Enfance malheureuse, adolescence brisée : Antoine, le narrateur de "La renverse", roman d'Olivier Adam, a littéralement fui sa vie incapable d'assumer une famille compliquée. Cela fait près de dix ans qu'il vivote dans une petite station balnéaire de Bretagne. Il habite dans un petit appartement spartiate, travaille dans une librairie et passe beaucoup de temps à regarder l'océan, perdu dans ses pensées. Il veut oublier cette période de sa vie douloureuse. Elle va lui revenir en pleine face à la faveur d'une nouvelle qui fait la une des journaux télévisés : Jean-François Laborde, maire d'une ville moyenne et ancien ministre, vient de se tuer dans un accident de voiture. Dans le bar où il a l'habitude de prendre un café, l'événement est sur toutes les lèvres. Mais personne ne sait qu'Antoine est directement concerné par cette disparition. Cet homme, au centre d'un scandale, a brisé le cercle familial. L'essentiel du roman revient sur l'affaire.
Le violeur et sa complice
La mère d'Antoine, bourgeoise un peu prétentieuse, a rencontré Jean-François Laborde quand Antoine était adolescent. Il ne sait pas exactement dans quelles circonstances, mais ce maire de droite, ambitieux, a été charmé par cette parent d'élève très active. Elle se retrouve sur la liste, est élue, devient adjointe et bras droit de Laborde. Antoine, un peu rebelle, n'en tire aucune fierté. Ce qu'il ne sait pas encore, c'est que sa mère est la maîtresse de Laborde. Et que derrière le vernis de rigueur et de moralité exemplaires, se cache une vie sexuelle dissolue. Le scandale éclate quand deux employées de la mairie portent plainte pour viol. Laborde est accusé, la mère d'Antoine suspectée d'être sa complice, sa rabatteuse. Démission, mise en examen, honte… Du jour au lendemain, la vie d'Antoine bascule. Il s'isole puis trouve une oreille compatissante en la personne de Lætitia, la fille de Laborde. Elle aussi est victime du scandale. "Être la fille de Jean-François Laborde la dégoûtait. La détruisait. Elle ne supportait plus le regard qu'on portait sur elle. (...) Je connaissais ça par cœur. En dépit de tout ce que je pouvais prétendre, être le fils de ma mère était un calvaire. Être insulté ou pris en pitié était un calvaire". Tous les deux ils disparaîtront, se cacheront, tenteront d'oublier ce passage de leur vie. Ce roman est celui de l'adolescence blessée, de la famille explosée, du scandale des politiques qui se croient tout permis. On s'identifie au narrateur, comprend sa volonté de disparaître, de ne plus souffrir d'une étiquette qu'il n'a pas choisi. Un droit à l'oubli mais à fort prix."La renverse" d'Olivier Adam, Flammarion, 19 euros.
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