Ambassadeur de Florence envoyé remplir une mission secrète à Rome, Dante Alighieri va enquêter sur de mystérieux assassinats de femmes.
Dante, poète, écrivain, fierté de l'Italie, est également depuis quelques années héros de roman policier. Dante en profileur, c'est une idée de Giulio Leoni et si cela peut paraître incongru au premier abord, le résultat est très plaisant. Dans « La croisade des ténèbres », Dante va devoir se rendre à Rome en tant qu'ambassadeur de Florence. La ville attend beaucoup du poète et de sa force de persuasion. Alors qu'il est en pleine rédaction de son œuvre majeure, Dante rechigne à quitter son confort et mettre à mal son inspiration. Mais ses commanditaires savent comment manœuvrer le lettré. Il recevra en échange de ses services un manuscrit de Virgile. Le choix est vite fait.
Cadavre dans le fleuve
Flanqué de deux autres ambassadeurs (qu'il s'empressera d'abandonner Dante n'aimant pas le travail d'équipe), il se rend à Rome. L'occasion donnée à l'auteur pour décrire minutieusement les environs de la ville et toutes les petites gens qui y vivent. Le héros s'y rend en barque. Un voyage de nuit, éprouvant et inquiétant. Arrivé sur la terre ferme, il est le témoin d'une première scène peu banale. Des pêcheurs ramènent le corps d'une jeune femme. Tout le monde pense qu'elle s'est noyée, mais l'œil expert et aiguisé de Dante se doute qu'elle a été assassinée. Il découpe sa tunique et découvre un spectacle d'horreur : « La cavité thoracique était vide : on ne distinguait que les blanches saillies des côtes, noyées dans la chair grise. Le ventre, également vidé, fourmillait de petits poissons. L'assassin ne s'était pas contenté de tuer, il s'était acharné avec perversité sur la malheureuse, la découpant comme un animal de boucherie. »
Cherchant un logis pour son séjour, il se rend dans une maison dans un quartier excentré. Et là il retrouve le cadavre de la jeune femme, veillé par sa mère, la logeuse. Dante, bouleversé par le chagrin de la famille et constatant que la police ne fera rien pour démasquer le coupable affirme à la mère éplorée « Bien, la vieille. Ta fille sera vengée. »
Dépouille dans un sarcophage
Il se met à fureter dans les bas-fonds de la ville découvrant que ce n'est pas la première femme découverte assassinée et atrocement mutilée. Mais son enquête ne lui fait pas oublier sa mission. Il se rend à la curie pour rencontrer le pape Boniface, entouré du collège des cardinaux, « pareil à une couronne, inondant la salle d'écarlate. » A la curie où il va croiser une autre femme : Jeanne la Papesse. Cette femme qui avait réussit à se grimer en homme et à se faire élire pape, est enterrée dans une crypte secrète. Dante assiste à l'ouverture de son sarcophage. « Un corps vêtu d'une robe blanche qui reflétait la lumière des torches apparut. La tête était surmontée d'une tiare de la même couleur, et les petites mains fines qui reposaient sur la poitrine semblaient être croisées depuis peu, tant la peau paraissant élastique et les muscles des doigts relâchés. »
Ce roman offre plusieurs niveaux de lecture. Les passionnés d'histoire seront fascinés par la richesse des descriptions de Rome et de ses habitants, alors que les amateurs de polar apprécieront un suspense palpitant et la progression de l'enquête de Dante. Une belle réussite qui permet également aux lecteurs de mieux apprécier l'œuvre de ce poète, monument européen encore trop méconnu
« La croisade des ténèbres », Giulio Leoni (traduction de Nathalie Bauer), Belfond, 20 €
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