas à la règle. Mais contrairement à ses petits camarades, il avance masqué et n'abat ses cartes que dans les dernières pages. Il ne fait plus œuvre d'autofiction mais d'autodélation imaginaire. C'est autrement plus subtil que de coucher sur papier... ses coucheries.
Présenté comme la radiographie de la jeunesse française des années 90, ce roman est avant tout une histoire d'amitiés. A pluriel car dans le cas du trio Faber, Madeleine et Basile, les amitiés se croisent, évoluent et parfois s'annulent. Faber est le personnage central, le soleil autour duquel tourne ses deux amis, au risque de s'y brûler les ailes. Faber, génie surdoué, véritable dieu pour Madeleine, a disparu depuis une dizaine d'années. La jeune femme, mariée, mère de famille, pharmacienne insipide, reçoit une lettre postée en Ariège. Un appel au secours de Faber, Mehdi de son prénom.
Elle prend sa petite voiture et descend vers ces Pyrénées sauvages, refuge ultime des contestataires du système. Elle retrouve Faber, crasseux, puant, méconnaissable, zonant dans une cabane à ânes en ruines. « Il était maigre de tout ce qui dans un corps devait manifester la santé. Gros et boursouflé partout où l'organisme réclame d'être vif et tendu. Paupières plissées mais joues creuses. Ventre arrondi mais thorax rentré. Côtes apparentes et début de goitre. Il était laid. Pourtant, dès qu'il s'est mis en mouvement, je l'ai reconnu. » Faber était un adolescent surdoué. Abandonné par sa mère naturelle, il est adopté par un couple d'artistes. Des parents par procuration morts dans un accident.

A trois contre le monde entier
Placé dans une famille plus modeste, son intelligence supérieure le met rapidement au-dessus de tous ses camarades. Il comprend tout. Et avant tout le monde. Dans la cour de récréation, il va prendre sous sa protection Basile, binoclard timide tête de Turc des « grands » et Madeleine, surnommée Maddie, garçon manqué amoureuse éperdue de ce nouveau si gentil, beau, compréhensif... A trois ils vont vivre une enfance de complicité, de ces moments de grâce dont on n'a conscience qu'à leur disparition. L'adolescence va changer Faber. Il devient leader, révolutionnaire, de ceux qui pourraient franchir le pas de la radicalité. Le trio va se perdre de vue.
Le roman de Tristan Garcia débute par les retrouvailles entre Faber, clochard céleste amnésique, Maddie, mère hésitante et Basile, professeur dans le lycée qui a vu les exploits du Faber leader syndicaliste. Après le récit de l'enfance, retour au présent et au côté dramatique du roman. Entre nostalgie et vengeance. Nostalgie dans le regard de Basile, professeur obsédé par son enfance : « J'ai contemplé la classe de seconde 6 devant moi, j'ai cligné des yeux et je nous ai vus, nous. Sur le fond de mon œil notre enfance était là, inchangée. J'ai rouvert les yeux; j'ai aperçu d'autres enfants. Mais je ne pouvais pas les regarder, tels qu'ils étaient, sans que notre jeunesse se surimprime à la leur. » Basile le plus fragile des trois, le plus durablement marqué par Faber.
Le roman, par moment, a des airs de récit fantastique. Le lecteur est happé par le personnage quasi mythique de Faber. A moins qu'il ne soit pas un « être papier. Il existe, il a existé. »
Michel LITOUT

« Faber le destructeur », Tristan Garcia, Gallimard, 21,50 € (Egalement disponible au format poche chez Folio

samedi 12 octobre 2013

NET ET SANS BAVURE - Je roule en clito

L'anatomie féminine est encore un grand mystère pour nombre d'hommes. En dehors des appâts sexuels classiques que sont les seins et les fesses, leur ignorance crasse fait parfois peur. Pour preuve le très sérieux journal italien Corriere della sera a repris les chiffres d'un sondage où 86% des français pensaient qu'un clitoris était un modèle de
Toyota comme il y a des Yaris ou des Auris. Ce sondage, totalement bidon et imaginé par le Gorafi, a piégé des journalistes italiens. Il a surtout donné des idées à quelques femmes persuadées que la caricature n'est pas si éloignée de la réalité. Sauriez-vous dessiner un clitoris ? Pourquoi seuls les croquis de sexe masculin prolifèrent un peu partout ? Une discrimination sexiste parmi d'autres. La discussion animée entre plusieurs amies a débouché sur la création d'un blog fièrement intitulé « Vive le clito ! » Louna, la principale animatrice, graphiste dans le privé, a trouvé la parade : « J’en suis venue à l’idée d’en faire un sticker à placarder un peu partout, histoire de démocratiser ce bon vieux clito qui a lui aussi droit à son heure de gloire visuelle. » Vous pouvez donc acheter 20 autocollants pour 5 euros et les essaimer dans des lieux publics. Le clitoris est représenté en entier, avec prépuce, gland (ce n'est pas pour rien qu'il est surnommé le pénis féminin) mais aussi bulbes du vestibule et piliers. Dessiné, il a l'air sympa avec sa petite tête et ses longues jambes. Et pour bien se moquer de tous les hommes qui ne comprennent pas, le dessin est légendé : « Ceci n'est pas une voiture ». 

Chronique "Net et sans bavure" parue ce samedi en dernière page de l'Indépendant.

vendredi 11 octobre 2013

NET ET SANS BAVURE - Police belge fantôme

Incroyable histoire belge. Pas la blague de base avec l'accent caricatural, plutôt celle qui met en exergue le côté surréaliste de nos voisins du Nord. Comme Magritte a imaginé « Ceci n'est pas une pipe », une vidéo démontre que « Ceci n'est pas la police ».

Tout débute un dimanche à minuit. Un jeune entrepreneur, pour achever un travail urgent, doit se rendre dans le quartier populaire de Schaerbeek. Pas de chance, une voiture mal garée l'empêche d'entrer dans ses bureaux. Il téléphone à la police pour faire évacuer le véhicule. Pas de réponse. Il se rend donc au commissariat situé à quelques pâtés de maisons (un ami filme toute la scène). Il sonne à l'interphone d'urgence. Pas de réponse. La suite est hallucinante. Il constate que la porte est ouverte. Il entre. Dans le noir, il appelle. Toujours aucun écho. Il déambule alors dans le commissariat et tente une nouvelle fois de téléphoner avec son portable. Il entend une sonnerie dans une pièce, s'y rend et décroche. Voilà comment il parvient à répondre à son propre coup de fil... Il conclut sa démonstration d'un très ironique « Ça se passe comme ça à la police de Schaerbeek ». Diffusée sur plusieurs sites belges, la vidéo est vue plus de 100 000 fois. Les commentaires sont particulièrement... vaches. Il faudra attendre deux jours pour que la fameuse police réagisse. Le problème viendrait d'une serrure électrique déficiente. Et une enquête interne est en cours. Mais la priorité sera sans doute de retrouver les policiers fantômes...

Chronique "Net et sans bavure" parue ce vendredi en dernière page de l'Indépendant. 

BD - Planète hostile


Les
 amateurs de jeu vidéo connaissent déjà Lost Planet. C'est un jeu vidéo développé par Capcom dont le troisième opus est sorti en juin dernier. « First colony », l'album de BD écrit par Izu et dessiné par Dall'Oglio se situe 40 ans avant le jeu. La Terre, en mal de ressources énergétiques, envoie des centaines de vaisseaux pour prospecter. La planète EDN III semble regorger de T-eng, de la thermo-énergie. C'est en tentant de l'extraire au cœur d'une montagne, qu'un groupe de colons réveille Nushi, reine mère des Akrids. En résumé, plein de petits monstres et un autre, gros, très gros. Et en colère... 
Bref quand les pirates menés par le capitaine June, belle mais incapable du moindre sentiment, débarquent sur EDN III en catastrophe, ils ne sont pas au bout de leurs difficultés. Obligé de respecter la trame et le décor du jeu, le scénario manque parfois d'originalité. Mais les incroyables paysages et encore plus étonnants monstres permettent au dessinateur de nous plonger dans un monde totalement virtuel.

« Lost Planet », Glénat, 13,90 €

jeudi 10 octobre 2013

BD - Conflit global dans UW2 de Bajram


Entre 1998 et 2006, Denis Bajram a conté en six volumes denses les grands épisodes du la première guerre universelle. « UW1 » (Universal War 1) a tenu en haleine des milliers de lecteurs. Le cycle terminé, tous espéraient que Bajram se remette au travail. Il a pris le temps de vivre un peu, s'est détendu la main dans d'autres projets et a finalement accepté de se lancer dans le chantier gigantesque et tant attendu de « Universal War 2 ». 
Nouveaux personnages, nouvelle époque et nouvel éditeur, Casterman récupérant ce qui s'annonce comme une des meilleures ventes de la rentrée. La terre détruite, les derniers humains ont été déplacés sur Mars par la civilisation Kalish. Des Humains toujours aussi râleurs et mécontents, dénonçant colonisation et esclavage. Les Kalish, si intelligents qu'ils en deviennent hautains et méprisants, se retrouvent une nouvelle fois face à une menace inconnue. 
Des triangles noirs sortent du soleil, l'anéantissant en quelques heures. Sur une planète vouée à la glaciation, le lecteur suit les doutes et révoltes de Théa, fille des héros d'UW1. Attention, claque graphique assurée !

« Universal War 2 » (tome 1), Casterman, 12,95 €

NET ET SANS BAVURE - Mieux vaut mort que vivant

Effroyable drame que le naufrage d'un bateau de réfugiés au large de Lampedusa. Des centaines de morts et quelques rescapés. Impossible de rester indifférent ? Pas sûr. Tous les jours des réfugiés parviennent à mettre un pied sur cette petite partie d'Europe. Ils ont bravé tous les risques pour enfin entrevoir une chance de s'en sortir. Capturés, emprisonnés, jugés pour immigration illégale, ils sont presque systématiquement condamnés à une lourde amende et renvoyés de l'autre côté de la Méditerranée. Les réseaux sociaux dénoncent régulièrement ces pratiques. Et depuis 1994, ils sont plus de 6000 à avoir péri en tentant la traversée.

Alors quand le gouvernement d'Enrico Letta annonce des funérailles nationales pour les noyés, avec en plus l'obtention de la nationalité italienne, les réactions sur Twitter sont légitimement indignées.

Ainsi @littlenemo75 constate : « Obsèques nationales, jours de deuil, nationalité italienne accordée. Un bon migrant est un migrant mort. »

Comment des technocrates peuvent-ils accorder à des morts ce qu'ils refusent à des vivants ? Doit-on faire le constat qu'en Europe, un Africain mort vaut mieux qu'un Africain vivant ? Alors s'il est de fait impossible de rester indifférent devant le sort des morts de Lampedusa, comment supporter celui qui est réservé aux rescapés ? Et le paradoxe fait que parmi les victimes, certaines en étaient à leur deuxième voyage. Refoulées vivantes, elles auront finalement obtenu cet asile tant désiré. Mais six pieds sous terre.  

Chronique "Net et sans bavure" parue ce jeudi en dernière page de l'Indépendant.  

mercredi 9 octobre 2013

Fred Hidalgo sur les traces de Brel, l'aventurier

Fred Hidalgo, après plusieurs décennies à la tête de magazines sur la chanson francophone, profite de sa retraite en Roussillon pour raconter les dernières années de Jacques Brel, l'anonyme des îles Marquises. 


Pas évident d'écrire un livre sur un géant de la chanson comme Jacques Brel. Tout a été dit et Fred Hidalgo, créateur des magazines « Paroles et Musiques » et « Chorus » en sait quelque chose. Il a édité une des biographies les plus complètes, « Grand Jacques » de Marc Voline, sans compter les multiples dossiers dans ses magazines. Dans « Jacques Brel, l'aventure commence à l'aurore », Fred Hidalgo, qui n'a pas eu le bonheur de rencontrer l'artiste mort le 9 octobre 1978, apporte un éclairage nouveau sur les dernières années du chanteur du « Plat Pays » et des « Marquises ».
Durant près de trois ans, Jacques Brel a vécu en anonyme dans la petite et sauvage île de Hiva Oa, poussière de cet archipel perdu dans l'immensité du Pacifique Sud. « Il venait de traverser la moitié du Pacifique, raconte Fred Hidalgo. Epuisé, il jette l'ancre dans la baie et tombe sous le charme de l'île. » Dégoûté du bateau, il abandonne son tour du monde débuté en 1974 et s'installe dans une petite maison en compagnie de sa compagne Maddly. En se rendant à la poste du village pour récupérer son courrier en poste restante, il prend conscience avoir enfin trouvé l'endroit où il ne sera plus harcelé par les paparazis. Pour preuve, le postier ne le connaît pas et lui demande ses papiers d'identité pour lui remettre son courrier. Enfin anonyme.
L'idée du livre est venue à Fred Hidalgo après avoir publié quelques notes sur son blog. Tout a débuté à Paris, aux Trois Baudets en septembre 2010. Fred et son épouse Mauricette, fêtent leurs nominations dans dans l’Ordre National du Mérite et dans l’Ordre des Arts et des Lettres en compagnie d'amis artistes. Antoine, le chanteur voyageur, les invite en Polynésie. Les époux Hidalgo, contraint à la retraite après l'arrêt de leur trimestriel « Chorus » ont enfin du temps de libre. Et envie de fêter leurs 40 ans de mariage par un voyage exceptionnel. En 2011, ils passent un mois en Polynésie. A Tahiti et aux Marquises. Voilà comment cette balade d'agrément se transforme en enquête sur les traces de Brel à l'autre bout du monde.
Fred Hidalgo recueille les témoignages des Marquisiens qui n'ont pas connu le chanteur mais l'homme serviable et enthousiaste, toujours partant pour rendre service. « Là-bas, il a eu une vie exceptionnelle, à la Don Quichotte, son héros de toujours, constate Fred Hidalgo. Il a revalidé sa licence de pilote, a acheté un bimoteur et l'a mis au service des Marquisiens. » Il faisait chaque semaine le lien avec Papeete, la capitale, pour rapporter médicaments, courrier et biens culturels. « Il a projeté des films en plein air à Hiva Oa. En faisant payer une somme symbolique car il estimait que tout travail artistique méritait un salaire. Il avait même en projet la création d'un spectacle avec des stars, toujours dans cette petite île des Marquises. »
Toutes ces anecdotes et information, Fred les partage sur son blog. Un feuilleton qui grossit, se structure. Bref, la matière pour un livre, bourré d'informations, mais écrit de façon subjective. Cela donne ces 380 pages denses et émouvantes, enrichies de plusieurs photos de Jacques Brel dans son petit paradis marquisien. Un voyage, une aventure, dans les pas d'un géant trop tôt disparu.
« Jacques Brel, l'aventure commence à l'aurore », L'Archipel, 21 euros

____________________________________________
Retraite en Roussillon
 Fred Hidalgo se partage encore entre sa maison de Corbère-les-Cabanes et celle en région parisienne. Mais ce fils de réfugié espagnol (passé par les camps d'Argelès) a semble avoir trouvé son île à lui au pied du Montou. Après une école de journalisme, il part pour l'Afrique, déjà en compagnie de son épouse Mauricette, pour créer un quotidien au Gabon puis relancer un journal à Djibouti. Dix années sous les tropiques et retour en France pour lancer un mensuel sur la chanson francophone. Ce sera « Paroles et Musiques » durant une dizaine d'années suivi par « Chorus », véritable bible de la chanson durant près de 15 ans. En parallèle, Fred a édité nombre de livres sur les chanteurs, de Brassens à Trenet en passant par toute la jeune génération (Goldman, Souchon...). Ce passionné de San-Antonio (il connaissait personnellement Frédéric Dard) a toujours su que l'écriture serait son meilleur moyen d'expression. Le livre sur Jacques Brel en est le parfait exemple. Et déjà une autre idée trotte dans la tête de Fred. En 1986, il a accompagné Claude Nougaro dans sa tournée en Afrique. Pourquoi ne pas raconter ce périple au Congo, Cameroun, Niger... Juste avant son départ pour New York et au moment de sa rencontre avec Hélène, à l'île de la Réunion. Anecdotes, photos et écrits du poète toulousain viendront enrichir un projet en bonne voie.
En attendant, vous pouvez retrouver régulièrement Fred Hidalgo sur son blog* et le 9 octobre sur France Bleu Roussillon où il racontera au micro de Philippe Anglade les dernières années de Brel.
* http://sicavouschante.over-blog.com/

NET ET SANS BAVURE - Nous sommes tous nuls


Phénomène éditorial depuis quelques années, la collection « Pour les nuls » prouve que la culture générale, avec un minimum de dérision et d'humour, peut passionner les foules. Le premier titre, sur l'histoire de France, assure la renommée de la collection et rapidement les thèmes se multiplient. Avec notamment des mines pour les handicapés des nouvelles technologies. A chaque version de Windows correspond son titre, avec toujours la somme des bugs et autres anomalies. 

Internet a ensuite pris le relais pour mieux comprendre le haut débit ou Internet Explorer. En achetant ces livres, on accepte notre « nullité ». On reconnaît nos lacunes. Grâce à ces livres aux couvertures immédiatement identifiables on peut aussi apprendre la guitare, le ukulélé, devenir incollable sur le rock, l'astrologie ou la Grèce antique. Une formule gagnante déclinée sur le net avec le site pourlesnuls.fr aux rubriques ludiques. Vous pouvez par exemple défier vos amis dans un test de culture générale. Vous choisissez les questions, l'envoyez à une adresse mail et pariez sur le nombre de bonnes réponses.

Le plus savoureux reste la possibilité d'élire ou d'imaginer le prochain titre de la collection. Vous avez le choix entre la galette des rois, Audrey Pulvar, ou les huîtres pour les nuls parmi la quinzaine de propositions. Pour rester dans l'actualité j'ai glissé l'idée de « L'extrême droite pour les nuls ». J'en réserve quelques exemplaires à la direction du Front National.   

Chronique "Net et sans bavure" parue ce mercredi en dernière page de l'Indépendant. 

mardi 8 octobre 2013

NET ET SANS BAVURE - Les Chinois et moi

"Sept cent millions de Chinois. Et moi, et moi, et moi" chante Jacques Dutronc. En réalité, sur le net, ils sont deux millions de Chinois exactement.
Deux millions d'employés d'agences gouvernementales chinoises qui chaque jour espionnent les blogs, sites et réseaux sociaux à la recherche des propagateurs de « fausses rumeurs ». Deux millions de censeurs en action. En Chine on ne plaisante pas avec le franc-parler. Au risque de se retrouver rapidement en prison. Il est loin le temps des dazibao, ces journaux-affiches derniers vestiges de la liberté d'expression « made in China ». Désormais, si l'un de ces espions découvre qu'une « fausse rumeur » a été reprise plus de 500 fois, l'instigateur encourt une peine de trois ans d'emprisonnement. Le terme « fausse rumeur » correspond dans les faits à toute information non officielle, vous l'aurez compris.

On ne se félicite jamais assez de notre chance de vivre en démocratie. Transposé en France, ce système obligerait à construire de nouvelles prisons. Sur Twitter, les 3000 abonnés du compte @flambyland feraient moins les intéressants à se moquer du président. Sur Facebook, les 52 000 adeptes de la page « Peine de mort pour la mère et le beau-père de Fiona » tiendraient compagnie à ces derniers en cellule. Quant aux anti mariage pour tous, depuis le 26 mai et l'adoption de la loi, ils feraient mieux de la mettre en veilleuse. Ou d'émigrer en Russie ou en Chine. Au moins là-bas ils seront dans l'idéologie officielle...
Chronique "Net et sans bavure" parue ce mardi en dernière page de l'Indépendant.

BD - La famille de Nävis


Au rythme soutenu d'un album par an, Jean-David Morvan et Philippe Buchet font vivre le monde de Sillage. Des aventures spatiales épatantes avec en toile de fond la quête de Nävis, dernière terrienne, autour de son identité. Les aléas du convoi (immense train de vaisseaux spatiaux dérivant dans la galaxie) sont un peu mis de côté pour recentrer l'intrigue sur la belle et fougueuse orpheline. Celle qui a longtemps cru être la dernière représentante de son espèce a finalement retrouvé quelques humains. Un contact de courte durée mais qui lui a permis de découvrir l'amour et d'avoir un enfant. Oui, Nävis maman ! Que les fans se rassurent, l'aventurière ne va pas remiser ses sabres pour les couches culottes. Morvan, le scénariste, a trouvé la parade non seulement pour éviter la grossesse, l'accouchement et l'allaitement, mais également l'enfance du marmot. C'est un adulte, aussi impétueux qu'elle, que Nävis découvre au détour d'un complot. Et dans ce 16e tome, ils ne seront pas trop de deux pour sauver Sillage d'une destruction programmée. Beaucoup de baston, des aliens en pagaille et quelques pleurs : un savant dosage pour une série devenue incontournable.

« Sillage » (tome 16), Delcourt, 13,95 €