Sophie Fillières n‘a pas eu le temps de finaliser son dernier film. Morte en 2023, ce sont ses enfants qui ont assuré la supervision du montage. Après une présentation à Cannes en mai, Ma vie ma gueule sort enfin au cinéma, sorte de testament d’une réalisatrice (également comédienne) aux projets toujours originaux.
Pour incarner le personnage principal, Agnès Jaoui est parfaite. Une femme de 55 ans, divorcée, seule, dépressive et voyant approcher la mort à grands pas. Pourtant, on a l‘impression dans la première partie de voir une comédie enlevée aux dialogues savoureux et irrésistible.
Surnommée Barbie, Barberie Bichette parle de plus en plus toute seule. Ses enfants, devenus adultes, s’éloignent inexorablement. Divorcée, elle tente de se persuader qu’elle est encore désirable. Mais quand elle prend à pleine main ses bourrelets devant la glace, elle se fait une raison. Elle a fait son temps. Alors Barbie se laisse dériver. Au travail (dans une agence de pub), elle arrive en retard à une réunion et au lieu de trouver un slogan pour des céréales avec un trou, écrit un poème sur le tableau blanc. Son humour tombe souvent à côté et au bout de quelques péripéties, quand elle rencontre un ami d’enfance qu’elle ne reconnaît pas, préfère tout arrêter et se retrouve dans un hôpital psychiatrique.
Le film devient plus sombre, réaliste. Même si des éclats de poésie (notamment avec l’intervention de Philippe Katerine) viennent adoucir le discours crépusculaire. La dernière image, contemplative et apaisée, donne le véritable ton de cette œuvre unique en son genre.
Film de Sophie Fillières avec Agnès Jaoui, Angelina Woreth, Édouard Sulpice, Philippe Katerine